Rapport n° 378 (2022-2023) de Mme Nadine BELLUROT , fait au nom de la commission des lois, déposé le 1er mars 2023
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L'ESSENTIEL
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I. LA VACANCE D'UN SIÈGE FAUTE DE CANDIDATS
DU MÊME SEXE POUR REMPLACER UN CONSEILLER COMMUNAUTAIRE
DÉMISSIONNAIRE : UNE RÈGLE INSATISFAISANTE
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II. LA PROPOSITION DE LOI : UNE SOLUTION
PRAGMATIQUE À UN PROBLÈME PONCTUEL
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I. LA VACANCE D'UN SIÈGE FAUTE DE CANDIDATS
DU MÊME SEXE POUR REMPLACER UN CONSEILLER COMMUNAUTAIRE
DÉMISSIONNAIRE : UNE RÈGLE INSATISFAISANTE
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EXAMEN EN COMMISSION
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RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45 DE LA CONSITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT
DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
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LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 378
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023
Enregistré à la Présidence du Sénat le 1 er mars 2023
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires ,
Par Mme Nadine BELLUROT,
Sénatrice
(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet , président ; Mmes Catherine Di Folco, Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Christophe-André Frassa, Jérôme Durain, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Bonnecarrère, Mme Nathalie Goulet, M. Thani Mohamed Soilihi, Mmes Cécile Cukierman, Maryse Carrère, MM. Alain Marc, Guy Benarroche , vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Laurence Harribey, Muriel Jourda, Agnès Canayer , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Philippe Bas, Arnaud de Belenet, Mmes Nadine Bellurot, Catherine Belrhiti, Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Valérie Boyer, M. Mathieu Darnaud, Mmes Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Pierre Frogier, Mme Françoise Gatel, MM. Loïc Hervé, Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Mme Marie Mercier, MM. Alain Richard, Jean-Yves Roux, Jean-Pierre Sueur, Mme Lana Tetuanui, M. Dominique Théophile, Mmes Claudine Thomas, Dominique Vérien, M. Dany Wattebled .
Voir les numéros :
Sénat : |
860 (2021-2022) et 379 (2022-2023) |
L'ESSENTIEL
Face au nombre croissant de démissions observé depuis le renouvellement général de 2020, alors même que les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre exercent aujourd'hui des compétences structurantes pour le territoire communal, Françoise Gatel, présidente de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, a déposé une proposition de loi en août 2022 tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires .
La commission a pleinement partagé la volonté que soient, pour toute la durée du mandat, impérativement et pleinement représentées les communes au sein des conseils communautaires . Réaffirmant une position constante du Sénat, la rapporteure, Nadine Bellurot, a rappelé que le conseil communautaire, émanation des conseils municipaux , doivent impérativement représenter, tout au long du mandat, tant l'ensemble des communes membres que les équilibres politiques au sein de celles-ci, et qu'il ne saurait y être fait, pour aucun motif, durablement échec.
La commission des lois a donc adopté, à l'unanimité, avec modifications la proposition de loi.
I. LA VACANCE D'UN SIÈGE FAUTE DE CANDIDATS DU MÊME SEXE POUR REMPLACER UN CONSEILLER COMMUNAUTAIRE DÉMISSIONNAIRE : UNE RÈGLE INSATISFAISANTE
A. L'INCOMPRÉHENSION DES ÉLUS FACE À UNE RÈGLE RÉSULTANT D'UN COMPROMIS LÉGISLATIF PERFECTIBLE
Faisant suite à la constitutionnalisation de l'objectif d'égale représentation des femmes et des hommes au sein des instances locales 1 ( * ) , le législateur a instauré, pour les communes de plus de 1 000 habitants, une règle de parité pour la constitution des listes des candidats aux conseils communautaires 2 ( * ) .
Complétant cette règle, l'article L. 273-10 du code électoral prévoit que le respect du principe de parité s'applique tout au long du mandat, y compris en cas de démission au cours du mandat : ainsi, le siège de conseiller communautaire vacant doit être pourvu par un élu municipal de même sexe et issu de la même liste dans les communes de plus de 1 000 habitants disposant de plusieurs sièges au conseil communautaire ; à défaut, le siège demeurera vacant jusqu'à la fin du mandat. Il en résulte, comme l'a rappelé la direction générale des collectivités territoriales (DGCL), qu'« en l'état actuel du droit, si aucun conseiller municipal de même sexe ne peut être désigné, le siège demeure vacant jusqu'au prochain renouvellement du conseil municipal de la commune » 3 ( * ) .
Modalités de remplacement
d'un conseiller
communautaire démissionnaire
Source : commission des lois du Sénat
Cette disposition, fruit d'un compromis lors de la réforme des élections municipales et communautaires de 2013, a été acceptée par le Sénat dans le but de faire échec aux dispositions alors proposées par l'Assemblée nationale et le Gouvernement qui liaient la démission du mandat communautaire à celle du mandat municipal , rapprochant ainsi l'intercommunalité d'une « supra-communalité » 4 ( * ) .
Dès lors, l'intention du législateur devrait être interprétée moins comme la volonté explicite de prévoir, au nom du principe de parité, la possibilité de vacance d'un siège communautaire, que comme un refus de tout automatisme entre une démission communautaire et une démission municipale dans un souci de clarification du lien entre ces deux mandats.
