Rapport n° 500 (2022-2023) de M. Jacques GROSPERRIN , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 5 avril 2023
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Synthèse du rapport (310 Koctets)
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AVANT-PROPOS
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EXAMEN DES ARTICLES
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Article 1er
Expérimentation sur l'extension du domaine d'autonomie des écoles
et des établissements scolaires
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Article 2
Autorité hiérarchique des directeurs d'école
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Article 2 bis
(nouveau)
Pérennisation de la possibilité d'instruire des enfants âgés de trois à six ans dans les jardins d'enfants
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Article 3
Possibilité de dérogation aux modalités d'affectation des enseignants
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Article 4
Création des écoles supérieures du professorat des écoles
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Article 5
Coordination liée à la création des écoles supérieures
du professorat des écoles
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Article 6
Création d'un service public de soutien scolaire
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Article 7
Création de la réserve éducative
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Article 7 bis
(nouveau)
Développement de la bivalence
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Article 7 ter (nouveau)
Mention du respect de l'élève et de l'étudiant
comme composante de l'égalité des chances
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Article 8
Création des territoires ruraux à besoins éducatifs particuliers
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Article 9
Moratoire sur la fermeture d'écoles dans les aires urbaines de moins de 5 000 habitants en cas d'opposition du conseil municipal
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Article 10
Neutralité religieuse des personnes participant au service public
de l'éducation
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Article 11
Obligation du port de l'uniforme pour les élèves des classes primaires, collèges et lycées
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Article 12
Recevabilité financière
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Article 1er
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EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES
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RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
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LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 500
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023
Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 avril 2023
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur la proposition de loi pour une école de la liberté , de l' égalité des chances et de la laïcité ,
Par M. Jacques GROSPERRIN,
Sénateur
1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon , président ; M. Max Brisson, Mme Laure Darcos, MM. Stéphane Piednoir, Michel Savin, Mme Sylvie Robert, MM. David Assouline, Julien Bargeton, Pierre Ouzoulias, Bernard Fialaire, Jean-Pierre Decool, Mme Monique de Marco , vice-présidents ; Mmes Céline Boulay-Espéronnier, Else Joseph, Marie-Pierre Monier, Sonia de La Provôté , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jérémy Bacchi, Mmes Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Toine Bourrat, Céline Brulin, Samantha Cazebonne, M. Yan Chantrel, Mmes Nathalie Delattre, Véronique Del Fabro, M. Thomas Dossus, Mmes Sabine Drexler, Laurence Garnier, Béatrice Gosselin, MM. Jacques Grosperrin, Jean Hingray, Jean-Raymond Hugonet, Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Michel Laugier, Pierre-Antoine Levi, Jean-Jacques Lozach, Jacques-Bernard Magner, Jean Louis Masson, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Olivier Paccaud, Damien Regnard, Bruno Retailleau, Mme Elsa Schalck, M. Lucien Stanzione, Mmes Sabine Van Heghe, Anne Ventalon, M. Cédric Vial .
Voir les numéros :
Sénat : |
320 rect. et 501 (2022-2023) |
AVANT-PROPOS
La commission de la culture, de l'éducation et de la communication a adopté, le 5 avril 2023, la proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité déposée par Max Brisson et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains.
Constatant les difficultés de l'institution scolaire pour atteindre les objectifs que lui assigne la Nation , ce texte se structure autour de quatre axes :
- renforcer l'autonomie des établissements scolaires,
- assurer l'égalité des chances entre les élèves en créant un service public du soutien scolaire et en déployant une politique destinée aux élèves des territoires ruraux,
- améliorer la transmission de savoirs fondamentaux en réformant la formation des enseignants du premier degré,
- renforcer l'affirmation de la laïcité à l'école et le sentiment d'appartenance à une communauté scolaire.
À l'initiative de Jacques Grosperrin, rapporteur du texte , la commission a adopté des amendements destinés à associer les maires avant que leurs écoles, volontaires, ne deviennent des établissements publics dans le cadre de l'expérimentation visant à accroitre leur autonomie, sécuriser le nouveau parcours des étudiants préparant le concours de professeurs du premier degré, ou encore créer des territoires ruraux à besoins éducatifs spécifiques, mieux à même de répondre aux spécificités de ces territoires.
La commission a par ailleurs pérennisé l'instruction des enfants de trois à six ans au sein des jardins d'enfants qui existaient avant la loi pour une école de la confiance.
I. L'INSTITUTION SCOLAIRE EN SOUFFRANCE
De nombreuses interrogations se posent sur la capacité de l'institution scolaire à atteindre les objectifs qui lui sont assignés.
pensent que l'école fonctionne mal. |
sont pessimistes sur l'avenir de l'école. 1 ( * ) |
A. DES INÉGALITÉS ENTRE LES ÉLÈVES TOUJOURS FORTES ET DES DIFFICULTÉS MAJEURES DANS LA MAÎTRISE DES SAVOIRS FONDAMENTAUX
Malgré des dépenses importantes en France en faveur de l'éducation, notamment de l'éducation prioritaire, les inégalités entre les élèves demeurent très fortes. La dernière étude PISA (2018) montre que comparé à ceux des autres pays de l'OCDE, le système scolaire français favorise la réussite des enfants qui réussissent le mieux tandis qu'il est de moins en moins capable de faire réussir les enfants les moins privilégiés. La France reste l'un des pays où l'origine sociale des élèves conditionne le plus leur parcours scolaire .
L'étude internationale TIMSS 2019 permet de constater quant à elle que les élèves français de CM1 sont sur-représentés parmi les élèves européens les plus faibles : au lieu des 25 % attendus dans le quartile inférieur, ils sont 45 % en mathématiques et 41 % en sciences. 15 % des élèves français - soit 1 sur 7 - ne maîtrisent pas les compétences élémentaires en mathématiques ; ils sont seulement 6 % au niveau européen.
Les évaluations intergénérationnelles mettent également en lumière une baisse de la maîtrise des savoirs fondamentaux. En 40 ans, sur une même dictée, les élèves de CM2 de 2021 font significativement plus de fautes que leurs prédécesseurs de 1987.
Répartition du nombre d'erreurs obtenues à la dictée 2 ( * ) ( %)
= 2 erreurs |
= 5 erreurs |
= 10 erreurs |
= 15 erreurs |
= 25 erreurs |
|
1987 |
12,9 |
30,7 |
58,1 |
26,2 |
6,9 |
2007 |
5,8 |
15,6 |
36,6 |
45,7 |
13,2 |
2015 |
2,0 |
7,7 |
24,4 |
59,4 |
22,7 |
2021 |
1,9 |
7,0 |
21,9 |
63,0 |
27,5 |
Lecture : en 2021, 7 % des élèves ont fait 5 erreurs ou moins. Une partie d'entre eux (1,9 %) de l'ensemble effectue 2 erreurs ou moins. De fait, 5,1 % des élèves réalisent entre 3 et 4 fautes.
B. UNE ADAPTATION DIFFICILE DE L'ÉDUCATION NATIONALE AUX BESOINS DES TERRITOIRES
L'un des objectifs majeurs de l'éducation nationale consiste à déployer une politique nationale tenant compte de la diversité des territoires .
L'article L. 111-1 du code de l'éducation dispose en effet que « la répartition des moyens du service public de l'éducation tient compte des différences de situation, notamment en matière économique, territoriale et sociale » . La politique éducative différenciée s'est historiquement construite en s'appuyant sur la politique de la ville , à travers des moyens supplémentaires en faveur des réseaux d'éducation prioritaire. Le rapport de la commission sur les nouveaux territoires de l'éducation de Laurent Lafon et Jean-Yves Roux a mis en lumière l'absence de la donnée ruralité dans les statistiques de l'éducation nationale, conduisant à une politique scolaire rurale par défaut .
Pourtant, les parcours scolaires post-collège et post-baccalauréat d'une partie des jeunes résidant dans les territoires ruraux « sont marqués par des écarts à la moyenne, voire des difficultés selon une ampleur comparable à celles qui caractérisent les élèves de l'éducation prioritaire » 3 ( * ) . Or, 23 % des Français de moins de 20 ans vivent dans les territoires ruraux.
C. UN SENTIMENT D'APPARTENANCE À UNE COMMUNAUTÉ SCOLAIRE MOINDRE CHEZ LES ÉLÈVES FRANÇAIS
Le sentiment d'appartenance à une communauté scolaire est peu développé en France. En 2018, 31 % des élèves français disent se sentir comme un étranger dans leurs écoles .
Non seulement cette proportion est nettement supérieure à la moyenne de l'OCDE (20 %), mais surtout elle a fortement augmenté en trois ans (+ 8 points) puisqu'elle atteignait 23 % en 2015 pour les élèves français. Sans doute signe de ce manque de sentiment d'appartenance, les élèves français sont parmi ceux, au sein de l'OCDE, qui coopèrent le moins entre eux dans leurs établissements (PISA 2018).
II. UN TEXTE AMBITIEUX EN FAVEUR DE L'ÉCOLE
A. ACCORDER PLUS D'AUTONOMIE AUX ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
« Malgré les objectifs
d'égalité du système éducatif, l'ensemble des
rapports sur la mixité scolaire dans les établissements, tout
comme les analyses sur les différences de résultats
aux
examens nationaux et d'accès à la filière
générale du lycée montrent à quel point
l'uniformité nationale formelle peut s'accommoder de larges
inégalités réelles de traitement des
élèves »
(Cour des comptes, janvier 2023).
Pour essayer de remédier à un système éducatif qui fonctionne mal du fait d'une politique éducative centralisée, la proposition de loi ouvre la voie à une expérimentation pour une contractualisation entre l'autorité académique, la collectivité locale, si elle le souhaite et des écoles ou établissements volontaires en vue d'accroitre leurs autonomies (art. 1 er ). Cet accroissement d'autonomie, en contrepartie duquel des objectifs et une évaluation sont mis en place, peut porter sur le recrutement des élèves, l'affectation des personnels, l'allocation et l'utilisation des moyens budgétaires, l'organisation pédagogique ainsi que les dispositifs d'accompagnement des élèves. Il doit permettre aux établissements de mieux prendre en compte les spécificités et les besoins de leurs élèves et de renforcer la mixité scolaire .
L'article 2 de cette proposition de loi, qui confère aux directeurs une autorité hiérarchique sur les enseignants de leur école, vise également à fédérer sous leur autorité une institution scolaire adaptée aux besoins des élèves.
B. ASSURER L'ÉGALITÉ DES CHANCES POUR TOUS LES ÉLÈVES
Le texte permet par ailleurs la création de contrats de mission, recommandation ancienne de la commission, permettant de déroger aux règles d'affectation des enseignants (art. 3). Il existe un risque important de « désertification enseignante », à l'instar d'autres services publics. Certains postes (établissements réputés difficiles, territoire isolé,...), déjà peu attractifs, sont encore plus désavantagés par le système de mobilité.
La mobilité « au barème » est fondée essentiellement sur l'ancienneté et les majorations de points attachées aux priorités légales et réglementaires. Il s'agit pour les enseignants affectés en début de carrière dans les académies et les postes les moins attractifs d'accumuler suffisamment de points pour être nommés dans les académies ou les établissements recherchés. Ce système incite peu les enseignants expérimentés à demander leur mutation. Le contrat de mission permis par le texte est fondé sur une logique d'engagement. Un enseignant exerçant pendant une durée et dans des établissements déterminés bénéficierait par exemple à la fin de sa mission d'une bonification de points pour le choix du poste suivant .
Le texte crée également un service public du soutien scolaire (art. 6). L'éducation nationale, qui aura la charge de l'organisation de ce service public, pourra s'appuyer sur des enseignants volontaires, des associations, ainsi que sur la réserve éducative nouvellement créée (art. 7). Ce nouveau service public doit être l'occasion de mettre en cohérence et en lumière l'ensemble des dispositifs déjà existants, parfois méconnus des familles .
Le texte vise enfin à garantir l'égalité des chances pour les élèves des territoires ruraux et à associer les territoires à la gestion de la carte scolaire : l'article 8 permet aux écoles et établissements scolaires situés au sein d'une zone de revitalisation rurale de bénéficier des mêmes dispositifs que ceux situés au sein des réseaux d'éducation prioritaire et l'article 9 prévoit que le conseil municipal d'une commune de moins de 5 000 habitants doit être consulté en cas de projet de fermeture d'une classe et peut s'y opposer entraînant un moratoire d'un an sur celui-ci. Alors que l'école est un facteur de dynamisation des territoires, l'élaboration de la carte scolaire se fonde sur un calcul statique du nombre d'enfants et occulte les initiatives des communes ainsi que les documents locaux d'urbanisme pourtant élaborés, à la demande de l'État, suivant un schéma pluriannuel.
C. AMÉLIORER LA TRANSMISSION DES SAVOIRS FONDAMENTAUX
Les spécificités de l'enseignement dans le premier degré sont mal prises en compte lors de la formation initiale .
« La formation au métier est trop courte. C'est pourquoi j'ai proposé de recruter les professeurs des écoles à bac + 3 avec une formation professionnalisante de deux ans », Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en séance au Sénat le 1 er mars dernier.
La proposition de loi crée des écoles supérieures du professorat des écoles, sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale (art. 4). Celles-ci préparent les étudiants aux concours d'enseignants du premier degré et forment les enseignants stagiaires - et titulaires - du premier degré. La préparation aux concours d'enseignants du second degré ainsi que leur formation continue restent inchangées au sein des INSPÉ, qui deviennent des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation du second degré.
D. RENFORCER L'AFFIRMATION DE LA LAÏCITÉ À L'ÉCOLE ET FAIRE ÉMERGER UN SENTIMENT D'APPARTENANCE
À plusieurs reprises, le Sénat a rappelé que les sorties scolaires sont des temps de classe en dehors des murs de l'école . En l'absence de textes clairs, il revient aux chefs d'établissement d'accepter ou d'interdire aux accompagnants de sorties scolaires le port de signes religieux ostensibles. Il en résulte des différences peu compréhensibles pour les élèves, les parents d'élèves et les élus locaux. En imposant aux accompagnants de sorties scolaires les mêmes contraintes qu'aux élèves - une interdiction des signes religieux ostensibles -, ce texte permet de ne plus laisser les directeurs d'école et les chefs d'établissement dans un entre-deux juridique inconfortable (art. 9).
Enfin, ce texte reprend une proposition de loi portée par Céline Boulay-Espéronnier et rend obligatoire le port de l'uniforme dans toutes les écoles, collèges et lycées, publics ou privés sous contrat (art. 10). Régis Debray en 2015 devant la commission d'enquête sénatoriale pour « Faire revenir la République à l'école » 4 ( * ) déclarait que « l'uniforme scolaire n'est pas ressenti par les élèves comme une brimade, mais engendre un sentiment d'appartenance pouvant même aller jusqu'à une certaine fierté » .
III. LA POSITION DE LA COMMISSION : DES AMÉLIORATIONS AUX DISPOSITIFS PROPOSÉS ET UNE MODIFICATION DE LA PORTÉE DU TEXTE
La commission a adopté plusieurs amendements à l'initiative du rapporteur permettant :
- dans le cadre de l'expérimentation prévue à l'article premier, de recueillir l'accord des maires avant la transformation d'une école souhaitant y participer en établissement public ;
- de limiter l'autorité hiérarchique aux directeurs des écoles comportant un nombre important de classes ;
- de sécuriser les étudiants préparant le concours d'enseignants du premier degré et de faciliter leur réorientation en cas d'échec au concours ou d'abandon de la formation. Le contenu de la convention liant les écoles supérieures du professorat des écoles aux établissements d'enseignement supérieur précise notamment les modalités selon lesquelles un master - diplôme indispensable pour présenter le concours - peut être délivré aux étudiants inscrits au sein de ces écoles ;
- d'aligner les conditions de probité des participants au service public du soutien scolaire sur celles s'imposant aux personnes participant aux accueils collectifs de mineurs, et de rappeler l'obligation de neutralité qu'elles doivent respecter ;
- de créer des territoires éducatifs à besoins particuliers , plutôt que d'appliquer aux établissements scolaires ruraux les mêmes dispositifs que ceux existant en éducation prioritaire, pour certains peu pertinents . Ainsi, le dédoublement des classes a peu de sens. En revanche des moyens spécifiques pour l'accompagnement à l'orientation ou pour permettre un déploiement dans de bonnes conditions de la réforme du lycée seraient utiles.
