III. UNE RÉDUCTION SENSIBLE DU DÉFICIT DES COMPTES DE PRÊTS
En 1996, la charge nette des comptes de prêts passe de 10,9 à 4 milliards de francs, en raison de l'évolution de deux comptes :
- le compte de prêts du Trésor à des États étrangers pour la consolidation de dettes envers la France (903-17) dont le déficit décroît de 5,9 milliards à 1,7 milliard.
- le compte de prêts du Trésor à des États étrangers et à la Caisse française de développement (903-07) qui accuse, pour 1996, un déficit de 2,7 milliards de francs, inférieur de 45 % à celui de l'année en cours.
Évolution des comptes de prêts (après vote de l'Assemblée nationale)
(en millions de francs)
A. LE COMPTE DE PRÊTS DU TRÉSOR À DES ÉTATS ÉTRANGERS POUR LA CONSOLIDATION DE DETTES ENVERS LA FRANCE
1. L'objet et le financement du compte
Le compte n° 903-17 est l'un des instruments budgétaires de prise en charge des impayés constatés sur des crédits accordés à des États étrangers, soit au titre des grands contrats, soit dans le cadre de la politique d'aide au développement.
Il assure ainsi le refinancement par l'État, des créances les plus compromises, mais son intervention est subordonnée à la conclusion d'un accord en "Club de Paris" avec le pays défaillant.
Concrètement, il retrace, en dépenses, les versements effectués par le Trésor en vue d'honorer, à la place du pays emprunteur, les échéances :
- d'un prêt précédemment accordé par le Trésor ou la Caisse française de développement ;
- d'un prêt de refinancement précédemment accordé par la BFCE pour le compte de l'État.
En contrepartie de la prise en charge de ces échéances consolidées, le Trésor constate une créance sur le pays emprunteur, créance dont les modalités de remboursement sont adaptées à la situation (délai de grâce de 5 ans, taux d'intérêt réduit). Les remboursements en capital viennent alors en recettes du compte n° 903-17 tandis que les intérêts alimentent le budget général.
2. Évolution récente : le poids de la crise de l'endettement
Le compte n'est véritablement actif que depuis 1985, date à laquelle il a été décidé de mettre progressivement fin à la procédure de refinancement de la BFCE. Il s'agissait ainsi d'assurer effectivement la budgétisation des créances compromises au lieu de les faire porter par un intermédiaire agissant pour le compte de l'État.
Le tableau suivant retrace l'évolution des recettes et des dépenses du compte, et illustre l'impact de la crise de l'endettement sur le budget de l'État.
(en millions de francs)
A la fin de 1994, l'encours porté par le compte atteignait 47,9 milliards de francs.
3. Une inversion de tendance
•
La loi de
finances
pour
1995
avait évalué les dépenses du compte à
10 milliards de francs, cette prévision incluant les refinancements du
Brésil, de Madagascar, du Nigeria, de l'ex-Yougoslavie.
Les dépenses se sont avérées inférieures et ont permis une annulation de crédits de 2.840 millions de francs dans l'arrêté du 28 juin 1995 accompagnant la première loi de finances rectificative pour 1995.
Trois raisons expliquent cette évolution.
- Le Brésil a honoré correctement ses dettes à l'égard des différents organismes créanciers, et de ce fait n'a pas été obligé de recourir au réaménagement de sa dette dans le cadre du Club de Paris.
Madagascar et le Nigeria ont connu des difficultés économiques telles qu'ils n'ont pas pu passer en Club de Paris en 1995.
Quant aux États de l'ex-Yougoslavie, ni la Croatie ni la Macédoine n'ont pu signer d'accord bilatéral avec le gouvernement français, les négociations ayant été tenues respectivement en mars et en juillet.
Enfin, le second projet de loi de finances rectificative pour 1995 comporte à nouveau une annulation de crédits de 3,7 milliards de francs
Justifiée, selon les explications fournies à votre rapporteur par "l'évolution de fond que constitue la décrue des besoins de rééchelonnement de dette de pays en développement après la crise de la période 1987-1991".
•
Le projet de loi de finances pour 1996
tire les conséquences de cette évolution favorable et fixe
à 3 milliards de francs le montant des dépenses du compte pour
l'année à venir.
En conséquence, la charge nette se trouve ainsi ramenée à 1,7 milliard de francs.
Certes, en raison du jeu des reports le montant des dépenses réellement constaté en cours de gestion sera sans doute supérieur à l'évaluation figurant en loi de finances. Toutefois, il est certain que, depuis deux ans, la tendance de fond demeure favorable et la charge du compte a désormais tendance à s'alléger.
Ce phénomène récent trouve en fait deux origines :
- d'une part, l'amélioration progressive de la situation financière de certains de nos débiteurs importants. Des pays tels le Mexique, le Maroc, la Pologne ou l'Egypte ont désormais retrouvé une capacité de paiements extérieurs et sont de ce fait sortis du "cycle" des rééchelonnements de dettes. Dès lors, ils ne pèsent plus sur le compte et lui assure des recettes grâce au respect de leurs engagements antérieurs ;
- d'autre part, l'impact des mesures d'annulation de dettes prises en faveur des pays les plus pauvres. Avec les procédures dites de "Dakar II" et "Libreville", cette démarche a trouvé une nouvelle dimension et évite de procéder à la consolidation d'encours dont le remboursement est, en réalité, définitivement compromis.
Toutefois, au-delà des aléas ponctuels liés aux phénomènes de report ou aux dates de passage en Club de Paris, votre rapporteur constate qu'à l'avenir, la décroissance des charges du compte sera sans doute extrêmement progressive. Ainsi, certains pays à revenus intermédiaires, tels le Cameroun, le Congo ou le Gabon, devront en principe bénéficier à nouveau de rééchelonnement de dettes. En outre, il est certain que le problème aujourd'hui posé par certains État potentiellement riches, mais au comportement de paiement incertain, devra un jour trouver une solution qui risque là encore de se concrétiser par des rééchelonnements de dettes.
B. LE COMPTE DE PRÊTS DU TRÉSOR À DES ÉTATS ÉTRANGERS ET À LA CAISSE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT
La charge nette de ce compte diminue de 2,2 milliards de francs pour s'établir à 2,66 milliards de francs.
ï Les recettes sont évaluées en progression de 100 millions de francs, et s'établissent à 1,064 milliard de francs.
ï Les dépenses diminuent de 2,008 milliards de francs et s'établissent à 3,717 milliards de francs (1 ( * )) .
La diminution de ces dépenses traduit avec retard la réduction régulière de l'enveloppe annuelle des prêts sur protocoles conclus entre la France et les États étrangers : il faut en effet compter un délai moyen d'exécution variant entre 3 et 4 ans entre la signature du protocole et la date du dernier paiement sur ce protocole.
Alors que le montant total des protocoles signés en 1994 a atteint 7.260,8 millions de francs -dont 1.129,6 millions de francs pour la Chine et 1.025 millions de francs pour l'Algérie-, le montant des protocoles conclus au titre de 1995 atteignait 1.250,38 millions de francs au 30 juin 1995 (dont 300 millions de francs pour le Maroc).
Pour 1996, l'enveloppe de prêts retenue est de 3.350 millions de francs en autorisations de signatures.
* 1 Après annulation de 100 millions de francs lors de l'examen par l'Assemblée nationale.