EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial, sur la mission « Cohésion des territoires » (et articles 50 D et 50 E) - Programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville.

M. Claude Raynal, président. - Nous examinons les crédits de la mission « Cohésion des territoires » et les articles 50 D et 50 E. MM. Jean-Baptiste Blanc et Bernard Delcros, rapporteurs spéciaux, vont présenter respectivement les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville », puis « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État ».

Je salue également la présence de Mme Viviane Artigalas, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de Mme Nadia Sollogoub, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, et de MM. Sébastien Fagnen et Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteurs pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville ». - Si notre avis devait être proportionné à l'évolution des crédits, la conclusion serait rapide : après des années de réduction ou de faible progression des crédits, résultant de mesures de régulation budgétaire sur les aides au logement, les crédits de la mission augmentent dans ce projet de loi de finances (PLF) de 1,3 milliard d'euros, pour atteindre 19,4 milliards d'euros. Les crédits de la rénovation énergétique des logements privés, transférés à l'Agence nationale de l'habitat (Anah), passent de 369 millions d'euros en 2023 à 1,38 milliard d'euros en 2024. Sur le moyen terme, les crédits de la politique d'hébergement progressent de 120 à 150 millions d'euros chaque année.

Nous devons aller au-delà de ces effets d'affichage et examiner les résultats. Or, le constat est inquiétant. Concernant le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », la crise sanitaire a beau être derrière nous, le parc d'hébergement est maintenu à son niveau maximal de 203 000 places. L'accroissement du parc, qui compte 50 000 places de plus qu'il y a six ans, s'effectue surtout dans les formes d'hébergement dont il est le plus difficile de sortir vers un logement stable, comme les hôtels.

Le Gouvernement parle de plein emploi, mais l'Insee, de son côté, constate la progression de la pauvreté. Les personnels répondant au numéro d'urgence 115 peuvent en témoigner, car ils parviennent de moins en moins à trouver de solutions ; le nombre de demandes non pourvues explose.

Les crédits s'établissent à 2,9 milliards d'euros, mais ils sont systématiquement sous-estimés en loi de finances initiale (LFI). Nous l'avons encore vu la semaine dernière, avec une ouverture de crédits à hauteur de 239 millions d'euros pour tenir jusqu'à la fin de l'année 2023 ; le Gouvernement avait pourtant indiqué que ce programme serait budgétisé correctement dès le début de l'année.

Je ne m'étendrai pas sur le programme 109 « Aide à l'accès au logement », qui porte la majorité des crédits. En effet, l'aide de guichet ne connaît pas de réforme particulière cette année. Le coût prévu pour l'État s'élèvera à 13,9 milliards d'euros en 2024.

J'observe la diminution importante du montant global des prestations versées depuis 2017 - elle est de 18,1 % en euros constants -, résultat des mesures de restriction budgétaire prises par le Gouvernement, dont le coût est supporté à la fois par les bénéficiaires et par les bailleurs sociaux. En outre, je rappelle que le schéma de financement, voire l'existence même du Fonds national d'aide au logement (Fnal), devra être revu d'ici à l'an prochain, car l'affectation de la contribution des employeurs n'est pas conforme à la loi organique relative aux lois de finances (Lolf).

J'en viens au programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat », qui porte le coeur de la politique du logement du Gouvernement. Les crédits prévus pour 2024 s'élèvent à 1,53 milliard d'euros, soit quasiment le double de ceux qui ont été ouverts dans la LFI pour 2023. Cela s'explique par le triplement de la subvention donnée à l'Anah pour la rénovation énergétique du parc de logements privés. Je ne peux qu'approuver l'accent mis sur la rénovation des logements ; le bâti est responsable de près de 30 % des émissions mondiales de CO2 liées à l'énergie, et la tâche s'avère immense, avec un parc de 30 millions de logements en France.

Toutefois, on observe un effet d'affichage dans ces crédits, sachant que les objectifs du dispositif MaPrimeRénov' ne sont pas atteints et que des crédits sont annulés ; cela concerne surtout le programme 174 « Énergie, climat et après-mines ». Surtout, une telle exclusivité donnée à la politique de rénovation, qui se traduit également par l'annonce d'un fonds de 1,2 milliard d'euros sur trois ans pour la rénovation des logements sociaux, montre que le Gouvernement passe à côté de la crise historique du secteur du logement.

Il s'agit d'une triple crise. Celle-ci concerne d'abord les habitants qui peinent à se loger. Les taux d'emprunt ont remonté brutalement depuis 2021, alors que les prix restent très élevés. Aujourd'hui, un acheteur peut acquérir 10 mètres carrés de moins qu'il y a deux ans.

C'est également une crise de l'offre. Si l'on regarde les autorisations de logement ou les lancements de chantier, les points bas des cycles précédents sont déjà dépassés, et aucun signe de redémarrage ne s'annonce. Les professionnels du secteur m'ont alerté : les permis de construire, les acquisitions de foncier sont au point mort, et il faudra peut-être plusieurs années pour qu'une amélioration de la conjoncture fasse vraiment repartir le secteur.