Par ailleurs, la commission a souhaité prolonger au-delà de l'année scolaire 2023-2024 la possibilité pour les jardins d'enfants , gérés ou financés par une collectivité publique ou associatifs et existant avant la loi pour une école de la confiance, d'assurer l'instruction obligatoire des enfants de trois à six ans.
Elle a souhaité également encourager le développement de la bivalence pour les enseignants et mis en place, dans un souci de prévisibilité pour les élus locaux , un moratoire de 3 ans en cas d'opposition du conseil municipal d'une commune rurale à la fermeture d'une classe de son école.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Expérimentation sur l'extension du domaine
d'autonomie des écoles
et des établissements scolaires
Cet article permet, à titre expérimental et sous forme contractuelle, aux écoles et établissements scolaires volontaires de disposer de plus d'autonomie dans certains domaines.
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté quatre amendements visant à préciser le dispositif en recueillant notamment l'accord des maires avant la transformation en établissement public de l'école souhaitant participer à cette expérimentation .
I. - Le droit actuel : des marges d'autonomie limitées et des possibilités d'expérimentations encadrées
(1) Une autonomie limitée des établissements scolaires
Les établissements scolaires disposent d'une autonomie, « dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur et des objectifs définis par les autorités compétentes de l'État » (R. 421-2 du code de l'éducation) qui s'exprime dans trois domaines : en matière pédagogique et éducatif, dans la gestion des moyens horaires et sur le plan administratif et budgétaire.
Dans les deux premiers domaines, cette autonomie concerne ainsi « l'organisation du temps scolaire et les modalités de la vie scolaire », « la préparation de l'orientation ainsi que de l'insertion sociale et professionnelle des élèves », « la définition, compte tenu des schémas régionaux, des actions de formation complémentaire et de formation continue destinées aux jeunes et aux adultes », « l'ouverture de l'établissement sur son environnement social, culturel, économique », « le choix de sujets d'étude spécifiques à l'établissement, en particulier pour compléter ceux qui figurent aux programmes nationaux », « sous réserve de l'accord des familles pour les élèves mineurs, les activités facultatives qui concourent à l'action éducative organisées à l'initiative de l'établissement à l'intention des élèves ainsi que les actions d'accompagnement pour la mise en oeuvre des dispositifs de réussite éducative », « l'organisation en classes et en groupes d'élèves ainsi que les modalités de répartition des élèves » ainsi que « l'emploi des dotations en heures d'enseignement et, dans les lycées, d'accompagnement personnalisé mises à la disposition de l'établissement dans le respect des obligations résultant des horaires réglementaires ».
Pour la gestion du recrutement de leurs personnels, les établissements scolaires disposent d'une autonomie qui se limite aux assistants d'éducation (article L. 916-1 du code de l'éducation), aux accompagnants d'élèves en situation de handicap après accord du directeur académique des services de l'éducation nationale (article L. 917-1 du code de l'éducation) et aux volontaires du service civique.
En ce qui concerne les enseignants, le chef d'établissement ne les recrute pas 5 ( * ) , à l'exception toutefois de quelques postes : le directeur général des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale a indiqué au rapporteur que le chef d'établissement formule un avis sur les candidatures aux postes spécifiques de son établissement et participe à la commission rectorale chargée du recrutement sur les postes à profil 6 ( * ) .
Dans le domaine budgétaire, les établissements scolaires disposent d'un budget propre qui est préparé, adopté et exécuté dans les conditions définies aux articles L. 421-11 et suivants du code de l'éducation.
(2) Des expérimentations possibles uniquement dans un nombre limité de domaines pédagogiques
L'article L. 314-2 du code de l'éducation permet aux établissements scolaires de mettre en place des expérimentations pédagogiques. Celles-ci peuvent porter sur l'enseignement des disciplines, l'interdisciplinarité, l'organisation pédagogique de la classe, de l'école ou de l'établissement, la coopération avec les partenaires du système éducatif, les échanges ou le jumelage avec des établissements étrangers d'enseignement scolaire, l'utilisation des outils et ressources numériques, la liaison entre les différents niveaux d'enseignement, l'enseignement dans une langue vivante étrangère ou régionale, les procédures d'orientation des élèves et la participation des parents d'élèves à la vie de l'établissement.
La loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a introduit deux modifications : d'une part, les collectivités locales concernées sont désormais systématiquement associées à la définition des grandes orientations des expérimentations menées par l'éducation nationale ainsi qu'à leurs déclinaisons locales ; d'autre part, sous réserve de l'accord des enseignants concernés, la périodicité de leurs obligations réglementaires de service peut être modifiée - l'obligation de service est alors calculée sur le mois, le trimestre ou l'année, pour permettre, par exemple, des regroupements d'heures d'enseignement.
II. - Le dispositif proposé : expérimenter une contractualisation pour étendre l'autonomie des établissements scolaires
Le I de l'article 1 er du texte de la proposition de loi permet aux recteurs, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, de conclure des contrats avec des écoles et des établissements scolaires pour accroitre l'autonomie de ceux-ci, et avec la collectivité locale si elle le souhaite. Ces contrats peuvent porter sur cinq domaines : le ressort de l'établissement, l'affectation de personnels, y compris enseignants, l'allocation et l'utilisation des moyens budgétaires, l'organisation pédagogique et les dispositifs d'accompagnement des élèves.
Le dispositif prévoit la définition d'objectifs et une évaluation annuelle de ceux-ci, avec la possibilité pour le recteur, et le cas échéant la collectivité territoriale, de résilier les contrats en cas de non-atteinte deux années consécutives des objectifs fixés par ceux-ci, notamment en termes de réussite et de mixité scolaires.
Par ailleurs, la signature d'un tel contrat n'empêche pas l'école ou l'établissement concerné de mener en son sein une des expérimentations pédagogiques prévues à l'article L. 314-2 du code de l'éducation.
Le II limite le nombre d'écoles et d'établissements scolaires pouvant être simultanément, au sein d'une même région académique, dans une démarche de contractualisation de ce type avec le rectorat.
Le III autorise les écoles et établissements scolaires concernés à déroger à un certain nombre de dispositions du code de l'éducation, telles que les modalités de désignation du chef d'établissement, ses fonctions ainsi que les fonctions du conseil d'administration, la composition et le rôle du conseil pédagogique (art. L. 421-3 à L. 421-5 du code de l'éducation), les modalités de préparation, de contenu, d'adoption et d'exécution du budget des établissements scolaires (L. 421-11 à L. 421-14 du code de l'éducation), les modalités selon lesquelles les actes pris par l'établissement deviennent exécutoires (art. L. 421-15), le régime financier, comptable, des marchés, ou encore les modalités de représentation des élèves et des parents d'élèves compte tenu du recrutement et de la vocation spécifique de l'établissement (art. L. 421-16 du code de l'éducation). Par ailleurs, le III permet une dérogation aux modalités d'affectation des personnels dans les établissements concernés.
Le IV impose aux écoles maternelles ou élémentaires, souhaitant s'engager dans un tel contrat, d'obtenir préalablement le statut d'établissement public. Actuellement une école n'est pas un établissement public ; elle ne dispose pas de la personnalité juridique ni d'une autonomie en matière budgétaire.
Le V prévoit une évaluation de l'ensemble des expériences menées par un comité scientifique, six mois avant la fin de l'expérimentation. Elle porte notamment sur les résultats en termes de réussite des élèves et de mixité scolaire.
Enfin un décret en conseil d'État doit préciser les conditions d'application de cet article (VI).
III. - La position de la commission : préciser le dispositif et prévoir un accord préalable du conseil municipal avant le changement de statut de l'école volontaire
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté quatre amendements visant à préciser le dispositif.
Elle a rappelé le rôle du conseil d'administration qui, en tant qu'organe délibérant de l'établissement scolaire, doit se prononcer sur le projet de contrat ou sur tout avenant ( COM-25 ).
Elle a également adopté un amendement précisant l'organisation et le mode de fonctionnement de ces nouvelles écoles autonomes, en s'inspirant de ceux des établissements publics locaux d'enseignement avec une adaptation concernant la taille du conseil d'administration ( COM-28 ).
Par ailleurs, consciente de l'attachement des maires à leurs écoles, elle rend nécessaire l'accord du conseil municipal, ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale lorsque la compétence scolaire a été transférée à l'intercommunalité, pour que l'école souhaitant participer à cette expérimentation puisse devenir un établissement public, autonome de la commune ( COM-27 ).
Enfin, elle a adopté un amendement rédactionnel ( COM-26 ).
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 2
Autorité hiérarchique des directeurs
d'école
Cet article confère aux directeurs d'école une autorité hiérarchique sur les enseignants de leur école. Ils participent, en lien avec l'inspecteur de l'éducation nationale, à l'évaluation de ceux-ci .
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement visant à limiter cette autorité hiérarchique aux écoles dont le nombre de classes dépasse un seuil défini par décret .
Depuis la loi n° 2021-1716 du 21 décembre 2021 créant la fonction de directrice ou de directeur d'école, ces derniers disposent d'une autorité fonctionnelle. L'absence de la publication des décrets d'application de cette loi, adoptée pourtant il y a quinze mois, ne permet pas de définir précisément le contenu de cette autorité fonctionnelle. Il ressort néanmoins des débats parlementaires qu'elle permet aux directeurs d'école de disposer d'un pouvoir décisionnel pour l'exercice des missions administratives et organisationnelles qui leur sont confiées. En revanche, elle ne crée aucun lien hiérarchique. Le directeur d'école reste « un pair parmi ses pairs » : il ne participe pas à l'évaluation des enseignants de son école.
L'article 2 de cette proposition de loi confère aux directeurs d'école une autorité hiérarchique pour les missions qui leur sont confiées. Ils participent également, en lien avec les inspecteurs de l'éducation nationale, à l'évaluation des enseignants de leur école.
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement ( COM-29 ) limitant la portée de cet article aux écoles dont le nombre de classes dépasse un seuil défini par décret. Pour le rapporteur, ce seuil pourrait être fixé à 9 classes. Cela concernerait environ 9 100 écoles, soit environ 20 % des écoles publiques. En revanche, cette autorité hiérarchique a moins de sens lorsque l'équipe pédagogique est plus restreinte. Pour ces écoles plus petites, le directeur de l'école conserverait une autorité fonctionnelle telle que définie à l'article L. 411-1 du code de l'éducation.
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 2 bis (nouveau)
Pérennisation de la
possibilité d'instruire des enfants âgés de trois à
six ans dans les jardins d'enfants
Cet article additionnel vise à maintenir l'activité des jardins d'enfants en les autorisant, par dérogation à l'obligation de scolarisation, à assurer l'instruction des enfants de trois à six ans au-delà de la rentrée scolaire 2023-2024 .
Les jardins d'enfants sont des établissements d'accueil de jeunes enfants « qui reçoivent exclusivement des enfants âgés de plus de deux ans non scolarisés ou scolarisés à temps partiel » 7 ( * ) , soit traditionnellement jusqu'à six ans. Ils existent depuis plus d'un siècle et sont des structures pédagogiques originales qui constituent une alternative reconnue à l'école maternelle. Au 1 er juin 2020, l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) a recensé 260 jardins d'enfants représentant 8 200 places concentrées dans quelques départements, notamment à Paris (25 % du nombre de places), ainsi que dans le Bas-Rhin et le Haut-Rhin (14 % des places en Alsace) 8 ( * ) .
En abaissant à trois ans l'âge de scolarisation obligatoire, la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a profondément ébranlé le mode de fonctionnement de ces structures. D'après les informations recueillies par la mission d'expertise sur l'avenir des jardins d'enfants de l'IGÉSR, en juin 2020, les enfants soumis à l'obligation de scolarisation (nés en 2016 et avant) représentaient 28 % des effectifs des jardins d'enfants. 9 ( * ) La mission de l'IGÉSR envisage trois scénarii d'évolution de ces structures qui présentent tous des difficultés : se transformer en une autre catégorie d'établissements d'accueil de jeunes enfants (par exemple halte-garderie) pour accueillir des enfants de moins de trois ans, complété par des activités péri ou extrascolaires pour les enfants scolarisés ; devenir une école maternelle hors contrat, mais avec des coûts financiers importants 10 ( * ) ; demander à devenir une école maternelle publique, mais en perdant leur autonomie pédagogique.
Certes, une dérogation a été accordée pour les années scolaires 2019-2020 à 2023-2024 par l'article 18 de la loi pour une école de la confiance : elle considère comme satisfaite l'obligation de scolarisation pour des enfants âgés de trois à six ans lorsqu'elle est dispensée dans des jardins d'enfants qui existaient déjà avant l'entrée en vigueur de cette loi.
La commission a adopté les amendements identiques d'Elsa Schalck ( COM-17 rect. quinquies ) et d'Hervé Marseille ( COM-19 rect.) qui pérennisent cette dérogation à la scolarisation obligatoire au-delà de la rentrée scolaire 2023-2024. Comme le soulignait le rapport de Max Brisson sur la loi pour une école de la confiance, « si le personnel [de ces structures] est moins qualifié que les professeurs des écoles, leur formation est plus spécialisée sur l'accueil de cette tranche d'âge. Relativement marginales en France, ces structures sont très développées dans les pays du Nord de l'Europe, dont les résultats scolaires ne semblent pas en pâtir » 11 ( * ) .
Pour pouvoir accueillir des enfants âgés de trois à six ans dans le cadre de cette dérogation, les jardins d'enfants doivent respecter deux conditions cumulatives, la seconde étant un complément au droit en vigueur apporté par les amendements : préexister à la date d'entrée en vigueur de la loi pour une école de la confiance ; être un jardin d'enfants géré, financé ou conventionné par une collectivité publique ou un jardin d'enfants sous statut associatif.
La commission regrette le manque d'accompagnement de ces structures depuis 2019 malgré les promesses du Gouvernement ainsi que la mise en difficulté d'un réseau historique qui fonctionne bien.
La commission a adopté cet article additionnel .
Article 3
Possibilité de dérogation aux
modalités d'affectation des enseignants
Cet article introduit la possibilité de déroger aux modalités d'affectation des enseignants, qui fonctionne aujourd'hui principalement sur une logique d'ancienneté .
I. - Le droit actuel : une affectation des enseignants fondée sur un mouvement national et une logique d'ancienneté
Les articles L. 512-18 à L. 512-22 du code général de la fonction publique définissent les règles de mutation des fonctionnaires et plus spécifiquement des enseignants. Celles-ci répondent à un double objectif : pourvoir les postes vacants dans la perspective de la rentrée scolaire et donner satisfaction au plus grand nombre d'enseignants dans leurs voeux de mobilité.
Comme le souligne le rapport de Max Brisson et Françoise Laborde sur le métier d'enseignant 12 ( * ) , « [le barème] , qui vise à départager les candidatures, est fondé essentiellement sur l'ancienneté, à laquelle s'ajoutent un grand nombre de majorations attachées aux priorités légales et réglementaires : rapprochement de conjoints, handicap, enseignement en éducation prioritaire, intérêts matériels et moraux pour les fonctionnaires ultramarins, situation parentale... » . La mobilité se conçoit pour un nombre important d'enseignants comme une accumulation de points afin de pouvoir progressivement être mutés dans des académies ou des établissements plus recherchés. Il en résulte un « bizutage institutionnel » , dénoncé à de nombreuses reprises par la commission tendant à affecter les nouveaux enseignants et donc les moins expérimentés sur des postes particulièrement difficiles.
