B. POURSUIVRE LE RENFORCEMENT DE LA PLACE DE L'ÉTABLISSEMENT
Le Président de la République a annoncé la pérennisation de l'expérimentation menée à Marseille sur « l'école du futur ».
L'expérimentation marseillaise
Ce sont 59 écoles (maternelles, élémentaires et primaires) qui ont été volontaires pour s'engager dans des expérimentations pédagogiques. Parmi ces écoles, 81 % relèvent de l'éducation prioritaire (REP+ et REP) ou de l'éducation accompagnée (écoles dont la situation est assimilable à celle des REP). Près de 700 enseignants et 11 000 élèves sont ainsi concernés.
Hors dépenses de personnel, 3,5 millions d'euros ont été mobilisés . Sur le titre 2, le total des postes mobilisés s'élève à 120 postes d'enseignants, 55 AESH et 11 personnels de santé scolaire .
Un des volets les plus intéressants de ce dispositif est la possibilité pour le directeur de disposer d'un pouvoir de recrutement des enseignants à profils particuliers et de mener des projets d'établissement . Le rapporteur spécial est très favorable au renforcement de la liberté du chef d'établissement . En conséquence, l'extension de l'expérimentation marseillaise semble aller dans le sens d'une plus grande adaptation des recrutements en fonction des besoins et de l'offre locale d'enseignants, face à un système d'affectation nationale très dissuasif pour les jeunes enseignants.
L'extension de l'expérimentation s'accompagne de la création dès 2023 d'un fonds d'innovation pédagogique, qui devrait être doté de 500 millions d'euros d'ici 2027. En 2023, ce fonds devrait compter 150 millions d'euros , qui ne figurent pas sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » mais sur ceux de la mission « Investir pour la France de 2030 ».
En revanche, les informations concernant les modalités de gestion de ce fonds et de sélection des projets, ainsi que sa trajectoire complète d'ici 2027, restent très lacunaires . Le rapporteur spécial appelle le ministère à clarifier ces aspects le plus rapidement possible, afin de garantir la prévisibilité de la dépense et de permettre une évaluation de la sélection des projets d'établissement.
Concernant les usages internationaux, le rapporteur spécial renvoie à ses récents travaux sur les comparaisons européennes 18 ( * ) , laissant parfois des souplesses très étendues aux chefs d'établissements. Par exemple dans le cas portugais, le chef d'établissement, élu peut désormais décider librement de l'utilisation de ses heures, hors portugais et mathématiques, dans la limite de 25 % des horaires définis nationalement.
Le corollaire de cette liberté est une évaluation précise et individualisée au niveau de l'établissement , qui doit pouvoir laisser à chaque chef d'établissement la possibilité se comparer à des établissements possédant les mêmes caractéristiques et de mesurer la valeur ajoutée de chaque établissement. Le Conseil d'évaluation de l'école (CEE), créé en 2019, est chargé de l'évaluation des établissements, dont il partage la maîtrise d'oeuvre avec les recteurs d'académie. Le Conseil a ainsi mis en oeuvre au printemps 2020 un cadre d'évaluation des établissements scolaires.
Le ministère avait initialement demandé aux recteurs de programmer chaque année l'évaluation de 20 % des établissements , soit environ 2 000 établissements du second degré par an, afin de viser l'évaluation de tous les établissements tous les cinq ans .
Du fait de la crise sanitaire, ce rythme a été ralenti, seuls 5 % des établissements ayant été évalués la première année. En 2022, 3 000 établissements du second degré avaient déjà été évalués.
Le rapporteur spécial considère que l'action du conseil d'évaluation de l'école pour guider les établissements dans leur auto-évaluation et former les évaluateurs externes est extrêmement intéressante.
* 18 Crise d'attractivité du métier d'enseignant : quelles réponses des pays européens ?, Rapport d'information de M. Gérard LONGUET, fait au nom de la commission des finances, n° 649 (2021-2022), juin 2022.