Enfin, il s'agit d'une crise du logement social. Pris lui aussi dans un niveau historiquement faible de production, limité dans ses capacités financières par la réduction de loyer de solidarité et par la hausse du taux du livret A, le logement social ne joue plus son rôle contra-cyclique qui lui permettait naguère de prendre le relais des promoteurs privés en cas de crise.

Face à cette situation, quelle est la politique du logement du Gouvernement ?

Les économistes réunis par la commission le 18 octobre dernier nous ont mis en garde : le logement est le grand absent de la politique du Gouvernement. Or, le manque de logement a un impact sur l'échec scolaire et l'insertion professionnelle ; il rend les recrutements plus difficiles et constitue un handicap majeur pour l'économie. Le Gouvernement reste en retrait sur cette question du logement, sans doute volontairement, voire idéologiquement.

On peut identifier plusieurs domaines qui témoignent de sa mauvaise compréhension des enjeux. Dans les mesures prises - ou non prises - par le Gouvernement, on voit bien une volonté de favoriser la location par rapport à la propriété individuelle. Dans un monde 2.0, tout le monde serait locataire afin de changer plus facilement de logement, et les propriétaires seraient des institutionnels, pas des particuliers. Or, les Français sont, à juste titre, attachés au modèle du propriétaire occupant, même et surtout en ayant des revenus modestes, car il s'agit d'une sécurité pour l'avenir. Il ne faut pas opposer propriété et location, mais favoriser la mobilité, y compris par les propriétaires. La fiscalité de l'acquisition peut être une piste ; en effet, celle-ci représente une part trop importante des prélèvements pesant sur le logement.

Autre présupposé du Gouvernement : le logement neuf doit être combattu, dans un pays où la démographie progresse moins qu'autrefois. Or, la société a changé, les familles se séparent et la population vieillit. Un logement qui accueillait 2,72 personnes en 1982, n'en accueille plus que 2,17 aujourd'hui. Il reste donc nécessaire d'accroître le parc de logements. La rénovation de logements anciens et la remise sur le marché de logements vacants sont nécessaires, mais cela ne suffira pas. Le logement neuf est accusé de tous les maux, notamment du péché d'artificialisation des sols ; cette vision manichéenne oublie que les modes de construction ont évolué, et que l'on peut bâtir des maisons individuelles beaucoup plus respectueuses qu'autrefois des sols et des continuités écologiques.

Toutefois, cela demande un travail au plus près des terrains, et c'est là un autre sous-entendu non assumé dans la politique du logement du Gouvernement, qui tente de diriger, d'orienter d'en haut une politique qui relève par nature du niveau local. Sous couvert de territorialisation, on définit des cathédrales normatives ; je pense notamment à la planification écologique ou au « zéro artificialisation nette » (ZAN). Les objectifs sont incontestables et ne peuvent être que partagés - préservation des sols, réduction de l'empreinte écologique des bâtiments -, sachant que les collectivités s'y sont engagées depuis déjà longtemps. Au lieu de leur dire comment faire alors qu'il n'a plus les moyens de faire lui-même, l'État devrait plutôt leur donner les moyens réglementaires et financiers pour mettre en oeuvre des politiques du logement et de l'urbanisme permettant de loger les populations tout en préservant les sols et les paysages.

Face au retard de l'État, il nous reviendra d'explorer ces pistes. Il faudra trouver des solutions de financement qui rendent attractives, au niveau local, les nouvelles pratiques de construction et d'aménagement. Ces solutions seront à la fois budgétaires et fiscales. Il conviendra de s'appuyer sur les établissements publics fonciers et de créer des foncières avec lesquelles les collectivités pourront construire des stratégies protégées des évolutions de court terme des marchés.

Enfin, le programme 147 « Politique de la ville » portera des crédits de 634 millions d'euros en 2024. La hausse s'élève à 37 millions d'euros et correspond à la contribution de l'État au nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), qui passe de 15 à 50 millions d'euros. Pour l'essentiel, ce programme demeurera financé par Action Logement, qui l'a confirmé dans la nouvelle convention quinquennale conclue l'été dernier. Cela risque d'ailleurs de ne pas suffire ; selon les financements prévus à ce stade, un manque de trésorerie s'annoncerait pour les années 2025 à 2028.

Le programme 147 contribue aussi au financement des actions menées dans le cadre des contrats de ville. Ces contrats sont en attente de leur renouvellement, repoussé une nouvelle fois au premier trimestre de l'an prochain ; c'est pourquoi l'article 50 E du PLF prévoit une mesure transitoire pour assurer les financements dans l'intervalle.

Le montant global de ce budget ne suffit pas à le rendre acceptable. Il repose sur des présupposés qui me paraissent inquiétants et qui méconnaissent la réalité socio-démographique du pays, comme le rapport des Français au logement ; il mise tout sur la rénovation des logements avec des résultats mitigés, en oubliant la nécessité de satisfaire le besoin fondamental de logement et de trouver une solution à l'inexorable hausse des besoins et des coûts en hébergement d'urgence ; et il ne propose pas aux collectivités des perspectives pour faire face aux règles et normes qui leur sont imposées.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous propose donc, pour ce qui concerne les quatre programmes relatifs aux crédits du logement, de l'urbanisme, de l'hébergement et de la politique de la ville, de rejeter les crédits.