Les enseignants sont peu incités à demander leur mutation - par exemple pour occuper pendant une période limitée un poste perçu comme moins attractif - une fois le poste désiré obtenu : en raison de l'imprévisibilité du système de mutation, ils n'ont aucune garantie sur le poste suivant sur lequel ils pourraient postuler.
Face à la difficulté, voire à l'impossibilité, de pourvoir certains postes, nait dans certains territoires un risque de « désertification enseignante ».
II. - Le dispositif proposé : créer un cadre juridique permettant la mise en place de contrats de missions
L'article 3 ouvre la possibilité de déroger aux règles d'affectation prévues par le code de la fonction publique. L'objectif est de permettre au ministère de l'éducation nationale de créer des contrats de missions évoqués par la commission dans plusieurs de ses travaux 13 ( * ) : aux termes de ce contrat, l'enseignant s'engage à exercer dans des établissements spécifiques (situés dans des territoires isolés, en éducation prioritaire ou réputés difficiles par exemple) et pour une durée déterminée.
Les modalités exactes de ce contrat seront fixées par décret. Pour le rapporteur, la liste des postes ou établissements susceptibles de bénéficier de ce dispositif pourrait être établie par les recteurs, dans le cadre d'une politique éducative territorialisée. Quant à la contrepartie pour l'enseignant, elle pourrait par exemple prendre la forme d'une bonification de points dans la perspective de ses prochaines mobilités.
La commission a adopté cet article sans modification .
Article 4
Création des écoles supérieures du
professorat des écoles
Cet article crée, dans chaque région académique, une école supérieure du professorat des écoles, sous tutelle du ministère de l'éducation nationale, chargée de la préparation au concours d'enseignant du premier degré et de la formation des enseignants stagiaires et titulaires du premier degré.
Sur proposition du rapporteur, la commission a précisé le contenu des conventions liant ces écoles supérieures aux établissements d'enseignement supérieur afin de sécuriser le parcours de formation des étudiants .
I. - Le droit existant
Les étudiants qui se destinent aux métiers du professorat et de l'éducation du premier et du second degrés sont formés dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (INSPÉ), constitués au sein d'un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel.
En application de l'article L. 721-1 du code de l'éducation, les INSPÉ sont accrédités par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de l'éducation nationale, après avis du conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, et sont habilités à délivrer un diplôme universitaire de niveau master.
II. - Le dispositif proposé : une reprise en main de la formation des enseignants du premier degré par le ministère de l'éducation nationale
L'article 4 institue une distinction entre la formation des enseignants du second degré qui demeure inchangée au sein des INSPÉ, et celle des enseignants du premier degré. Pour ces derniers, une école supérieure du professorat des écoles, sous tutelle du ministère de l'éducation nationale, est créée dans chaque région académique. Cette tutelle répond à une recommandation récurrente de la commission de repositionner l'éducation nationale vis-à-vis des responsables de la formation de ses futurs fonctionnaires et de mieux définir ses attentes en tant que futur employeur. La création de cette école doit également recentrer la formation sur les spécificités du métier d'enseignant dans le premier degré : pluridisciplinarité, appréhension des besoins globaux des enfants ou encore maîtrise des méthodes nécessaires à l'acquisition des savoirs fondamentaux. Le rapporteur tient à le rappeler : « faire cours » et « faire classe » exigent des compétences différentes.
L'école supérieure du professorat des écoles exerce pour le premier degré des missions analogues à celles des INSPÉ : elle organise et assure des actions de formations initiales ainsi que de formation continue, prépare au concours de recrutement et participe à des actions de coopération internationale.
Une différence notable réside néanmoins dans la formation aux thématiques suivantes (alinéas 8 et 9 de l'article L. 721-2 du code de l'éducation et alinéas 13 et 14 de l'article 4) :
- formation à la maîtrise des outils et ressources numériques, à leur usage pédagogique ainsi qu'à la connaissance et à la compréhension des enjeux liés à l'écosystème numérique et à la sobriété numérique ;
- préparation aux enjeux du socle de connaissances, de compétences et de culture, à ceux de l'éducation aux médias et à l'information, et à ceux de la formation tout au long de la vie ;
- formation au principe de laïcité et aux modalités de son application dans les écoles, collèges et lycées publics, ainsi que pendant toute activité liée à l'enseignement.
Alors que pour le second degré, les INSPÉ forment à ces thématiques à la fois les étudiants qui préparent le concours et les enseignants dans le cadre de la formation continue, les écoles supérieures du professorat des écoles ne les mentionnent pas dans le champ de formation pré-concours : ces thématiques sont uniquement inscrites dans le parcours de formation des enseignants stagiaires et des enseignants, c'est-à-dire, pour les personnes ayant déjà réussi le concours.
Pour le rapporteur, cette nouvelle organisation offre au ministère la possibilité de réformer en profondeur la formation initiale des professeurs des écoles en permettant un temps de formation plus important après le concours et avant la prise de poste devant les élèves.
Devant le Sénat le 1 er mars dernier, Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, a d'ailleurs évoqué l'idée d'un recrutement des professeurs des écoles à bac + 3 avec une formation professionnalisante de deux ans . Une telle organisation de la formation initiale ne remettrait pas en cause un métier d'enseignant à niveau bac + 5. Mais elle permet d'envisager un concours de pré-admission se déroulant à la fin du premier cycle des études supérieures qui permettrait d'intégrer ces écoles de formation sous le statut d'enseignant stagiaire. Une épreuve clôturant les deux années de formation professionnalisante au sein de ces écoles permettrait la titularisation.
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement ( COM-35 ) visant à préciser le contenu des conventions conclues entre une école supérieure du professorat des écoles et un établissement d'enseignement supérieur. Il s'agit, d'une part, de sécuriser et de faciliter le parcours des élèves de ces écoles supérieures notamment en cas d'échec au concours ou de changement d'orientation en cours de scolarité. D'autre part, ces conventions prévoient également les conditions dans lesquelles un master peut leur être délivré. En l'absence de toute évolution sur le positionnement du concours dans la formation initiale, ce diplôme reste indispensable pour s'inscrire au concours de professeur des écoles.
La commission a également adopté un amendement ( COM-18 rect. ter . ) d'Annick Billon renforçant la formation continuée des enseignants du premier degré au cours des trois années suivant leur titularisation, afin de compléter leur formation initiale.
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 5
Coordination liée à la création des
écoles supérieures
du professorat des écoles
Cet article réalise diverses coordinations rendues nécessaires par la création des écoles supérieures du professorat des écoles .
En coordination avec la création des écoles supérieures du professorat des écoles qui retire aux INSPÉ la compétence de formation initiale et continue sur le premier degré, ces derniers sont renommés « instituts nationaux supérieurs du professorat du second degré ». Cet article réalise les coordinations nécessaires dans le code de l'éducation à la suite de ce changement de dénomination.
La commission a adopté cet article sans modification .
Article 6
Création d'un service public de soutien
scolaire
Cet article vise à créer un service public de soutien scolaire, dont l'organisation est assurée par le ministère de l'éducation nationale.
La commission a adopté deux amendements du rapporteur intégrant les fondations parmi les acteurs de ce service public, visant à renforcer les conditions de probité et rappelant l'obligation de neutralité des personnes qui participent à ce service public .
L'article L. 111-1 du code de l'éducation prévoit la possibilité pour les élèves de bénéficier d'actions de soutien individualisé. L'article L. 311-3-1 du même code précise qu' « à tout moment de la scolarité obligatoire, lorsqu'il apparaît qu'un élève risque de ne pas maîtriser les connaissances et les compétences indispensables à la fin d'un cycle, le directeur d'école ou le chef d'établissement met en place, dans des conditions fixées par le ministre chargé de l'éducation nationale, des dispositifs d'aide qui peuvent prendre la forme d'un programme personnalisé de réussite éducative » .
L'article 6 de la proposition de loi complète ces dispositions en instaurant un service public de soutien scolaire. Ce dernier s'appuie sur des professeurs volontaires, des associations, ainsi que sur la réserve éducative créée par l'article 7 de la proposition de loi.
Pour le rapporteur, la création de ce service public doit être l'occasion de mettre en cohérence et en lumière l'ensemble des dispositifs de soutien scolaire de l'éducation nationale parfois mal connus des familles : activités pédagogiques complémentaires, dispositif « devoirs faits », stages de réussite proposés durant les vacances aux élèves de l'école élémentaire au lycée, vacances apprenantes...
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté deux amendements : le premier ( COM-30 ) intègre les Fondations à la liste des acteurs pouvant être sollicités pour participer à ce nouveau service public. En effet, un certain nombre d'entre elles mènent des actions de soutien scolaire.
Le second ( COM-31 ) instaure des conditions de probité à respecter pour les personnes participant au service public du soutien scolaire identiques à celles qui s'imposent à toute personne qui intervient ou exerce une fonction même occasionnelle au sein d'un accueil collectif de mineurs. Est notamment exclue toute personne condamnée de manière définitive pour l'un des crimes ou délits relatifs aux atteintes à la vie et atteintes à l'intégrité physique et psychique - à l'exception des atteintes involontaires -, à la mise en danger de la personne, aux atteintes aux libertés de la personne, aux atteintes à la dignité de la personne, aux appropriations frauduleuses, à des destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes, aux atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation et au terrorisme.
Cet amendement rappelle l'obligation de neutralité prévue par l'article 1 er de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République : toute personne participant à l'exécution d'un service public doit respecter cette obligation. De manière plus spécifique en matière éducative, la Cour administrative d'appel de Lyon a jugé dans un arrêt du 23 juillet 2019 que toute personne intervenant à l'intérieur de locaux scolaires et qui participe à des activités similaires à celles des personnels enseignants est tenue de respecter le principe de neutralité religieuse dans les mêmes conditions que les enseignants et les autres agents publics du service public de l'éducation.
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 7
Création de la réserve éducative
Cet article crée la réserve éducative chargée de contribuer au service public du soutien scolaire .
L'article 7 institue une réserve éducative, partie de la réserve civique prévue par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté. Ses membres, qui doivent être majeurs, sont chargés de contribuer au service public du soutien scolaire nouvellement institué.
La réserve civique
Selon l'article premier de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, « la réserve civique offre à toute personne volontaire la possibilité de servir les valeurs de la République en participant, à titre bénévole et occasionnel, à la réalisation de projets d'intérêt général ». Elle comporte des réserves « thématiques », parmi lesquelles la réserve citoyenne de défense et de sécurité, les réserves communales de sécurité civile et les réserves citoyennes des services d'incendie et de secours, la réserve citoyenne de la police nationale, la réserve citoyenne de l'éducation nationale mise en place en mai 2015 pour transmettre et faire vivre les valeurs de la République à l'école ou dans le cadre des activités périscolaires, la réserve citoyenne pour la cohésion des territoires.
Outre un amendement rédactionnel ( COM-34 ) du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-20 précisant que les membres de la réserve éducative doivent être titulaires du baccalauréat.
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 7 bis (nouveau)
Développement de la
bivalence
Cet article additionnel encourage le développement, sur la base du volontariat pour les futurs enseignants et enseignants en exercice, de compétences bivalentes et leurs mises en oeuvre au sein des établissements du second degré .
La bivalence permet à un enseignant du second degré d'avoir en charge deux matières différentes. Cet article additionnel issu de l'amendement COM-6 rect. bis d'Olivier Paccaud élargit le contenu des formations de préparation au concours de recrutement des métiers du professorat et de l'éducation à l'acquisition de compétences bivalentes, pour les étudiants qui le souhaitent. Par ailleurs, le plan de recrutement des personnels, prévu à l'article L. 911-2 du code de l'éducation, doit prévoir des mesures favorisant le recrutement d'enseignants bivalents. Enfin, des formations permettant à un enseignant d'acquérir des compétences bivalentes sont également encouragées dans le cadre de la formation continue.
Le rapporteur souligne que le recours à des enseignants en charge de deux matières différentes dans le secondaire a précédemment existé en France : le corps des professeurs d'enseignement général au collège n'a été mis en extinction qu'à partir de 2003.
Cette double compétence existe également dans un certain nombre de pays. Dans son avis du 3 mars dernier sur la formation initiale et le recrutement des professeurs des premier et second degrés, le conseil supérieur des programmes évoque même une « tendance à la "multivalence" pour les enseignants du second degré. Les candidats choisissent des disciplines "majeures" et des disciplines "mineures" pendant leur formation initiale, ce qui leur permettra de se présenter à plusieurs concours et de couvrir plusieurs enseignements, en général deux, une fois en poste dans les établissements » .
Le rapporteur estime que le développement de la bivalence permet un décloisonnement des différents champs des savoirs et peut participer à renforcer l'attractivité du métier d'enseignant en offrant une nouvelle perspective d'évolution professionnelle. Enfin, en permettant à un enseignant d'effectuer plus d'heures de cours devant les élèves au sein d'un même établissement, la bivalence réduit les affectations de personnels partagés entre plusieurs établissements.
La commission a adopté cet article additionnel .
Article 7 ter (nouveau)
Mention du respect de
l'élève et de l'étudiant
comme composante de
l'égalité des chances
Cet article additionnel vise à préciser que le respect de l'élève et de l'étudiant est une composante de l'égalité des chances .
Il existe un consensus au sein de la communauté éducative pour mieux prendre en compte le bien-être de l'élève, dans un contexte de post-crise sanitaire aux conséquences significatives sur la santé mentale de certains élèves 14 ( * ) , de travail sur l'amélioration du climat scolaire et de lutte contre le harcèlement scolaire. La circulaire du 29 juin 2022 - première circulaire de rentrée de Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse -, fait de « l'excellence, l'égalité et le bien-être les objectifs majeurs de cette année scolaire » et rappelle que le « bien-être implique une attention soutenue à chacun de nos élèves, dans une ouverture à l'autre et au monde » .
Cet article additionnel, introduit par l'amendement COM-13 rect. de Stéphane Sautarel, inscrit le bien-être de l'élève et de l'étudiant comme composante de l'égalité des chances à l'article L. 111-1 du code de l'éducation, consacré aux principes, valeurs et objectifs de l'institution scolaire.
La commission a adopté cet article additionnel .
Article 8
Création des territoires ruraux à besoins
éducatifs particuliers
Cet article vise à accorder aux écoles et établissements scolaires situés en zone de revitalisation rurale les mêmes moyens que ceux situés en réseau d'éducation prioritaire.
Sur proposition du rapporteur, la commission a réécrit cet article pour créer les territoires ruraux à besoins éducatifs particuliers .
La spécificité des territoires ruraux est très peu présente dans le code de l'éducation, témoignant, pendant de nombreuses années, de l'absence de prise en compte par le ministère de l'éducation nationale de la ruralité. L'article L. 111-1 du code de l'éducation précise seulement que « le service public de l'éducation nationale doit contribuer à l'égalité des chances et à la lutte contre les inégalités sociales et territoriales » .
L'article 8 de la présente proposition de loi permet aux écoles et établissements scolaires situés dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) de bénéficier de plein droit des dispositifs de l'éducation prioritaire (REP).
Les écoles et établissements situés en REP et REP + bénéficient de moyens supplémentaires : dédoublement des classes de grande section de maternelle au CE1, heures bonifiées pour permettre des heures de concertation des équipes pédagogiques au primaire, dotations horaires supplémentaires.
Sur proposition du rapporteur ( COM-32 rect .), la commission a créé les territoires ruraux à besoins éducatifs particuliers qui bénéficient de moyens et de dispositifs spécifiques. Ce nouvel outil, à la main des recteurs, est plus pertinent que le recours aux ZRR, dispositif fiscal qui couvre un territoire très vaste : 51 % des communes françaises en bénéficient. Par ailleurs, le régime des ZRR arrive à échéance le 31 décembre 2023. Enfin, un certain nombre de mesures dont bénéficient les réseaux d'éducation prioritaire ont peu de sens dans les territoires ruraux, à l'image du dédoublement précité des classes.