À l'heure où les EPCI à fiscalité propre exercent des compétences structurantes pour la vie communale, nombreux sont les élus locaux à faire état de leur incompréhension face à la possibilité de vacance durable d'un siège au sein du conseil communautaire imposée par le principe de parité .
Ainsi, le récent rapport d'Elodie Jacquier-Laforge et de Raphaël Schellenberger fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale relatif à la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal a dressé le constat suivant : « les difficultés relatives à l'application de l'article L. 273-10 du code électoral portant sur la règle de remplacement d'un conseiller communautaire par un suivant de liste de même sexe, nous ont été signalées. (...) Cette obligation suscite l'incompréhension des élus, dont les marges de manoeuvre sont nulles » 5 ( * ) .
Les auditions menées par la rapporteure ont confirmé ces observations . Pour l'association des maires de France (AMF), auditionnée par la rapporteure, la vacance des sièges intercommunaux constitue l'un des points d'attention du mandat municipal actuel. Il s'agit également d'une préoccupation d'Intercommunalités de France qui, lors de son audition, soulignait « les incompréhensions de certaines règles par les élus qui surviennent lorsque des difficultés comme celle d'une vacance se posent ».
B. DES SITUATIONS PRÉJUDICIABLES, AUJOURD'HUI PONCTUELLES MAIS SUSCEPTIBLES DE SE MULTIPLIER
Dans un contexte de démissions croissantes des élus locaux et de désaffection du mandat intercommunal par les élus locaux, les exemples de vacance durable de siège en conseil communautaire se sont récemment multipliés 6 ( * ) et ont été relayés par plusieurs parlementaires 7 ( * ) .
Les règles actuelles ont pu, dans les faits, constituer un frein supplémentaire à la représentation juste et continue des communes au sein de leur EPCI à fiscalité propre , ce qui apparait préjudiciable à trois principaux égards.
En premier lieu, cela aboutit à un amoindrissement de la représentation des communes au sein du conseil communautaire alors même que les EPCI à fiscalité propre sont désormais titulaires de nombreuses compétences, qu'ils exercent souvent sur l'ensemble de leur périmètre. Le rapport d'Elodie Jacquier-Laforge et de Raphael Schellenberger précité soulignait, à cet égard, que « dans son application, [une telle règle] est susceptible de nuire à la représentation de la commune concernée par la vacance au sein du conseil communautaire » 8 ( * ) ;
En deuxième lieu, dans certains cas, une telle vacance conduit à un amoindrissement des droits de l'opposition, celle-ci pouvant se retrouver sans représentation au sein du conseil communautaire, faute d'un réservoir de candidats de même sexe, fléchés ou non, suffisant.
En effet, puisqu'en application du I de l'article L. 273-5 du code électoral, ne peuvent être désignés conseillers communautaires que les seuls conseillers municipaux ou d'arrondissement, le vivier des conseillers municipaux de même sexe susceptibles d'être désignés en remplacement d'un conseiller communautaire démissionnaire élu sur une liste d'opposition peut être très faible, voire inexistant, alors même que le pluralisme des courants d'idées et d'opinions a acquis valeur constitutionnelle 9 ( * ) et doit trouver à s'appliquer à tout moment d'un mandat .
En dernier lieu, une telle situation apparait tout autant préjudiciable pour les communes que pour les EPCI à fiscalité propre eux-mêmes, dont les décisions pourraient être considérées comme entachées d'un défaut de représentativité et de légitimité, en particulier s'agissant des équilibres fragiles de la pondération de la représentation de la ville-centre et de l'ensemble des communes de plus petite taille.
Comme l'a fait valoir Intercommunalités de France lors de son audition par la rapporteure, il n'est pas souhaitable « qu'une commune ne puisse plus bénéficier complètement du nombre de conseillers communautaires qui est le sien en application de l'arrêté de répartition des sièges de conseiller communautaire entre les communes ».
Les conséquences sur
l'intercommunalité et sur la commune
d'une vacance durable d'un
siège : l'exemple de la commune de Reuilly
La commune de Reuilly (Indre, 2 056 habitants) illustre, parmi d'autres, l'ensemble des conséquences préjudiciables à une commune, aux équilibres politiques locaux et à un EPCI à fiscalité propre susceptibles d'être occasionnées par l'application des dispositions actuelles de l'article L. 273-10 du code électoral.
Cette commune dispose de quatre sièges au sein du conseil communautaire de la communauté de communes du Pays d'Issoudun, composé de 38 sièges, dont elle est membre. La répartition des sièges dans ce conseil communautaire conduit à attribuer à la ville-centre d'Issoudun la moitié des sièges, soit 18 sièges, et aux autres communes de plus petite taille, le reste des sièges , chacune disposant entre un et quatre sièges en fonction de son poids démographique.
Nombre de sièges accordés à
chaque commune au conseil communautaire
de la communauté de communes
du Pays d'Issoudun
Source : commission des lois du Sénat
Dès lors, si une vacance se produisait parmi les sièges attribués aux autres communes que la ville-centre, un déséquilibre naitrait automatiquement au profit de la ville-centre qui se retrouverait, dans sa représentation au conseil communautaire , en majorité à elle-seule et non plus à égalité avec l'ensemble des autres communes additionnées.