En outre, concernant les deux articles rattachés, je vous rappelle que le vote sur ces articles est indépendant de celui sur les crédits.

L'article 50 D tend à reporter d'un an l'actualisation des quartiers prioritaires de la politique de la ville en outre-mer, dont la définition a pris du retard, et à prendre des dispositions transitoires relatives aux contrats de ville pour assurer la continuité des paiements en attendant leur finalisation. Quant à l'article 50 E, il modifie les règles d'indexation de la réduction de loyer de solidarité (RLS) et stabilise son montant en 2024, conformément à un accord conclu avec le secteur du logement social en 2020. J'émets un avis favorable à ces deux articles.

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État ». - Le volet « politique des territoires » de la mission Cohésion des territoires comprend les programmes 112 et 162, pour un total de 468 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 371 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Il faut y ajouter plus de 700 millions d'euros au titre des dépenses fiscales portées par le programme 112, incluant notamment les zones de revitalisation rurale (ZRR). Ces crédits, même faibles, produisent un effet de levier sur de nombreux financements qui ont un impact concret sur le développement local et sont rattachés à d'autres missions.

Concernant le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », les crédits s'élèvent à 387,9 millions d'euros en AE et 338,5 millions d'euros en CP, soit une hausse respective de 17,8 % et de 29 % par rapport à l'année dernière, même s'il convient de la relativiser au regard des montants concernés.

Les deux tiers du programme financent la politique de contractualisation de l'État, principalement au travers des contrats de plan État-région (CPER) et des contrats de plan interrégionaux État-régions (CPIER) de fleuves et de massifs.

À l'exception des CPER de Corse et de Normandie, et des CPIER de la Loire, des Vosges et de la vallée de la Seine, tous les protocoles ont été signés, ce qui représente 28 milliards d'euros contractualisés par l'État, dont une petite partie repose sur le programme 112 au travers de la section locale du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT).

Le programme porte également dix pactes territoriaux, ainsi que deux contrats budgétairement en voie d'extinction : les contrats de redynamisation de site de défense (CRSD) et les contrats de ruralité mis en place en 2017, auxquels ont succédé les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), portés par la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Le programme 112 intègre aussi la subvention pour charges de service public allouée à Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Celle-ci augmentera en 2024 d'environ 20 millions d'euros, pour atteindre 81,5 millions d'euros. Cette hausse abonde principalement les crédits consacrés à l'ingénierie des collectivités territoriales, qui sont doublés pour passer à 40 millions d'euros.

L'ANCT, au travers du plan France Ruralités lancé en juillet 2022, poursuit la coordination de nombreux programmes nationaux territorialisés : le programme Action coeur de ville (ACV), afin de renforcer l'attractivité des villes moyennes ; le programme Petites villes de demain, qui concerne aujourd'hui 1 600 communes de plus petite taille ayant un rôle de centralité ; le programme Villages d'avenir, qui vient d'être lancé, accompagnant les communes rurales en ingénierie dans leur stratégie de projets ; pour ce dernier programme, l'ANCT déploiera 100 chefs de projets dans les préfectures et sous-préfectures.

Parmi les autres programmes soutenus par l'ANCT, citons le programme Fabrique de territoires, qui aide à la mise en place de tiers lieux dans les territoires ; le programme Territoires d'industrie, qui a pour l'instant labellisé 127 sites industriels ; le programme Volontariat territorial en administration (VTA), qui finance des contrats de mission pour de jeunes diplômés sur des périodes de 12 à 18 mois, au service du développement des projets de territoires ruraux ; et enfin, le programme Conseillers numériques, qui accompagne les usagers en difficulté avec le numérique ; pour ce dernier programme, on compte environ 4 000 conseillers numériques.

Enfin, le programme 112 porte les maisons France Services (MFS), que celles-ci soient fixes ou mobiles, puisque les bus France Services fonctionnent également ; on trouve même une MSF sur pirogue en Guyane. Au total, on dénombre aujourd'hui 2 600 MSF, et 2 700 nouvelles structures sont prévues d'ici à la fin de l'année. Pour 2024, on observe une augmentation des crédits, liée à l'augmentation du nombre de maisons, qui passent de 51,6 à 55,7 millions d'euros.

Les MFS permettent l'accès à un bouquet de services de neuf opérateurs : La Poste, Pôle emploi, la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), la Mutualité sociale agricole (MSA), le ministère de l'intérieur, le ministère de la justice et la direction générale des finances publiques (DGFiP).

Je me réjouis de retrouver dans ce budget pour 2024 la concrétisation de plusieurs recommandations formulées dans mon rapport, parmi lesquelles l'ouverture à de nouveaux opérateurs pour enrichir l'offre de services et couvrir des champs qui ne le seraient pas encore ; je pense, par exemple, au dispositif MaPrimeRénov' ou au chèque énergie. Dès le 1er janvier 2024, le ministère de la transition écologique et l'Anah entreront comme opérateurs ; et je souhaite que d'autres puissent les rejoindre en cours d'année, comme l'Agirc-Arrco, la Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem) ou encore l'Urssaf.

On observe également des avancées concernant la formation et le référencement des conseillers de France Services. Il s'agissait, le plus souvent, de métiers nouveaux. Désormais, une fiche sera référencée dans le répertoire de la fonction publique, et la formation sera renforcée.

