- L'ESSENTIEL
- EXAMEN DES ARTICLES
- EXAMEN EN COMMISSION
- RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 695
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023
Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juin 2023
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur la proposition de loi relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic,
Par Mme Évelyne PERROT,
Sénatrice
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Didier Mandelli, Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Joël Bigot, Rémy Pointereau, Frédéric Marchand, Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Pierre Corbisez, Pierre Médevielle, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Pascal Martin, Bruno Belin, secrétaires ; MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Étienne Blanc, François Calvet, Michel Dagbert, Mme Patricia Demas, MM. Stéphane Demilly, Michel Dennemont, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Nassimah Dindar, MM. Gilbert Favreau, Jacques Fernique, Mme Martine Filleul, MM. Fabien Genet, Hervé Gillé, Éric Gold, Daniel Gueret, Mmes Nadège Havet, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Olivier Jacquin, Gérard Lahellec, Mme Laurence Muller-Bronn, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Philippe Pemezec, Mmes Évelyne Perrot, Marie-Laure Phinera-Horth, Kristina Pluchet, MM. Jean-Paul Prince, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Pierre-Jean Verzelen.
Voir les numéros :
Sénat : |
553 et 696 (2022-2023) |
L'ESSENTIEL
La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté, le 7 juin 2023, la proposition de loi de Vincent Capo-Canellas relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic, suivant les orientations d'Évelyne Perrot, rapporteure, sous le bénéfice de trois amendements de précision.
Cette proposition de loi poursuit un triple objectif :
assurer une meilleure prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne pendant les mouvements sociaux, et donc éviter les annulations de vols « à chaud » ;
assurer une meilleure adéquation entre l'ampleur du mouvement social et la réduction du trafic, en limitant les abattements de vols préventifs massifs liés à une incertitude sur le nombre de grévistes ;
garantir un droit de grève plus effectif et des conditions de travail plus satisfaisantes pour les contrôleurs aériens en rendant inutile le recours préventif au dispositif du « service minimum » en cas de mouvement social.
Pour la commission, ce texte répond efficacement aux limites d'un système à bout de souffle et préjudiciable aussi bien pour les passagers que pour les contrôleurs eux-mêmes.
I. AUJOURD'HUI, DES GRÈVES D'UNE AMPLEUR IMPRÉVISIBLE ET UN SERVICE MINIMUM COMPLEXE À ORGANISER
A. UN GRAND NOMBRE DE VOLS ANNULÉS PRÉVENTIVEMENT, SOUVENT DE FAÇON DÉCONNECTÉE DE LA RÉALITÉ DE LA GRÈVE, ET D'INÉVITABLES ANNULATIONS « À CHAUD »
Les grèves des contrôleurs aériens sont actuellement très lourdes de conséquences. Bien que les syndicats doivent déposer un préavis de grève cinq jours avant un mouvement de grève, la direction générale de l'aviation civile (DGAC) ne dispose pas des informations nécessaires pour anticiper le nombre exact de grévistes, ceux-ci n'ayant pas à déclarer individuellement leur participation préalablement au mouvement. Or, les contrôleurs aériens sont les seuls travailleurs du secteur aérien à ne pas être soumis à une telle obligation.
Face à ce manque d'informations qui nuit à la prévisibilité, la DGAC en vient à annuler préventivement un nombre élevé de vols afin d'éviter d'avoir à effectuer des annulations de dernière minute.
De 2004 à 2016, 67 % des jours de grève du contrôle aérien en Europe ont eu lieu en France. Ils sont à l'origine de 96 % des retards enregistrés sur cette période. L'écart avec nos voisins européens est patent : 254 jours de grèves des contrôleurs aériens en France, contre 4 pour l'Allemagne.
Plus dommageable encore, chaque jour de grève en France a un impact sur le trafic aérien européen beaucoup plus fort que pour les autres pays européens, puisqu'il est évalué à 35 000 minutes par jour de grève contre, par exemple, 1 800 en Grèce.
Retards liés aux grèves |
Minutes de retards causées par les grèves du contrôle aérien français (2004-2016) |
Annulations de vols causées par les grèves du contrôle aérien français (2005-2016) |
Ces annulations préventives conduisent à ce que les contrôleurs aériens n'ont plus besoin de participer réellement au mouvement de grève, l'objectif de perturbation de l'activité aérienne étant atteint avant même que la grève commence. Ainsi, en pratique, il arrive que, même en l'absence de gréviste effectif dans un service, de nombreux vols soient annulés.
En outre, à l'inverse, il n'est pas rare que le nombre de travailleurs en grève soit supérieur à la prévision de la DGAC. Cette situation conduit à la nécessité d'effectuer des annulations « à chaud » perturbatrices pour l'ordre public dans les aéroports.
B. UN RECOURS FRÉQUENT AU SERVICE MINIMUM PRÉJUDICIABLE POUR LES CONTRÔLEURS AÉRIENS
Le système actuel est également pénalisant pour les contrôleurs aériens. L'absence de prévisibilité mène la DGAC à avoir
un recours accru au service minimum par précaution, même s'il est parfois levé in fine. Il consiste en la réquisition de personnel afin d'assurer 50 % des vols. Les agents réquisitionnés n'ont pas réellement l'opportunité d'exercer leur droit de grève.
En outre, le cadre juridique en vigueur produit donc le même impact sur le trafic que le mouvement social soit minoritaire ou très suivi. Il y a donc une disproportion entre l'ampleur du mouvement et ses effets sur la réduction du trafic.
C. UN CADRE QUI A MONTRÉ SES LIMITES AU COURS DES DERNIERS MOIS
Le cadre juridique actuel a particulièrement montré ses limites lors du mouvement social consécutif à la réforme des retraites.
Le samedi 11 février dernier, alors qu'aucune organisation syndicale n'avait repris le préavis de grève nationale pour la fonction publique lié à la réforme des retraites, de nombreux agents ont fait grève. Sur les 472 mouvements prévus à Paris-Orly et Roissy-CDG, seuls 297 ont été maintenus. Depuis le début de l'année 2023, dans les aéroports français, on dénombre 37 jours de grève, menant à 2,4 millions de minutes de retard.
Ces annulations touchent plus les compagnies aériennes françaises que les compagnies étrangères. Ainsi, l'impact des grèves au sein de la navigation aérienne française pour le groupe Air France est estimé à plus de 400 000 minutes de retard entre janvier et avril 2023. Sur cette période, le groupe a annulé plus de 3 000 vols.
Les contrôleurs aériens ont de leur côté vécu des semaines difficiles, du fait de la mise en place d'un service minimum éprouvant. Le système des réquisitions ne permet pas en effet la meilleure conciliation entre vie privée et vie professionnelle. Il dégrade aussi les conditions de travail et le dialogue social.
II. LA PROPOSITION DE LA COMMISSION : MIEUX PRÉVOIR L'AMPLEUR DU MOUVEMENT AFIN DE RENDRE SES CONSÉQUENCES PLUS ADÉQUATES À CELLE-CI
La proposition de loi crée pour tout agent des services de la navigation aérienne dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols une obligation de se déclarer gréviste au plus tard à midi l'avant-veille de chaque journée de grève. Sur la base de cette déclaration, l'autorité administrative peut alors, le même jour, décider de la mise en place du service minimum. Elle peut aussi informer les compagnies aériennes, et donc in fine les passagers, du nombre de vols annulés.
Cette déclaration individuelle permet donc de résoudre trois difficultés inhérentes au système actuel.
L'ampleur des grèves devenant plus prévisible, il devient possible de mieux ajuster préventivement le nombre d'annulations de vols par rapport aux effectifs réels de grévistes. La réduction du trafic aérien est ainsi plus proportionnée à l'ampleur du mouvement. Seul un mouvement réellement suivi aurait de fortes conséquences sur l'activité.
Cette prévisibilité accrue permet d'éviter de procéder à des annulations « à chaud » en cas de sous-estimation de l'ampleur de la grève. Ces annulations sont particulièrement préjudiciables aux passagers, venus « pour rien » à l'aéroport, et à l'ordre public dans les terminaux.
Enfin, le recours au service minimum sera mieux contrôlé qu'aujourd'hui puisqu'il ne sera plus activé par précaution, alors que le nombre de grévistes est en réalité plus faible que prévu. Ainsi, cette déclaration, loin d'être une restriction du droit de grève, aboutira en réalité à le renforcer dans la pratique. Loin de stigmatiser les contrôleurs aériens, cette proposition de loi a pour objectif de répondre aux difficultés concrètes qu'ils rencontrent dans l'exercice de leur métier.
La commission a adopté deux amendements pour clarifier le texte à l'initiative de la rapporteure pour inclure dans la loi les grèves nationales de la fonction publique ( COM-1) et préciser que les déclarations individuelles peuvent servir à informer les passagers de toutes les adaptations du trafic aérien consécutives à la grève ( COM-2).
