C. L'URGENCE D'UNE LOI D'ORIENTATION SUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
En matière sociale, comme en matière budgétaire, la situation est évidemment dominée par l'urgence. Aussi, le gouvernement propose-t-il, de façon un peu éparse, des mesures de financement qui conduisent à modifier sensiblement l'importance relative de certains prélèvements et à solliciter de façon plus directe certains revenus jusqu'alors relativement épargnés.
Sur le fond, ces orientations sont sans doute inéluctables.
L'ensemble de notre système de prélèvement obligatoire doit en effet être repensé afin de neutraliser ses effets les plus pénalisants pour l'activité et l'emploi, tout en assurant à l'État et aux régimes sociaux des ressources assises sur une base plus large et plus réactive aux différentes composantes de la croissance.
Mais il est évident que l'enjeu est énorme et mérite pour le moins que le Parlement soit associé à la définition du schéma à atteindre. Tel est d'ailleurs en principe l'objet de la loi d'orientation des prélèvements obligatoires que votre commission avait réclamée dès l'examen du projet de loi de finances pour 1995, et que 1'actuel gouvernement s'est engagé à proposer au début de l'année prochaine.
Toutefois, il est profondément regrettable que le Parlement soit amené à se prononcer sur les premières mesures, sans avoir encore eu à débattre du cadre général et des orientations à retenir.
Dès 1993, votre commission des finances avait d'ailleurs souhaité apporter sa contribution à ce débat fondamental pour l'avenir. Affinée lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1995, cette analyse reste plus que jamais d'actualité. Aussi, se propose-t-elle d'en rappeler à nouveau les grandes lignes.
• Pour votre commission, la clé de la
réforme reste la rénovation de notre système de
prélèvements sociaux. Dans cette optique, elle préconise
de
déplacer vers les revenus et la consommation une partie des
charges sociales grevant les salaires.
L'objectif poursuivi est double : abaisser la barrière à l'emploi, mais aussi accroître la part du salaire direct dans le coût global du travail.
Pour y parvenir, il convient, d'une part, d'accélérer le mouvement d'allégement des charges patronales pesant sur les bas-salaires et, d'autre part, de transférer sur la CSG le financement des dépenses sociales de solidarité aujourd'hui couvertes grâce à des cotisations sociales salariées.
Un appel plus important à la CSG est au coeur de ce dispositif et doit logiquement s'accompagner d'un élargissement de l'assiette de cet instrument fiscal. Il devient dès lors nécessaire de revoir son articulation avec les autres impositions pesant sur le revenu.
• Le deuxième axe essentiel reste la
réforme de l'impôt sur le revenu.
Déjà impérative en soi, la nécessité de cette réforme ne peut qu'être renforcée dans un contexte marqué par une montée en puissance de la CSG.
Il s'agirait de faire de la CSG la "première tranche" du dispositif de prélèvement sur les revenus et d'y superposer un barème progressif comportant des tranches larges et plus nombreuses avec des taux modérés, le taux marginal supérieur ne devant pas excéder 40 %. Il conviendrait en outre d'homogénéiser les règles d'assiette des revenus professionnels non salariaux et de supprimer les très nombreux abattements ou dispositifs spécifiques à l'exception toutefois du quotient familial, de l'abattement de 10 % pour frais professionnels et de la réduction d'impôt pour emploi à domicile.
Cette réforme devrait s'accompagner d'une réorganisation de la fiscalité de l'épargne en se fondant sur un principe simple : proportionner l'avantage accordé aux contraintes d'immobilisation acceptées par l'épargnant.
• Enfin, au-delà de cette priorité de
la réforme des prélèvements sur le revenu, la loi
d'orientation fiscale devra également programmer une
réforme des droits de mutation
et poser les jalons
d'une
réforme de la fiscalité locale,
notamment
de la taxe professionnelle où, là encore, le souci de ne pas
pénaliser l'emploi doit constituer le principal objectif.