À la suite du renouvellement général de 2020, la liste de la majorité sortante a obtenu, à Reuilly, quinze sièges au conseil municipal contre quatre pour la liste d'opposition . Parallèlement, les quatre sièges de la commune de Reuilly au conseil communautaire ont été pourvus comme suit : trois conseillers municipaux (deux femmes et un homme) de la liste ayant obtenu la majorité de suffrages ont été désignés au conseil communautaire et une conseillère municipale de la liste d'opposition y a été désignée .
Ainsi, si la seule élue municipale d'opposition siégeant au conseil communautaire démissionne de son mandat, il n'existe qu'une autre candidate de même sexe sur la liste communautaire comme sur la liste municipale ayant été élue au conseil communautaire pour la remplacer . Si celle-ci ne se portait pas candidate, le siège de l'opposition serait donc vacant, faute de « réserves » de conseillères municipales et faute de pouvoir désigner un conseiller municipal élu sur la même liste de sexe opposé.
Bien que ces situations restent aujourd'hui ponctuelles , les tendances de fond de crise de l'engagement local, en particulier intercommunal, ne sauraient être ignorées tant elles illustrent le risque d'une multiplication de ces cas de vacance et ce, d'un constat unanime des acteurs auditionnés par la rapporteure. Il en résulte la nécessité d'une évolution législative, qui semble partagée par le Gouvernement, Joël Giraud, alors ministre chargé des collectivités territoriales, énonçant, en réponse à la question écrite de Françoise Gatel précitée, que « ces situations, qui sont exceptionnelles, pourraient faire l'objet d'une attention particulière à l'occasion d'un prochain vecteur législatif » 10 ( * ) .
II. LA PROPOSITION DE LOI : UNE SOLUTION PRAGMATIQUE À UN PROBLÈME PONCTUEL
A. INTRODUIRE DEUX NOUVELLES FACULTÉS SUBSIDIAIRES DE DÉSIGNATION D'UN CONSEILLER MUNICIPAL POUR ÉVITER UNE VACANCE
Comme le rappelle l'exposé des motifs de la proposition de loi, il peut être estimé que « le législateur n'a pas procédé à une conciliation équilibrée entre les principes de parité et de représentation des communes au sein des intercommunalités dont elles sont membres, puisque l'application du premier de ces principes fait échec à l'application du second » 11 ( * ) .
La présente proposition de loi, déposée
par la présidente de la délégation aux
collectivités territoriales, Françoise Gatel, prévoit
deux assouplissements pour corriger ces dysfonctionnements ponctuels
dans la représentation des communes de plus de 1 000 habitants au
sein des
conseils communautaires
afin que, lorsqu'intervient la
vacance d'un siège de conseiller communautaire et
lorsqu'il
n'existe pas de conseiller municipal ou de conseiller d'arrondissement de
même sexe candidat à ce siège
:
• le siège soit pourvu par le premier candidat élu conseiller municipal ou conseiller d'arrondissement suivant sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu, sans tenir compte de son sexe ;
• qu'à défaut, lorsqu'il n'y a plus de candidat élu conseiller municipal ou conseiller d'arrondissement pouvant pourvoir le siège sur la liste des candidats au siège de conseiller communautaire, le siège soit pourvu par le premier conseiller municipal ou conseiller d'arrondissement élu sur la liste correspondante des candidats aux sièges de conseiller municipal n'exerçant pas de mandat de conseiller communautaire, sans tenir compte de son sexe .
Une telle dérogation ne serait applicable qu'à l'issue de la première année du renouvellement général des conseils municipaux .
Modalités de remplacement d'un conseiller
communautaire démissionnaire
envisagées
par
la proposition de loi
Source : commission des lois du Sénat
B.
APPROUVER LE PRINCIPE D'UN DISPOSITIF LIMITÉ, ENCADRÉ
ET
SUBSIDIAIRE POUR REMÉDIER AUX DIFFICULTÉS DES ÉLUS
LOCAUX
1. Une initiative nécessaire et approuvée dans son principe
a) Une mesure pleinement partagée par la commission des lois
Au regard des difficultés précédemment évoquées, la proposition de loi déposée par Françoise Gatel apporte une réponse durable et pragmatique à la multiplication des vacances de siège au sein des conseils communautaires . La commission des lois, attachée à la représentation continue et complète des communes au sein des conseils communautaires s'est en conséquence prononcée à l'unanimité en faveur de son adoption .
Suivant sa rapporteure, elle a jugé que si les dispositions relatives à la parité au sein des listes communautaires et leur application en cas de démission en cours de mandat ont indéniablement prouvé leur efficacité afin d'assurer une représentation équilibrée des sexes dans les instances locales 12 ( * ) , l'obligation d'appliquer le principe de parité pour sur toute la durée du mandat, pouvait aboutir à une inacceptable vacance durable du siège, résultant in fine en un défaut préjudiciable de représentation de la commune membre au sein de son EPCI à fiscalité propre .