Ce texte va plus loin qu'une simple transposition aux contrôleurs aériens de la loi « Diard »1(*) applicable à tous les salariés qui concourent directement à l'activité du transport aérien, comme le personnel navigant et les assistants d'escale. Un simple renvoi au code des transports pour des fonctionnaires de la fonction publique d'État n'aurait en effet pas été adapté à la situation et l'auteur a fait le choix, opportun, de créer un nouvel article au sein du code de la fonction publique afin d'articuler le mécanisme de la déclaration individuelle avec le dispositif du service minimum.
Les contrôleurs aériens seront par ailleurs mieux protégés contre l'utilisation des déclarations individuelles à toute fin autre que celles qu'elle prévoit.
La commission a adopté un amendement de la rapporteure pour étendre la protection du secret professionnel aux déclarations individuelles ( COM-3).
Les avantages de cette proposition sont nombreux :
Des annulations de vol plus cohérentes avec l'ampleur d'un éventuel mouvement social.
Une meilleure prévisibilité de l'organisation aérienne et moins d'annulations à chaud.
Un service minimum utilisé moins régulièrement, et des conditions d'exercice du droit de grève et de travail améliorées pour les contrôleurs aériens.
EXAMEN DES ARTICLES
Article unique
Assurer une meilleure
prévisibilité de l'organisation des services
de la navigation
aérienne en cas de mouvement social et un meilleur équilibre
entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic
Cet article vise à assurer une meilleure prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et un meilleur équilibre entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic.
À cette fin, il crée une obligation pour tout agent, dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols, d'informer l'autorité administrative de sa participation à la grève au plus tard à midi l'avant-veille du mouvement.
La commission a adopté trois amendements pour renforcer la clarté du texte et placer les informations contenues dans la déclaration individuelle de participation à la grève sous la protection du secret professionnel.
I. Le cadre actuel relatif à l'exercice du droit de grève du personnel des services de la navigation aérienne ne permet pas d'assurer une organisation efficace des services
A. Les contrôleurs aériens, des fonctionnaires de la fonction publique d'État au rôle essentiel afin d'assurer le bon fonctionnement du trafic aérien
Les contrôleurs aériens sont des fonctionnaires de la fonction publique d'État, rattachés, au sein de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), à la direction des services de la Navigation aérienne (DSNA). Ils sont divisés en deux corps :
- les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) - catégorie A ;
- les techniciens supérieurs des études et de l'exploitation de l'aviation civile (TSEEAC) - catégorie B.
Leur mission au sein de l'écosystème de l'aviation est double. Ils garantissent tout d'abord la sécurité du trafic aérien en maintenant les avions dans des couloirs aériens précis afin d'éviter les collisions. Ils doivent également assurer la fluidité d'un trafic en croissance dans un espace aérien limité. Leur performance se mesure alors à leur capacité à assurer la ponctualité des avions.
Les contrôleurs aériens exercent leur métier dans deux types de structures : les centres de contrôle en route de la navigation aérienne (CRNA) et les services régionaux chargés du contrôle d'approche et du contrôle d'aérodrome (SNA). Il y a 5 CRNA en France et 12 SNA, dont 9 en métropole.
La performance des services de la navigation aérienne est cruciale dans le bon fonctionnement du secteur. Or, parmi d'autres facteurs, les mouvements sociaux peuvent influer sur cette performance.
B. Des abattements de vols préventifs avant les mouvements sociaux disproportionnés par rapport à l'ampleur des mouvements
Aujourd'hui, les grèves des contrôleurs aériens ont des conséquences extrêmement fortes, car, en cas de mouvement de grève, la DGAC n'est pas en mesure de déterminer le nombre exact de grévistes.
En effet, l'obligation qu'ont les syndicats de déposer un préavis de grève cinq jours avant le mouvement ne permet pas réellement d'anticiper dans quelle mesure le mouvement sera suivi. Ce délai permet seulement d'engager des négociations afin de prévenir la grève, ce qui n'est pas toujours possible. En outre, la DGAC, administration publique d'État, est concernée par les préavis de grève nationaux de la fonction publique. En cas de grève de cette nature, les syndicats de la DGAC n'ont aucune obligation de relayer en interne le préavis de grève.
Ce caractère imparfait de l'information s'explique par le fait que les contrôleurs aériens, à la différence de tous les autres travailleurs du secteur aérien, dont la grève à un impact sur le trafic, ne sont pas soumis à une obligation de se déclarer individuellement grévistes préalablement au mouvement.
Les déclarations individuelles de
participation à la grève
en vigueur dans le secteur des
transports
La loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 prévoit que les salariés indispensables à l'exécution des services publics de transport terrestre doivent informer leur employeur de leur intention de participer à une grève au plus tard 48 heures avant, sous peine de sanctions disciplinaires.
La loi n° 2012-375 du 19 mars 2012 dite « loi Diard » a créé une obligation analogue pour les travailleurs du secteur aérien. Elle s'applique au personnel navigant (personnel navigant commercial et pilotes de ligne) et au personnel d'assistance au sol. La déclaration individuelle doit être transmise à l'employeur 48 heures avant la participation au mouvement de grève. Les salariés ont jusqu'à 24 heures avant le mouvement pour renoncer à participer à la grève.
Les contrôleurs aériens, en tant que fonctionnaires de la fonction publique d'État ne sont pas concernés par cette loi qui s'applique au secteur privé.
Cette information lacunaire amène la DGAC à annuler de nombreux vols préventivement afin d'éviter les annulations de dernière minute, bien plus dommageables pour le trafic aérien que les abattements de vols en amont. Ainsi, un total de 580 000 minutes de retard a été enregistré sur les 6 jours de grève de 2021-2022.
Plus généralement, de 2004 à 2016, 67 % des jours de grève du contrôle aérien en Europe se sont produits en France, causant 96 % des retards enregistrés sur cette période. Cela représente 254 jours de grèves des contrôleurs aériens en France, contre 4 pour l'Allemagne. Plus grave encore, chaque jour de grève en France a un impact sur le trafic aérien européen beaucoup plus fort que dans les autres pays européens, puisqu'il est évalué à 35 000 minutes par jour de grève contre, par exemple, 1 800 en Grèce.
Les grèves au sein de la navigation aérienne ont un impact financier très élevé pour tous les acteurs du secteur aérien. Il est ainsi couramment admis qu'une minute de retard pour un avion entraîne un coût de 100 euros pour la compagnie aérienne2(*).
Outre les compagnies aériennes, les entreprises d'assistants d'escale sont également touchées par les annulations. Ce sont les entreprises auxquelles les compagnies aériennes sous-traitent la gestion des bagages, l'enregistrement des passagers, le nettoyage des avions, et diverses tâches effectuées au sol. Elles ont des coûts fixes élevés, liés en particulier à leurs coûts de main-d'oeuvre, mais sont rémunérées par les compagnies au nombre d'avions qu'elles traitent. La Chambre syndicale des assistants d'escale estime ainsi que, depuis 2012, chaque pour cent de vols annulés à l'aéroport de Roissy-CDG représente une perte de 20 000 euros pour les entreprises de ce secteur.
Une situation paradoxale découle de ces annulations préventives. Avant même que la grève commence, la DGAC a procédé à des abattements importants de vols. De la sorte, l'objectif de la grève en termes d'impact sur le trafic aérien et de retombées médiatiques est déjà atteint. Il n'est donc plus nécessaire de participer réellement à la grève. Même sans aucun gréviste effectif dans un service, les vols sont annulés, sans qu'il soit possible de revenir sur cette annulation.
Cette situation est particulièrement problématique s'agissant des grèves au sein de la « fonction publique » qui, au contraire des grèves catégorielles, sont peu suivies par les fonctionnaires de la DGAC, mais conduisent à la mise en place de restrictions préventives du trafic aérien, et donc à des abattements de vols. Or, sur les 43 jours de grèves à la DGAC entre 2021 et 2023, seuls 4 jours ont fait suite à des mouvements sociaux strictement internes à la DGAC. Le trafic aérien pâtit donc fortement de grèves la plupart du temps non liées à la DGAC et peu suivies en interne.
Si certains aéroports bénéficient d'un dispositif de service minimum (cf. infra, « D. Un recours fréquent au service minimum qui limite fortement le droit de grève des contrôleurs aériens »), ce n'est pas le cas pour tous. Pour les tours de contrôle ne faisant pas partie du périmètre bénéficiant du service minimum, l'absence de contrôleurs conduira à annuler tous les vols pendant la durée de la vacation du personnel gréviste. C'est par exemple le cas des aéroports de Montpellier et de Cannes.