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 9
Moratoire sur la fermeture d'écoles dans les aires
urbaines de moins de 5 000 habitants en cas d'opposition du
conseil municipal
Cet article vise à recueillir l'avis préalable du conseil municipal d'une commune située dans une unité urbaine de moins de 5 000 habitants dans laquelle une fermeture de classe est envisagée par les services académiques à la rentrée suivante et permet un moratoire sur cette fermeture en cas de désaccord du conseil municipal .
Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement de réécriture globale qui modifie le calendrier de la procédure. Elle a également prévu un moratoire de trois ans en cas d'opposition de ces conseils municipaux à la fermeture d'une classe .
En application de l'article L. 212-1 du code de l'éducation qui reproduit l'article L. 2121-30 du code des collectivités territoriales, le conseil municipal décide de la création et de l'implantation des écoles et classes élémentaires et maternelles de l'enseignement public, après avis du représentant de l'État dans le département. En début de son second quinquennat, le Président de la République s'est engagé à ce qu'aucune fermeture d'école dans les territoires ruraux n'ait lieu sans l'accord du maire.
Si la suppression d'une école relève d'une décision du conseil municipal, la fermeture d'une classe, dès lors qu'elle n'entraîne pas la suppression de l'école, ne nécessite pas de décisions du conseil municipal : cela relève de la compétence du directeur académique des services de l'éducation nationale.
L'article 9 du texte prévoit que, dans les communes n'appartenant pas à une unité urbaine ou appartenant à une unité urbaine de moins de 5 000 habitants, la fermeture d'une classe nécessite l'accord du conseil municipal. En cas de désaccord, un moratoire est prononcé sur cette fermeture.
Sur proposition du rapporteur ( COM-33 ), la commission a reculé d'un mois - soit le 15 janvier au lieu du 15 décembre initialement prévu dans le texte - la date limite avant laquelle les services académiques doivent solliciter l'avis du conseil municipal. Une date fixée au 15 décembre réduit fortement le temps dont disposent les services académiques pour élaborer leur pré-projet de carte scolaire. Elle a également introduit un délai d'un mois - soit au 15 février au plus tard - dont dispose le conseil municipal pour se prononcer, à défaut l'avis étant réputé favorable. Ces dates permettent de conserver dans son ensemble le calendrier actuel d'élaboration de la carte scolaire. Celui-ci a des conséquences pour le mouvement des enseignants - connaissance des postes disponibles, candidatures, affectations - et ne peut donc pas glisser de manière trop importante vers la fin de l'année scolaire.
Par ailleurs, la commission a adopté un sous-amendement ( COM-36 ) d'Annick Billon prévoyant qu'en cas de désaccord du conseil municipal d'une commune concernée par cet article sur la fermeture d'une classe, celle-ci ne peut pas être fermée pendant les trois années suivantes.
La commission a adopté cet article ainsi modifié .
Article 10
Neutralité religieuse des personnes participant
au service public
de l'éducation
Cet article vise à étendre aux personnes qui participent au service public de l'éducation, y compris lors des sorties scolaires, l'interdiction du port de signes et tenues par lesquels une personne manifeste de manière ostensible son appartenance religieuse .
Le Sénat s'est prononcé à plusieurs reprises sur la nécessité d'étendre aux personnes concourant au service public de l'éducation - notamment les accompagnants de sorties scolaires - la neutralité religieuse.
Le rapport 15 ( * ) de Max Brisson sur la proposition de loi tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l'éducation rappelle que la sortie scolaire, temps pédagogique et obligatoire, est une projection de la salle de classe en dehors de l'enceinte scolaire. La sortie scolaire constitue ainsi une activité liée à l'enseignement, identique sur ses principes et sa mission, à celle se déroulant dans la salle de cours.
Dans son avis de décembre 2013, le Conseil d'État, à la suite d'une saisine du Défenseur des droits sur l'application du principe de neutralité religieuse dans les services publics, a estimé que les parents d'élèves sont des usagers du service public. Dès lors, en l'état actuel du droit, ils ne sont pas soumis à l'obligation de neutralité religieuse. Toutefois, le Conseil d'État a précisé que « les exigences liées au bon fonctionnement du service public de l'éducation peuvent conduire l'autorité compétente, s'agissant des parents d'élèves qui participent à des déplacements ou des activités scolaires, à recommander de s'abstenir de manifester leur appartenance ou leurs croyances religieuses ». Aujourd'hui, il revient aux directeurs d'école ou aux chefs d'établissement de décider si les accompagnants de sorties scolaires doivent respecter le principe de neutralité. Les décisions peuvent donc être différentes entre deux écoles ou établissements d'une même commune, rendant celles-ci peu compréhensibles pour les élèves, leurs parents et les élus locaux.
La commission a adopté cet article sans modification .
Article 11
Obligation du port de l'uniforme pour les
élèves des classes primaires, collèges et
lycées
Cet article impose le port d'un uniforme, dont les caractéristiques sont précisées par le règlement intérieur de l'établissement, pour les élèves des classes primaires, collèges et lycées publics, privés sous contrat, ainsi que ceux scolarisés dans des écoles privées liées par un contrat d'association simple .
À l'exception de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation, relatif à l'interdiction du port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse, le code de l'éducation ne contient pas de dispositions régissant la tenue vestimentaire des élèves.
S'il existe des circulaires ou textes ministériels sur la tenue vestimentaire, ceux-ci rappellent seulement qu'il incombe aux élèves, au titre de leurs obligations, le port d'une « tenue vestimentaire convenable » (charte des règles de civilité du collégien), ou encore que le règlement intérieur peut interdire les « tenues incompatibles avec certains enseignements, susceptibles de mettre en cause la sécurité des personnes ou les règles d'hygiène ou encore entraîner des troubles de fonctionnement dans les établissements » (circulaire du 1 er août 2011 relative au règlement intérieur dans les établissements publics locaux d'enseignement).
Le port d'une tenue d'établissement uniforme peut contribuer à apaiser le climat scolaire et encourager l'émergence d'un sentiment d'appartenance au sein d'une communauté scolaire. Il apporte également une solution juridique aux chefs d'établissement face à la montée « de signes religieux par destination qui peuvent le devenir par une intention que leur prête leur auteur : un bandana n'est pas un signe religieux, mais il peut le devenir » 16 ( * ) .
Il convient de noter que le texte prévoit que les élèves sont dispensés du port de l'uniforme à l'occasion des spectacles joués au sein de l'établissement, y compris les répétitions, ainsi que les évènements qui leur sont liés.
La commission a adopté cet article sans modification .
Article 12
Recevabilité financière
Cet article permet d'assurer la recevabilité financière de la proposition de loi .
L'article 13 de la proposition de loi assure la recevabilité financière de la proposition de loi au titre de l'article 40 de la Constitution.
La commission a adopté cet article sans modification .
*
* *
En conséquence, la commission de la culture, de
l'éducation
et de la communication a adopté la proposition de
loi ainsi modifiée
.
EXAMEN EN COMMISSION
MERCREDI 5 AVRIL 2023
M. Laurent Lafon , président . - Nous poursuivons nos travaux par l'examen du rapport de notre collègue Jacques Grosperrin sur la proposition de loi (PPL) pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité, déposée par Max Brisson et ses collègues du groupe Les Républicains.
Je vous rappelle que l'examen de ce texte en séance publique est programmé mardi 11 avril prochain, en fin d'après-midi.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - Mes chers collègues, notre système éducatif n'arrive plus à remplir l'ensemble des missions que lui a confiées la Nation.
Malgré d'importants efforts financiers, notamment en faveur de l'éducation prioritaire, les comparaisons internationales mettent en lumière des résultats scolaires alarmants pour nos élèves. La France reste ainsi l'un des pays où l'origine sociale conditionne le plus le parcours scolaire des enfants.
Les élèves français sont surreprésentés parmi les élèves européens les plus faibles en mathématiques et en sciences. Selon l'étude Timss ( Trends in Mathematics and Science Study ) de 2019, un élève français sur sept ne maîtrise pas les compétences élémentaires en mathématiques.
Le ministère de l'éducation nationale a mené une étude intergénérationnelle éloquente. La même dictée a été donnée à des élèves de CM2 en 1987, 2007, 2015 et 2021 ; 27,5 % des élèves de 2021 font plus de vingt-cinq fautes, alors qu'ils étaient 13 % en 2007 et seulement 7 % en 1987. Quant aux meilleurs élèves, qui font deux fautes ou moins, ils étaient 13 % en 1987 et ne sont plus que 6 % en 2007 et 2 % en 2021.
L'éducation nationale doit répondre à un autre défi majeur : déployer une politique nationale qui tienne compte de la diversité des territoires. Le rapport d'information de nos collègues Laurent Lafon et Jean-Yves Roux sur les nouveaux territoires de l'éducation a montré combien la donnée ruralité n'était pas prise en compte : la politique scolaire rurale reste une politique par défaut.
Or « les parcours scolaires post-collège et post-baccalauréat d'une partie des jeunes résidant dans les territoires ruraux sont marqués par des [...] difficultés comparables par leur ampleur à celles qui caractérisent les élèves de l'éducation prioritaire » : c'est ce qu'a mis en lumière le rapport de la mission « Territoires et réussite » confiée à Pierre Mathiot et Ariane Azéma.
On constate également un sentiment d'appartenance à une communauté scolaire moindre chez les élèves français par rapport à leurs homologues européens. En 2018, presque un élève français sur trois disait se sentir comme un étranger au sein de son établissement scolaire. Non seulement cette proportion est nettement supérieure à la moyenne de l'OCDE, mais, surtout, elle est en forte augmentation. Cela explique peut-être pourquoi les élèves français sont aussi parmi ceux qui disent coopérer le moins entre eux au sein de leur établissement. Le sentiment d'appartenance à une communauté scolaire permet pourtant l'émergence d'un climat scolaire serein et dynamise la vie d'un établissement.
Enfin, les atteintes à la laïcité à l'école restent élevées. Pour la première fois, le ministre a reconnu l'existence de « signes religieux par destination ».
Face à ces constats, ce texte présenté par le groupe Les Républicains propose plusieurs pistes pour améliorer notre système éducatif. Il sera également l'occasion de débattre avec le ministre d'un certain nombre de recommandations de notre commission.
La proposition de loi se structure autour de quatre axes.
Elle vise tout d'abord à renforcer l'autonomie des établissements scolaires. Le constat fait par la Cour des comptes dans son rapport de janvier 2023 est brutal : « L'ensemble des rapports sur la mixité sociale dans les établissements tout autant que les résultats aux examens nationaux [...] montrent à quel point l'uniformité nationale formelle peut s'accommoder de larges inégalités réelles de traitement des élèves. »
L'article 1 er ouvre la voie à l'expérimentation d'une contractualisation entre la collectivité territoriale - si elle le souhaite -, les services académiques et l'établissement volontaire dans le but d'accroître l'autonomie de ce dernier. Ce surcroît d'autonomie porte sur cinq domaines : le recrutement des élèves, l'affectation des personnels, l'allocation et l'utilisation des moyens budgétaires, l'organisation pédagogique et les dispositifs d'accompagnement des élèves. En contrepartie, des objectifs en matière de réussite et de mixité scolaires sont définis, assortis d'une évaluation régulière. Les écoles qui souhaitent participer à cette expérimentation doivent acquérir le statut d'établissement public.
Je connais l'attachement de nos élus locaux à leurs écoles. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement prévoyant un accord préalable de la commune avant tout changement de statut de son école.
L'article 2 de la proposition de loi confère au directeur d'école une autorité hiérarchique. Je vous proposerai toutefois de limiter ce dispositif aux écoles d'une certaine taille. Le seuil pourrait être fixé par décret à neuf classes. Pour les écoles comptant peu de classes et dont les équipes pédagogiques sont restreintes, l'autorité hiérarchique me semble moins pertinente.
Deuxième axe de ce texte : ses auteurs souhaitent garantir l'égalité des chances pour tous les élèves.
L'article 3 permet de déroger aux règles d'affectation des enseignants pour créer, par exemple, des contrats de mission.
Les mutations, dans l'éducation nationale, se font sur la base du « barème », essentiellement fondé sur l'ancienneté, auquel s'ajoutent des règles de priorité réglementaires.
Pour un enseignant expérimenté, qui a enfin obtenu le poste qu'il souhaitait, points acquis après points acquis chaque année, changer d'établissement est un pari ; il n'est en effet pas certain d'obtenir un poste semblable par la suite. Certains postes peu attractifs, qu'il s'agisse d'établissements situés dans des territoires isolés ou réputés difficiles, sont plus pénalisés encore par ce système de mobilité.
Le contrat de mission, fondé sur une logique d'engagement, permettrait à un enseignant exerçant pendant une durée et dans des établissements déterminés de bénéficier par exemple, à la fin de sa mission, d'une bonification de points pour le choix du poste suivant.
Je tiens à le préciser, il ne s'agit pas de lui garantir un droit de retour dans son établissement d'origine ; cela imposerait trop de contraintes dans la gestion du mouvement des mutations. Mais il s'agirait de lui garantir un « bonus » : un nombre de points élevé, par exemple, lors de sa prochaine demande d'affectation.
J'évoquerai un peu plus tard les articles 4 et 5.
L'article 6 prévoit la création d'un service public du soutien scolaire, organisé par l'éducation nationale.
Ce service public s'appuie sur des enseignants volontaires, des associations - je vous proposerai d'y ajouter les fondations -, ainsi que sur la réserve éducative que crée l'article 7.
À mes yeux, la création de ce service public doit également être l'occasion de mettre en cohérence l'ensemble des dispositifs déjà existants : activités pédagogiques complémentaires, dispositifs devoirs faits et vacances apprenantes, stages de réussite et de remise à niveau.
Les articles 8 et 9 concernent plus spécifiquement les territoires ruraux.
L'article 8 permet aux établissements scolaires situés en zone de revitalisation rurale de bénéficier des mêmes dispositifs que ceux qui font partie d'un réseau d'éducation prioritaire (REP). Je vous proposerai une nouvelle rédaction de cet article pour mieux prendre en compte la spécificité des territoires ruraux : il n'y a, par exemple, pas beaucoup de sens à demander le dédoublement des classes en zone rurale. En revanche, d'autres dispositifs pourraient être utiles, comme l'aide à l'orientation ou l'attribution de moyens spécifiques aux lycées : nos collègues Max Brisson, Annick Billon et Marie-Pierre Monier ont souligné les difficultés qu'ont de petits établissements à mettre correctement en place la réforme du lycée.
L'article 9 prévoit une consultation du conseil municipal dans les communes de moins de 5 000 habitants en cas de projet de fermeture d'une classe. Il ouvre également la possibilité d'un moratoire sur cette fermeture en cas d'opposition du conseil municipal.
Les écoles jouent un rôle essentiel dans la dynamisation d'un territoire ; or la confection de la carte scolaire par les services académiques est trop souvent abordée via un prisme comptable et statique. Elle ne prend pas en compte les projets d'urbanisme ou les dispositifs d'attractivité que mettent en place les élus locaux à destination des élus locaux.
À ce sujet, j'ai entendu, comme vous, la Première ministre annoncer une élaboration désormais pluriannuelle de la carte scolaire, en meilleure concertation avec les élus locaux. C'est une demande ancienne du Sénat. Notre commission sera, j'en suis sûr, particulièrement attentive à la mise en oeuvre de cette annonce.
Le troisième axe de cette proposition de loi concerne l'amélioration de la transmission des savoirs fondamentaux. Actuellement, les spécificités de l'enseignement du premier degré sont mal prises en compte lors de la formation initiale.