La contribution financière pour accompagner France Services augmente également ; elle est passée à 35 000 euros en 2023 et atteindra 40 000 euros par maison en 2024. Pour rappel, cette contribution est financée, à parts égales, par l'État et les opérateurs. J'ai proposé que le montant passe à 50 000 euros, ce qui représente la moitié du coût minimal d'une MSF.

Autre proposition : la mise en place, dans les territoires ruraux, de services de transport à la demande, afin de pouvoir déplacer les habitants des petites communes. Dans le programme France Ruralités, 90 millions d'euros sont prévus pour des opérations innovantes concernant la mobilité ; avec ces crédits, on pourrait financer une telle proposition.

Concernant le programme 162 « Interventions territoriales de l'État », le périmètre des huit actions territorialisées restera stable en 2024. Ce programme est composé d'actions répondant à des enjeux spécifiques, et rassemble des contributions issues de différents ministères. Comme chaque année, nous n'avons pas de visibilité sur les montants affectés au programme ; en 2021, les crédits votés en LFI représentaient seulement 15 % de l'enveloppe effective consacrée à ces actions.

À l'inverse du programme 112, les crédits alloués diminuent de 6 % en AE et de 46 % en CP. Parmi les huit actions de ce programme, le plan d'investissement pour la Corse, lancé en 2002 et qui arrive à échéance en 2026, connaît une diminution de 87 % de ses crédits par rapport à l'année précédente. Le plan Littoral 21, financé par l'État et la région Occitanie pour aider à la reconversion du littoral occitan, voit ses crédits baisser de 20 % en AE, pour atteindre 8 millions d'euros, et de 5 % en CP, soit 4,2 millions d'euros.

Les six autres actions connaissent une diminution plus mesurée de leurs crédits prévisionnels. Citons le volet territorialisé du plan national d'action Chlordécone, l'action Eau et agriculture en Bretagne, ouverte en 2006, ou encore l'action consacrée à la reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire.

Le programme 162 finance également le fonds interministériel pour la transformation de la Guyane, le service d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna, ainsi que le plan Sargasses II, qui vise à passer d'une approche curative à une approche préventive, en collectant les algues sargasses en mer.

En conclusion, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits sur ces deux programmes. Concernant le vote sur l'ensemble de la mission, je me range à l'avis de Jean-Baptiste Blanc, dont la partie est financièrement la plus importante.

Mme Nadia Sollogoub, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Je partage le bilan et les conclusions du rapporteur spécial sur le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ». On observe un décalage entre le budget et les besoins exprimés sur le terrain.

Les populations ukrainiennes sont comptées parmi les personnes vulnérables. Pour de nombreuses associations, leur accueil a provoqué des difficultés ; je pense, en particulier, au système d'hébergement via l'intermédiation locative. Pour 2024, l'accueil des Ukrainiens n'apparaît toujours pas dans le budget. Les associations ayant avancé la trésorerie vont donc se retrouver, comme cette année, dans une situation d'incertitude.

Je compte déposer un amendement afin de sécuriser ces associations. L'action n° 4 « Réglementation, politique technique et qualité de la construction » du programme 135 étant abondamment pourvue cette année, avec une enveloppe globale de 1,2 milliard d'euros, je proposerai un transfert de crédits de 60 millions d'euros vers le programme 177.

M. Claude Raynal, président. - Madame Sollogoub, le fait d'être présidente du groupe d'amitié France-Ukraine ne doit pas être sans lien avec vos intentions...

Mme Nadia Sollogoub, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Le hasard fait bien les choses, puisque ce programme 177 concerne des sujets qui me tiennent à coeur.

Mme Viviane Artigalas, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. - Je partage les avis du rapporteur sur le programme « Politique de la ville », ainsi que sur les questions liées au logement ; sur les deux programmes portant ces éléments, j'émets un avis défavorable.

Concernant la politique de la ville, j'ai toujours, jusqu'à présent, émis un avis favorable à l'adoption des crédits. Cette année, l'augmentation du budget est principalement liée à un transfert de crédits vers l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). Nous alertons depuis longtemps sur le fait que le décaissement de l'Anru risque de coûter cher à l'État. Par ailleurs, les programmes en cours subissent les coûts de l'inflation et de la construction, ce qui provoque une hausse des dépenses. Nous avons interrogé Mme Mialot, la directrice générale de l'Anru ; elle compte sur les opérations qui ne se réaliseront pas pour abonder celles qui sont en cours. À budget constant, dans les prochaines années, les CP de l'Anru risquent de phagocyter les crédits de la politique de la ville.

Je comprends que l'État fasse des choix ; le programme des cités éducatives, qui fonctionne bien, est généralisé ; et les bataillons de la prévention, de leur côté, même si je peux en comprendre les raisons, sont supprimés. Cependant, je déplore que ces deux budgets n'embrassent pas une vision plus globale, tenant compte des enjeux stratégiques, avec une planification à moyen terme.