C. D'inévitables annulations de vols « à chaud » face à l'impossibilité de prévoir l'ampleur réelle du mouvement
Il arrive parfois qu'en dépit d'un premier abattement préventif de vols, le nombre de grévistes se révèle supérieur à la prévision effectuée par la DGAC. Dans ce cas de figure, des annulations « à chaud » sont inévitables.
Or, ces dernières sont les plus pénalisantes pour les passagers, qui se sont rendus pour rien à l'aéroport et n'ont pas bénéficié d'un laps de temps suffisant pour chercher un trajet alternatif.
De même, les compagnies aériennes, en particulier les compagnies françaises, plus touchées par ce phénomène que les compagnies étrangères, sont fortement affectées par ces annulations.
Ces annulations peuvent aussi mener à des situations préjudiciables pour l'ordre public dans les aéroports. De nombreux voyageurs apprennent dans les terminaux, et parfois même quand ils sont déjà à bord de leur avion, que leur vol est annulé, ce qui peut donner lieu à des situations complexes à gérer par la force publique au sein des aérogares.
Ces divers impacts sont d'autant plus forts qu'en cas d'annulations massives de vols « à chaud », les aéroports concernés mettent fréquemment plusieurs jours, voire une à deux semaines, pour complètement s'en remettre. Les retards non anticipés s'accumulent fortement et sont difficilement rattrapables parce que les avions, en particulier les long-courriers, sont utilisés de façon quasi permanente.
Ces annulations « à chaud » amènent des retards et des annulations de vols non seulement dans les aéroports et les zones de contrôle en route touchées par la grève, mais également dans de nombreux aéroports en France et en Europe.
D. Un recours fréquent au service minimum qui limite fortement le droit de grève des contrôleurs aériens
Ce système est également très pénalisant pour les contrôleurs aériens eux-mêmes.
Cette absence de prévisibilité incite la DGAC à avoir fortement recours au service minimum par précaution. L'article L. 114-4 du code général de la fonction publique définit en effet un certain nombre de missions devant être assurées, même en cas de grève, par les services de la navigation aérienne.
Les missions assurées par le service minimum
Selon l'article L. 114-4 du code général de la fonction publique :
En cas de cessation concertée du travail dans les services de la navigation aérienne, doivent être assurés en toute circonstance :
1° La continuité de l'action gouvernementale et l'exécution des missions de la défense nationale ;
2° La préservation des intérêts ou besoins vitaux de la France et le respect de ses engagements internationaux, notamment le droit de survol du territoire ;
3° Les missions nécessaires à la sauvegarde des personnes et des biens ;
4° Le maintien de liaisons destinées à éviter l'isolement de la Corse et des collectivités ultra-marines ;
5° La sauvegarde des installations et du matériel de ces services.
Le décret d'application3(*) de l'article L. 114-4 du code général de la fonction publique précise les services de la navigation aérienne qui sont nécessaires à l'exécution de ces missions, et impose que la capacité offerte pour les survols, dans les espaces aériens gérés par la France, soit égale à la moitié de celle qui serait normalement offerte au cours de la période concernée.
Par ailleurs, il impose que les services chargés de la sécurité de la navigation aérienne dans certains aéroports soient ouverts, pour qu'un certain nombre de vols à l'arrivée et au départ soient assurés.
In fine, le service minimum consiste à assurer 50 % des vols. Il implique la réquisition de personnel nécessaire pour assurer cet objectif. Or, fréquemment, lorsque la DGAC constate que le nombre de grévistes est, finalement, plus faible que prévu, elle peut lever le service minimum. Il n'en reste pas moins que les agents réquisitionnés sont venus, et n'ont pas réellement eu l'opportunité d'exercer leur droit de grève.
En outre, cette absence de prévisibilité a une seconde conséquence néfaste pour les contrôleurs aériens. Avec le cadre juridique actuel, chaque mouvement social, quelle que soit son ampleur réelle parmi les contrôleurs aériens, a des conséquences très lourdes. Un mouvement minoritaire à des conséquences assez analogues à celles d'un mouvement social très suivi. Il y a donc une disproportion entre l'ampleur d'un mouvement et la réduction du trafic.
Or, cette situation cache la réalité du dialogue social au sein de la DGAC, qui est particulièrement dense. Les grèves catégorielles sont très peu nombreuses en comparaison des mouvements qui impliquent toute la fonction publique.
Il y a ainsi une forme d'instrumentalisation du système actuel, qui dégrade l'image des contrôleurs aériens de façon injustifiée. Les syndicats de la DGAC déplorent d'ailleurs que certaines compagnies aériennes profitent de cette situation en affirmant fréquemment que des retards divers sont dus à une grève des contrôleurs aériens, quand bien même ce n'est pas le cas.
E. Un cadre qui a montré ses limites les derniers mois
Le cadre actuel a particulièrement montré ses limites lors du mouvement social consécutif à la réforme des retraites.
Le samedi 11 février dernier, alors qu'aucune organisation syndicale n'avait officiellement repris le préavis de grève nationale fonction publique lié à la réforme des retraites, de nombreux agents ont fait grève. « »-De nombreux vols ont été annulés « à chaud ». Sur les 472 mouvements initialement prévus à Paris-Orly et Roissy-CDG, seuls 297 ont été maintenus. Le retard moyen sur cette journée a été de 117 minutes par vol.
Par la suite, au cours du mois de mars 2023, 2 038 vols, soit 4 % du total, ont été annulés au départ des aéroports de Paris-Orly et Roissy-CDG. Le trafic aérien en mars 2023 n'a atteint que de 85,4 % son niveau de mars 2019. Le groupe ADP estime que sans les grèves, il aurait été de 89,9 %.
De façon générale, sur le début de l'année 2023, dans tous les aéroports français, il y a eu 37 jours de grève, menant à 2,4 millions de minutes de retard.
Ces annulations touchent plus les compagnies aériennes françaises que les compagnies étrangères. Ainsi, l'impact des grèves au sein de la navigation aérienne française pour le groupe Air France est estimé à plus de 400 000 minutes de retard entre janvier et avril 2023. Sur la même période, le groupe a annulé plus de 3 000 vols. L'impact financier de ces seules annulations pour le groupe Air France est estimé à plus de 10 millions d'euros en 2023.
Pour la seule journée du 1er mai, les abattements de vols à l'aéroport Roissy-CDG (25 % des vols) ont eu un coût de 485 000 euros pour les entreprises d'assistants d'escale selon l'Union syndicale des assistants d'escale.
Hier encore, la DGAC était obligée de demander aux compagnies aériennes de réaliser un abattement de 33 % des vols à Paris-Orly et de 20 % à Bordeaux, Marseille, Lyon, Nantes, Toulouse et Nice.
Alors que la Coupe du monde de rugby puis les Jeux olympiques vont se tenir très prochainement en France, ces derniers mois ont montré combien une réforme rapide du système actuel d'encadrement du droit de grève des contrôleurs aériens est nécessaire.
Les contrôleurs aériens ont également vécu des semaines extrêmement difficiles, avec la mise en place d'un service minimum très éprouvant. Le système des réquisitions brise en effet toutes les souplesses qui permettent une conciliation équilibrée entre vie privée et vie professionnelle. Il dégrade également les conditions de travail et le dialogue social.
II. Créer une obligation de déclaration individuelle de participation à la grève deux jours avant le mouvement résoudrait ces difficultés tout en respectant le droit de grève des contrôleurs aériens
A. La déclaration individuelle et son cadre d'utilisation
La proposition de loi crée pour tout agent des services de la navigation aérienne dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols une obligation de se déclarer gréviste au plus tard à midi l'avant-veille de chaque journée de grève.
Tout agent qui a déclaré son intention de participer à la grève a la possibilité de renoncer à y participer. Il doit alors en informer l'autorité administrative avant dix-huit heures le même jour.
Ces déclarations individuelles peuvent alors être utilisées de trois façons différentes.
Tout d'abord, la DGAC peut utiliser les informations qu'elles contiennent pour décider, le cas échéant, du déclenchement du service minimum. Elle peut le faire, au plus tard, à dix-huit heures l'avant-veille de chaque journée de grève. La mise en place de ce tour de service ne peut intervenir qu'après avis du comité social d'administration compétent.
Ces informations peuvent également mener la DGAC à constater qu'il n'est pas nécessaire de mettre en place le service minimum, si le nombre de grévistes est inférieur à son seuil de déclenchement.
Deuxièmement, les informations issues des déclarations individuelles permettent aussi d'anticiper plus tôt le nombre exact d'abattements de vols qu'il sera nécessaire de réaliser. De la sorte, il est possible d'en informer plus tôt les compagnies aériennes, et donc in fine les passagers.
En outre, une troisième finalité est également poursuivie. Les informations issues des déclarations individuelles des agents peuvent en effet servir, une fois anonymisées, à l'information des organisations syndicales.