Elle a souligné la démarche pragmatique et ponctuelle retenue par le texte, qui s'illustre par :
- le caractère subsidiaire des assouplissements proposés, qui loin de modifier les dispositions en vigueur, ajoutent deux autres modalités de désignation des conseillers communautaires en cas d'échec des précédentes ;
- l' encadrement dans le temps du mandat de ces dérogations pour ne les rendre applicables qu'après une année de mandat, afin de se prémunir contre toute stratégie malveillante de « démissions en cascade » ;
- et le champ limité du dispositif, qui ne s'appliquerait qu'aux seules communes de plus de 1 000 habitants représentées par plusieurs sièges au conseil communautaire, soit, d'après les éléments transmis à la rapporteure, moins de 30 % des communes françaises.
b) Une attention à la constitutionnalité du dispositif
Certaines personnes entendues par la rapporteure ont émis des doutes quant à la conformité à la Constitution du dispositif créé . Dès lors qu'il consiste à prévoir des modalités permettant le remplacement d'un candidat d'un sexe par celui du sexe opposé, certains y voient en effet une rupture du principe d'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives et aux mandats politiques . La commission n'a pas jugé ces craintes justifiées.
En premier lieu, le Conseil constitutionnel a, par deux fois, précisé la portée du principe de parité en jugeant, d'une part, qu'il « n'institu [ait] pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit » 13 ( * ) et, d'autre part, « qu'il est loisible au législateur d'adopter [ en la matière ] des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant. Il lui appartient toutefois d'assurer la conciliation entre cet objectif et les autres règles et principes de valeur constitutionnelle auxquels le pouvoir constituant n'a pas entendu déroger » 14 ( * ) . La commission, à l'invitation de sa rapporteure, a dès lors estimé que la conciliation qui avait été ainsi opérée par le législateur entre les deux principes de représentation des communes et de parité n'était pas satisfaisante et qu'il convenait, ce faisant, de la modifier en adoptant le dispositif de la proposition de loi.
Au surplus, et en second lieu, le juge constitutionnel a précisé que le principe de parité, s'il « permet au législateur d'imposer des règles de parité pour l'accès aux mandats électoraux de caractère politique, ne lui impose pas d'imposer » 15 ( * ) . C'est ainsi qu'il a admis la substitution du mode de scrutin majoritaire au mode de scrutin proportionnel dans les départements où trois sénateurs étaient élus et ce, alors que seul le scrutin proportionnel permet une alternance stricte entre les sexes des candidats.
Sur ce point, il ne fait aucun doute pour la commission, que le principe de représentation juste et continue des communes au sein des groupements intercommunaux, protégé à plusieurs reprises par la jurisprudence constitutionnelle, ne saurait être mis en échec par un autre principe et a fortiori , celui de parité, justifiant ainsi d'y déroger ponctuellement et subsidiairement .
2. Un ajustement nécessaire pour garantir la sécurité juridique et éviter les risques de contournement du dispositif
La commission a porté une attention particulière , dans le cadre de son examen de la proposition de loi, à ce qu' un équilibre soit trouvé entre la garantie d'une représentation continue des communes au sein du conseil communautaire et celle d'une représentation équilibrée des sexes au sein desdits conseils .
La commission partage le souci de l'auteur de la proposition de loi d'éviter le contournement du dispositif en restreignant son application aux cinq dernières années du mandat communautaire . La tentation de présenter des listes paritaires aux élections municipales et communautaires tout en orchestrant des « démissions en cascade » quelques jours après les élections des conseillers communautaires d'un même sexe afin d'être remplacés par des candidats de l'autre sexe ne saurait, en effet, exister.
La rédaction de la proposition de loi initiale , si elle a le mérite de prévoir une première limitation, apparait toutefois imprécise . Ainsi que l'a indiqué la direction générale des collectivités locales lors de son audition, d'une part, « le point de départ de ce délai » n'est pas déterminé, d'autre part, « en cas de renouvellement du conseil municipal entre deux renouvellements généraux des conseils municipaux et communautaires et si ce renouvellement local a lieu plus d'un an après les dernières élections municipales, il devient possible de déroger immédiatement aux principes de parité ».
La commission a en conséquence estimé qu'une reformulation du dispositif était nécessaire afin d'en garantir l'effectivité, sans pour autant nuire à l'équilibre trouvé . Elle a adopté, en ce sens, un amendement COM-4 présenté par la rapporteure avec l'accord de l'auteur de la proposition de loi, précisant que le dispositif trouverait à s'appliquer à compter d'une année suivant la date d'installation du conseil municipal , plutôt que celle du renouvellement général des conseils municipaux. Aucune vacance intervenue dans le délai d'un an à compter du début de mandat ne pourrait donc se voir appliquer les dispositions de la proposition de loi.
*
* *
La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.
EXAMEN EN COMMISSION
__________
M. François-Noël Buffet , président . - Nous examinons maintenant la proposition de loi tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires, présentée par Mme Françoise Gatel et plusieurs de ses collègues.