Concernant le logement, les mêmes logiques sont à l'oeuvre. On instaure d'abord la réduction des aides personnelles au logement (APL), puis on se rend compte de l'erreur et on demande aux bailleurs sociaux de compenser cette réduction, sans se poser la question de l'impact sur la construction de logement. En effet, la RLS pénalise les fonds propres des bailleurs sociaux. Si l'on souhaite améliorer la construction du logement - les hébergements d'urgence, mais aussi les logements sociaux, les logements intermédiaires -, il convient d'agir en concertation et en activant tous les leviers. Or ce n'est pas le cas aujourd'hui, et ce budget pour 2024 ne le permettra pas davantage.

M. Sébastien Fagnen, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Après la présentation du rapport sur l'aménagement numérique du territoire, notre commission a rendu un avis favorable à l'unanimité.

Dans ce rapport, on constate un important ralentissement du déploiement, notamment dans les zones d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii). Chacun a en tête l'actualité récente et la sanction de 26 millions d'euros infligée par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) à Orange.

Les efforts déployés par les collectivités territoriales sont considérables. Le déploiement s'effectue à grande vitesse dans les zones de réseaux d'initiative publique (RIP). Dans les zones Amii, 3 millions de foyers seront raccordés d'ici à la fin de l'année 2023, alors que nous en avions recensé 6 millions en 2020.

Il s'agit également de mieux encadrer le mode Stoc - sous-traitance opérateur commercial - et les raccordements finaux. De nombreux usagers ont fait part de difficultés liées au raccordement avec, notamment, un nombre important de sous-traitants, jusqu'à huit ou neuf parfois, entre les opérateurs d'infrastructures et ceux de commercialisation. La fermeture du réseau cuivre d'ici à 2030 rend d'autant plus nécessaire l'encadrement des raccordements finaux, afin que nos concitoyens ne se retrouvent pas sans solution.

Ces dernières semaines, au regard des conditions météorologiques, s'est posée la question de la résilience des réseaux, notamment dans les départements ruraux où la fibre se déploie sur des réseaux aériens ; je pense notamment au département de la Manche, touché par la tempête Ciaran. La question de la sécurité des réseaux de télécommunication devient prégnante, et la Banque des territoires nous a particulièrement sensibilisés sur cette question lors des auditions, estimant entre 5 et 15 milliards d'euros le coût induit par l'enfouissement des réseaux afin d'assurer la sécurité des transmissions.

Un point d'alerte concerne les conseillers numériques France Services. Le montant des subventions, qui s'élevait à 50 000 euros sur deux ans, tombe à 42 500 euros sur trois ans. L'ANCT précise que le taux de renouvellement de ces contrats va s'élever à seulement 70 % ; il s'agit d'un transfert de charges insidieux, et les collectivités territoriales ne seront pas en mesure de l'assumer, alors même que la demande ne fait que s'accentuer, notamment dans le cadre de la lutte contre l'illectronisme.

À la suite de ce rapport, un amendement a été déposé concernant Mayotte. Dans ce territoire, la couverture très haut débit n'est que de 40 % et la fibre n'est pas encore déployée. Les crédits affectés à ce déploiement s'élèvent à seulement 4,5 millions d'euros, quand il en faudrait 55 millions d'euros. L'amendement a été voté à l'unanimité, afin que le montant des crédits atteigne celui engagé dans d'autres territoires, comme la Guyane.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - La commission de l'aménagement et du territoire a émis un avis d'abstention à l'unanimité. Les crédits de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) n'augmentent que de 1 % cette année. Dans un contexte d'inflation et de hausse des taux d'intérêt, cela complique les possibilités d'investissement des collectivités locales.

Le renforcement de l'ingénierie, dans le cadre du plan France Ruralités, ne pourra pas soutenir l'investissement local de façon efficace si, en parallèle, ces dotations d'investissement restent constantes. Par ailleurs, il apparaît nécessaire de renforcer la lisibilité des politiques des territoires, et de développer notamment deux outils de soutien à la ruralité : les zones de revitalisation rurale et le programme national Ponts.

Le premier amendement déposé concerne les ZRR. Le second, quant à lui, s'oppose aux augmentations de crédits prévues pour Villages d'avenir et pour l'ANCT - respectivement 6 et 20 millions d'euros - afin de créer des postes d'ingénierie. Nous considérons qu'il est plus utile de soutenir l'investissement que d'augmenter systématiquement les crédits d'ingénierie ; in fine, plus personne ne se retrouve dans les différentes politiques publiques mises en place dans les territoires.

M. Jean-François Husson, rapporteur général- Les dispositifs portant sur la cohésion des territoires et le logement doivent répondre au double impératif de satisfaire les besoins des Français tout en tenant compte des demandes de territorialisation. À la lecture de tous ces dispositifs dédiés, je me demande si, par exemple, un état des lieux national a été effectué concernant les contrats de ruralité. Beaucoup de ces dispositifs ont été repris dans le cadre des pactes territoriaux de relance et de transition écologique (PTRTE).

