III. LES DÉPENSES DE LA MISSION, QUI CROÎSSENT AVEC LA RÉSORPTION DU CHÔMAGE À LAQUELLE ELLES CONTRIBUENT, SONT INDIRECTEMENT SOUTENUES PAR LES EXCÉDENTS DE L'UNÉDIC
A. UNE DIMINUTION DES INDEMNITÉS DE CHÔMAGE PRISES EN CHARGE PAR L'ÉTAT, PLUS QUE COMPENSÉE PAR UNE HAUSSE DES DÉPENSES DE SOUTIEN À L'EMPLOI
Les crédits de la mission sont largement conditionnés par la situation de l'emploi et progresseront vraisemblablement en 2024 en raison de mouvements en sens contraire.
Les dépenses d'indemnisation du chômage dans le cadre du régime de solidarité diminuent d'environ 120 millions d'euros par rapport à la prévision initiale pour 2023, mais le coût des exonérations de cotisations sociales compensées par la mission aux organismes sociaux s'alourdit de 546 millions d'euros.
1. Les dépenses d'indemnisation de la perte d'activité reculent avec la résorption du chômage
a) Une diminution d'environ 120 millions d'euros des indemnités en faveur des demandeurs d'emploi prises en charge par l'État
L'amélioration de la situation de l'emploi a un effet direct sur les dépenses d'allocations chômage prises en charge par l'État. En effet, les crédits destinés à la prise en charge par l'État des dépenses du régime de solidarité s'élèvent pour 2024 à 1,725 milliard d'euros, en diminution de près de 120 millions d'euros (- 6,6 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2023.
En LFI 2023, les crédits s'étaient établis à 1,846 milliard d'euros. Toutefois, le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 propose d'annuler 753,2 millions d'euros en AE et 755,7 millions d'euros en CP sur l'ensemble du programme 102, au titre de « sous exécutions diverses », dont il est probable qu'une partie concerne les dépenses du régime de solidarité.
S'agissant de l'allocation de solidarité spécifique destinée aux chômeurs arrivés en fin de droits dans le régime d'assurance chômage, qui représente 1 652 millions d'euros, soit 95,7 % de la dépense, la dotation proposée anticipe pour 2024 une diminution de 12 % du nombre de bénéficiaires par rapport à l'estimation d'il y a un an, en raison de l'amélioration de la situation de l'emploi. Ce nombre passerait de 280 510 bénéficiaires envisagés lors de la construction de la loi de finances initiale pour 2023 à 245 985 en 2023.
La dotation demandée pour 2024 serait donc proche du niveau de consommation attendu en 2023.
b) Les dépenses liées à l'activité partielle poursuivraient leur diminution
Destinée à éviter le licenciement économique, l'activité partielle permet à l'entreprise rencontrant des difficultés ponctuelles de réduire l'horaire de travail ou de fermer temporairement l'établissement. L'employeur verse alors aux salariés une allocation pour les heures non travaillées et reçoit en contrepartie une aide financée par l'État et l'Unédic.
Ce dispositif a été fortement remanié en mars 2020, à l'occasion de la crise sanitaire, avec une prise en charge exceptionnelle supprimant le reste à charge des entreprises et un élargissement des catégories d'entreprises et de salariés concernés. Il a été resserré à partir du printemps 2021, en fonction de l'allègement des mesures de restriction d'activités. Ces mesures ont progressivement pris fin entre novembre 2021 et fin mars 2022.
En parallèle, a été mis en place un nouveau dispositif d'activité partielle de longue durée (APLD) pour les entreprises confrontées à une réduction d'activité durable5(*). Reposant sur la négociation collective, il leur permet de diminuer l'horaire de travail, dans la limite d'une réduction de 40 % de la durée du travail par salarié, en contrepartie d'engagements portant notamment sur le maintien de l'emploi et la formation. Dans ce dispositif, l'employeur bénéficie d'un reste à charge de 15 %.
Le recours à l'activité partielle de longue durée, dont la durée maximale a été fixée à 12 mois6(*), est lui aussi appelé à se réduire. En effet, il n'est plus possible pour une entreprise de mettre en place un dispositif d'APLD depuis le 1er janvier 2023, et les dispositifs mis en place avant cette date ne pourront continuer à s'appliquer que jusqu'au 31 décembre 2026.
Ainsi, en 2024, le montant prévu par le projet de loi de finances s'élève à 225,9 millions d'euros, en diminution de 43,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2023.
2. Le coût des exonérations de cotisations sociales en faveur de l'emploi, directement conditionné par le nombre de salariés concernés, s'alourdirait encore en 2024
La mission « Travail et emploi » finance, sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », l'essentiel de la compensation aux administrations sociales des exonérations « ciblées » de cotisations sociales, les missions « Outre-mer » et « Agriculture » assurant celles concernant certains dispositifs spécifiques.
Inversement, la compensation aux organismes sociaux des exonérations de cotisations sociales, directement conditionnée par le nombre de salariés concernés, s'alourdit considérablement. Ainsi, le poids financier des exonérations de cotisations sur les contrats d'apprentissage serait majoré de 310 millions d'euros, soit une augmentation de 22,4 %.
S'agissant des exonérations « ciblées », les principaux dispositifs compensés par la mission concernent :
- la déduction forfaitaire sur les heures supplémentaires (970 millions d'euros) ;
- l'aide aux créateurs ou repreneurs d'entreprise - ACRE (453 millions d'euros) ;
- la déduction forfaitaire pour les particuliers employeurs (383 millions d'euros en 2024) ;
- l'aide à domicile employée par un particulier fragile ou une association ou une entreprise, auprès d'une personne fragile (1 940 millions d'euros en 2024) ;
Le coût des diverses exonérations mentionnées supra augmenterait de 236 millions d'euros en 2024, soit une hausse de 6,7 %. Elles représentent, avec les exonérations en faveur de l'apprentissage, 4 989 millions d'euros.
L'amélioration de la situation de l'emploi a donc un double effet sur les crédits de la mission : d'une part elle permet la diminution des dépenses liées à l'indemnisation des demandeurs d'emploi ; d'autre part elle est corrélée à une augmentation des dépenses en faveur de l'emploi. Le deuxième effet compense toutefois largement le premier, de telle sorte que les crédits de la mission « Travail et emploi » augmentent à mesure que se réduit le chômage.
* 5 Instauré par l'article 6 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.
* 6 Le décret n° 2022-508 du 8 avril 2022 relatif au dispositif spécifique d'activité partielle en cas de réduction d'activité durable l'a portée à 36 mois consécutifs ou non sur une période de référence de 48 mois, contre 24 mois consécutifs ou non sur une période de référence de 36 mois auparavant.