B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
1. Le nombre croissant de repas à un euro dans un contexte de précarité étudiante
Dans le contexte de la crise sanitaire, des mesures de soutien au pouvoir d'achat ont été déployées à la rentrée 2020, avec notamment la création d'un tarif à 1 euro, dans les restaurants universitaires des CROUS, pour les étudiants boursiers , et le gel à 3,30 euros pour les autres étudiants . Par la suite, en janvier 2021 , le tarif à 1 euro a été étendu à l'ensemble des étudiants , boursiers et non boursiers.
Depuis la rentrée 2021, le repas à 1 euro n'est plus accessible qu'aux étudiants boursiers et aux étudiants « en situation de précarité » , ces derniers devant faire état de difficultés financières graves constatées par les services sociaux des Crous. Jusqu'au 31 décembre 2021, les étudiants non boursiers qui souhaiteraient bénéficier de la mesure peuvent déposer par voie dématérialisé un dossier simplifié de demande ; néanmoins, à compter du 1 er janvier 2022, les étudiants devront prendre attache avec les services sociaux afin que leur dossier puisse faire l'objet d'une évaluation approfondie.
Le coût du repas à un euro s'est élevé à 47,5 millions d'euros en 2021, intégralement compensé par l'État. La dotation prévue en PLF 2023 s'élève à 51 millions d'euros soit une augmentation de 1,55 million d'euros par rapport à la LFI 2022.
S'agissant du nombre d'étudiants bénéficiaires, il s'élevait à 319 296 étudiants boursiers en 2020-2021, et 433 860 étudiants boursiers en 2021-2022. D'après les informations fournies au rapporteur spécial, la fréquentation des restaurants universitaires devrait continuer à croître très rapidement, en particulier du fait de la hausse des coûts des produits alimentaires. Le réseau des oeuvres universitaires indique avoir constaté une activité à la rentrée 2022 supérieure de 20 % à 30 % à l'année précédente.
Nombre de repas à 1 euro servis dans le réseau des Crous au 31 août 2022
2020-2021 (année universitaire) |
2021 (année civile) |
2021-2022 (année universitaire) |
2022 (année civile) |
|
Boursiers |
7 845 965 |
12 598 972 |
17 148 117 |
9 324 227 |
Non boursiers |
6 905 373 |
6 846 105 |
||
Non boursiers précaires |
219 348 |
508 863 |
288 646 |
|
Total |
14 751 338 |
19 664 425 |
17 656 980 |
9 612 873 |
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
2. Malgré une amélioration de la situation financière des CROUS, une nécessaire vigilance sur les conséquences de la hausse des coûts
Le rapporteur spécial s'était inquiété au cours des années précédentes de la non-compensation des pertes d'exploitation pendant la crise sanitaire qui avait fortement pesé sur le réseau des oeuvres universitaires.
Il se félicite de la stabilisation des montants exceptionnels accordés pendant la crise sanitaire. Il réitère toutefois certaines des observations émises au cours des années précédentes, en particulier sur la non-compensation intégrale depuis 2020 des différentes mesures destinées à lutter contre la précarité étudiante reconduites en 2023 - comme le gel de l'augmentation des loyers et la mise en place d'une offre de restauration à 1 euro.
Plusieurs points d'attention doivent cependant être soulevés et pourraient affecter la situation financière des Crous en 2023.
En premier lieu, les conséquences de la hausse des coûts des denrées alimentaires pourraient engendrer un effet ciseaux, le nombre de repas servis augmentant en parallèle du renchérissement des prix alimentaires. S'agissant de l'exercice 2022, les prévisions à date du CNOUS font état d'une possible hausse des effets directs du repas à 1 euro pour la fin de l'année, pour un coût total de l'ordre de 50 millions d'euros. Le Crous estime que le coût d'un repas s'élèverait en moyenne à 7 euros, soit plus du double du coût compensé au réseau (c'est-à-dire 3,30 euros).