Mme Nadine Bellurot , rapporteure . - Je remercie notre collègue Françoise Gatel de cette initiative. Certes, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui entend répondre à un problème ponctuel, mais elle mérite toute notre attention, car certaines communes connaissent des situations de vacances durables de sièges au sein des conseils communautaires faute de candidats de même sexe pour remplacer le conseiller démissionnaire. Ainsi, pour illustrer mon propos, j'évoquerai le recours gracieux formé par le préfet de la Nièvre en 2021 à l'encontre de la délibération procédant au remplacement d'un conseiller de sexe masculin démissionnaire de son mandat municipal par une conseillère municipale, faute de candidats de même sexe, aboutissant à une vacance durable du poste en dépit de cette candidature. Si celui-ci n'a fait qu'appliquer la règle de droit, cette règle conduit, faute de candidats, à freiner la représentation juste et continue des communes au sein de leur intercommunalité.
Ce constat a été partagé par le Gouvernement ainsi que certains de nos collègues députés. En effet, Élodie Jacquier-Laforge et Raphaël Schellenberger déplorent dans leur rapport d'information sur la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal d'octobre 2021 « les marges de manoeuvre nulles » des élus locaux face à une telle obligation et appellent le ministre des collectivités territoriales à se saisir du sujet.
De façon analogue, interrogé par Françoise Gatel, l'ancien ministre des collectivités territoriales Joël Giraud avait constaté que « ces situations, qui sont exceptionnelles, pourraient faire l'objet d'une attention particulière à l'occasion d'un prochain vecteur législatif ».
Une telle situation de vacance est préjudiciable aux communes et aux intercommunalités, et ce à trois égards.
Premièrement, la vacance d'un siège aboutit à un amoindrissement de la représentation des communes au sein du conseil communautaire, alors même que les intercommunalités ont de nombreuses compétences.
Deuxièmement, dans certains cas, une telle vacance conduit à un amoindrissement des droits de l'opposition, qui peut se retrouver privée de représentation au sein du conseil communautaire, faute d'un réservoir de candidat de même sexe, fléchés ou non, suffisant.
Troisièmement, des vacances durables sont également préjudiciables au bon fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre eux-mêmes, dont les décisions pourraient être considérées comme entachées d'un défaut de représentativité et de légitimité, en particulier s'agissant des équilibres fragiles de la pondération de la représentation de la ville-centre et de l'ensemble des communes de plus petite taille.
La présente proposition de loi apporte une solution pragmatique en prévoyant, pour les seules communes de plus de 1 000 habitants représentées par plusieurs sièges au conseil communautaire, et lorsqu'il n'existe pas de conseiller municipal, « fléché » ou non, de même sexe candidat à ce siège, de le pourvoir par le suivant de liste « fléché » et élu au conseil municipal sans tenir compte de son sexe. Lorsque la liste concernée ne comporte plus de conseillers municipaux dits « fléchés », le siège serait alors pourvu par le premier conseiller municipal élu sur la liste n'exerçant pas de mandat de conseiller communautaire, sans tenir compte de son sexe.
Ces deux assouplissements étant subsidiaires aux modalités existantes de remplacement d'un conseiller communautaire démissionnaire, le dispositif me semble constituer un point d'équilibre satisfaisant entre l'exigence d'égale représentation des hommes et des femmes et l'indispensable représentation juste et continue des communes au sein des conseils communautaires.
Je vous propose, cependant, avec l'accord de l'auteur de cette proposition de loi, d'adopter un amendement de précision.
La principale originalité du dispositif initial est de n'être applicable qu'à l'issue de la première année du mandat. La rédaction de la proposition de loi initiale, si elle a le mérite de prévoir une première limitation, apparaît toutefois imprécise. Le point de départ de ce délai n'est pas suffisamment déterminé, ainsi que l'a indiqué en audition la direction générale des collectivités locales (DGCL).
C'est pourquoi je vous propose de préciser que le dispositif s'appliquerait à compter d'une année suivant la date d'installation du conseil municipal, afin notamment de tenir compte d'éventuels renouvellements locaux.
Au bénéfice de ces observations, et sous réserve de l'adoption de cet amendement, je suis donc favorable à l'adoption de cette proposition de loi.
Mme Catherine Di Folco . - Merci à l'auteur de ce texte de nous proposer une mesure frappée au coin du bon sens. Cependant, pourquoi le point de départ se déclenche-t-il à l'issue de la première année du mandat, et non pas dès que le poste devient vacant ?
Mme Brigitte Lherbier . - Pourquoi ne pas simplement flécher au départ davantage de conseillers municipaux ?
M. Guy Benarroche . - Nous voterons cette proposition de loi. Je rejoins l'observation de Mme Lherbier, à savoir flécher plus de personnes dès le départ, voire prévoir un autre système. Toutefois, ce texte corrige un vide juridique existant.
Pour ma part, je resterai vigilant afin que ce nouveau dispositif ne donne pas libre cours à l'imagination de certains qui en tireraient profit pour faire élire plus d'hommes que de femmes. C'est pourquoi, il est essentiel d'avoir prévu qu'il ne sera applicable qu'à l'issue de la première année du mandat.
M. Éric Kerrouche . - Ce texte correctif sera utile, même si les situations de vacances restent à la marge. Fondamentalement, la problématique est celle de la parité au sein des intercommunalités. J'ai cru comprendre que les amendements que j'ai déposés seront déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution. Mais le problème de fond a trait aux différents modes de scrutin. Il conviendrait d'aligner le mode de scrutin en vigueur pour les communes de moins de 1 000 habitants sur celui des communes de plus de 1 000 habitants, avec une représentation miroir des femmes au moins au sein de l'exécutif.