L'article 4 transforme profondément la formation des enseignants du premier degré - celle des enseignants du second degré reste inchangée au sein des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé).
Il crée des écoles supérieures du professorat des écoles placées sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale. Celles-ci prépareront les étudiants au concours et formeront les enseignants stagiaires et les enseignants du premier degré. Je vous proposerai un amendement visant à sécuriser le parcours des jeunes préparant le concours au sein de ces écoles, en cas d'échec à celui-ci ou s'ils souhaitent se réorienter.
J'en viens au quatrième et dernier axe de ce texte : réaffirmer la laïcité et renforcer le sentiment d'appartenance au sein d'une communauté scolaire.
L'article 10 interdit le port de signes religieux ostensibles pour les accompagnants de sorties scolaires ; nous avons déjà débattu de cette mesure. Je tiens à le rappeler, les sorties scolaires sont un temps de classe obligatoire, hors les murs. La neutralité propre à l'école doit également s'y appliquer.
L'article 11 rend obligatoire le port de la tenue scolaire ou tenue d'établissement à l'école, au collège et au lycée publics et privés sous contrat. Régis Debray, en 2015, devant la commission d'enquête sénatoriale pour « Faire revenir la République à l'école », déclarait que « l'uniforme scolaire n'est pas ressenti par les élèves comme une brimade, mais engendre un sentiment d'appartenance pouvant même aller jusqu'à une certaine fierté ». Il peut en tout cas contribuer à améliorer le climat scolaire.
L'objet de ce texte ambitieux est de changer en profondeur notre école, de limiter les injonctions centralisées et de mieux prendre en compte les besoins des élèves.
M. Laurent Lafon , président . - Avant d'ouvrir la discussion générale, j'invite notre rapporteur à définir le périmètre retenu pour l'application de l'article 45 de la Constitution.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - Ce périmètre pourrait comprendre les dispositions relatives à l'organisation du système scolaire et à la formation des enseignants et des futurs enseignants. En revanche, je vous propose de considérer que ne présentent aucun lien, même indirect, avec le texte les dispositions relatives à l'organisation de l'enseignement supérieur.
Mme Marie-Pierre Monier . - Je remercie notre rapporteur pour le travail accompli en peu de temps et les auditions fort intéressantes qui ont été organisées ; j'apprécie que nous y ayons été invités. Certains thèmes abordés convergent avec ceux qu'a à traiter notre mission d'information sur l'autonomie des établissements scolaires.
Je remercie aussi Max Brisson de nous offrir ainsi un temps de débat sur nos politiques éducatives. Vous vous doutez bien que coexistent dans notre assemblée des visions de l'école différentes ; nos désaccords pourront s'exprimer.
Les auditions auxquelles j'ai pris part ont mis en lumière les limites de la faisabilité de certains articles ; c'est d'ailleurs probablement, monsieur le rapporteur, ce qui vous a conduit à déposer un certain nombre d'amendements. Elles ont également révélé les fortes réticences suscitées par plusieurs des dispositions de ce texte. Or il me semble qu'un chantier d'une telle ampleur ne peut s'engager à contre-courant de l'ensemble de l'écosystème scolaire.
Si aucun de nous ne prétend que la situation actuelle est parfaite, nous pensons, pour notre part, que c'est en renforçant les moyens alloués à notre école publique, via notamment des effectifs enseignants à la hauteur des besoins, et en améliorant l'attractivité de la profession que nous pourrons avancer dans la bonne direction.
Parmi lesarticles, plusieurs d'entre eux constituent pour mon groupe une ligne rouge - j'en citerai quatre.
L'article 1 er prévoit l'expérimentation d'une autonomie renforcée des établissements scolaires des premier et second degrés. Au-delà des fragilités juridiques de cet article, les établissements publics autonomes de l'éducation ne pouvant être créés pour une durée temporaire dans le cadre d'une expérimentation, cette vision s'inscrit dans une logique de libéralisation de l'école et de mise en concurrence des établissements, à rebours du modèle public républicain qui nous est cher.
L'article 2 confère une autorité hiérarchique aux directeurs et directrices d'école - nous avons déjà eu l'occasion de discuter de ce sujet et d'affirmer nos positions lors de l'examen de la proposition de loi Rilhac. Nous sommes, pour notre part, attachés au fonctionnement collégial des écoles du premier degré, celui des pairs parmi les pairs.
L'article 3 met en place des contrats de mission conclus entre recteurs et enseignants. Le cadre dérogatoire au droit commun de la fonction publique qui nous est ici proposé n'est pas acceptable, d'autant qu'il ne résoudra d'aucune manière le problème du manque d'attractivité de certains établissements ou territoires.
L'article 10 étend le principe de neutralité et l'interdiction du port ostensible de signes religieux aux accompagnants de sorties scolaires. Mon groupe s'est toujours opposé à une telle extension de ces obligations.
Au-delà de ces lignes rouges, plusieurs articles de cette proposition de loi sont l'occasion de soulever des problèmes pertinents, même si nous ne rejoignons pas toujours les solutions proposées.
Ainsi, en ce qui concerne la séparation de la formation initiale des enseignants des premier et second degrés prévue par les articles 4 et 5, il nous paraît dommageable de mettre fin à la culture professionnelle commune que permettent les Inspé et d'éloigner la formation des enseignants du premier degré du monde universitaire et de la recherche - il en a été question lors des auditions.
L'article 6 pose les jalons d'un service public du soutien scolaire. Il y a là un signal positif, qui répond à une demande sociale très forte. Nous considérons toutefois que l'exigence d'un soutien scolaire de qualité impose d'en confier en premier lieu la responsabilité aux enseignants. Cela doit bien entendu se faire dans un cadre qui n'engendre pas une charge de travail supplémentaire : le représentant des syndicats de chefs d'établissement nous a dit qu'il était impossible d'aller au-delà des deux heures supplémentaires que les enseignants sont obligés d'accepter. Il faudra donc des effectifs supplémentaires pour assurer ce service public.
L'article 7 prévoit la mise en place d'une réserve éducative pour nourrir ce service public ; or une telle réserve nous paraît redondante par rapport à la réserve citoyenne de l'éducation nationale, qui existe déjà.
À propos de l'article 8, nous nous interrogeons quant aux difficultés propres aux écoles rurales. Si elles sont bien réelles, elles ne sont pas de la même nature que celles des écoles situées en REP et nécessitent à notre sens une approche spécifique.
Nous partageons la préoccupation exprimée à l'article 9. Dans l'ensemble de nos territoires ruraux, les alertes se sont multipliées concernant les fermetures de classes prévues à la rentrée prochaine. Mes chers collègues, nous vous avions alertés, lors du vote du projet de budget pour 2023, sur les conséquences des 1 500 suppressions de postes d'enseignants. Un tel cadre produit mécaniquement des sacrifices lors de l'élaboration de la carte scolaire !
En ce qui concerne l'article 11, qui prévoit la mise en place d'une tenue vestimentaire uniforme qui serait - du moins le supposons-nous - à la charge des familles, nous considérons que telle n'est pas la bonne réponse à apporter au problème des inégalités sociales et scolaires. Cette disposition ne répond pas non plus à une demande des équipes de direction ou des équipes enseignantes, qui se retrouveraient d'ailleurs, le cas échéant, en première ligne pour contrôler l'effectivité du port de cette tenue.
Pour toutes ces raisons, et notamment du fait des lignes rouges que j'ai évoquées, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se prononcera contre l'adoption de ce texte. Mais nous aurons l'occasion de poursuivre ce débat et de vous faire part de nos propositions en séance.
Mme Céline Brulin . - Cette proposition de loi a le mérite de remettre au centre des discussions le débat sur l'école. Ce débat, il faut l'avoir, et nous l'aurons en séance publique. Mais je trouve ce texte plein de contradictions.
On y découvre, par exemple, qu'il faudrait travailler à renforcer l'appartenance à une communauté, via notamment le port de l'uniforme. Or nous sommes plutôt de ceux qui choisissent l'école de la République face au communautarisme.
Les auteurs de cette PPL proposent de développer l'éducation prioritaire en milieu rural ; et des problèmes y compris sociaux se posent en effet tout particulièrement en milieu rural. N'est-ce pas contradictoire avec l'idée, qui est par ailleurs la vôtre, selon laquelle le principe même de l'éducation prioritaire - accorder davantage de moyens à ceux qui en ont le plus besoin - serait en échec ?
Il me semble aussi qu'il y a une contradiction entre votre interprétation de la laïcité et votre volonté de confier le soutien scolaire à des bénévoles et au milieu associatif, dont on ne sait pas toujours quels vont être la philosophie et les objectifs.
Au-delà de ces contradictions, cette proposition de loi apporte à nos yeux de mauvaises réponses à de véritables questions. Il est, par exemple, proposé de résorber les inégalités en les accroissant ; mais nous ne sommes pas, nous, pour une école à la carte : nous sommes pour l'école de la République. Les contrats de mission proposés aux enseignants sont peu ou prou la nouvelle version du dispositif Éclair - école, collège, lycée, ambition, innovation et réussite -, qui a fait la preuve de son échec. Nous vivons par ailleurs une grave crise de recrutement des enseignants ; si le ministère de l'éducation nationale peine à y faire face, comment des établissements relèveraient-ils localement ce défi ?
Concernant la hiérarchie, j'entends plus d'enseignants qui attendent un soutien de leur hiérarchie que d'enseignants qui voudraient exercer une hiérarchie sur leurs collègues !
Je note enfin que des amendements ont été déposés visant à « amortir » un peu la colère que pourrait susciter cette proposition de loi si son contenu se répandait largement dans le pays. Je m'interroge d'ailleurs sur le timing de sa présentation - certes, nous ne sommes pas maîtres du calendrier des niches qui nous sont offertes. Mais notre pays est aujourd'hui très fracturé : faisons un effort pour ne pas en rajouter...
Une dernière question, provocatrice - mais l'auteur du texte connaît ma franchise et mon honnêteté : cette proposition de loi est-elle une commande du Gouvernement ?
M. Julien Bargeton . - Je remercie notre rapporteur : le travail accompli est très important. Cette proposition de loi embrasse beaucoup de sujets - et c'est là peut-être la première difficulté que je soulèverai - sans en même temps les aborder tous. Il est question d'organisation, d'égalité - mais à propos des territoires ruraux -, de laïcité, de formation. Mais pourquoi ne pas traiter la situation des territoires urbains, de la Seine-Saint-Denis par exemple, et des métropoles ? Quid des lycées professionnels ou de la question du harcèlement ? Le texte qui nous est soumis a donc vocation à embrasser un champ de questions très large et très général sans pour autant pouvoir tout traiter au fil de ses douze articles ; cela crée, me semble-t-il, une impression de déséquilibre.
On y trouve des éléments intéressants, parfois guère éloignés, d'ailleurs, de mesures que nous avons défendues : en matière d'expérimentation d'une forme d'autonomie éducative, par exemple, je citerai le plan pour Marseille ; je pense également au soutien scolaire. Chacun sait bien par ailleurs qu'il faut réfléchir à l'attractivité du métier d'enseignant : le ministre a fait des annonces sur les revalorisations salariales, mais il faut aussi poser la question de la formation, et notamment de l'équilibre entre formation stricto sensu et stage effectué en établissement.
Sur certains de ces sujets, encore une fois, nous pouvons trouver des terrains d'entente.
C'est certes un beau débat qui nous attend ; à y verser également des questions comme celles de l'autorité hiérarchique et du port du voile par les accompagnatrices, on risque néanmoins de multiplier les sujets polémiques sans pour autant atteindre à l'exhaustivité.
Le ministre a fait des annonces, sur la pluriannualité notamment : il faut donner de la prévisibilité à trois ans en matière d'ouvertures de classes.
J'aurais préféré que nous soyons saisis d'un texte limité à quelques points dont nous avons déjà débattu et sur lesquels il faut avancer - formation, soutien scolaire. En l'espèce, je ne suis pas sûr que l'on puisse espérer un consensus. Et il me semble que le Sénat aurait gagné à présenter une proposition de loi susceptible d'aboutir à une forme de convergence sur trois ou quatre points très concrets du quotidien.
Mme Annick Billon . - Je souhaite tout d'abord remercier l'auteur de cette proposition de loi, Max Brisson. Ce texte est le bienvenu, car la situation de l'école se détériore d'année en année : l'école ne joue plus son rôle d'ascenseur social, elle ne lisse ni ne corrige plus les inégalités - elle les creuse même parfois -, et ce alors même que la dépense nationale d'éducation est supérieure en France à la moyenne de l'OCDE. Une cheffe d'établissement nous a d'ailleurs dit, au cours de l'une des auditions, que les moyens dont elle disposait chutaient année après année.
Ce texte arrive donc dans un contexte où nous nous devons d'agir pour une école qui s'affaiblit.
Cette proposition de loi retravaillée par notre rapporteur, Jacques Grosperrin, apporte des réponses à des problèmes assez variés. Elle contient des dispositions intéressantes visant notamment à donner plus de liberté aux équipes pédagogiques. Il est ainsi proposé de passer d'une autorité fonctionnelle à une autorité hiérarchique.
Je souhaite préciser, à ce stade, que mes positions ne sont pas forcément toutes partagées par l'ensemble des commissaires du groupe Union Centriste. Reste que, globalement, nous sommes tous pour davantage d'autonomie et d'efficacité et pour rapprocher la décision du terrain.
Les précisions apportées par le rapporteur au dispositif du contrat de mission permettent de répondre aux biais éventuels et aux difficultés de gestion des ressources humaines qui auraient pu en découler.
La formation telle qu'elle est actuellement organisée ne répond pas à toutes les attentes ; là encore, les précisions du rapporteur nous semblent intéressantes.
Un mot sur la réserve éducative : il s'agit de compléter l'offre existante. Nous souhaitons toutefois qu'un niveau minimal de diplôme soit demandé - nous présenterons un amendement en ce sens. Concernant la redéfinition du rôle des collectivités locales, nous plaidons pour que celles-ci aient davantage de pouvoir pour ce qui est des fermetures de classes. Nous proposons donc un moratoire sur trois ans.
J'en viens aux articles 10 et 11.
Ce n'est pas la première fois que nous débattons de la neutralité religieuse applicable aux accompagnateurs de sorties scolaires. Les commissaires du groupe UC estiment majoritairement que la neutralité doit être de mise dans l'école hors les murs, qui est encore l'école.
Quant à l'article 11, qui prévoit le port obligatoire d'une tenue vestimentaire d'établissement scolaire, je n'y suis, à titre personnel, pas favorable. D'un côté, on veut donner davantage de liberté et réduire la verticalité ; d'un autre côté, on ferait peser une nouvelle obligation sur l'ensemble des établissements. De surcroît, la culture française n'a jamais été une culture d'uniforme - il est peut-être un peu trop tard pour cela... Quoi qu'il en soit, l'uniforme ne saurait être la solution à tous les problèmes de l'école. Et la question du financement reste posée si, comme c'était l'intention de départ, il n'est pas question de faire supporter aux familles le coût de l'uniforme : où prendra-t-on l'argent dans le budget de l'éducation nationale ?
Je souhaite pour conclure féliciter notre rapporteur : les améliorations certaines et les précisions qu'il apporte au texte vont nous permettre de le voter.
M. Bernard Fialaire . - Je félicite moi aussi le rapporteur et remercie Max Brisson pour cette proposition de loi. Je ne sais si la Première ministre la lui a commandée, mais je souhaiterais qu'il en soit ainsi : cela prouverait tout l'intérêt qu'elle porte à l'école. Dans le cas contraire, je salue son initiative : s'il est bien un sujet crucial, c'est celui de l'école de la République. La plus grande richesse de notre pays, en effet, ce sont ses ressources humaines. Et s'il y a bien un investissement majeur à réaliser pour rendre la France compétitive, c'est certainement dans l'éducation et dans la formation qu'il faut le faire.
