B. LE RETOUR À LA DÉMOCRATIE
1. Le Brésil en quête de stabilité
L'immensité de l'espace brésilien n'a pas non plus été sans conséquence sur l'organisation institutionnelle. L'évolution politique de ce pays se caractérise par un balancement régulier entre deux tendances contradictoires : la centralisation et la décentralisation.
Au XIXe siècle la deuxième tendance tend à prévaloir sur une organisation constitutionnelle d'abord centralisatrice avec l'institution d'assemblées provinciales élues dotées de pouvoirs étendus. La chute de l'Empire (1889) consacre ce mouvement : le Brésil devient une république fédérative (les États-Unis du Brésil) composée de vingt États investis de pouvoirs législatifs et judiciaires et dotés de ressources propres. La crise économique de 1929 marque un retour du balancier au profit de l'État fédéral et une évolution vers l'autoritarisme (dictature de Getulio Vargas 1937-1945, présidence de Juscelino Kubitschek 1956-1961) aggravée par la prise de pouvoir par les militaires en 1964. Vingt ans plus tard, la faillite d'une politique économique incapable d'enrayer la dérive inflationniste et de maîtriser l'endettement avait totalement discrédité le pouvoir militaire contraint de passer la main aux civils.
2. Le renouveau politique
La vie politique du Brésil au cours des dix dernières années a connu une réelle démocratisation que manifestent trois évolutions majeures.
En premier lieu la vie politique brésilienne se caractérise, depuis l'avènement de la démocratie, par la multiplication des partis passés au congrès de cinq à dix-huit en 1990. Toutefois, deux partis jouent un rôle désormais décisif. D'une part l'ancien parti d'opposition toléré par le pouvoir militaire, le parti du mouvement démocratique brésilien, a obtenu la majorité lors de l'élection de l'assemblée constituante de 1986 et conservé depuis un rôle de pivot dans la constitution des majorités de gouvernement. D'autre part, un nouveau mouvement a émergé, le parti des travailleurs, dont le fondateur Luis Ignacio da Silva, dit Lula, avait failli l'emporter sur le Président Fernando Collor de Mello, lors des élections présidentielles de 1989. Les majorités parlementaires restent dans ces conditions très difficiles à réunir et plusieurs initiatives des Présidents Sarney (1989-1990) et Collor se sont ainsi trouvées bloquées par le Congrès.
En second lieu, la nouvelle constitution de 1988 confirme à la fois l'orientation démocratique et décentralisée du régime.
Le Président de la République est élu au suffrage universel direct. Le principe du régime présidentiel a été confirmé par référendum en avril 1993. La nouvelle Constitution a par ailleurs défini pour chacun des niveaux d'administration (État fédéral, États, communes ou « municipes ») des compétences exclusives et des compétences communes, exercées par un pouvoir législatif et une autorité exécutive élus au suffrage universel direct. L'Union reste responsable des principales fonctions régaliennes (politique étrangère, défense) mais aussi de la politique économique. Les États peuvent agir dans tous les domaines qui ne leur sont pas explicitement interdits par la Constitution. Les « municipes » disposent de compétences propres dans la gestion des intérêts locaux et en particulier le transport collectif, la voirie, l'aménagement urbain.
Enfin, incontestablement, la démocratie brésilienne a su surmonter l'épreuve de la procédure d'empêchement conduite contre le Président F. Collor reconnu coupable de corruption passive. L'intérim assuré par Hamar Franco s'est déroulé dans de bonnes conditions. L'élection dès le premier tour du candidat social-démocrate, en 1994, Fernando Cardoso, avec 47 % des suffrages contre 25 % des voix pour Luis Ignacio da Silva, n'a pas suscité de controverses et témoigne sans aucun doute de la maturité du régime politique brésilien.