Quoi qu'il en soit, nous voterons cette proposition de loi, en soulignant cependant qu'elle ne malheureusement répond pas aux difficultés auxquelles nous faisons face.
M. Alain Richard . - Je tiens à préciser que l'ordre de remplacement, lorsqu'un poste de conseiller communautaire est vacant, est d'abord le suivant de même sexe sur la liste des conseillers communautaires, puis le conseiller municipal non fléché, mais de même sexe, et, le cas échéant, le conseiller municipal du sexe opposé.
Ce texte vient ainsi corriger deux situations : celle où les listes minoritaires comptent très peu d'élus, et celle des villes-centres, qui concentrent la très grande majorité de la population, dans lesquelles la quasi-totalité des conseillers municipaux sont conseillers communautaires, comme à Besançon ou Le Havre.
J'alerte sur le fait que le législateur privilégierait ici l'intégrité de la représentation d'une composante politique d'un conseil municipal à la parité. Je ne sais pas si l'Assemblée nationale partagera cet arbitrage... L'idée même d'une micro-dérogation au principe de parité est de nature à déclencher quelques tempêtes. Personnellement, je voterai cette proposition de loi, mais sans être sûr qu'elle pourra prospérer.
Mme Françoise Gatel , auteur de la proposition de loi . - Ce texte très modeste apporte des solutions à des situations certes ponctuelles, mais qui représentent néanmoins une atteinte à la démocratie - je pèse mes mots.
La représentation des communes au sein de l'intercommunalité est déterminée quantitativement par le poids de la population, comme l'a rappelé la décision du Conseil d'État dit « Commune de Salbris ». Il ne s'agit nullement de contester ou de nier le principe de parité, mais il ne saurait, néanmoins, être supérieur au principe démocratique, qui permet à une commune d'être justement représentée au sein du conseil communautaire. En outre, les manquements qui ne permettent pas à la commune d'être représentée concernant principalement l'opposition, qui, souvent, avec un faible nombre de conseillers municipaux, se retrouve sous-représentée faute d'un réservoir suffisant de candidats pour siéger au conseil communautaire.
Monsieur Benarroche, si malice il y a, elle n'a pas de genre... Enfin, mes chers collègues, je crois que nous ne devons pas sous-estimer la détermination des femmes conseillères municipales à vouloir être conseillères communautaires.
M. Jean-Pierre Sueur . - M. Éric Kerrouche a évoqué deux amendements qui me paraissent extrêmement pertinents. Il conviendrait d'instaurer la parité au sein des exécutifs des intercommunalités, ou a minima, une clause miroir qui impliquerait la même répartition au sein de l'exécutif qu'au sein de l'assemblée intercommunale. Or ces amendements tomberaient sous le coup du fameux article 45 de la Constitution.
Cette proposition de loi porte sur l'intercommunalité et la parité. Je ne comprends donc pas pourquoi ces amendements seraient irrecevables dans la mesure où l'article 45 dispose que, en première lecture, tout amendement est recevable dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte. Si je conviens que ces amendements n'ont pas un lien direct avec le texte, ils ont un rapport indirect avec le texte que nous examinons. J'aimerais que l'on me dise un jour au nom de quel principe l'adjectif « indirect » n'est jamais pris en compte.
M. Alain Richard . - Je tiens à rappeler à notre collègue Jean-Pierre Sueur qu'un commentaire du Conseil constitutionnel précise qu'il est nécessaire qu'une des dispositions figurant dans le projet de loi initial permette de rattacher un amendement au périmètre du texte, ce qui n'est pas le cas dans cette proposition de loi.
M. Jean-Pierre Sueur . - Ce n'est qu'un commentaire !
Mme Nadine Bellurot , rapporteure . - Le texte porte ici seulement sur le remplacement des sièges communautaires en cas de vacance. Par ailleurs, ces amendements visent à modifier le code général des collectivités territoriales, alors que les dispositions proposées concernent le code électoral.
Le coeur du sujet est que nous souhaitons tous davantage de femmes maires, ce qui permettrait de résoudre l'ensemble des questions que nous nous posons ce matin.
Sur l'application de ce dispositif à l'issue d'une année de mandat seulement, l'objectif est très précisément de prévenir les actes de malveillance visant à contourner le principe de parité. L'amendement précise simplement le point de départ de l'application du dispositif.
Mme Catherine Di Folco . - J'entends votre explication sur cette année neutralisée. Cependant, des évènements majeurs peuvent survenir, tel le décès d'un conseiller. Pendant un an, vous pénalisez une collectivité qui subirait cette vacance au sein du conseil communautaire. Or des décisions prises à ce niveau impactent fortement les communes, comme vous l'avez si justement souligné.
Mme Nadine Bellurot , rapporteure . - Les dispositions existantes s'appliqueraient en cas de vacance du siège au cours de la première année du mandat : le conseiller pourrait être remplacé par un conseiller municipal, « fléché » ou non, s de même sexe.
M. François-Noël Buffet , président . - S'agissant du périmètre de l'article 45 de la Constitution, je vous propose de considérer que ce périmètre comprend les dispositions relatives aux modalités de désignation des conseillers communautaires représentant les communes en cas de vacance de siège.