Quoi qu'il en soit de nos visions de l'école respectives, nous partageons tous un objectif commun, celui de l'épanouissement et de la réussite de nos enfants. À supposer que la promesse républicaine d'égalité des chances se réalise, tous les problèmes seraient réglés, y compris celui de la laïcité : lorsque la République sera réenchantée, notre jeunesse n'aura plus besoin de se réfugier dans d'autres paradis...
J'attendais avec impatience le rapport qui nous avait été promis pour la fin du mois de mars par le ministre de l'éducation nationale sur la réforme des cartes scolaires et les effectifs des établissements. Il me semble qu'il n'a pas pour l'instant été publié.
Pour ce qui est de la formation, ma conviction est qu'il faut rétablir les écoles normales, qui avaient fait leurs preuves.
Quant à l'obligation de neutralité des accompagnants scolaires, j'y souscris également : à l'école, il y a des règles ; lorsque l'école s'ouvre à l'extérieur, elles doivent continuer de s'appliquer. Arrêtons de baisser la garde !
Mme Sylvie Robert . - Mais ce n'est pas ce que dit la loi !
M. Bernard Fialaire . - La loi est faite aussi pour évoluer... Je suis un fervent défenseur de cette neutralité.
Je ne suis pas contre l'uniforme, mais n'imaginons pas que cette disposition pourrait tout régler. Quid des chaussures, qui représentent un enjeu important ? Les élèves se distinguent aussi par ce qu'ils ont aux pieds... Je souscris néanmoins au message ainsi envoyé.
Je trouve intéressant de réunir autour d'une même table, via l'autonomie des établissements, les collectivités, communes, départements, régions, et les services de l'éducation nationale, un chef de file étant désigné pour éviter la cacophonie. L'égalité n'est pas l'uniformité : il faut des traitements différents par territoire et par école pour offrir à nos enfants l'égalité des chances.
Je suis par ailleurs pour le rétablissement d'une autorité hiérarchique dans l'école de la République.
Pour toutes ces raisons, les membres du RDSE penchent pour une vision pleine d'enthousiasme d'une école de la République neutre, laïque, gratuite et obligatoire.
Mme Monique de Marco . - Cette proposition de loi a le mérite de nous offrir un temps de débat ; pour le reste, sur le fond, les articles du texte sont autant de marqueurs de droite en matière d'éducation.
M. Max Brisson . - Ce n'est pas faux !
Mme Monique de Marco . - Mon sentiment, chers collègues de droite, est que c'est pour « tester » le ministre de l'éducation nationale que vous avez déposé cette proposition de loi. Je suis moi aussi curieuse, d'ailleurs, de connaître ses réponses...
Autant il est possible de partager l'état des lieux qui est posé, autant il est difficile d'être convaincu par vos propositions. Certaines sont intéressantes ; je pense aux dispositions relatives aux communes rurales ou au service public du soutien scolaire - ce sont des pistes à étudier. D'autres le sont beaucoup moins : ainsi des mesures dont nous avons déjà débattu concernant les directeurs d'école et la notion d'autorité hiérarchique. Revenir sur l'autorité fonctionnelle n'est pas ce que désirent les enseignants et les directeurs.
J'en viens à l'article 10 et à la question de la laïcité. La neutralité s'imposerait aux accompagnants bénévoles ponctuels de sorties scolaires. Or ceux-ci ne relèvent pas du service public de l'éducation nationale, et la mesure que vous proposez risque d'être complètement contreproductive, puisqu'elle revient à exclure des personnes au lieu de les impliquer dans la vie scolaire.
L'article 11 impose le port de l'uniforme afin, dites-vous, de renforcer une culture commune. Je souris en y lisant que « l'obligation mentionnée au présent alinéa n'est pas applicable aux spectacles, y compris les répétitions, joués par les élèves et aux événements qui leur sont liés ». Je m'interroge : quid du sport ? de la natation ? Cela risque de faire beaucoup de tenues à financer...
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre l'adoption de ce texte.
M. Max Brisson , auteur de la proposition de loi . - Tout d'abord, acceptez que je rassure Céline Brulin, quitte à désespérer Bernard Fialaire : il s'agit d'une véritable proposition de loi, et non pas, comme cela peut parfois arriver, du faux-nez de volontés gouvernementales. C'est le travail d'un parlementaire, avec toutes les imperfections que vous avez bien voulu aimablement relever, les détaillant avec beaucoup de délicatesse - je vous en remercie.
C'est un texte imparfait, mais un texte de conviction. Nous n'avons pas les mêmes convictions sur l'école, mais le clivage, lorsqu'il trouve à s'exprimer comme ce matin, est tout à fait républicain ; il nous honore. Je souhaite qu'il en soit ainsi dans l'hémicycle : que nous ayons un authentique débat. Oui, cette proposition de loi contient certains marqueurs de ma famille politique, et j'en suis fier. L'école mérite un débat politique, car, depuis au moins Jules Ferry et la IIIe République, l'école est un sujet politique de plein droit, avec ses irréductibles clivages. À force de chercher des convergences au nom du « en même temps », on finit dans un immobilisme total que, précisément, nous souhaitons combattre.
Je remercie notre rapporteur pour le travail qu'il a fourni. Cette proposition de loi, mérite bien des corrections ; il en a apporté un certain nombre. Je remercie nos collègues pour leurs amendements, en attendant la séance, qui sera l'occasion d'améliorer encore ce texte.
Notre commission ne cesse de s'interroger sur les moyens de répondre au constat d'une crise de l'école, constat qui ne fait plus débat. Le rapporteur a énuméré les indicateurs qui l'attestent. Ce qui me semble le plus important, c'est que le peuple français n'a plus totalement confiance dans son école ; or la construction de notre République reposait sur cette confiance : c'est elle qui est brisée.
Face à cette dégradation, la demande de moyens supplémentaires, que Marie-Pierre Monier a une nouvelle fois fortement exprimée, est posée par certains comme la solution. Mais c'est oublier que la France consacre 5,2 % de son produit intérieur brut (PIB) à l'école, que notre pays est, en ce domaine, au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE, qui est de 4,1 %, qu'au cours du quinquennat précédent le budget consacré à l'éducation a augmenté de 21 %, contre 11 % pendant le quinquennat du président Hollande...
Malgré cette augmentation continuelle des moyens, l'école peine à trouver un nouveau souffle. Les réformes de notre système éducatif ont échoué - c'est mon point de vue - parce qu'elles cherchent à aménager un système vertical, hiérarchisé, uniforme, oublieux des particularités des territoires et des établissements. Or aucune école, aucun collège, aucun lycée ne ressemble à l'autre, car nos territoires ne se ressemblent pas.
Voilà pourquoi il me paraît important - c'est une position forte, je comprends que l'on puisse y être opposé - de rompre avec une injonction permanente de moyens supplémentaires que n'accompagne aucune réforme structurelle. Il faut cesser, me semble-t-il, de dépenser sans repenser en profondeur l'organisation du service public de l'éducation nationale. Et je suis convaincu, comme beaucoup de mes collègues, qu'une plus grande autonomie des établissements scolaires et une plus grande liberté collective des équipes pédagogiques sont les leviers d'une sortie de crise. Je crois au contrat : fixer quelques règles communes et laisser la main, c'est-à-dire la liberté, aux équipes. Je comprends que d'autres, par goût de l'héritage, préfèrent circulaires, injonctions et contrats copiés-collés pilotés par le haut.
Le coeur de cette proposition de loi est de définir les conditions dans lesquelles une dose d'autonomie pourrait être expérimentée dans les établissements scolaires volontaires, les établissements publics autonomes d'éducation, dont le nombre serait plafonné au sein d'une académie. Ces établissements auraient la possibilité de conclure avec le rectorat et avec les collectivités des contrats portant sur l'organisation pédagogique, l'accompagnement des élèves, l'affectation des personnels, l'allocation et l'utilisation des moyens budgétaires ou le recrutement des élèves.
Des libertés nouvelles, diront certains ; non : des libertés retrouvées. Je vous signale en effet que circulaire après circulaire - la première, que l'on doit à Joseph Fontanet, date de 1973 -, loi après loi, toutes sensibilités politiques confondues, on n'a cessé d'insister sur la liberté et l'autonomie des établissements : la gauche comme la droite n'ont cessé de développer un corpus législatif et réglementaire où il est question d'autonomie et de liberté des établissements. Mais force est de constater qu'à chaque fois cette autonomie et cette liberté ont été encadrées, enserrées, réduites, rabougries par une technostructure qui ne les a jamais vraiment acceptées.
Il n'est pas ici question de porter un coup de canif à un modèle unitaire fondé sur une approche égalitaire de notre école, mais de constater que ce modèle a sombré en confondant unicité et uniformité. Au fond, il s'agit de faire confiance à celles et à ceux qui font vivre quotidiennement la mission éducative en repartant de leurs besoins, de leurs attentes, de leurs projets, pour donner un nouvel élan à notre école.
Donner plus de responsabilités aux enseignants nécessite aussi des moyens de mieux les préparer à l'exercice de leurs fonctions. La proposition de dissociation de la formation des enseignants des premier et second degrés part du constat suivant : ce n'est pas, de part et d'autre, le même métier. Apprendre aux élèves à lire, à écrire, à compter, à coder, c'est un métier particulièrement difficile, qui mérite une formation différente. Après tout, notre République a fonctionné ainsi pendant longtemps et ne s'en est pas plus mal portée... C'est peut-être pour satisfaire l'égalitarisme ambiant que l'on a, de fait, mis en difficulté un certain nombre de professeurs qui n'ont pas été bien formés ou l'ont été insuffisamment.
Cependant, cette liberté retrouvée n'est pas un but en soi. Le service public d'éducation doit également viser l'égalité des chances. Nos propositions sur le sujet - notamment la création d'un service public de soutien scolaire - devraient pouvoir nous rassembler. Le soutien scolaire dépend aujourd'hui d'officines privées ; il me semble important que cette mission soit portée par l'éducation nationale.
Depuis longtemps, nous menons une approche territorialisée dans le cadre des réseaux d'éducation prioritaire (REP) liée à la politique de la ville. Il est temps désormais d'avoir un regard sur les territoires ruraux qui souffrent également de la pauvreté, de l'enclavement et du décrochage scolaire.
Cette proposition de loi réaffirme, à partir des travaux de Céline Boulay-Espéronnier et de Jacqueline Eustache-Brinio, les valeurs fondamentales qui ont accompagné la création du service public de l'éducation, à savoir le partage d'une culture commune, fondement de notre vivre-ensemble, construite sur un strict respect de la laïcité.
Comme vous l'avez compris, je porte ce texte avec conviction. Sans doute est-il perfectible et vos amendements apporteront de judicieuses corrections. Ce qui m'importe, c'est que nous nous interrogions ensemble et que nous débattions ; cette proposition de loi est faite pour cela, pour sortir des sentiers battus.
M. Jacques-Bernard Magner . - Vous établissez un constat alarmant, en exprimant beaucoup de contre-vérités. Par exemple, vous dites que les Français n'ont pas confiance dans leur école ; cela est totalement faux : plus de 70 % des Français disent avoir confiance dans l'école publique. Nous ne devons pas avoir les mêmes sources d'information. Sans doute faut-il améliorer certaines choses, mais cette proposition de loi traite de sujets secondaires par rapport aux véritables problèmes de l'école.
Vous évoquez l'uniforme obligatoire. Quel sens peut avoir une telle proposition ? Les chefs d'établissement devront faire respecter cette obligation. Quelles seront les sanctions ? Celles-ci s'appliqueront-elles aux familles ? Aux élèves ? Les chefs d'établissements seront-ils eux-mêmes sanctionnés s'ils ne parviennent pas à maintenir l'ordre et la discipline dans leur établissement ? Nous avons changé d'époque.
Depuis 1986, nos collègues de droite entretiennent le débat sur les signes ostentatoires. On croyait que la loi avait tranché et que l'on en avait terminé avec cette question ; on y revient encore !
Dans ce texte, vous confondez les zones de revitalisation rurale (ZRR) avec les REP. Le traitement économique d'un territoire n'a rien à voir avec les difficultés scolaires que l'on peut y rencontrer ; même si, parfois, des recouvrements existent.
Par ailleurs, cette volonté de caporalisation des personnels me déplait fortement ; comme si la clé de la réussite des élèves passait par l'introduction de chefs à l'école... Vous savez bien que les résultats d'un établissement scolaire ne dépendent pas d'un chef. Au prétexte de dénoncer l'excès de verticalité et de hiérarchie, vous en rajoutez plus encore.
M. David Assouline . - Avec la baisse de la démographie, près de 1 500 postes vont être supprimés à la rentrée 2023. Notre école s'effondre, car, selon une des dernières études de l'OCDE, nous sommes l'un des pays les moins dotés en matière d'encadrement des élèves. Pour que l'égalité des chances soit réelle, la question de l'accompagnement est décisive. L'encadrement doit être proche des élèves, avec des effectifs réduits.
Plus que des chefs, il faut des maîtres formés, qui ont envie d'exercer ce métier. Dans ma génération, le métier suscitait encore des convoitises. On n'enviait pas seulement la fonction, mais aussi le statut social. Aujourd'hui, ce métier n'est plus attractif, car il est difficile d'en vivre. À ce titre, il concerne aujourd'hui plutôt les femmes qui, selon un schéma de reproduction sociale bien connu, apportent un salaire d'appoint dans le couple.
On aurait pu imaginer qu'en supprimant des postes on augmenterait les salaires des professeurs et on adapterait le niveau d'encadrement ; ce n'est pas le cas. L'école et la santé sont les deux piliers qui tiennent la société française depuis l'après-guerre. Ces piliers font tenir la République et donnent un sens aux valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité. Aujourd'hui, l'un de ces deux piliers - l'école - souffre et menace de s'effondrer, du fait de la concurrence du privé. Et cette concurrence, qui aujourd'hui concerne aussi bien les établissements privés entre eux, sera d'autant plus forte avec l'autonomisation prévue dans la loi.
Mme Sonia de La Provôté . - Ma première question concerne l'autonomie des écoles publiques. Les chiffres montrant l'impact de l'école sur le destin des jeunes sont cruels. Les perspectives d'ascenseur social se sont réduites. Dans toutes les évaluations conduites depuis 2008, les performances ont chuté. Il faut faire évoluer les choses et cette proposition de loi a le mérite de poser un certain nombre de questions.
Je suis assez réservée sur la question de l'autonomie et sur l'idée de fixer les conditions par décret. J'ignore si, jusqu'à présent, les décrets ont été efficaces pour améliorer la situation de l'école. Le contenu du décret mériterait, à mon sens, un débat parlementaire. Je m'interroge aussi sur le seuil des neuf classes, plutôt que douze, qui est pourtant le seuil à partir duquel le directeur d'école bénéficie d'une décharge totale.
Ce texte marque le retour de l'autorité hiérarchique. On a débattu de ce sujet pendant des mois, y compris en commission mixte paritaire (CMP). On était parvenu, en accord avec la communauté éducative, à un équilibre concernant l'autorité fonctionnelle. Celle-ci s'avérait notamment un bon outil de négociation et renforçait le rôle du directeur d'école. Je m'interroge sur le fait de revenir à une autorité hiérarchique ; cela risque d'être mal perçu et d'accentuer le risque de fracture.
À titre personnel, je soutiens la proposition de l'uniforme. Cela ne règle pas tous les problèmes, mais, en cette période de dictature de l'image, où la fringue remplace l'intelligence collective et individuelle des enfants, il est grand temps d'agir.
M. Cédric Vial . - En dépit de l'estime que je porte au travail effectué par mon collègue Max Brisson et notre rapporteur, j'éprouve quelques divergences quant à l'appréciation du texte, notamment concernant l'article 1 er . Je m'abstiendrai donc de voter ce texte en commission, tout en saluant la possibilité d'un débat éclairé dans l'hémicycle.