Ce texte, enfin, protège les contrôleurs aériens contre l'utilisation des déclarations individuelles à toute fin autre que l'organisation du service, l'information des passagers et celle des organisations syndicales. Des sanctions pénales sont prévues si ce cadre d'utilisation n'est pas respecté.
B. La déclaration individuelle, un instrument efficace de correction des principaux défauts du système actuel vis-à-vis des passagers
Grâce au système de déclaration individuelle, l'ampleur des grèves deviendrait plus prévisible. Il serait possible de ne pas annuler préventivement trop de vols par rapport au nombre réel de grévistes. Le service minimum n'est activé que lorsqu'il y a un nombre élevé de grévistes, et, de façon plus générale, le programme d'abattements de vol est strictement proportionné à l'ampleur du mouvement de grève. Un mouvement n'aurait de conséquences notables que s'il est réellement suivi par le personnel de la DSNA.
Dans les aéroports exclus du dispositif du service minimum, la déclaration préalable redonnera une prévisibilité sur l'activité de ces terrains, qu'il est impossible de donner avec certitude aujourd'hui.
Cette prévisibilité accrue permettra d'éviter d'avoir recours à des annulations « à chaud » en cas de sous-estimation de l'ampleur de la grève. Ces annulations sont en effet les plus préjudiciables pour les passagers, venus pour rien à l'aéroport, et pour le maintien de l'ordre public dans les terminaux.
Éviter les annulations « à chaud » permet également de laisser aux compagnies aériennes et aux sociétés aéroportuaires un délai suffisant pour s'organiser au mieux face à la grève, si bien que la contagion des effets de celle-ci dans d'autres aéroports, souvent à l'étranger, sera contenue.
Connaître l'ampleur de la grève permettrait d'informer plus tôt les passagers de ses conséquences. Ceux-ci disposeraient d'un laps de temps pour trouver, si c'est possible, une alternative à leur vol annulé. Les situations les plus problématiques avec, par exemple, des correspondances impossibles à effectuer seraient évitées.
Enfin, le délai limite imposé à la DGAC pour mettre en place le service minimum est de nature à faciliter son organisation, tant pour l'administration que pour les contrôleurs. Le personnel réquisitionné est prévenu plus tôt et plus facilement. Cette organisation évite des difficultés pratiques telles que l'incapacité à trouver un fonctionnaire réquisitionné absent de son domicile ou la venue des forces de l'ordre pour lui signifier sa réquisition.
Pour que le dispositif soit efficace, il est donc apparu nécessaire de mettre en place des délais différents de ceux mis en place par la loi « Diard » pour les compagnies aériennes. Alors qu'avec la loi « Diard », les salariés ont jusqu'à 24 heures avant le vol pour renoncer à leur participation à la grève, les contrôleurs aériens ne peuvent le faire que jusqu'à 18 heures l'avant-veille de chaque journée de grève. Ce délai supplémentaire facilite la réponse de tout l'écosystème du transport aérien en cas de grève.
C. Un exercice du droit de grève des contrôleurs aériens pleinement respecté, et même renforcé par cette disposition
Le recours au service minimum sera bien plus limité qu'aujourd'hui puisqu'il ne sera plus activé par précaution alors que le nombre de grévistes sera en réalité plus faible que prévu.
Ainsi, cette déclaration, loin de s'apparenter à une restriction du droit de grève, aboutira en réalité à le renforcer dans la pratique. De nombreux contrôleurs aériens, qui sont dans l'impossibilité de faire grève puisqu'ils sont réquisitionnés, auront la possibilité de participer au mouvement lorsque la DGAC constatera qu'il n'est pas nécessaire d'activer le service minimum.
Cette proposition de loi n'est pas une simple transposition de la loi « Diard » aux contrôleurs aériens. Un simple renvoi au code des transports pour des fonctionnaires de la fonction publique d'État ne serait en effet pas adapté. C'est la raison pour laquelle il est proposé créer un nouvel article au sein du code de la fonction publique.
Toutefois, les principales garanties mises en place par la loi « Diard » relative à l'utilisation des déclarations individuelles sont pleinement reprises dans cette proposition de loi. C'est en particulier le cas de l'existence de sanctions pénales en cas de mésusage des déclarations individuelles.
De même, la loi « Diard » prévoit une équivalence entre, d'une part, le délai limite laissé à un salarié pour renoncer à sa participation à la grève, et, d'autre part, celui laissé à la compagnie aérienne pour informer les passagers. Une équivalence analogue est prévue dans la proposition de loi entre le délai limite laissé à un contrôleur aérien pour renoncer à sa participation à la grève et celui dont dispose l'administration pour réquisitionner le personnel.
Ce délai limite de réquisition crée une obligation analogue pour l'administration à celle créée pour les contrôleurs aériens.
Cette proposition de loi prévoit d'inclure également des garanties supplémentaires pour le personnel, qui prennent en compte les spécificités de la DSNA, et en particulier l'existence d'un service minimum. C'est le cas, par exemple, de l'obligation qu'a l'autorité administrative de consulter le comité social d'administration compétent en cas d'activation du tour de service. De la sorte, même dans le cas où cette procédure est lancée, le dialogue social reste une priorité et le point de vue du personnel est pris en compte. L'information des organisations syndicales serait également prévue.
D. Un dispositif qui encadre de façon strictement proportionnée le droit constitutionnel de grève
Le droit de grève est « un principe de valeur constitutionnelle »4(*). Cependant, il revient au législateur d'opérer « la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen, et la sauvegarde de l'intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte ; il est, à ce titre, loisible au législateur de tracer la limite séparant les actes et les comportements qui constituent un exercice licite de ce droit des actes et comportements qui en constitueraient un usage abusif » 5(*).
Plus particulièrement, il revient également au législateur de concilier le droit de grève et la continuité du service public : « en ce qui concerne les services publics, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d'apporter à ce droit les limitations nécessaires en vue d'assurer la continuité du service public qui, tout comme le droit de grève, a le caractère d'un principe de valeur constitutionnelle ; que ces limitations peuvent aller jusqu'à l'interdiction du droit de grève aux agents dont la présence est indispensable pour assurer le fonctionnement des éléments du service dont l'interruption porterait atteinte aux besoins essentiels du pays »6(*).
Or, le dispositif proposé a pour objectif d'assurer une meilleure prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne, et donc, in fine, une meilleure information des passagers, ainsi qu'une adéquation plus étroite entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic.
Cet objectif peut être défini comme un objectif d'intérêt général dans la mesure où il réduit pour les passagers les situations difficiles consécutives aux grèves et leurs conséquences économiques pour les entreprises, et permet surtout d'assurer le bon ordre et la sécurité des personnes dans les aérodromes et, par suite, la préservation de l'ordre public qui est un objectif de valeur constitutionnelle.
L'encadrement du droit de grève des contrôleurs aériens est mené de façon strictement proportionnée aux objectifs d'intérêt général du texte et à la nécessaire continuité du service public.
C'est afin de respecter cette proportionnalité que l'obligation de déclaration individuelle de participation à la grève proposée ne concerne que les agents « assurant des fonctions de contrôle, d'information de vol et d'alerte et dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols ». Il ne serait pas justifié au regard des objectifs de la proposition de loi que soient inclus dans son champ des agents de la DSNA dont l'absence n'affecterait pas directement la réalisation des vols.
Dans sa décision n° 2007-556 DC du 16 août 2007, le Conseil constitutionnel a jugé que cette obligation de déclaration préalable n'est pas contraire à la Constitution, seulement si elle « n'est opposable qu'aux seuls salariés dont la présence détermine directement l'offre de service ».
En outre, l'utilisation des déclarations individuelles est strictement encadrée, et toute utilisation hors cadre de ces dernières est passible de sanctions pénales.
Enfin, l'encadrement du droit de grève prévu ici est limité. L'objectif de ce texte n'est pas de remettre en cause le droit des agents de la navigation aérienne à faire grève. Ils pourront continuer de participer à un mouvement social, mais ils devront le déclarer au préalable à leur hiérarchie. Comme l'a souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2012-650 DC du 15 mars 2012, « l'obligation de déclaration préalable ne s'oppose pas à ce qu'un salarié rejoigne un mouvement de grève déjà engagé, auquel il n'avait pas initialement l'intention de participer, ou auquel il avait cessé de participer, dès lors qu'il en informe son employeur au plus tard quarante-huit heures à l'avance ; qu'en outre, la méconnaissance de ces obligations de déclaration individuelle préalable n'a de conséquences ni sur le caractère licite de la grève ni sur l'obligation pour l'employeur de rémunérer le salarié pour les heures pendant lesquelles il n'est pas en grève ».
