MOTION TENDANT
À OPPOSER
LA QUESTION PRÉALABLE
Motion présentée par Mme
Élisabeth Doineau
au nom de la commission des affaires
sociales
TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale pour l'année 2022 (n° 705, 2022-2023), rejeté par l'Assemblée nationale.
Objet
La loi organique du 14 mars 2022, résultant d'une proposition de loi organique de Thomas Mesnier, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, et s'inspirant largement sur ce point d'une proposition de loi organique du 26 mars 2021 de Jean-Marie Vanlerenberghe, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales du Sénat, a créé une nouvelle catégorie de lois de financement de la sécurité sociale : les lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss).
Les Lacss poursuivent un double objectif :
- permettre au Parlement de se prononcer plus spécifiquement sur l'approbation des comptes de la sécurité sociale, qui résultait jusqu'alors de l'adoption de la première partie du PLFSS ;
- favoriser un « chaînage vertueux » entre projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) et projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), notamment grâce aux informations figurant dans les annexes au Placss.
Sur le premier point, la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes 2022 de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) et de la branche famille, en raison de l'augmentation de la proportion de paiements erronés. Dans le cas de l'indicateur à 24 mois, les erreurs à la hausse ou à la baisse pour les prestations versées en 2021 étaient de 7,6 % du montant total des prestations (soit 5,8 Md€), contre 5,5 % dans le cas des prestations versées en 2019.
Dans le cas de l'exercice 2021, le tableau patrimonial devant être annexé à la Lacss (correspondant à l'ancienne annexe A des PLFSS) comprend, pour comparaison, une colonne relative à l'exercice 2021. Cette colonne ne prend pas en compte la correction effectuée par le Parlement, à l'initiative de la commission des affaires sociales du Sénat, lors de l'examen du PLFSS 2023. Comme le Conseil constitutionnel l'a confirmé dans sa décision n° 2022-845 DC, le « vrai » déficit est celui figurant à l'article 1er (corrigé par le Parlement) de la LFSS 2023, et non celui figurant à l'annexe A.
La commission ne peut approuver un projet de loi reprenant des comptes 2021 et 2022 manifestement erronés, correspondant à des montants que la Cour des comptes a refusé de certifier.
S'agissant des annexes au Placss, on peut mentionner deux violations majeures de la loi organique.
Tout d'abord, les rapports d'évaluation des politiques de sécurité sociale (Repss) ont désormais pour objet d'alimenter, chaque printemps, un débat relatif à l'efficacité et à l'efficience des dépenses de sécurité sociale. Il importe donc qu'ils indiquent les résultats atteints lors des trois dernières années, comme le prévoit la loi organique. Or, tel est loin d'être le cas. Si l'on excepte ceux relatifs à l'exécution financière, les indicateurs s'arrêtent habituellement en 2020 ou en 2021.
Ensuite, il est désormais prévu que l'annexe relative aux niches sociales comprenne une « évaluation de l'efficacité » (pour un tiers des niches, chacune devant faire l'objet d'une évaluation une fois tous les trois ans). Or cette annexe ne comprend toujours pas d'évaluation des mesures concernées.
Une lecture détaillée de ce texte ne permettra pas de corriger les erreurs des tableaux d'équilibre et patrimonial ou de compléter les nombreuses annexes au projet de loi (qui de toute façon n'ont pas vocation à être annexées au texte adopté et ne sont donc pas amendables). Dans ce contexte, la commission propose au Sénat d'adopter la présente motion.