M. Pierre Ouzoulias . - Nous sommes tous d'accord, je crois, pour penser avec Ferdinand Buisson que l'objectif de l'école de la République est de former des républicains. À ce titre, le principe de laïcité est fondamental. Aussi, je déplore que, chaque fois que notre groupe a souhaité aller plus loin sur ce sujet, en remettant notamment en question un certain nombre de régimes dérogatoires, vestiges du passé que plus rien ne justifie, cette assemblée a toujours refusé d'en tenir compte. Je me souviens avoir déposé un modeste amendement ; il s'agissait pour l'Alsace-Moselle de transformer les cours obligatoires de religion en cours facultatifs, sachant que 90 % des élèves, aujourd'hui, ne suivent plus ces cours ; vous l'avez refusé.
Avec cette proposition de loi, alors que nous souhaiterions avancer sur ce principe de la laïcité, vous allez encore nous opposer la raison, les traditions, les survivances régionales. Or, la laïcité s'applique dans une République une et indivisible sur l'intégralité du territoire.
Mme Alexandra Borchio Fontimp . - Il est primordial que l'école soit plus que jamais synonyme de confiance entre tous les acteurs. Cette proposition de loi invite à mieux accompagner les chefs d'établissement et les enseignants, l'idée étant non pas de les materner, mais de leur apporter un soutien, afin que chaque problématique rencontrée puisse trouver une solution.
Notre école doit retrouver la sérénité essentielle à toute bonne transmission du savoir. Nos enseignants ne peuvent former les citoyens de demain dans un tel climat de contestation, de dérives, de méfiance et de remise en cause perpétuelle de valeurs aussi fondamentales que la laïcité, l'égalité ou l'autorité. La proposition de loi, en réaffirmant avec force ces valeurs, a le mérite de remettre l'école au centre du débat.
M. Stéphane Piednoir . - Le rôle du Parlement, en plus de légiférer, est parfois d'organiser des débats qui montrent nos différences d'analyse. Nous ne devons pas en avoir honte. Pour ma part, il n'est pas question de mettre mes convictions dans ma poche au motif que certains nous accusent d'énoncer des contre-vérités. Si l'on tient à la véracité des propos, la première des choses est de donner ses sources...
M. Jacques-Bernard Magner . - C'est un rapport de l'Insee !
M. Stéphane Piednoir . - Cette proposition de loi a le mérite de reposer un certain nombre de questions. Le système actuel est-il satisfaisant pour les familles, les enseignants, les directeurs d'école ? Les résultats liés à l'augmentation des crédits - 10 % sous le quinquennat de François Hollande ; 20 % sous celui d'Emmanuel Macron - montrent-ils une amélioration du système ? Faut-il davantage de moyens encore pour un résultat aussi incertain ? Le niveau de nos élèves en école primaire comme à la sortie de notre système éducatif est absolument désolant.
Concernant les atteintes à la laïcité, je ne dois pas vivre dans le même monde que certains de mes collègues. Les atteintes non seulement se multiplient, mais elles se singularisent et sont plus ostentatoires. Une logique quantitative s'est imposée à l'éducation nationale. On se souvient que, dans les années 1980, M. Chevènement souhaitait un ratio de bacheliers dans notre pays ; cette logique s'est ensuite appliquée à l'enseignement supérieur, et bientôt on arrivera à un ratio minimum de thésards. Tout cela n'a aucun sens. Plutôt que le quantitatif, il convient de privilégier le qualitatif.
Une seule mesure ne va pas résoudre tous les problèmes de l'éducation nationale. Une panoplie d'expérimentations est nécessaire, en commençant par le fait d'accorder de la souplesse aux établissements de l'enseignement primaire.
Un autre point est de laisser aux élus locaux un droit de regard sur ce qui se passe dans leur territoire. Tel est le sens de la consultation des conseils municipaux avant qu'une école ne demande ce statut particulier. Il me semble également anormal qu'une fermeture d'école ne soit pas considérée par un conseil municipal. J'exprime, en revanche, une réserve sur la conséquence du moratoire ; celui-ci me semble un peu brutal ; sans doute est-il possible de reformuler cela afin que l'avis du conseil municipal soit pris en compte sans déboucher sur un moratoire.
Concernant la formation des enseignants, le système n'est pas satisfaisant. L'attractivité du métier d'enseignant ne tient pas uniquement à la fiche de paie.
Parfois, un chef est nécessaire, notamment dans une classe. Aujourd'hui, on constate que l'autorité du professeur dans sa classe est contestée. Chers collègues, déplacez-vous dans les classes plutôt que de seulement consulter les rapports de l'Insee ! Allez donc voir ce qui se passe dans ces établissements où le professeur ne peut pas faire classe, non en raison de son salaire - même si, je suis d'accord avec vous, celui-ci est insuffisant -, mais parce que son autorité est contestée. Il s'agit de rétablir une autorité et cela passe par des mesures qui sont, parfois, des marqueurs de droite.
Sur la formation des enseignants du premier degré, je suis en accord avec ce qui est proposé par Max Brisson. Aujourd'hui, on ne peut pas considérer qu'une licence spécialisée dans une matière suffise pour enseigner la lecture, l'écriture, et apprendre à compter à des enfants de six ou sept ans. Des innovations sont nécessaires, comme la réserve éducative ou le très pertinent service public de soutien scolaire.
Enfin, nous avons une vision différente du respect de la laïcité dans notre pays. Il faut prendre des mesures draconiennes, qui n'ont rien à voir avec celles qui ont été évoquées par M. Assouline dans les années 1970. Le monde a évolué depuis, et je proposerai des amendements correspondant à ce que le Sénat a voté dans le cadre du projet de loi sur les principes de la République.
M. Jean Louis Masson . - On a accusé cette loi d'être de droite. Nous sommes en démocratie et je ne vois pas de problème à se prononcer sur un texte qui soit clairement de droite ou de gauche.
Concernant le principe de laïcité, on ne peut pas interdire à des professeurs de porter des tenues ayant un caractère communautariste ou religieux et, dans le même temps, accepter que des gens participant à des activités scolaires s'habillent de manière extravagante. J'assume clairement de vouloir renforcer la loi actuelle en matière de laïcité. Ce texte propose de petites avancées ; je m'en réjouis et souhaite que le Sénat l'adopte.
En tant que parlementaire de Moselle, je m'étonne que certains assurent vouloir uniformiser la législation partout en France et, dans le même temps, acceptent les régimes spéciaux en Corse et en Nouvelle-Calédonie. La population d'Alsace-Moselle est tout autant attachée au maintien d'un droit local spécifique correspondant à son histoire que les Corses peuvent l'être à telle ou telle disposition. Le sens de la laïcité ne doit pas être dévoyé à des fins politiques.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - Cette proposition de loi suscite un débat et permet à chacun d'éclaircir ses positions ou de faire valoir ses convictions.
Madame Monier, vous dites que la situation actuelle est imparfaite et qu'il faut renforcer les moyens. Le budget de l'école est en augmentation de 6,5 % par rapport à l'année dernière. Les budgets augmentent chaque année, sans que les résultats suivent.
L'article 4 n'éloigne pas les étudiants de la recherche. En effet, mon amendement permettra aux étudiants d'écoles supérieures du professorat de pouvoir accéder à un niveau master. Concernant l'article 8, il est surtout question des besoins particuliers des territoires ruraux.
Madame Brulin, j'entends vos réserves, mais cette proposition de loi me semble porter un véritable sujet de société.
Sur les 44 000 écoles publiques, on recense aujourd'hui 9 100 écoles de plus de neuf classes, soit 20 % d'entre elles. Je doute fort que cette proposition de loi réponde à une commande du Gouvernement. Elle correspond aux convictions de notre groupe politique et nous estimons qu'il est important de pouvoir en parler ; peut-être permettra-t-elle également au ministre de l'éducation nationale de sortir de son silence sur le sujet.
Monsieur Bargeton, nous aurions pu embrasser d'autres sujets encore, mais on ne peut pas tout traiter. Le budget de l'éducation nationale s'élève à 59 milliards d'euros, hors contributions aux pensions.
Il est compliqué d'avoir un consensus dans la mesure où l'autonomie n'a pas le même sens pour tout le monde. En 2023, la Cour des comptes a indiqué que cette uniformité nationale était source d'inégalités de traitement des élèves ; on ne peut pas l'accepter.
Monsieur Fialaire, nous ne sommes pas nostalgiques des écoles normales, mais vous avez raison de dire que, dans ces écoles, se passait quelque chose de fort, avec l'intervention régulière de maîtres formateurs venant du terrain. Comme l'a expliqué Max Brisson, lors de la création des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé), nous avions insisté pour qu'il y ait plus d'enseignants, de professionnels parmi les formateurs. Faire cours, c'est enseigner une matière ; faire classe, c'est différent, cela implique d'être confronté à une hétérogénéité d'élèves. Ce n'est pas le même métier, la formation ne peut donc pas être la même ; d'où l'intérêt de distinguer ces écoles supérieures du professorat. Pour le ministère, c'est aussi une occasion de reprendre la main.
Madame de Marco, lorsque la Première ministre évoque une élaboration pluriannuelle de la carte scolaire avec les élus locaux, c'est une nouveauté. Sans refaire l'histoire, les élus locaux ont été oubliés, méprisés depuis de longues années. On attend aussi les déclarations du ministre de l'éducation nationale, qui semble découvrir toutes les atteintes à la laïcité alors que nous l'avons plusieurs fois alerté sur le sujet.
Je tiens à remercier Max Brisson, qui nous permet de présenter aujourd'hui une proposition de loi sur le premier budget de l'État. Ce sont des marqueurs importants pour la droite, mais aussi pour la gauche, dans la mesure où nous avons tous envie que les élèves réussissent, trouvent un métier et se réalisent.
Je ne vais pas revenir sur le sujet de l'autonomie. Le débat était, à mon sens, indispensable, et les mots de Max Brisson étaient très justes.
Monsieur Magner, lors de l'Agora de l'éducation organisée par le Sénat en janvier 2022, nous avions demandé à l'institut CSA un sondage sur la perception de l'école par les Français : un Français sur deux pensait alors que l'école fonctionnait mal, et deux tiers se disaient pessimistes sur l'avenir de l'école. Si nous ne nous attelions pas à la tâche - comme c'est le cas aujourd'hui -, nous manquerions à notre mission.
Monsieur Assouline, je ne suis pas là pour défendre la politique du Gouvernement, mais pour être le rapporteur de ce très bon texte de Max Brisson.
Madame de La Provôté, vous m'avez interrogé sur les décharges de service. La demi-décharge intervient à partir de neuf classes. Le seuil de neuf classes semble le plus pertinent, car, lorsque les équipes sont réduites ou que le nombre d'enseignants est insuffisant, il n'est pas opportun de mettre en place une autorité hiérarchique.
Monsieur Ouzoulias, la remise en cause du droit local est une question complexe. Quant à vos propos sur l'autonomie, si je comprends votre raisonnement, celle-ci implique, précisément, que chacun se prenne en main.
Je remercie Mme Borchio Fontimp pour son soutien.
Les propos de M. Piednoir pourraient servir de conclusion à nos échanges. Il est vrai, en effet, que les moyens sont toujours plus importants et que les élus ont été souvent oubliés. Si l'on regarde l'appellation des collèges depuis 1958, les titres ont changé, mais pas ce qui se passe à l'intérieur de ces établissements. Max Brisson a également évoqué les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) et les Inspé : ce n'est pas en changeant le nom qu'on change les pratiques.
On relève un certain nombre d'expérimentations dans les articles de cette proposition de loi. La question du rétablissement de l'autorité est importante. Elle constitue un repère et place au coeur du dispositif la responsabilité de l'enseignant.
Enfin, pour répondre à M. Masson, l'uniformisation n'est pas un problème en France, même si certains territoires - comme l'Alsace-Moselle - peuvent avoir des spécificités.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1 er
L'amendement rédactionnel COM-26 est adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-25 précise le rôle du conseil d'administration, qui doit se prononcer sur le projet de contrat conclu entre l'établissement et l'autorité académique dans le cadre de cette expérimentation.
L'amendement COM-25 est adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-27 concerne l'accord préalable du conseil municipal avant la transformation d'une école en établissement public.
L'amendement COM-27 est adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-28 tire les conséquences de la création d'une nouvelle catégorie d'établissements publics. Pour ces nouvelles écoles autonomes, on s'inspire de l'organisation et du fonctionnement des collèges et lycées, tout en tenant compte de leur spécificité.
L'amendement COM-28 est adopté.
L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-29 réserve l'autorité hiérarchique aux écoles ayant un nombre de classes minimum.
L'amendement COM-29 est adopté.
L'article 2 est ainsi rédigé.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - Les amendements identiques COM-17 rectifié quinquies et COM-19 rectifié prévoient la prolongation de la possibilité de donner l'instruction obligatoire aux 3-6 ans au sein des jardins d'enfants.
Mme Elsa Schalck . - Ces amendements visent à restaurer la spécificité des jardins d'enfants, mise à mal par la loi pour une école de la confiance. Une dérogation avait été envisagée jusqu'à la rentrée 2023-24. En France, les jardins d'enfants existent plus particulièrement à Paris, Strasbourg et l'île de La Réunion. Les méthodes pédagogiques à l'oeuvre dans ces jardins fonctionnent également très bien en Allemagne et en Suède.
M. Max Brisson . - Je rappelle que, lorsque le texte de la proposition de loi pour l'école de la confiance était arrivé à l'Assemblée nationale, le ministère avait découvert l'existence des jardins d'enfants. L'Assemblée nationale leur avait alors accordé un délai de deux ans ; au Sénat, nous avions voté, après un rude débat avec le ministre, pour un délai de cinq ans. Le ministre s'était alors engagé à trouver une solution ; cinq ans après, on attend toujours. Les amendements réparent cet oubli et permettent d'envoyer un signal afin que l'obligation d'instruction à partir de trois ans soit aussi portée par les jardins d'enfants, sur des modèles pédagogiques qui ont fait leurs preuves.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - J'émets un avis favorable à ces deux amendements identiques.
Les amendements identiques COM-17 rectifié quinquies et COM-19 rectifié sont adoptés et deviennent article additionnel. En conséquence, les amendements COM-23 rectifié et COM-24 deviennent sans objet.
Article 3
L'article 3 est adopté sans modification.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-35 concerne le contenu des conventions liant les écoles supérieures du professorat et les établissements d'enseignement supérieur. Il s'agit de prévoir les conditions dans lesquelles un master peut être délivré aux élèves en fin de formation.
L'amendement COM-35 est adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-18 rectifié ter concerne la formation continuée pour les enseignants du premier degré. Avis favorable.
L'amendement COM-18 rectifié ter est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5
L'article 5 est adopté sans modification.
Article 6
L'amendement rédactionnel COM-30 est adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-31 concerne les conditions de probité et d'obligation de neutralité pour les personnes participant au service public de soutien scolaire.
L'amendement COM-31 est adopté.
L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-20 précise les conditions de diplômes pour être membres de la réserve éducative, afin que ces personnes soient au moins titulaires d'un baccalauréat. Avis favorable.
L'amendement COM-20 est adopté.
L'amendement rédactionnel COM-34 est adopté.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-6 rectifié bis entend rétablir, sur la base du strict volontariat des enseignants et futurs enseignants, les possibilités pour ces derniers d'acquérir des compétences bivalentes et de les exercer dans les établissements du second degré. La bivalence doit permettre à un enseignant de s'établir dans un seul établissement scolaire et de ne plus se disperser sur deux ou trois. Avis favorable.
Mme Marie-Pierre Monier . - Peut-on parler d'un retour aux professeurs d'enseignement général de collège (PEGC) ?