III. Une proposition approuvée par la commission, sous le bénéfice de clarifications du texte bienvenues et d'une mesure pour renforcer la protection du secret des informations contenues dans la déclaration individuelle de participation à la grève
La commission a ainsi adopté l'article unique de la proposition de loi. Elle a adopté deux amendements visant à en clarifier les dispositions et un amendement qui place les informations contenues dans la déclaration individuelle de participation à la grève sous la protection du secret professionnel.
Un premier amendement ( COM-1) porte sur le deuxième alinéa de l'article unique. Il concerne le type de préavis de grève à l'occasion de laquelle l'obligation de déclaration individuelle est mise en place. La rédaction originelle mentionnait qu'il s'agit de grèves « concernant les personnels des services de la navigation aérienne ». Cela aurait pu laisser penser que le périmètre du champ d'application de l'article était restreint aux seuls préavis de grève internes à la DGAC. En auraient donc été exclus les préavis de grève nationaux de la fonction publique. Les grèves consécutives à un préavis national sont pourtant les plus fréquentes et celles qui ont l'impact le plus fort sur le trafic aérien. Il était donc nécessaire de les inclure sans aucune ambiguïté dans le périmètre de la proposition de loi.
Un deuxième amendement ( COM-2) porte sur la première phrase du sixième alinéa de l'article unique. On pouvait déduire de la rédaction originelle de la première phrase de l'alinéa 6 que l'information des passagers concernait uniquement « l'organisation de l'activité durant la grève dans les conditions prévues au présent article », et donc seulement le cas de la mise en place d'un service minimum.
Or, l'information transmise aux passagers pourrait s'étendre, d'une part, aux vols concernés par le service minimum, et, d'autre part, en cas de grève de faible ampleur ne nécessitant pas sa mise en place, les vols affectés par la grève. Cette nouvelle formulation permet de clarifier le texte en précisant que l'information des passagers englobe bien les adaptations du trafic aérien consécutives à un mouvement de grève, quelles que soient les adaptations qui en résultent.
Enfin, un troisième amendement ( COM-3) porte sur le sixième alinéa de l'article unique. Il introduit, après la première phrase, la mention selon laquelle les déclarations individuelles sont protégées par le secret professionnel. Cet amendement renforce la confidentialité des déclarations individuelles des agents qui participent au mouvement de grève. Il aligne la protection de ces déclarations sur la protection des déclarations analogues déjà existantes transmises à leurs employeurs par les personnels du secteur aérien entrant dans le périmètre de la « loi Diard ».
Ces trois amendements sont en parfaite continuité avec l'esprit d'équilibre qui anime cette proposition de loi. Ils en renforcent la clarté ainsi que la protection essentielle des contrôleurs aériens contre tout mésusage qui pourrait être fait de leur déclaration individuelle.
La commission a adopté l'article unique ainsi modifié.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 7 juin 2023, la commission a examiné le rapport de Mme Évelyne Perrot sur la proposition de loi n° 553 (2022-2023) relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic.
M. Jean-François Longeot, président. - Nous examinons le rapport d'Évelyne Perrot sur la proposition de loi relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic.
Cette proposition de loi a été déposée par Vincent Capo-Canellas, que je salue, et plusieurs de nos collègues. Elle vise à apporter une réponse pragmatique aux difficultés rencontrées par le système actuel d'encadrement du droit de grève des contrôleurs aériens. Aujourd'hui, la direction générale de l'aviation civile (DGAC) ne peut pas connaître exactement le nombre de contrôleurs participant à une grève. Elle est donc amenée à annuler préventivement de nombreux vols et, parfois, à procéder à d'autres annulations de dernière minute, très inconfortables.
Il en résulte une très difficile prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social, et une forte disproportion entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic. Une grève faiblement suivie peut en effet mener à de nombreux abattements préventifs. Cette situation s'explique par le fait que les contrôleurs aériens n'ont aucune obligation de prévenir leur direction de leur participation au mouvement en amont de la grève, à la différence des travailleurs du transport terrestre régulier de voyageurs depuis 2007 et des autres travailleurs du secteur aérien depuis 2012.
La proposition de loi crée une obligation de ce type pour les contrôleurs aériens, tout en veillant à bien l'adapter aux spécificités de leur situation, comme le service minimum que leur direction peut déclencher en cas de grève.
Je laisserai le soin à notre excellent collègue, auteur du texte, Vincent Capo-Canellas, de nous détailler le contexte de l'élaboration de cette proposition de loi, ainsi que ses objectifs, puis Évelyne Perrot nous présentera les grandes lignes son rapport et ses propositions de modifications.
M. Vincent Capo-Canellas, auteur de la proposition de loi. - Le service public du contrôle aérien est essentiel au pays, car il nous permet de maîtriser et de contrôler notre espace aérien et est un élément clé pour la sécurité des vols.
En 2018, j'ai rédigé un rapport sur la modernisation du contrôle aérien ; sa tonalité était assez critique. Je mène actuellement un contrôle budgétaire sur le sujet. Je constate que les choses ont évolué, ce qui démontre que le rapport du Sénat a été utile. Cette proposition de loi s'inscrit dans la lignée de ce travail.
Les contrôleurs aériens sont soumis à des règles nécessaires à la continuité de ce service public essentiel au respect de la souveraineté du pays ; il leur revient en particulier d'assurer le survol du pays en toute sécurité, dans le contexte du ciel unique européen.
Les contrôleurs aériens ont été exemptés de la loi du 19 mars 2012 relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports, dite « loi Diard » : ils ne doivent pas se déclarer grévistes 48 heures à l'avance. En revanche, ils doivent assurer un service minimum, qui fonctionne assez mal. L'absence de prévisibilité conduit à des abattements importants souvent disproportionnés compte tenu du nombre réel de grévistes, d'où des nuisances pour les passagers et les compagnies. À l'inverse, la DGAC est parfois contrainte à des annulations de dernière minute si elle a sous-estimé le nombre de contrôleurs aériens en grève - c'est ce qui s'est d'ailleurs passé le 11 février dernier. Parfois, d'ailleurs, malgré les abattements, dans certains aéroports, il y a des annulations de dernière minute.
Il faut, à la fois, prévoir plus finement le nombre de grévistes et préserver le principe constitutionnel du droit de grève. J'ai essayé de parvenir à un équilibre : les contrôleurs doivent se déclarer grévistes à l'avance et la DGAC doit prévenir l'avant-veille du mouvement les agents faisant l'objet d'une astreinte. À l'heure actuelle, ils sont parfois astreints à la dernière minute, quand on constate en salle de contrôle que le nombre de contrôleurs est insuffisant. Il arrive aussi que ce soient les gendarmes qui les préviennent la veille pour le lendemain. Depuis le début de l'année, on compte quarante jours de grève : les contrôleurs eux-mêmes témoignent de la désorganisation de leur travail. En tout état de cause, le décret relatif au service minimum doit être revu parce qu'un certain nombre de terrains doivent y entrer pour répondre aux évolutions du trafic depuis sa parution.
J'ai tenté de trouver une solution prenant en compte l'exaspération tant des passagers et des compagnies que celle des contrôleurs, qui admettent que le système actuel est à bout de souffle. Leur principal syndicat s'est déclaré disposé à évoluer en faveur d'un système de déclaration préalable. Bien sûr, le diable se cache dans les détails, mais j'ai cherché à parvenir à la solution la plus équilibrée possible. Le système actuel ne peut perdurer. C'est une tentative différente de celles menées à l'étranger : des pays interdisent à leurs contrôleurs de faire grève certains jours - je considère que ce n'est pas la bonne solution. Respectons nos principes tout en intégrant cette exigence de prévisibilité et d'adéquation entre l'ampleur du mouvement et la réduction du trafic. La modernisation de ce service public ne peut se faire qu'en respectant le dialogue social.
Mme Évelyne Perrot, rapporteure. - Nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner la proposition de loi de notre collègue Vincent Capo-Canellas relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic.
Ce texte porte sur un sujet bien identifié par le grand public : les conséquences sur le trafic aérien des mouvements sociaux des contrôleurs aériens au sein de la DGAC.
Le cadre actuel de ces mouvements sociaux n'est pas satisfaisant. Bien que les organisations syndicales de la DGAC doivent déposer un préavis de grève cinq jours avant le début du mouvement, il est très difficile d'anticiper son ampleur réelle : la DGAC n'a actuellement aucun moyen de savoir avec précision combien d'agents y participeront.
Face à ces incertitudes, la DGAC réalise fréquemment des abattements de vols bien plus élevés que nécessaire afin d'éviter les annulations de dernière minute, dites « à chaud », qui sont les plus pénalisantes pour les compagnies aériennes et les passagers. La réduction du trafic consécutive à la grève est donc disproportionnée compte tenu de la participation parfois très faible du personnel au mouvement.