Il en est ainsi décidé.
EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE
Article unique
L'amendement COM-4 est adopté.
Mme Nadine Bellurot , rapporteure . - Les amendements COM-1 et COM-5 visent à supprimer l'obligation de remplacer un conseiller communautaire par le suivant de liste pour les communes de moins de 1 000 habitants.
J'émets un avis défavorable sur ces amendements qui dérogent au résultat du vote des citoyens, qui ont décidé de l'ordre des conseillers municipaux du fait du mode de scrutin applicable aux communes de moins de 1 000 habitants. En outre, les règles applicables aux communes de moins de 1 000 habitants n'entraînent pas, aujourd'hui, de situation de vacance durable des sièges représentant une commune au conseil communautaire, puisque tous les conseillers municipaux inscrits sur la même liste que le démissionnaire peuvent prétendre à le remplacer. Enfin, s'agissant des règles de désignation des suppléants, l'ordre du tableau du conseil municipal qui régit la désignation des conseillers communautaires titulaires doit également être respecté dans la mesure où le conseiller suppléant a vocation à devenir le conseiller titulaire si celui-ci cesse d'exercer ses fonctions.
Mme Françoise Gatel . - Je rejoins totalement la rapporteure. Cette proposition de loi a pour objet de respecter le résultat démocratique. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les conseillers sont élus individuellement et figurent sur la liste en fonction de leur résultat personnel. « Piocher » dans la liste est donc de nature à revenir sur le choix des électeurs. Pour cette raison, j'y suis défavorable.
Mme Brigitte Lherbier . - Vous ne m'avez pas répondu sur la possibilité de flécher dès la constitution des listes municipales davantage de candidats.
Mme Nadine Bellurot , rapporteure . - La proposition de loi ne fait que répondre à une difficulté en ajustant une situation très ponctuelle, la vacance durable au sein d'un conseil communautaire. Il ne s'agit nullement ici de faire un travail de fond pour modifier le code général des collectivités territoriales ou le code électoral qui régissent les règles de fléchage des candidats dès la constitution des listes de candidats aux élections municipales. Enfin, je rappelle que le fonctionnement des EPCI repose largement sur des accords locaux, qui peuvent décider aussi des acteurs qui intégreront leur conseil communautaire.
Les amendements COM-1 et COM-5 ne sont pas adoptés.
Les amendements COM-3 et COM-2 sont déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.
L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Article unique |
|||
Mme BELLUROT, rapporteure |
4 |
Précisions relatives au point de départ de l'application des dérogations |
Adopté |
Article(s) additionnel(s) après l'article unique |
|||
M. SAURY |
1 |
Supprimer l'obligation de remplacer un conseiller communautaire par le suivant de liste pour les communes de moins de 1 000 habitants |
Rejeté |
M. MAUREY |
5 |
Supprimer l'obligation de remplacer un conseiller communautaire par le suivant de liste pour les communes de moins de 1 000 habitants |
Rejeté |
M. KERROUCHE |
3 |
Modification du mode de scrutin pour l'élection des conseillers municipaux dans les communes de moins de 1 000 habitants |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
M. KERROUCHE |
2 |
Modification du mode de scrutin pour l'élection des vice-présidents au bureau des conseils communautaires |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 16 ( * ) .
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 17 ( * ) . Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 18 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 19 ( * ) .
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 1 er mars 2022, le périmètre indicatif de la proposition de loi n°860 (2021-2022) tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires.
Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions relatives aux modalités de désignation des conseillers communautaires représentant les communes en cas de vacance de siège.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Mme Françoise Gatel, auteur de la proposition de loi, sénatrice d'Ille-et-Vilaine
DIRECTION GÉNÉRALE DES COLLECTIVITÉS LOCALES DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR ET DES OUTRE-MER (DGCL)
M. Stéphane Brunot, adjoint à la Directrice générale des collectivités locales
Mme Karine Delamarche , sous-directrice des compétences et des institutions locales
M. François Charlottin , chef du bureau des structures territoriales à la sous-direction des compétences et des institutions locales
ASSOCIATION DES MAIRES DE FRANCE (AMF)
Mme Stéphanie Guiraud-Chaumeil , maire d'Albi et présidente de la communauté d'agglomération de l'Albigeois, co-présidente de la commission intercommunalités de l'AMF
Mme Marie-Cécile Georges , responsable du département « Intercommunalité et organisation territoriale »
INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE
M. Simon Mauroux , responsable du pôle juridique et institutions
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl21-860.html
* 1 La révision constitutionnelle du 8 juillet 1999 a inscrit à l'article 1 er de la Constitution le principe de parité en matière d'accès aux mandats électoraux et aux fonctions électives.
* 2 La loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral a créé, par son article 33, un nouvel article L. 273-9 du code électoral qui prévoit au 3° de son I que, pour les communes de plus de 1 000 habitants, « la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire est composée alternativement de candidats de chaque sexe ».
* 3 Réponse à la question écrite de Françoise Gatel par le ministère de la cohésion des territoires, n° 7233, publiée dans le JO Sénat du 17/03/2022, page 1408, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/questions/base/2022/qSEQ220327233.html .
