III. LA PROPOSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : L'ADOPTION DE LA PROPOSITION DE LOI VOTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ASSORTIE D'UN AMENDEMENT DE PORTÉE GÉNÉRALE RESTITUANT AU JUGE DE L'ÉLECTION SON PLEIN POUVOIR D'APPRÉCIATION

Votre commission des Lois a adopté le texte de l'Assemblée nationale.

Votre rapporteur a néanmoins constaté que cette mesure, tout en rétablissant une sorte de présomption de bonne foi dans les cas d'espèces considérés, restait strictement limitée aux seules irrégularités tenant au choix du mandataire parmi les colistiers.


• Votre commission des Lois estime dès lors préférable d'inscrire cette notion de bonne foi dans une disposition d'ordre général.

En effet, la législation actuelle aboutit à infliger la même sanction automatique d'inéligibilité d'un an à des candidats de bonne foi pour d'autres inobservations de la loi, souvent vénielles ou de pure forme, puisque le juge, captif du texte, ne peut que la constater en cas de rejet à bon droit du compte de campagne.

Ce « couperet automatique » interdit au candidat d'exciper de sa bonne foi et au juge d'accueillir ce moyen.

Aussi votre rapporteur a-t-il proposé d'assortir la proposition de loi d'un article additionnel (après l'article 2) aux termes duquel « le juge peut relever de l'inéligibilité le candidat dont il a reconnu la bonne foi », rappelant que cette disposition avait déjà été votée par le Sénat le 17 juin 1993 lors de l'examen d'une proposition de loi présentée à l'époque par le Président Jacques Larché.

Cet amendement de portée générale, loin d'imposer quoi que ce soit au juge de l'élection, a tout au contraire pour objet de lui restituer son entier pouvoir d'appréciation.

Applicable à tous les cas d'espèce, il aurait de surcroît le mérite de faire pour l'avenir l'économie de textes de circonstance, car rien n'assure que telle ou telle disposition sur le financement des campagnes ne soulèvera pas des difficultés imprévues du même ordre.

Votre rapporteur a par exemple eu connaissance du cas de douze maires d'un même département ayant reçu des dons minimes de la même association dont le caractère de groupement politique a été admis dans cinq cas et contesté dans les autres, ce qui a conduit la commission des comptes de campagne à accepter les comptes des uns et à rejeter ceux des autres, ces derniers encourant ainsi leur invalidation.

Pour s'en tenir à cet exemple, des décisions contradictoires ont été rendues, certaines au vu de pièces dont la portée juridique exacte pouvait prêter à confusion.

L'amendement permettrait aux élus concernés dont la bonne foi a pu être surprise d'en apporter la démonstration, sous l'appréciation souveraine du juge de l'élection, et d'être relevés de leur inéligibilité si cette bonne foi était établie.

Votre commission des Lois a partagé le souci de votre rapporteur et a adopté cet article additionnel, qui reprend exactement le texte déjà voté par le Sénat en 1993.

Il s'inscrit dans le prolongement de la proposition de loi de l'Assemblée nationale, car il fait extension de la notion de bonne foi à l'ensemble des cas de figure.

Cette mesure supprimerait le caractère quasi contraventionnel de la sanction instituée par les textes actuels et permettrait au juge de la proportionner à la gravité du manquement reproché au candidat.


• Sur le plan juridique, deux remarques complémentaires s'imposent :

- En premier lieu, l'ensemble du texte ainsi amendé ne s'assimile en rien à une sorte d'amnistie électorale qui consisterait à rendre rétroactivement licite telle ou telle pratique que le législateur aurait entendu prohiber.

- En second lieu, on ne peut assimiler ce texte à une validation législative de mesures administratives dépourvues de base légale au moment ou elles ont été prises. En l'espèce, aucune mesure administrative n'est en cause.

S'agissant des colistiers mandataires, le législateur se bornerait à préciser l'interprétation d'un texte dont la portée n'était pas claire lors de sa mise en oeuvre, la position du Conseil d'État n'ayant été connue que six mois plus tard, et à travers un simple avis n'ayant pas la valeur d'une décision de justice.

Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve de l'amendement qu'elle vous présente, votre commission des Lois propose au Sénat d'adopter la proposition de loi n° 248, la proposition de loi n° 229 de MM. Michel Mercier, Serge Mathieu, Emmanuel Hamel et René Trégouët se trouvant ainsi satisfaite.

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