Le fonctionnement actuel est déroutant : il permet aux contrôleurs aériens d'annoncer qu'ils vont faire grève sans avoir besoin de réellement passer à l'action. Les abattements de vols ayant lieu avant le début du mouvement, les effets recherchés de la grève en termes de réduction de trafic sont déjà atteints avant même qu'elle commence.
Parfois, à l'inverse, la DGAC peut avoir une analyse trop optimiste de la situation et annuler en amont moins de vols que ce qui est nécessaire. Il faut alors procéder en urgence à des annulations « à chaud » qui désorganisent très fortement le trafic aérien. Des passagers déjà arrivés dans les terminaux, voire dans les avions, voient leur vol annulé. Cela peut donner lieu à des troubles à l'ordre public, en raison de la présence dans les aéroports de nombreuses personnes courroucées face à ces situations difficiles.
Cette incertitude est pénalisante pour les contrôleurs aériens eux-mêmes. En cas de grève, il est en effet possible de déclencher un dispositif de service minimum afin d'assurer la continuité du service public et une certaine partie des opérations, en particulier celles liées aux vols vers la Corse et les outre-mer et celles qui permettent le survol du territoire français. La DGAC est souvent obligée de le déclencher préventivement, alors que, in fine, le nombre de grévistes est faible, si bien qu'il n'aurait pas été nécessaire de le faire appliquer.
Le service minimum implique des réquisitions de personnel. Les contrôleurs réquisitionnés n'ont donc pas l'occasion de participer au mouvement de grève, quand bien même ils l'auraient voulu. En outre, lorsque le service minimum est déclenché, il n'est plus possible d'utiliser les souplesses habituelles pour assurer la conciliation entre vie professionnelle et vie privée.
Parfois, le service minimum peut être mis en place assez tardivement. Il est alors difficile de notifier leur réquisition aux contrôleurs : même si ces cas sont rares, les forces de l'ordre doivent alors s'en charger. Cette situation n'est évidemment pas pleinement satisfaisante.
Au cours des derniers mois, ce système a montré de façon très claire ses limites. Le 11 février dernier, des contrôleurs ont rejoint une grève de la fonction publique qui n'avait même pas été relayée en interne pas les syndicats de la DGAC. Il en a résulté de nombreuses annulations à chaud. Les semaines suivantes, le climat de travail s'est dégradé au sein de la DGAC, car le recours au service minimum s'est multiplié ; or la mise en oeuvre de ce dispositif est complexe et difficile, tant pour les contrôleurs aériens que pour leur direction.
Compte tenu de ce contexte, alors que la Coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques approchent à grands pas, une réforme est plus que jamais nécessaire.
La proposition de loi tend donc à remédier à cette situation. Elle crée une obligation pour les contrôleurs aériens de se déclarer individuellement grévistes l'avant-veille du mouvement de grève à midi. Ils ont la possibilité de renoncer à leur participation au mouvement jusqu'à dix-huit heures le même jour.
Sur le fondement de ces informations, l'autorité administrative peut décider de recourir au service minimum. Elle dispose, pour ce faire, d'un délai contraint : jusqu'à dix-huit heures l'avant-veille du mouvement également. L'information contenue dans les déclarations lui permet aussi de déterminer avec précision le nombre de vols à annuler. Les adaptations du trafic aérien seront donc plus proportionnées à l'ampleur du mouvement, et les annulations à chaud évitées.
Cette déclaration individuelle s'inscrit dans le prolongement de réglementations existant déjà dans le secteur des transports : depuis 2007 dans le transport terrestre régulier de voyageurs, et depuis 2012 pour les autres travailleurs du secteur aérien. Les contrôleurs aériens n'ont pas, en effet, été inclus dans le champ de la « loi Diard » créant une obligation de déclaration individuelle de participation à la grève, car elle ne concernait que le secteur privé ; or les contrôleurs sont des agents de la fonction publique d'État. La proposition de loi reprend donc le principe de la « loi Diard », mais n'en constitue pas un simple calque puisqu'il était nécessaire de veiller à l'articulation entre la déclaration individuelle et le service minimum.
Le texte déposé par M. Capo-Canellas est équilibré et adapté au cadre d'exercice des contrôleurs aériens. Certes, il crée une obligation pour les contrôleurs - la déclaration individuelle -, mais également une obligation pour l'administration puisque le délai de déclenchement du service minimum est contraint. Le texte résout les principales difficultés du système actuel aussi bien pour les passagers, puisque moins de vols seront annulés préventivement et à chaud, mais aussi pour les contrôleurs aériens, puisque le service minimum sera déclenché moins souvent et plus tôt.
J'ai cherché à m'inscrire dans cette philosophie alliant recherche de l'équilibre et pragmatisme. En accord avec M. Capo-Canellas, je vous proposerai trois amendements : deux de nature rédactionnelle et un renforçant la protection des contrôleurs aériens contre des usages non autorisés de leurs déclarations.
Je vous proposerai un premier amendement sur la nature du préavis de grève à l'occasion duquel l'obligation de déclaration individuelle est mise en place. La rédaction initiale de l'article unique mentionne qu'il s'agit de grèves « concernant les personnels des services de la navigation aérienne ». Cette écriture pourrait laisser penser que le périmètre du champ d'application de l'article est restreint aux seuls préavis de grève internes à la DGAC. Or les grèves consécutives à un préavis national sont pourtant les plus fréquentes et celles qui ont l'impact le plus fort sur le trafic aérien. Il est donc nécessaire qu'elles soient incluses sans ambiguïté dans le périmètre de la proposition de loi.
Je vous proposerai un deuxième amendement rédactionnel de clarification. On pourrait en effet déduire de la rédaction initiale que l'information des passagers concerne uniquement « l'organisation de l'activité durant la grève dans les conditions prévues au présent article », et donc les seuls cas pour lesquels l'administration a recours au service minimum. Or l'information transmise aux passagers peut s'étendre, d'une part, aux vols concernés par le service minimum, et, d'autre part, en cas de grève de faible ampleur ne nécessitant pas sa mise en place, aux vols affectés par la grève. La formulation que je vous propose permet de clarifier le texte en précisant que l'information des passagers englobe bien les adaptations du trafic aérien consécutives à un mouvement de grève, quelles que soient leurs modalités.
Enfin, je vous proposerai un troisième amendement pour introduire la mention selon laquelle les déclarations individuelles sont protégées par le secret professionnel. Cet amendement renforce la confidentialité des déclarations individuelles des agents qui participent au mouvement de grève. Il aligne la protection de ces déclarations sur celles, analogues, qui sont transmises à leurs employeurs par les personnels du secteur aérien entrant dans le périmètre de la « loi Diard ».
Ces trois amendements s'inscrivent parfaitement dans l'esprit d'équilibre qui anime cette proposition de loi. Ils en améliorent la clarté et renforcent la protection essentielle des contrôleurs aériens contre tout mésusage qui pourrait être fait de leur déclaration individuelle.
M. Bruno Belin. - Je salue la présentation de la rapporteure et j'apporte mon soutien total à l'initiative de Vincent Capo-Canellas. Une telle initiative est nécessaire. L'aviation civile est un secteur essentiel de notre économie, et notamment pour le tourisme ; elle participe de l'aménagement du territoire.
Au cours du premier trimestre 2023, 440 000 passagers ont été laissés « en rade », en raison de l'annulation de leur vol : ce n'est pas acceptable. Cela dit, nous respectons pleinement le droit de grève et le dialogue social.
Notre pays accueillera prochainement de grands événements internationaux. Le vol et l'arrivée à l'aéroport seront les premières images que les visiteurs retiendront de notre pays. Évitons les problèmes que certains de nos collègues ont encore rencontrés hier en atterrissant dans l'un des aéroports parisiens.
J'entends souvent dire que l'aviation serait nocive pour l'environnement. Mais elle joue un grand rôle dans nos territoires : les aéroports de province sont très utiles, notamment lors du transfert de greffes. Le Salon du Bourget aura lieu dans quelques jours : notre soutien à l'aviation civile est essentiel.
Les compagnies aériennes s'inquiètent des projets de taxes sur leur activité pour financer le secteur ferroviaire. Qui paiera en dernier ressort ? Le contribuable ou l'usager. Or elles font de gros efforts, en promouvant notamment l'utilisation des biocarburants durables d'aviation. Il faut soutenir le développement de cette filière dans notre pays.
M. Gilbert-Luc Devinaz. - Je remercie notre rapporteure pour sa présentation.
Avec Vincent Capo-Canellas, nous travaillons en bonne entente au sein de la mission d'information portant sur le thème : « Le développement d'une filière de biocarburants, carburants synthétiques durables et hydrogène vert ». Tel n'est pas le sujet du jour. Toutefois, dès lors qu'on souhaite décarboner nos activités et protéger la biodiversité, l'aviation n'apparaît pas comme le plus mauvais des modes de transport : le secteur a de grandes perspectives devant lui.