3. La CVEC, une ressource croissante essentiellement fléchée vers les établissements d'enseignement supérieur
L es crédits de l'action 03 « santé des étudiants et activités associatives, culturelles et sportives » seront complétés par le produit de la « contribution de vie étudiante et de campus » (CVEC) .
Cette contribution d'un montant de 95 euros pour l'année 2022-2023 , en hausse de 3 euros par rapport à l'année précédente a été créée en 2018 par la loi Orientation et réussite des étudiants. Se substituant au droit de médecine préventive, elle est due chaque année par les étudiants inscrits en formation initiale dans un établissement d'enseignement supérieur - à l'exception des étudiants bénéficiant d'une bourse sur critères sociaux ou d'une allocation annuelle attribuée dans le cadre des aides spécifiques, des réfugiés, demandeurs d'asile et bénéficiaires de la protection subsidiaire.
Le produit de la CVEC est réparti entre les établissements d'enseignement supérieur d'une part, et les CROUS d'autre part, afin que ces derniers financent des actions au profit des étudiants inscrits dans les établissements non affectataires de la CVEC.
Évolution du produit de la CVEC depuis sa création
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires
En juillet 2022, au titre de l'année universitaire 2021-2022, 150 millions d'euros ont été collectés . 127,5 millions sont affectés aux établissements d'enseignement supérieur prévus dans la loi (universités ; établissements publics d'enseignement supérieur, établissements d'enseignement supérieur privés d'intérêt général) pour qu'ils mettent en place des actions en matière de vie étudiante. Par ailleurs, 22,5 millions d'euros sont alloués au réseau des oeuvres universitaires, pour qu'il finance à la fois des actions en propre, ainsi que des actions au profit des étudiants inscrits dans des établissements ne recevant pas la ressource CVEC.
En 2023, le montant prévisionnel de la collecte de la CVEC est de 175 millions d'euros.
Emploi et suivi des produits de la CVEC
La circulaire du 21 mars 2019 précise les actions éligibles à un financement par le biais de la CVEC : accompagnement social des étudiants, pratique sportive, art et culture, accueil. Pour programmer et suivre l'usage de la CVEC, chaque établissement affectataire doit se doter d'une commission spécifique rassemblant les différents acteurs de la vie étudiante pour proposer à son conseil d'administration une programmation et un bilan qualitatif et quantitatif de l'utilisation de la CVEC.
À l'échelle académique, une commission territoriale, présidée par le recteur associant l'ensemble des établissements affectataires ou non, le CROUS et les acteurs de la vie étudiante, devra se réunir entre une et trois fois dans l'année afin de faciliter la coordination des actions menées avec le financement de la CVEC. Le CNOUS présente au ministre chargé de l'enseignement supérieur un rapport annuel récapitulant le total des sommes collectées, les montants reversés à chaque établissement.
Selon les informations transmises au rapporteur spécial, la répartition de la CVEC par domaine en 2021 s'effectue comme suit : 21,8 % des dépenses sont consacrées au domaine social, 26,9 % à la santé, 21,4 % au sport, 14 % à la culture et 15,9 % à l'accueil . Le volume le plus important s'effectue pour les dépenses de fonctionnement et d'intervention (59 %), suivies des dépenses de personnel (26,1 %) et d'investissement (14,9 %). C'est dans le domaine social et le domaine culturel que l'on trouve la part la plus importante de dépenses de fonctionnement et d'intervention (75 % des dépenses consacrées à ces domaines) et ce sont les domaines sport et accueil qui consacrent le plus de dépenses aux investissements (respectivement 32 % et 27 % des dépenses consacrées au sport et à l'accueil). Enfin, c'est dans le domaine de la santé que les dépenses de personnel sont les plus importantes : elles représentent 43,6 % des dépenses de santé, 49 % étant consacrées aux dépenses de fonctionnement et d'intervention. Au global, 44,2 % des dépenses de personnel financées par la CVEC sont rattachées au domaine sanitaire.
En outre, sur l'année 2021, 246 ETPT emplois étudiants ont été financés par la CVEC, correspondant à 2 688 effectifs physiques.