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - Il existe déjà une bivalence dans les lycées professionnels.
M. Olivier Paccaud . - J'assume le terme de PEGC, cela ne me gêne pas du tout. Les PEGC n'étaient pas des sous-professeurs. Cela permet également à certains professeurs de s'épanouir dans d'autres disciplines. L'histoire et la géographie, par exemple, sont deux matières différentes, enseignées par un seul professeur, et cela fonctionne plutôt bien.
M. Cédric Vial . - Au-delà du PEGC, un statut pour les professeurs bivalents avait été mis en place par le ministre Gilles de Robien, avec une prime associée. Celui-ci avait été ensuite supprimé sous la présidence de François Hollande. En termes de ressources humaines pour le ministère, mais aussi afin de limiter les déplacements et de favoriser l'intégration dans les équipes pédagogiques, c'est une bonne idée de le rétablir. On rappelle que ce dispositif fonctionne sur la base du volontariat et que cette compétence supplémentaire est rémunérée.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - En mars, le Conseil supérieur des programmes (CSP) a été invité à réfléchir à la place de la bivalence.
Mme Sylvie Robert . - Un niveau bac + 5 est-il requis pour les deux matières ?
M. Olivier Paccaud . - Il y aura une mention complémentaire dans une matière.
Mme Sylvie Robert . - C'est important de le préciser.
M. Olivier Paccaud . - Il existe des agrégés d'histoire, de géographie et d'histoire-géographie ; c'est mon cas.
M. Max Brisson . - Comme l'a précisé le rapporteur, le dispositif existe déjà pour les professeurs de lycées professionnels, et cela ne pose aucune difficulté.
Il ne s'agit pas, comme je l'ai entendu, de rétablir les PEGC. Ces derniers étaient régis par un statut qui s'est éteint par la suite. Dans ce texte, nous parlons bien des professeurs certifiés.
Aujourd'hui, un professeur certifié dans une seule discipline et exerçant dans un territoire rural navigue entre deux ou trois postes. Sa formation universitaire lui permettrait pourtant d'enseigner dans un même collège d'autres disciplines, en complément de celle pour laquelle il a passé le concours. On a évoqué l'attractivité du métier ; voilà un élément qui le rendrait plus attractif. L'amendement proposé par Olivier Paccaud apporterait de la souplesse au fonctionnement des établissements, en particulier dans les collèges ruraux.
Mme Samantha Cazebonne . - Dans beaucoup d'établissements français à l'étranger qualifiés comme des lycées d'excellence, la bivalence est indispensable, même pour des professeurs certifiés. En fonction du contexte, ils sont parfois obligés de s'adapter. Mais cela permet également à ceux qui en ont la volonté de se diversifier. Non seulement je soutiens ce principe de bivalence, mais je l'encourage.
L'amendement COM-6 rectifié bis est adopté et devient article additionnel.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-13 rectifié vise à insérer, parmi les principes de l'éducation nationale, le respect des personnes. Cela inclut la notion importante du bien-être de l'élève. Avis favorable.
L'amendement COM-13 rectifié est adopté et devient article additionnel.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-14 rectifié concerne une demande de rapport. Avis défavorable.
L'amendement COM-14 rectifié n'est pas adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-32 rectifié propose la création de territoires ruraux à besoins éducatifs particuliers, afin de mettre en place une action territorialisée de l'allocation des moyens répondant à la problématique spécifique des territoires ruraux, comme le préconise le rapport de MM. Lafon et Roux.
L'amendement COM-32 rectifié est adopté.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-33 laisse aux services académiques un mois de plus pour élaborer leur pré-projet de carte scolaire. Ils devront informer avant le 15 janvier - au lieu du 15 décembre comme prévu par le texte - le conseil municipal du projet de fermeture d'une classe dans la commune.
Le sous-amendement COM-36 fixe à trois ans la prévisibilité pour la fermeture des classes en territoire rural. Il s'agit d'un moratoire sur la fermeture de ces classes dans les communes de moins de 5 000 habitants, en cas d'opposition du conseil municipal. Les élus ont besoin de cette prévisibilité. Avis favorable.
Le sous-amendement COM-36 est adopté. L'amendement COM-33, ainsi sous-amendé, est adopté. En conséquence, les amendements COM-11 rectifié et COM-8 rectifié deviennent sans objet.
L'article 9 est ainsi rédigé.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - Cet article concerne à la fois les temps scolaires et non scolaires. L'amendement COM-1 interdisant le burkini se situe bien au-delà de la thématique de l'école et ne répond pas à l'objectif de la proposition de loi. Avis défavorable.
M. Jean Louis Masson . - Je savais que mes amendements seraient rejetés, mais je tenais quand même à les présenter et je les défendrai en séance.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-5 interdit le port de signes religieux ou communautaristes lors des activités sportives dans le cadre ou en lien avec les activités scolaires. Nous estimons que cet amendement est en partie satisfait. L'interdiction existe déjà pour les cours d'éducation physique et sportive (EPS), ainsi que pour le sport scolaire. Et tel qu'il est rédigé, l'amendement concernerait également les établissements privés sous contrat, pour lesquels l'interdiction du port de signes religieux par les élèves ne s'applique pas. Avis défavorable.
L'amendement COM-5 n'est pas adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-3 prévoit l'interdiction de signes religieux ou communautaristes ostensibles pour les accompagnants de sortie scolaire. La rédaction de l'article 10, déjà adoptée par le Sénat antérieurement, permet de rappeler que les sorties scolaires sont un temps de classe hors les murs. Avis défavorable.
L'amendement COM-3 n'est pas adopté.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-4 prévoit l'interdiction de signes religieux ou communautaristes ostensibles pour tout participant concourant au service public de l'éducation. L'interdiction du port de signes ou tenues ostensibles a plutôt sa place dans le titre consacré à la laïcité dans l'enseignement public. Avis défavorable.
L'amendement COM-4 n'est pas adopté.
L'article 10 est adopté sans modification.
M. Jacques Grosperrin , rapporteur . - L'amendement COM-2 prévoit le port obligatoire de l'uniforme. Avis défavorable, car cet amendement exclut les lycées du cadre de l'article 11.
L'amendement COM-2 n'est pas adopté.
L'article 11 est adopté sans modification.
Article 12
L'article 12 est adopté sans modification.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité |
||||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
|
Article 1 er |
||||
M. GROSPERRIN, rapporteur |
26 |
amendement rédactionnel |
Adopté |
|
M. GROSPERRIN, rapporteur |
25 |
rôle du conseil d'administration de l'établissement |
Adopté |
|
M. GROSPERRIN, rapporteur |
27 |
accord préalable du conseil municipal avant la transformation d'une école en établissement public |
Adopté |
|
M. GROSPERRIN, rapporteur |
28 |
création d'une nouvelle catégorie d'établissements publics |
Adopté |
|
Article 2 |
||||
M. GROSPERRIN, rapporteur |
29 |
limitation de l'autorité hiérarchique aux seules écoles les plus grandes (seuil défini par décret) |
Adopté |
|
Article(s) additionnel(s) après Article 2 |
||||
Mme SCHALCK |
17 rect. quater |
prolongation de la possibilité de donner l'instruction obligatoire au 3-6 ans au sein des jardins d'enfants |
Adopté |
|
M. MARSEILLE |
19 rect. bis |
prolongation de la possibilité de donner l'instruction obligatoire au 3-6 ans au sein des jardins d'enfants |
Adopté |
|
M. FÉRAUD |
23 rect. |
prolongation de la possibilité de donner l'instruction obligatoire au 3-6 ans au sein des jardins d'enfants |
Satisfait ou sans objet |
|
M. TABAROT |
24 |
prolongation de la possibilité de donner l'instruction obligatoire au 3-6 ans au sein des jardins d'enfants |
Satisfait ou sans objet |
|
Article 4 |
||||
M. GROSPERRIN, rapporteur |
35 |
contenu des conventions liant les écoles supérieures du professorat et des écoles et les établissements d'enseignement supérieur |
Adopté |
|
Mme BILLON |
18 rect. ter |
formation continuée pour les enseignants du premier degré |
Adopté |
|
Article 6 |
||||
M. GROSPERRIN, rapporteur |
30 |
amendement rédactionnel |
Adopté |
|
M. GROSPERRIN, rapporteur |
31 |
conditions de probité et obligation de neutralité pour les personnes participant au service public du soutien scolaire |
Adopté |
|
Article 7 |
||||
Mme BILLON |
20 |
conditions de diplômes pour être membres de la réserve éducative |
Adopté |
|
M. GROSPERRIN, rapporteur |
34 |
amendement rédactionnel |
Adopté |
|
Article(s) additionnel(s) après Article 7 |
||||
M. PACCAUD |
6 rect. bis |
bivalence |
Adopté |
|
M. SAUTAREL |
13 rect. |
respect de la personne en tant que composante de l'égalité des chances |
Adopté |
|
M. SAUTAREL |
14 rect. |
demande de rapport |
Rejeté |
|
Article 8 |
||||
M. GROSPERRIN, rapporteur |
32 rect. |
création des territoires ruraux à besoins éducatifs particuliers |
Adopté |
|
Article 9 |
||||
M. GROSPERRIN, rapporteur |
33 |
fermeture de classes dans les communes rurales |
Adopté |
|
Mme BILLON |
36 |
prévisibilité à trois ans pour la fermeture des classes en territoire rurale |
Adopté |
|
M. SAUTAREL |
11 rect. |
Information des parents d'élèves dans les communes rurales du projet de fermeture d'une classe |
Satisfait ou sans objet |
|
M. SAUTAREL |
8 rect. |
délai de deux mois pour le conseil municipal pour se prononcer sur la fermeture d'une classe en zone rurale |
Satisfait ou sans objet |
|
Article(s) additionnel(s) avant Article 10 |
||||
M. MASSON |
1 |
interdiction du burkini dans les piscines utilisées par les groupes scolaires |
Rejeté |
|
M. MASSON |
5 |
Interdiction du port de signes religieux ou communautaristes lors des activités sportives dans le cadre ou en lien avec les activités scolaires |
Rejeté |
|
Article 10 |
||||
M. MASSON |
3 |
interdiction de signes religieux ou communautaristes ostensibles pour les accompagnants de sortie scolaire |
Rejeté |
|
M. MASSON |
4 |
interdiction du port de signes religieux ou communautaires pour tout participant concourant au service public de l'éducation |
Rejeté |
|
Article 11 |
||||
M. MASSON |
2 |
port obligatoire de l'uniforme |
Rejeté |
LISTE
DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES
Jeudi 16 mars 2023
Direction générale de l'enseignement scolaire : MM. Édouard GEFFRAY , directeur général, et Christophe GÉHIN , chef du service du budget et des politiques éducatives territoriales.
Syndicat des enseignants 17 ( * )
Syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur (Snalc) : M. Maxime REPPERT , secrétaire national aux conditions de travail et climat scolaire.
Mercredi 22 mars 2023
Direction générale des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale (DGRH) : M. Boris MELMOUX-EUDE , directeur général des ressources humaines.
Jeudi 23 mars 2023
- Syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale ( SNPDEN-UNSA) : Mme Carole ZERBIB , membre de l'exécutif syndical national, M. Didier GEORGES , membre de l'exécutif syndical national du SNPDEN-UNSA et de la commission « vie syndicale ».
- Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) : M. Laurent ZAMECZKOWSKI , vice-président.
Lundi 27 mars 2023
- Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (Inspé) : M. Alain FRUGIÈRE , président du réseau des Inspé et directeur de l'Inspé de Paris, Mme Anne-Lise ROTUREAU , déléguée générale du réseau des Inspé.
- France Universités : Mme Marie-Cécile NAVES , déléguée générale, M. Kevin NEUVILLE , conseiller en charge des relations avec le Parlement.
CONTRIBUTIONS ÉCRITES
- Fédération syndicale unitaire - Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC (FSU-SNUipp)
- Syndicat général de l'éducation nationale - confédération française démocratique du travail (SGEN-CFDT)
- Syndicat national des enseignants du second degré - fédération syndicale unitaire (SNES-FSU)
Proposition de loi n° 320 rectifié (2022-2023) pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA
CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT
(« CAVALIERS »)
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 18 ( * ) .
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 19 ( * ) .
Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 20 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 21 ( * ) .
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 5 avril 2023, le périmètre indicatif de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité .
Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :
- à l'organisation du système scolaire,
- et à la formation des enseignants et des futurs enseignants .
En revanche, la commission a estimé que ne présentaient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé , des amendements relatifs :
- à l'organisation de l'enseignement supérieur .
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl22-320.html
* 1 « Perceptions et attentes vis-à-vis du système scolaire : regards croisés des Français et des enseignants », sondage réalisé pour le Sénat par l'institut CSA, janvier 2022.
* 2 « La même dictée a été proposée à des élèves de CM2 à quatre reprises. [ ...] Il s'agit d'un texte d'une dizaine de lignes comprenant 67 mots et 16 signes de ponctuation, soit 83 items. Le texte ne présente pas de difficultés linguistiques particulières. En revanche, il met l'accent sur la gestion des chaînes d'accords, et nécessite d'en assurer la continuité tout au long de la dictée », DEPP note n° 22.37.
* 3 Mission Territoires et réussite, Pierre Mathiot et Ariane Azéma, novembre 2019.
* 4 Rapport n°590 de Jacques Grosperrin, « faire revenir la République à l'école », 2014-2015.
* 5 En matière de recrutement des enseignants, la seule expérimentation donnant aux chefs d'établissement une véritable responsabilité est intervenue avec le programme ECLAIR (écoles, collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite). Cette expérimentation a pris fin en 2015.
* 6 Parmi ces postes, on peut citer les postes en établissements isolés géographiquement, les postes en établissement comportant un projet spécifique (bilinguisme, enseignement en langue régionale, expérimentation,...), les postes au contact de populations à besoins identifiés (population allophone, population en milieu carcéral, ...) ou encore les postes en établissements déployant un enseignement technique et professionnel rare.
* 7 Article R. 2324-17 du code de la santé publique.
* 8 Il existe au moins un jardin d'enfants dans 53 départements. La moitié de ces structures est concentrée dans huit départements : Paris, le Rhône, le Nord, le Bas-Rhin, les Bouches-du-Rhône, la Loire, La Réunion et le Haut-Rhin. Ces mêmes départements représentent en outre plus de 60 % des places totales.
* 9 Selon les réponses au questionnaire réalisé par la mission et renseigné par un quart des structures. IGÉSR n° 2020-109, mission d'expertise sur l'avenir des jardins d'enfants, juillet 2020.
* 10 De nombreux établissements pourraient devoir rembourser les subventions d'investissement dont ils ont bénéficié au titre de la CAF, la destination sociale de l'établissement ne pouvant être modifiée pendant une période de dix ans à compter de la fin des travaux ayant bénéficié de la subvention. Par ailleurs, les conditions d'ouverture des écoles hors contrat ont récemment été renforcées.
* 11 Rapport n° 473 de Max Brisson sur le projet de loi pour une école de la confiance, 2018-2019.
* 12 Métier d'enseignant : un cadre rénové pour renouer avec l'attractivité, Max Brisson et Françoise Laborde, rapport n° 690, 2017-2018.
* 13 Notamment le rapport n° 690 (2017-2018) : Métier d'enseignant : un cadre rénové pour renouer avec l'attractivité, Max Brisson et Françoise Laborde.
* 14 Le rapport annuel du Défenseur des droits de novembre 2021 a souligné les conséquences importantes de la crise sanitaire sur la santé mentale des enfants.
* 15 Rapport n° 83 de Max Brisson sur la proposition de loi tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l'éducation, session 2019-2020.
* 16 Interview de Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale le 13 octobre 2022, Le Monde .
* 17 Les autres syndicats invités ont envoyé une contribution écrite.
* 18 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 19 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 20 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.
* 21 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.