N° 398

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 mars 2025

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal et sur la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité (procédure accélérée),

Par Mme Nadine BELLUROT et M. Éric KERROUCHE,

Sénatrice et Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Muriel Jourda, présidente ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Mmes Isabelle Florennes, Patricia Schillinger, Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Michel Masset, vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Marie Mercier, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Olivier Bitz, secrétaires ; M. Jean-Michel Arnaud, Mme Nadine Bellurot, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Sophie Briante Guillemont, M. Ian Brossat, Mme Agnès Canayer, MM. Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, David Margueritte, Hervé Marseille, Mme Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mmes Anne-Sophie Patru, Salama Ramia, M. Hervé Reynaud, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mme Elsa Schalck, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

4587, 4966 et T.A. 782

Sénat :

451 (2021-2022), 11 rect., 399 et 400 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

Alors que le premier tour des élections municipales de 2026 approche à grands pas, les réponses apportées à la crise de l'engagement local sont loin d'être à la hauteur des enjeux, en dépit des nombreuses initiatives lancées par le Sénat pour renforcer l'attractivité des mandats et améliorer le fonctionnement des conseils municipaux.

Dans ce contexte, une part croissante des élus des communes les moins peuplées voit dans la réforme du mode de scrutin aux élections municipales un levier pour insuffler une nouvelle dynamique démocratique à l'échelle locale et garantir le renouvellement des équipes municipales.

Adoptée par l'Assemblée nationale en 2022, la proposition de loi visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal tend ainsi à généraliser le scrutin de liste aux élections municipales, en l'étendant aux communes de moins de 1 000 habitants.

Approuvant dans son principe cette harmonisation du mode de scrutin, la commission a adopté la proposition de loi, modifiée par sept amendements présentés par ses rapporteurs, visant à assurer l'opérationnalité juridique et pratique du dispositif et à offrir aux petites communes la souplesse nécessaire au regard de leurs spécificités.

La commission a, dans le même temps, adopté la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité, modifiée par deux amendements rédactionnels des rapporteurs.

I. FACE À LA CRISE DE L'ENGAGEMENT LOCAL : LA NÉCESSITÉ D'INSUFFLER UNE NOUVELLE DYNAMIQUE DÉMOCRATIQUE POUR LE SCRUTIN DE 2026

A. À L'APPROCHE DES ÉLECTIONS MUNICIPALES DE 2026, LA CRISE DE L'ENGAGEMENT LOCAL PERSISTE

1. Le Sénat alerte depuis plusieurs années sur la crise des vocations : il est plus que jamais urgent d'y répondre

Comme le Sénat le souligne régulièrement, la dégradation continue des conditions d'exercice des mandats locaux observée depuis de nombreuses années, sans qu'une réelle réponse soit collectivement apportée à cette situation, a provoqué une véritable crise des vocations électorales au niveau local, en particulier dans les communes rurales.

Celle-ci se traduit, d'une part, par la baisse du nombre de candidats. Ainsi, en 2020, après le renouvellement général des conseils municipaux, 345 communes ne disposaient pas d'un conseil municipal complet - contre 228 communes en 20141(*). Corroborant ce constat, plus de la moitié des élus interrogés dans le cadre l'enquête réalisée pour la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales en 2024 ont indiqué avoir rencontré des difficultés à réunir des candidatures pour les élections de 20202(*).

D'autre part, le nombre de démissions en cours de mandat s'établit également à un niveau inédit. Au 1er octobre 2024, 1 787 maires élus en 2020 avaient ainsi démissionné de leur mandat, soit plus de 5 % des maires.

Cette situation crée de nombreuses difficultés de fonctionnement au sein des conseils municipaux, en ce qu'elle conduit :

· au recrutement de personnes acceptant moins facilement les contraintes liées à l'exercice du mandat, entraînant des démissions plus fréquentes et un absentéisme élevé ;

· à l'organisation plus fréquente d'élections municipales complémentaires pour pourvoir les sièges devenus vacants.

2. Les assouplissements apportés par le législateur ces dernières années : des aménagements bienvenus, mais insuffisants

Face à cette crise des vocations, le législateur a prévu plusieurs aménagements afin de permettre aux petites communes de réunir suffisamment de candidats et aux conseils municipaux de fonctionner en dépit des difficultés rencontrées.

En premier lieu, en 20133(*), l'effectif légal des conseils municipaux des communes de moins de 100 habitants a été réduit de 9 à 7, afin d'atténuer les difficultés rencontrées pour réunir un nombre suffisant de candidats.

En second lieu, à l'initiative du Sénat, une dérogation à destination des petites communes a été créée en 20194(*) afin de « répondre aux inquiétudes des maires des communes de moins de 500 habitants qui craignent un nombre insuffisant de candidatures lors du prochain renouvellement5(*) ».

Désormais6(*), dans les communes de moins de 100 habitants, l'effectif légal du conseil municipal est fixé à 7, mais le conseil municipal est réputé complet dès lors qu'il compte au moins 5 membres à l'issue du second tour du renouvellement général du conseil municipal ou d'une élection complémentaire7(*). Dans les communes comptant entre 100 et 499 habitants, le conseil municipal est, dans les mêmes conditions, réputé complet dès lors qu'il compte au moins 9 membres - l'effectif légal étant fixé à 11 membres.


* 1 Parallèlement, en 2020, 106 communes ne disposaient d'aucun candidat, un chiffre en augmentation de 75 % par rapport au renouvellement général précédent.

* 2 Rapport d'information n° 9 (2024-2025) relatif à l'efficacité des conseils municipaux, fait par Françoise Gatel, Nadine Bellurot, Éric Kerrouche et Didier Rambaud au nom de la délégation aux collectivités territoriales, octobre 2024.

* 3 Loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

* 4 Loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

* 5 Compte rendu de la séance publique du 15 octobre 2019.

* 6 Article L. 2121-2-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

* 7 La création de cette « présomption de complétude » visait à répondre aux difficultés apparaissant dans certaines communes rurales sans pénaliser celles ayant la capacité de réunir suffisamment de candidatures.

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