Ma principale inquiétude porte sur le logement. Actuellement, tous les indicateurs sont au rouge. Si l'on observe l'ensemble du panorama, que l'on soit propriétaire, primo-accédant, locataire, bailleur privé ou public, ou encore occupant d'un logement intermédiaire, on n'entrevoit aucune lueur d'espoir. Ma question est donc la suivante : quels facteurs peuvent expliquer cette crise générale ? Faut-il déplorer les choix du passé ? La crise sanitaire a-t-elle été un accélérateur ? Si l'on mêle l'attrition des logements avec les besoins supplémentaires, les coûts du crédit et de la rénovation, la rareté du foncier, le constat est préoccupant. Une fois celui-ci établi, il convient de s'interroger sur les leviers à activer.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. - Ma première question porte sur les aides au logement. De fortes économies ont été réalisées depuis six ans. Dans quelles proportions celles-ci ont-elles pesé sur les locataires ou sur les bailleurs sociaux ?

En observant l'évolution du parc d'hébergement d'urgence, on s'aperçoit que la structure de celui-ci se déforme peu à peu au profit des formules les plus immédiates. Peut-on séparer les données de l'Île-de-France de celles du reste de la France ? La situation de l'Île-de-France me semble problématique, notamment dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) avec certains hôtels qui changeront d'affectation.

M. Grégory Blanc. - En ce qui concerne le logement, nous devrons nous pencher en séance sur un sujet fondamental, relatif aux meublés de tourisme non classés et à leur fiscalité. À la veille des Jeux, des personnes s'apprêtent à louer de façon exceptionnelle leur logement. Ils gagneront des dizaines de milliers d'euros en quelques jours, mais paieront moins d'impôts que ceux qui font l'effort de louer à l'année ; il y a là quelque chose d'immoral.

Mes questions portent sur le programme 147 « Politique de la ville ». Nous avons observé des situations très préoccupantes de violence au mois de juillet, révélatrices d'une situation qui perdure. Ceux qui vivent dans ces quartiers sont confrontés en permanence à des problèmes, qui relèvent avant tout de l'absence d'humain. Ces territoires ont besoin de travailleurs qui facilitent la coordination entre les différents dispositifs mis en place par les collectivités et l'État ; c'est tout l'enjeu de la politique de la ville, dont l'absence d'évaluation constitue un réel problème.

Les bataillons de la prévention sont imparfaits depuis leur origine. Cependant, dans deux cités éducatives, j'ai pu observer leur apport. Sans ces travailleurs qui font le lien entre ce qui se passe à l'intérieur du collège et les associations qui sont à l'extérieur, les cités éducatives n'auraient pas aussi bien fonctionné. Certes, elles sont à parfaire et des crédits seront alloués à leur renforcement. Comment vous positionnez-vous sur ce sujet ?

J'en viens à la réfaction des taxes foncières dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. À l'origine, ce mécanisme visait à encourager les bailleurs à intervenir dans ces quartiers. Aujourd'hui, elles retombent la plupart du temps dans le budget général des bailleurs sociaux, même si certains jouent le jeu. Comment avez-vous travaillé sur ces questions avec le ministère ?

M. Marc Laménie. - Des liens existent-ils entre l'hébergement d'urgence prévu par le programme 177 et la problématique des violences intrafamiliales ?

S'agissant de la politique de la ville, quel montant est alloué chaque année aux cités éducatives ? Leur nombre progresse-t-il ?

J'en viens à la ruralité et aux MSF. Le dispositif rassemble aujourd'hui neuf opérateurs ; d'autres seront-ils associés ?

En ce qui concerne le programme 112, le FNADT soutient-il les projets menés par les communes et les intercommunalités ?

M. Michel Canévet. - Comme tous les intervenants précédents et les rapporteurs, je suis très préoccupé par la situation du logement, qui représente pourtant un facteur important d'insertion de nos concitoyens. S'agissant du logement social, la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan) et le regroupement des opérateurs HLM ont conduit à une réduction et à un arrêt de la production.

En Bretagne, la population est particulièrement attachée à l'accession à la propriété et les difficultés rencontrées en ce moment ont des répercussions sur l'ensemble du secteur locatif. Il est nécessaire d'agir en faveur de la primo-accession.

Concernant l'hébergement d'urgence, sachant que les crédits augmentent depuis 2012, comment expliquer qu'un très grand nombre de nos concitoyens soient dans la rue, sans solution de logement ? Cette situation semble incroyable.

Par ailleurs, les dispositifs Petites villes de demain et Villages d'avenir ont-ils du succès ? Aboutissent-ils à la mise en place de véritables politiques territoriales de développement ? Il semble qu'il soit possible, dans ces communes, de bénéficier d'une défiscalisation pour la réhabilitation des logements anciens. Combien d'opérations ont été menées ? Comment mieux dynamiser les centres-bourgs et les coeurs de ville ?

Enfin, s'agissant du programme « Interventions territoriales de l'État », une date de fin est-elle prévue pour les initiatives menées ou sont-elles systématiquement reconduites ?

M. Stéphane Sautarel. - La politique du logement connaît une panne à tous les niveaux. J'espère que le probable rejet des crédits - que je voterai - permettra d'enclencher un échange plus productif sur cette politique.

S'agissant du programme 112, nous nous réjouissons de l'accroissement des crédits d'ingénierie. Cependant, ceux-ci peuvent-ils ouvrir des perspectives quant aux moyens d'investissement ? À cet égard, je voudrais partager un témoignage. J'accueille un territoire d'industrie pilote, qui s'étend entre les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie. Ce qui est fléché dans le cadre du dispositif trouve des réponses plus favorables en termes d'investissement et d'accompagnement.