J'en viens à la proposition de loi en discussion : sur le fond, nous ne sommes pas en désaccord. Nous comptons quarante jours de grève ces dernières semaines et la journée du 11 février dernier a perturbé l'ensemble du trafic européen. La gestion de ce mouvement a été catastrophique. Les syndicats avaient fourni plusieurs éléments d'information à leur direction : ce jour-là, le service minimum n'a pas été appliqué, ce qui explique en grande partie les problèmes que nous avons rencontrés. À l'inverse, lors des autres jours de mobilisation, la DGAC y a eu recours alors que peu de contrôleurs étaient en grève.
Les réquisitions sont difficiles à vivre pour les agents. Toutefois, je ne suis pas persuadé qu'obliger ces derniers à transmettre leur souhait à la direction 48 heures avant améliorerait les choses. C'est la définition du service minimum qu'il faut revoir. Celui-ci est déjà une restriction du droit de grève. Certes, le syndicat majoritaire des contrôleurs aériens n'est pas forcément opposé à ce texte, toutefois, toutes les organisations syndicales s'accordent sur la nécessité de revoir la définition du service minimum qui date d'un décret de 1985.
Cette loi va faire peser sur ce personnel deux obligations : la déclaration individuelle et le service minimum. Or, le syndicat majoritaire souhaite conditionner la déclaration préalable individuelle de participation à la modification des modalités du service minimum. Avec ce texte, on met la charrue avant les boeufs par rapport à ce qu'attend le personnel. En l'état, nous ne voterons donc pas cette proposition de loi.
M. Gérard Lahellec. - J'ai participé à la gestion des activités civiles sur des petits aéroports régionaux ; à cette occasion, j'ai vécu quelques conflits sociaux, qui ne concernaient pas uniquement les contrôleurs aériens : ils touchaient aussi les gestionnaires d'aéroport et les compagnies aériennes.
Je me suis rendu au Centre en route de la navigation aérienne (CRNA) de Loperhet, dans le Finistère : 525 salariés de l'aviation civile y sont employés, dont 300 contrôleurs aériens. Le CRNA gère 400 000 kilomètres carrés du territoire métropolitain, ainsi que 17 radars, dont trois sont situés en Espagne et deux en Irlande. Les salariés m'ont fait remarquer que l'on parlait de leur métier seulement lors des mouvements de grève. Or ces personnels très qualifiés ont passé le concours de l'École nationale de l'aviation civile : ce sont non pas des sauvageons, mais des gens civilisés et responsables, qui exercent leur droit de grève de façon raisonnable.
Cela dit, je souscris aux propos déjà tenus sur la journée du 11 février dernier : pourquoi un événement exceptionnel a-t-il créé autant de désordre ? Selon un proverbe breton, un talus a toujours deux côtés : une seule catégorie de professionnels ne saurait à elle seule être tenue pour responsable de la situation, tandis que l'administration assurerait quant à elle la bonne gestion de ses missions. D'un incident, on fait une loi : je ne suis pas d'accord avec cette posture, bien trop fréquente.
Certes, le droit de grève est très embêtant : s'il n'existait pas, on ne serait pas confronté à ce type de problème. Le législateur a créé le préavis dont le but est d'éviter le conflit : la durée du préavis doit être mise à profit pour négocier et tenter de régler le problème.
Hier, le secteur aérien comptait plus de grévistes que le secteur ferroviaire. On ne réglera pas le problème à coup de lois. Le groupe CRCE ne votera pas ce texte.
M. Stéphane Demilly. - Les récents mouvements de grève ont fortement touché les déplacements dans notre pays, comme en témoigne la journée du 11 février dernier, au cours de laquelle la grève s'est invitée par surprise à l'aéroport d'Orly. Ce jour-là, un vol sur deux a été cloué sur sol, au grand dam des voyageurs déjà présents, et dans un délai très court : la DGAC a annoncé la mise en place d'abattements à 12 heures 30 pour une mise en application à 13 heures.
Les conséquences de ces grèves ont été très dures pour les compagnies aériennes françaises. La Fédération nationale de l'aviation et de ses métiers (Fnam), par ailleurs très favorable à ce texte - à l'instar du syndicat des pilotes d'Air France, que j'ai rencontré - dénombre plus de 40 jours de grève depuis le début de l'année, plus de 3 000 vols annulés par anticipation à Orly, 600 vols annulés à chaud et 470 000 passagers empêchés de voyager sur les aéroports parisiens au premier trimestre 2023. Selon Eurocontrol, 75 % des retards du ciel européen au cours du mois de mars sont attribuables au contrôle aérien français. Le coût des annulations est estimé à 8 millions d'euros par jour en moyenne pour les exploitants.
Ces chiffres témoignent de l'ampleur de la catastrophe économique et réputationnelle pour notre pays. Cela n'est plus acceptable : cessons d'être dépendants de cet État dans l'État. Le groupe Union Centriste est très favorable à cette proposition de loi, d'autant que le transport aérien se relève à peine de la plus grave crise de son histoire.
Gilles de Robien avait beaucoup travaillé sur l'introduction d'un service minimum dans le secteur ferroviaire. Des tentatives ont-elles été menées dans d'autres secteurs ?
J'imagine que cette proposition de loi a été élaborée en concertation avec la DGAC et les syndicats. Les compagnies aériennes et les aéroports français y ont-ils été associés ?
M. Jacques Fernique. - Compte tenu de la teneur de nos débats, il est clair que nos votes ne seront pas identiques. Toutefois, le diagnostic est partagé : le cadre actuel a montré ses limites, notamment lors des récents conflits sociaux.
Si ce texte est adopté, un nouveau dispositif - la déclaration individuelle - compléterait les règles relatives au service minimum, définies par un décret datant des années 1980. Ce dernier n'est plus adapté : le service minimum s'applique à Deauville, mais pas à Montpellier. Nous devons privilégier une réforme d'ensemble si nous voulons adopter une position équilibrée : adopter ce texte sans réécrire le décret n'est pas une démarche satisfaisante. Pis, cela accentuerait le déséquilibre : notre groupe ne votera pas cette proposition de loi.
Mme Nadège Havet. - Je remercie la rapporteure pour son travail. La continuité du service public et le respect du droit de grève sont respectés : notre groupe votera ce texte.
M. Didier Mandelli. - Notre groupe votera également cette proposition de loi.
Je partage la nécessité d'engager une réflexion sur le service minimum - je lui préfère d'ailleurs la notion de service nécessaire.
Mme Évelyne Perrot, rapporteure. - Monsieur Lahellec, nous n'avons pas attendu la journée du 11 février dernier pour travailler sur ce problème.
Les contrôleurs aériens ont suivi le mouvement contre la réforme des retraites. Or ils ne sont pas concernés : c'était une grève de soutien.
Mes échanges avec la DGAC et les syndicats ont été de grande qualité. J'ai veillé à préserver le droit de grève. Nous avons construit cette proposition de loi ensemble.
À cette occasion, j'ai découvert que la gestion des aéroports était très complexe : c'est un millefeuille extraordinaire. Les différences de salaires sont énormes : à cet égard, nous avons besoin des syndicats. Des stewards ou des hôtesses de l'air des compagnies low cost touchent des salaires de misère.
Lorsque je les ai rencontrés, les dirigeants d'Air France m'ont indiqué qu'ils ne rencontraient pas de problèmes de recrutement. Toutefois, ils ont connu des moments très difficiles durant la crise sanitaire. Aujourd'hui, ils multiplient les efforts pour acheter des avions de nouvelle génération et investir dans les biocarburants. Ils ont besoin de nous : nous devons leur offrir un ciel français sans problème.
M. Vincent Capo-Canellas. - Merci à la rapporteure, qui a mené un travail conséquent sur un sujet complexe.
Ce service public travaille tout le temps, y compris la nuit. Je vous laisse imaginer les difficultés si l'on attendait 4 heures du matin pour recenser les présents et procéder, le cas échéant, aux réquisitions. Aujourd'hui, un modus vivendi s'est imposé : les contrôleurs assurent la sécurité des vols et contribuent à la réduction des émissions de carbone avec les routes droites. Or les avions évitent la France, car il est impossible de gérer la prévisibilité des vols : les émissions de CO2 sont donc plus importantes.