* 4 Le rapporteur de la commission des lois du Sénat, Michel Delebarre, rappelait à cet égard que « le mandat à la commune s'exerce indépendamment de sa représentation à l'intercommunalité ; il constitue la source et le fondement du mandat communautaire dont le sort lui est lié. L'inverse n'est pas vrai » (voir le rapport n° 404 (2012-2013) de Michel Delebarre, fait au nom de la commission des lois du Sénat, déposé le 27 février 2013, p. 61, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l12-404/l12-40416.html#toc190 ). C'est pourquoi « les deux assemblées (...) divergeaient sur les conséquences de l'absence de conseiller municipal de même sexe élu sur la même liste et appelé à remplacer un élu qui aurait choisi de démissionner de l'organe délibérant tout en restant membre du conseil municipal : l'Assemblée nationale avait prévu en première et en seconde lectures que l'élu concerné serait dans l'obligation de renoncer aux mandats municipal et intercommunal ; le Sénat a préféré que le siège intercommunal ne pouvant être pourvu reste vacant (...) » (voir le rapport n° 883 de Pascal Popelin, fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, déposé le 3 avril 2013, p. 42, consultable à l'adresse suivante : https://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r0883.asp#P506_89475 ).
* 5 Mission flash sur la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, Elodie Jacquier-Laforge et Raphaël Schellenberger, 6 octobre 2021, au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale. La communication sur cette mission est consultable à l'adresse suivante : https://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/408231/3983283/version/1/file/Communication+MI+flash+parit%C3%A9+fonctions+%C3%A9lectives+et+ex%C3%A9cutives+bloc+communal.pdf .
* 6 Exemple topique, en 2021 dans le département de la Nièvre : la délibération par laquelle un conseil communautaire a procédé au remplacement d'un conseiller de sexe masculin démissionnaire de son mandat municipal par une conseillère municipale de sexe féminin, faute de candidats masculins, a fait l'objet d'un recours par le préfet, dans le cadre du contrôle de légalité et a été, logiquement, annulée, aboutissant à une vacance durable du siège.
* 7 Questions écrites n° 20598 de Stéphane Demilly publiée dans le JO du Sénat du 11 février 2021, p. 882, consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/questions/base/2021/qSEQ210220598.html ; n° 24815 de Hugues Saury publiée dans le JO du Sénat du 14 octobre 2021, p. 5859, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/questions/base/2021/qSEQ211024815.html ; n° 17433 de Jean Louis Masson publiée dans le JO du Sénat du 23 juillet 2020, p. 3303, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/questions/base/2020/qSEQ200717433.html ; n° 40561 de Lionel Causse publié dans la JO de l'Assemblée nationale du 3 août 2021, p. 6116, consultable à l'adresse suivante : https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-40561QE.htm ; n° 42555 de Xavier Batut publié dans la JO de l'Assemblée nationale du 16 novembre 2021, p. 8248, consultable à l'adresse suivante : https://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-42555QE.htm .
* 8 Mission flash précitée, p. 20.
* 9 La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a complété l'article 8 de la Constitution pour consacrer explicitement le principe, précédemment dégagé par la jurisprudence du juge constitutionnel, du pluralisme des courants d'idées et d'opinions.
* 10 Réponse à la question écrite de Françoise Gatel par le ministère de la cohésion des territoires, n° 7233, publiée dans le JO du Sénat du 17 mars 2022, p. 1408, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/questions/base/2022/qSEQ220327233.html .
* 11 Exposé des motifs de la proposition de loi, p. 1. Il est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/leg/exposes-des-motifs/ppl21-860-expose.html .
* 12 La DGCL a indiqué à la rapporteure qu'après le renouvellement de 2020, le nombre de femmes siégeant dans les conseils communautaires a augmenté de 4,4 points et atteint désormais 35,8 % des conseillers communautaires.
* 13 Conseil constitutionnel, QPC n° 2015-465 du 24 avril 2015, Conférence des présidents d'université, considérant n° 14.
* 14 Ibid , considérant n° 15.
* 15 Plus précisément, le commentaire du Conseil constitutionnel des décisions n° 2003-475 DC et n° 2003-476 DC du 24 juillet 2003 rappelle que « comme l'indiquent les travaux parlementaires, la révision constitutionnelle de juillet 1999 a eu pour seule finalité de lever le « verrou » constitué par la jurisprudence du Conseil constitutionnel proscrivant les distinctions fondées sur le sexe en matière d'élections politiques et, plus généralement, en matière d'accès aux emplois publics (...). Il a été jugé à cet égard que l'intention claire du constituant, telle qu'elle ressortait des débats parlementaires préalables à l'adoption de la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999, était non d'obliger, mais d'autoriser le législateur à instaurer des règles contraignantes quant au sexe des candidats aux élections politiques dont le mode de scrutin se prêtait à une telle réglementation (...) C'est dire que le dernier alinéa de l'article 3 de la Constitution, s'il permet au législateur d'imposer des règles de parité pour l'accès aux mandats électoraux de caractère politique, ne lui impose pas d'imposer. C'est dire aussi que le dernier alinéa de l'article 3 de la Constitution ne saurait être interprété comme restreignant le pouvoir que tire le législateur de l'article 34 de la Constitution de fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées parlementaires ».
* 16 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 17 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 18 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.
* 19 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.