Enfin, je me félicite de la trajectoire du financement forfaitaire prévu pour les MSF, qui doit passer de 35 000 à 50 000 euros.

M. Christian Bilhac. - Sur le volet de la mission présenté par Bernard Delcros, je note que des efforts sont fournis, auxquels on ne peut être que favorable. Cependant, je mettrai un bémol s'agissant du déploiement des 100 chefs de projet. Les maires n'ont pas besoin d'études, de cabinets de conseil et de chefs de projet, mais de moyens.

Quant au logement, il traverse une crise, dont les causes sont multiples : réglementation de plus en plus draconienne, inflation, ZAN et situation catastrophique du secteur du bâtiment. Il faut renforcer le logement d'urgence, comme le logement social, et soutenir l'accession à propriété. Or le prêt à taux zéro (PTZ) est resserré et le nombre de logements diminue. Quand l'État prend en charge le coût du PTZ, il perçoit aussi des cotisations sociales, les impôts sur les sociétés et le revenu, ainsi que la TVA. Le coût du PTZ n'est-il pas inférieur à ce que son attribution génère comme recettes ? Je déplore que nous parlions toujours des dépenses et des recettes et que jamais l'État ne mette les deux en corrélation, comme un maire est tenu de le faire par la loi.

Mme Frédérique Espagnac. - Je m'associe à ce qui a été dit sur la question du logement et voudrais rappeler que celle-ci crée une tension sociale qui peut devenir explosive. Le retour à la violence d'une jeune génération qui a le sentiment de ne plus pouvoir se loger doit nous conduire à nous interroger.

Ensuite, la question de ce que rapporte à l'État le PTZ se pose effectivement.

Par ailleurs, je rappelle que la crise du logement a commencé bien avant que ne se pose la question du ZAN.

En ce qui concerne la location et la fiscalité, la question de l'avantage fiscal de la location à l'année pour les propriétaires est primordiale. Les dérives observées aujourd'hui à Paris sont présentes aussi en province, où se trouvent des sites olympiques. Elles ont des conséquences pour les habitants, notamment l'attrition des logements dans les zones tendues pour les locaux.

S'agissant du volet « politique des territoires », je salue les quelques avancées constatées. Cependant, si les programmes Petites villes de demain et Villages d'avenir étaient prometteurs, nous entendons les élus se demander comment les financer. Il s'agit d'un enjeu majeur : on ne peut pas décider de favoriser certains territoires sans leur donner ensuite les moyens d'agir.

Le dispositif Territoires d'industrie manque aussi de financements. On nous explique qu'une stratégie de réindustrialisation des territoires est à l'oeuvre, mais les résultats ne sont pas au rendez-vous.

Nous sommes favorables à ce volet, mais nous voterons contre l'adoption de l'ensemble des crédits de la mission.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. - En ce qui concerne l'Ukraine, le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 a ouvert des crédits sur le sujet.

Je partage les propos tenus par Viviane Artigalas et Grégory Blanc sur la politique de la ville. Les problèmes sont identifiés depuis le rapport de Jean-Louis Borloo sur la situation des quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui a été mis de côté. Le comité interministériel des villes a été reporté plusieurs fois. Cette politique souffre effectivement de l'absence d'évaluation.

Je voudrais aussi revenir sur l'observation inquiétante livrée par Viviane Artigalas au sujet de l'audition de la directrice générale de l'Anru, Mme Mialot, qui compte sur le fait que des opérations ne se fassent pas pour pouvoir financer les suivantes. Nous apprenons aussi qu'il faut écrire une nouvelle « saison » de la politique de la ville, alors que nous ignorons comment financer celle qui s'achève.

Nous avons entendu la ministre Sabrina Agresti-Roubache, qui entend répondre à tous les problèmes par la territorialisation de la politique de la ville, mais avec quels moyens ? Elle évoque aussi un assouplissement des règles de zonage. Par ailleurs, je me permets de rappeler le débat que nous avons eu hier sur la planification, qui pose également problème. Territorialisation, planification, nouvelle saison de la politique de la ville : tout semble à redéfinir.

Nous avons indiqué certaines des causes de la crise du logement dans notre rapport. Cependant, si 1,5 milliard d'euros supplémentaires sont alloués à des sujets importants tels que la rénovation, on ne répond pas du tout à la crise historique que nous traversons. Ce qui s'est enclenché ressemble à un rejet de la propriété et du modèle pavillonnaire, alors qu'il reste un idéal pour nombre de nos concitoyens et que l'attractivité des territoires en dépend. C'est un modèle de société qui est menacé, pour en favoriser un autre, qui privilégie des salariés, locataires et mobiles.

De plus, le modèle du logement social est malmené. Le parc n'est pas assez étendu, les objectifs ne sont pas atteints et les chiffres ne correspondent pas aux besoins réels.

Lors de nos auditions, nous avons entendu que les grandes foncières devaient se substituer aux opérateurs existants et favoriser le logement intermédiaire, ce qui nous inquiète.