Chacun reconnaît que nous pouvons progresser. Cela dit, comment concilier le service minimum et ce nouveau dispositif ? Le système actuel est baroque : Montpellier ne figure pas dans le décret relatif au service minimum, contrairement à Limoges. En outre, le système de réquisitions est très ancien. Il fonctionne parce que personne ne le conteste. Pour les syndicats, le système est relativement aisé. Il y a un préavis, souvent externe à la DGAC, l'administration abat des vols, et, finalement, peu de fonctionnaires sont grévistes car l'effet est déjà là. Personne ne comprend à l'étranger ce système qui pousse à des abattements disproportionnés. La DGAC est critiquable : le 11 février dernier, elle n'a pas déployé le service minimum, et il y a eu de nombreuses annulations « à chaud ».
Il faut bien sûr revoir ce décret, qui date de 1985. Pour le moment, le Gouvernement ne dit rien de ses intentions et joue la carte de la prudence, mais je suis sûr qu'il souscrit à notre constat. Je ne suis pas l'avocat des compagnies, et certainement pas de Ryanair. Cela dit, une pétition a recueilli 1,6 million de signatures et la Commission européenne a saisi la DGAC pour lui demander des réponses et une évolution du système. Dès lors, soit on trouve nous-mêmes la solution, soit on nous en imposera une autre, moins équilibrée. Si cette proposition de loi est votée, il y aura une révision du décret, car elle est, en tout état de cause, inévitable. Cela se fera par le biais d'un décret pris en Conseil d'État, qui ne manquera pas de veiller au respect du droit de grève.
Monsieur Belin, il est effectivement essentiel de décarboner le secteur aérien, qui est très utile pour nos territoires.
Monsieur Devinaz, les récentes grèves ont causé deux millions de minutes de retard ; si la proposition de loi avait été en vigueur, ce chiffre aurait été beaucoup moins important. La corrélation entre le nombre de grévistes, qui aurait peut-être été plus élevé, et les perturbations aurait été plus forte.
Monsieur Lahellec, ma proposition de loi n'est pas la première du genre : Bruno Retailleau avait déposé une proposition de loi visant à assurer l'effectivité du droit au transport, à améliorer les droits des usagers et à répondre aux besoins essentiels du pays en cas de grève. Celle-ci avait été votée par le Sénat. Notre collègue Joël Guerriau avait lui aussi rédigé un texte. En ce qui me concerne, j'essaie d'équilibrer les choses : j'impose à la DGAC de tenir compte de la situation des contrôleurs et de leur notifier leur astreinte à l'avance.
Monsieur Demilly, les compagnies et l'ensemble des aéroports ont été consultés.
Je remercie enfin Nadège Havet et Didier Mandelli pour leurs prises de position.
Mme Évelyne Perrot, rapporteure. - Il me reste à vous soumettre un périmètre pour l'établissement du texte au regard de l'article 45 de la Constitution et de l'article 44 bis du Règlement du Sénat s'agissant des cavaliers législatifs.
Je vous propose de retenir dans le périmètre du texte les dispositions relatives : aux modalités d'exercice du droit de grève du personnel des services de la navigation aérienne, aux modalités d'organisation du service en cas de grève au sein des services de la navigation aérienne et à l'information des passagers et des organisations syndicales en cas de grève au sein des services de la navigation aérienne.
Il en est ainsi décidé.
Mme Évelyne Perrot, rapporteure. - L'amendement COM-1 vise à lever une ambiguïté du texte initial. Le renvoi, à l'alinéa 2, aux « personnels des services de la navigation aérienne » pourrait être interprété comme restreignant le périmètre du champ d'application de l'article aux seuls préavis de grève internes à la DGAC, et pourrait sembler exclure les préavis de grève nationaux de la fonction publique. Les grèves consécutives à un préavis national sont pourtant les plus fréquentes et aussi les plus nombreuses : ce sont elles qui ont l'impact le plus fort sur le trafic aérien. Il est donc nécessaire qu'elles soient incluses sans ambiguïté dans le périmètre de la proposition de loi.
L'amendement COM-1 est adopté.
Mme Évelyne Perrot, rapporteure. - L'amendement COM-2 tend à répondre à une imprécision du texte initial. On pourrait en effet déduire de la rédaction de la première phrase de l'alinéa 6 que l'information des passagers concerne uniquement « l'organisation de l'activité durant la grève dans les conditions prévues au présent article », et donc seulement le cas de la mise en place d'un service minimum.
Or l'information transmise aux passagers peut concerner, d'une part, les vols concernés par le service minimum, et, d'autre part, en cas de grève de faible ampleur ne nécessitant pas sa mise en place, les vols affectés par la grève. Cette nouvelle formulation permet de clarifier le texte en précisant que l'information des passagers concerne bien les adaptations du trafic aérien consécutives au mouvement de grève, quelles que soient ces adaptations.
L'amendement COM-2 est adopté.
Mme Évelyne Perrot, rapporteure. - L'amendement COM-3 vise à protéger la confidentialité des déclarations individuelles des agents qui participent au mouvement de grève. Il aligne la protection de ces déclarations sur le régime des déclarations analogues déjà transmises à leurs employeurs par les personnels du secteur aérien entrant dans le périmètre de la « loi Diard ».
L'amendement COM-3 est adopté.
L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Article unique |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Mme PERROT, rapporteure |
1 |
Clarification du champ d'application du texte et de l'inclusion en son sein des grèves « fonction publique » nationales |
Adopté |
Mme PERROT, rapporteure |
2 |
Clarification du champ de l'information délivrée aux passagers sur la base des renseignements contenus dans les déclarations individuelles de participation à la grève |
Adopté |
Mme PERROT, rapporteure |
3 |
Ajout de la mention selon laquelle les déclarations individuelles de participation à la grève sont protégées par le secret professionnel |
Adopté |
La réunion est close à 10 h 55.
RÈGLES
RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET
DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT
PROPOSITION DE LOI RELATIVE À LA PRÉVISIBILITÉ DE L'ORGANISATION DES SERVICES DE LA NAVIGATION AÉRIENNE EN CAS DE MOUVEMENT SOCIAL ET À L'ADÉQUATION ENTRE L'AMPLEUR DE LA GRÈVE ET LA RÉDUCTION DU TRAFIC
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie »7(*).
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie8(*).
Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte9(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial10(*).
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a arrêté, lors de sa réunion du 7 juin 2023, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 553 (2022-2023) relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic.
Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :
- aux modalités d'exercice du droit de grève du personnel des services de la navigation aérienne ;
- aux modalités d'organisation du service en cas de grève au sein des services de la navigation aérienne ;
- à l'information des passagers et des organisations syndicales en cas de grève au sein des services de la navigation aérienne.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Jeudi 25 mai 2023
- Direction générale de l'aviation civile (DGAC) : M. Damien CAZÉ, directeur général, Mme Aline PILLAN, secrétaire générale, MM. Florian GUILLERMET, directeur des services de la navigation aérienne, et Jean GOUADAIN, directeur de cabinet du directeur général
- FO - Syndicat national du personnel navigant commercial (FO-SNPNC) : MM. David COLLET, secrétaire général, et Stéphane SALMON, secrétaire général adjoint en charge des PNC sous contrat
- Air France : MM. Olivier JANICAUD, secrétaire général, et Pierre ALBANO, directeur des projets transverses pour les affaires institutionnelles
- Fédération nationale de l'aviation et de ses métiers (FNAM) : MM. Laurent TIMSIT, délégué général, et Éric TRAUTMANN, délégué général adjoint affaires réglementaires et techniques
- Syndicat national des contrôleurs du trafic aérien (SNCTA) : MM. Guilhem FARALDO, David GIRAUD, Yohann LE PETITCORPS, Stéphane ROZALEN, et Guillaume SINTES, secrétaires nationaux
Mercredi 31 mai 2023
- Aéroports de Paris (ADP) : MM. Régis LACOTE, directeur de l'aéroport de Paris-Charles de Galle, Paul BEYOU, chargé des affaires publiques nationales, et Mathieu CUIP, directeur des affaires publiques
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl22-553.html
* 1 LOI n° 2012-375 du 19 mars 2012 relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports
* 2 Cook, A.J. et Tanner, G. 2015. European airline delay cost reference values. Brussels EUROCONTROL Performance Review Unit
* 3 Décret n° 85-1332 du 17 décembre 1985 portant application de la loi n° 84-1286 du 31 décembre 1984 abrogeant certaines dispositions des lois n° 64-650 du 2 juillet 1964 relative à certains personnels de la navigation aérienne et n° 71-458 du 17 juin 1971 relative à certains personnels de l'aviation civile et relative à l'exercice du droit de grève dans les services de la navigation aérienne.
* 4 Conseil constitutionnel, Décision n° 79-105 DC du 25 juillet 1979
* 5 Conseil constitutionnel, Décision n° 2012-650 DC du 15 mars 2012
* 6 Conseil constitutionnel, Décision n° 79-105 DC du 25 juillet 1979
* 7 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 8 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 9 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.
* 10 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.