C. LA CONTRAINTE DE LA DETTE PASSÉE ET DE SON REFINANCEMENT PÈSERA SUR LES ANNÉES À VENIR
Le niveau très élevé des émissions de dette provient de la nécessité de combler le niveau excessif des dépenses effectuées au cours de l'année par rapport aux recettes, mais aussi de rembourser les titres de dette arrivés à échéance, ce qui représente une contrainte certaine pour les années à venir.
1. En 2027, la charge de la dette devrait être le premier poste de dépenses de l'État
En 2025, la charge budgétaire de la dette99(*) serait de 54,2 milliards d'euros, en augmentation de 3,6 milliards d'euros par rapport à 2024.
Sur le moyen terme, la charge de la dette a entamé une augmentation importante. Son niveau en 2025 serait supérieur de plus de moitié au niveau bas atteint en 2020.
Évolution de la charge de la dette du budget général
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires. Crédits de paiement du programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » exécutés, estimés ou prévus dans la présentation pluriannuelle
La charge de la dette représentera donc en 2025 une dépense supérieure à toutes les missions du budget général100(*), excepté la mission « Enseignement scolaire » (64,5 milliards d'euros), devant la mission « Défense » (50,5 milliards d'euros).
Le montant des intérêts payés aux créanciers de l'État sera ainsi supérieur à la somme des crédits consacrés à la recherche et l'enseignement supérieur (31,1 milliards d'euros), à la police et à la gendarmerie (mission « Sécurités », 17,3 milliards d'euros).
Cette augmentation a vocation à se poursuivre car les nouvelles émissions de titres sont réalisées à un taux supérieur, en moyenne, à celui des titres émis au cours des années 2010 ou au début des années 2020 et arrivant à échéance dans les années à venir. À cet effet taux s'ajoute l'effet volume d'une dette en croissance constante.
Selon la présentation pluriannuelle des crédits inscrite dans le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'État », la charge de la dette serait ainsi de 59,4 milliards d'euros en 2026 et 69,0 milliards d'euros en 2027.
La charge de la dette deviendrait alors la première charge de l'État devant la mission « Enseignement scolaire », dont les crédits sont prévus, hors contributions au CAS Pensions, à un niveau de 65,4 milliards d'euros en 2027 par la loi de programmation des finances publiques101(*).
2. Les émissions de dette atteindront pour la première fois en 2025 un niveau de 300 milliards d'euros
En 2025, le Gouvernement prévoit d'emprunter 300,0 milliards d'euros d'obligations à moyen et long termes.
Le montant annuel des émissions de dette aura donc augmenté de 50 % en six ans, puisqu'il était de 200,0 milliards d'euros en 2019, alors que les prix à la consommation n'ont augmenté que de 17 % pendant cette période et le PIB en valeur de 8,6 %.
Évolution des émissions et des amortissements de dette
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances, à partir des projets de loi de finances et de règlement
En revanche, l'augmentation de la dette à court terme serait de 5,0 milliards d'euros seulement, ce qui doit toutefois s'apprécier par rapport au niveau très élevé de cette dette, qui s'est accrue de près de 80 milliards d'euros entre 2019 et 2024102(*).
3. Le remboursement des titres arrivés à échéance nourrira le besoin de financement sur le moyen et long terme
Le besoin de financement, c'est-à-dire en pratique les dettes qui doivent être contractées chaque année, comprend pour l'essentiel le déficit budgétaire de l'année et le renouvellement des titres de dette arrivant à échéance au cours de l'année.
Si le Gouvernement peut mener une action résolue pour réduire le déficit, ce qui se traduit dans le présent projet de loi de finances, le renouvellement des titres de dette arrivant à échéance constitue une contrainte héritée du passé, sur laquelle il ne dispose pas de marge de manoeuvre.
Or, il ressort de l'échéancier des obligations assimilables du Trésor (OAT) déjà émises que le simple remboursement des titres arrivant à échéance créera un socle de besoin de financement de 170 à 230 milliards d'euros chaque année jusqu'en 2029.
Titres de dette déjà émis et arrivant à échéance dans les années 2025 à 2034
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances, à partir de l'encours détaillé des OAT publié par l'Agence France Trésor
* 99 Crédits de paiement du programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » de la mission « Engagements financiers de l'État », qui inclut la charge de la dette proprement dite résultant des intérêts d'OAT et de BTF (53,5 milliards d'euros) et la trésorerie (0,7 milliard d'euros). Une présentation complète de la charge de la dette ajouterait à ce montant la charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (programme 355), dont le montant est de 692 millions d'euros en 2025.
* 100 Crédits de paiement prévus par le projet de loi de finances pour 2025, hors contributions au compte d'affectation spéciale « Pensions » et hors remboursements et dégrèvements.
* 101 Article 13 de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
* 102 Voir le rapport n° 34 (2024-2025), tome I, présenté par Jean-François Husson, rapporteur général, au nom de la commission des finances du Sénat sur le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2023, déposé le 16 octobre 2024.