Nous avons besoin d'une évaluation de la fusion des organismes de logement social, prévue par la loi Élan, qui s'est accompagnée de la réduction de loyer de solidarité et d'une coupe des APL. Quel est l'impact ? Nous l'ignorons.

En ce qui concerne l'hébergement d'urgence, en 2022, 8 351 personnes se voyaient chaque jour refuser leur demande par le 115. Parmi ces demandes, 5 362 émanaient de personnes en famille et 2 822 d'enfants de moins de 18 ans. Par ailleurs, l'effet des JOP doit être appréhendé de façon sérieuse. Avec une certaine pudeur administrative, on nous parle de « délestage » dans les territoires, ce qui ne semble pas très humaniste. Comment un pays comme le nôtre peut accepter que 2 822 enfants dorment dehors ?

S'agissant du PTZ, l'État sort sans doute gagnant. À cet égard, la non-éligibilité du modèle pavillonnaire hors des secteurs tendus montre aussi que nous nous orientons vers un certain type de société.

J'en viens au sujet de la location de meublés et de la fiscalité. La mise en place d'une mission parlementaire a été annoncée, mais j'espère qu'une vraie discussion aura lieu dans le cadre de l'examen du PLF pour 2024.

Concernant les cités éducatives, on passe de 78 millions en 2023 à 106 millions en 2024.

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. - Nous avions défendu les contrats de ruralité, nous avions même voté une proposition de loi sur ce sujet en 2015, l'idée étant que l'État doit contractualiser à l'échelle locale. Signés pour quatre ans, ce qui nous donnait de la visibilité, ces contrats ont été une réussite : 481 contrats ont été signés, contre 200 prévus. Mais ils n'ont pas été reconduits sous cette forme et ont été remplacés par les CRTE, qui n'offrent malheureusement pas la même visibilité financière.

Sur les MSF, on compte aujourd'hui neuf partenaires, qui seront rejoints au 1er janvier prochain par le ministère de la transition écologique et l'Anah. Je défends cependant l'idée que d'autres doivent y participer comme l'Agirc-Arcco, l'Urssaf, la Fepem, le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous), car il faut aussi les publics jeunes. Intégrer de nouveaux opérateurs prend du temps, mais on avance.

Je confirme que le FNADT est aussi dédié aux intercommunalités. Il finance de l'investissement et de l'immatériel, notamment au travers du soutien en ingénierie, des MSF et il participe aussi à la subvention pour charges de service public, qui passe de 60 millions d'euros à 80 millions d'euros.

Le programme Villages d'avenir vise à répondre aux besoins des communes, avec l'ingénierie uniquement. Le soutien à l'ingénierie est nécessaire : les villes moyennes ont des services qui leur permettent de répondre aux appels à projets, d'être opérationnels, mais c'est plus compliqué dans les petites communes qui ne disposent que d'une secrétaire de mairie à mi-temps. Aujourd'hui, il existe plusieurs formes d'ingénierie. L'ingénierie interne consiste en un soutien financier de l'État à des chefs de projet recrutés dans des collectivités dans le cadre du programme Petites villes de demain. Au niveau externe, lorsqu'un territoire a besoin par exemple d'une étude, il peut, grâce à ce dispositif, recourir aux services d'un bureau d'étude identifié au niveau national. Enfin, des emplois d'État - une centaine - dans les préfectures et les sous-préfectures seront dédiés à l'accompagnement les petites communes.

Sur la défiscalisation, le dispositif Pinel arrive à échéance, mais le dispositif Denormandie pour l'Action Coeur de ville, permet de défiscaliser la réalisation de logements pour des particuliers. Grâce au programme PVD, cette défiscalisation est étendue aux opérations de revitalisation de territoire (ORT) à l'échelle du territoire. Ce dispositif sera maintenu en 2024, mais il faudra être vigilant dans les prochains PLF.

Lorsqu'une action est signée dans le cadre du programme « Interventions territoriales de l'État », il y a bien une date de début et une date de fin. Certaines actions se sont terminées récemment.

Concernant les moyens d'investissement, si l'on donne la priorité aux PVD dans le cadre de la DETR, les territoires qui n'en font pas partie ne pourront plus bénéficier de la DETR pour leurs travaux. En ingénierie, il ne me semble pas nécessaire d'aller plus loin. En revanche, la question des investissements se pose pour les programmes PVD ou Villages d'avenir. Par exemple, le FNADT, qui permet une certaine souplesse, pourrait être cet outil d'accompagnement de l'investissement. Il a été menacé de disparaître, il est pourtant un bon instrument qu'il vaut mieux renforcer que supprimer.

Le PTZ pourrait aussi inclure le foncier bâti dans les recettes. Mais quand des économies ou des dépenses sont réalisées, il faudrait examiner leur impact.

Les 3 milliards d'euros prévus aujourd'hui pour les PVD sont des crédits de droit commun.

M. Claude Raynal, président. - Quel est votre avis sur la mission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. - J'émets un avis favorable sur les programmes 112 et 162, mais je comprends qu'un avis défavorable puisse être émis sur le reste de la mission.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. - Je maintiens mon avis défavorable sur les crédits de cette mission.

La commission a décidé de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 50 D

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 50 D.

Article 50 E

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 50 E.

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Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions.

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