C. LA RECHERCHE D'ÉCONOMIES REND INDISPENSABLE UNE REMISE EN CAUSE DES DISPOSITIFS PUBLICS D'ÉVALUATION
1. La modernisation des administrations
Les difficultés propres à l'activité ministérielle ne permettent pas, sauf exception, au ministre en poste de conduire une réflexion sur la réorganisation de ses services, aussi ambitieuse qu'il serait souhaitable. Il est donc indispensable de lancer une politique de 1 '"autoévaluation permanente" que les rapports Picq et Minc appellent par ailleurs de leurs voeux.
Le ministre de l'agriculture, quels que soient par ailleurs ses éminents mérites, se voit épinglé par la Cour des comptes qui relève que :
"L'organisation de l'administration centrale souffre de nombreuses incohérences", que "le trop grand nombre d'acteurs a pour conséquence la lenteur des décisions et que "les services chargés de l'application des politiques soient extrêmement dispersés".
2. La reconfiguration du dispositif public d'évaluation
Le dispositif actuel est disparate. Le Conseil économique et social, la Cour des comptes, le Commissariat général au Plan, le comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics, le comité interministériel de l'évaluation, les corps d'inspection, les services spécifiques à certains ministères, les instances d'évaluation ad hoc (comité national de l'évaluation des universités, commission nationale d'évaluation du RMI) possèdent, à des titres divers, une compétence d'évaluation des politiques publiques.
Ce dispositif est caractérisé par la prépondérance de l'exécutif dans la mise en oeuvre des procédures, par une certaine forme d'autocontrôle (les fonctionnaires sont alternativement contrôleurs et contrôlés), par la confidentialité et par une synergie que l'on pourrait qualifier d'incertaine.
Toutefois, la réforme en cours du Commissariat général au Plan et la mise en oeuvre, par le Premier ministre, d'une ambitieuse réforme de l'État, témoignent d'une prise de conscience qu'il convient de saluer.
Le souci de l'évaluation permanente n'est pas, par ailleurs, le réflexe spontané de toutes les administrations. Quels que soient les contrôles externes ou internes, la recherche de la "meilleure adéquation entre le coût et l'efficacité des dépenses" n'est pas la préoccupation première d'un ministre, naturellement plus enclin à privilégier d'autres actions. L'abandon de la procédure de rationalisation des choix budgétaires (RCB) ainsi que la qualité inégale et la périodicité incertaine des budgets de programme ("blancs") en témoignent.
3. L'opportunité de la création d'un office parlementaire
L'absence d'un office parlementaire chargé d'évaluer les choix budgétaires a été avancée pour expliquer la difficulté de "tailler dans les dépenses". La relative impréparation des coupes envisagées ne saurait être discutée. En imputer la cause à l'absence d'un organisme ad hoc peut être prise en considération. Le Sénat aura à en débattre prochainement.
Sans préjuger la teneur de ce débat, votre rapporteur général croit pouvoir l'enrichir en amont en rappelant les conclusions d'ensemble auxquelles est parvenue la commission des finances qui en a délibéré à plusieurs reprises.
Elle juge prioritaire le renforcement de ses moyens en personnel parlementaire, en capacité d'expertise, en moyens techniques, en instruments juridiques.
Elle estime que la ligne de partage des compétences doit être nettement tracée pour respecter l'esprit et la lettre des textes en vigueur et éviter ainsi les concurrences stériles et les conflits potentiels. La création d'un office ne doit pas avoir par ailleurs pour conséquence une banalisation des compétences des rapporteurs spéciaux qui doivent rester les "piliers" du contrôle budgétaire.
Conclusions
La maîtrise de la dépense publique suppose une politique ambitieuse, conduite dans la durée et préparée par une réflexion approfondie. Votre rapporteur général partage sans réserve les conclusions auxquelles est parvenu M. Philippe Auberger, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale :
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Sur la détermination du
gouvernement :
"Toutefois la démarche traditionnelle d'économie rencontre ses limites. Conformément aux engagements du Président de la République, il importe d'entreprendre une réforme en profondeur de l'action publique. Les instances de décision ont été mises en place. Mais cinq mois à peine se sont écoulés depuis la rationalisation, le présent projet porte surtout la marque de la détermination du gouvernement à endiguer la croissance de la dépense. " (Tome I, volume 2, page 11)