B. UNE FILIALISATION DÉSORMAIS EFFECTIVE D'EXPERTISE FRANCE DONT LES GAINS SONT ENCORE À VENIR
1. Les objectifs et modalités d'intégration d'Expertise France au sein du groupe AFD
Le III de l'article 10 de la loi n°2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales prévoit que « l'Agence française de développement est autorisée à détenir tout ou partie du capital de la société par actions simplifiée Expertise France ».
Ces dispositions traduisent les conclusions du
CICID
du 8 février 2018
qui indiquaient qu'afin
« de poursuivre l'effort de rationalisation du paysage de la
coopération française, le gouvernement décide de
procéder à l'intégration d'Expertise France au sein du
groupe AFD »
3
(
*
)
.
D'après le ministère des Affaires étrangères cette intégration vise deux principaux objectifs :
- d'une part, doter la France d'un opérateur de la politique de développement unifié et facilement identifiable ;
- d'autre part, favoriser une consolidation et structuration d'Expertise France avec l'appui de l'AFD permettant de réaliser des économies d'échelle et de renforcer l'efficacité de l'opérateur.
Afin de permettre l'intégration d'Expertise France au
sein du
groupe AFD, l'article 11 de la loi du 4 août 2021 a
procédé à
la transformation du statut de
l'opérateur d'un établissement public industriel et commercial
(EPIC) en celui de société par action
simplifiée.
En outre, la loi a prévu une révision de la gouvernance d'Expertise France qui était dotée d'un directeur général, nommé par l'État, et d'un conseil d'administration composé :
- du délégué interministériel à la coopération technique internationale, président du conseil d'administration ;
- de deux députés et de deux sénateurs ;
- de sept représentants de l'État ;
- d'un représentant des administrations de sécurité sociale ;
- d'un représentant des collectivités locales ;
- de trois personnalités qualifiées ;
- de deux représentants du personnel.
Par ailleurs, des représentants de certains ministères (Agriculture ou Intérieur par exemple) et de l'Agence française de développement pouvaient assister au conseil d'administration en qualité d'observateur.
La nouvelle gouvernance d'Expertise France , société par action simplifiée détenue entièrement par l'AFD, laisse une place plus importante qu'auparavant au président-directeur général de l'AFD . Celui-ci a notamment pour fonction :
- de présider le conseil d'administration d'Expertise France ;
- de désigner le directeur général d'Expertise France ;
- de désigner les quatre membres du conseil d'administration d'Expertise France chargés de représenter l'AFD.
2. Des synergies possibles mais pas d'indicateurs à ce jour pour mesurer leurs effets
D'après Expertise France, l'AFD et les tutelles ministérielles, le rapprochement des deux opérateurs doit permettre de dégager des synergies opérationnelles et fonctionnelles.
Au plan opérationnel, l'intégration doit permettre d'assurer une meilleure connaissance mutuelle , de consolider les outils et procédures permettant aux deux entités de travailler de concert et, enfin, de créer une « offre groupe » afin de concurrencer plus efficacement les autres acteurs du développement et de la coopération technique.
Au plan fonctionnel, des échanges engagés dès 2019 ont permis d'identifier neuf principales pistes de synergies dont :
- la fonction achat avec la mise en oeuvre de conventions de groupement de commande dès 2020, la définition d'une politique « achats groupe » en 2021 et l'institution d'un comité de pilotage des achats transverse au groupe ;
- la fonction financière afin de faciliter la consolidation des comptes du groupe ;
- la fonction de gestion des ressources humaines avec l'objectif de fluidifier les parcours professionnels au sein du groupe et d'améliorer l'efficacité des dispositifs de formation ;
- la sécurité sur le terrain avec l'intention de mettre en oeuvre des gouvernances locales croisées entre les équipes de l'AFD et celles d'Expertise France, de favoriser des co-localisations et de coordonner les achats en matière de sécurité ;
- la fonction immobilière dans la mesure où l'ensemble des collaborateurs du groupe sont appelés à être réunis sur le site de la Cité du développement à l'horizon 2026 ;
- en matière de système d'information afin de réaliser des mutualisations, l'option d'une intégration totale étant exclue à ce stade pour des raisons de coût.
Le ministère des Affaires étrangères indique toutefois qu'à ce jour les indicateurs permettant de suivre et d'évaluer les gains permis par l'opération d'intégration n'ont pas été définis. Certains sont envisagés tels que :
- l'évolution du budget dédié aux fonctions support par tête chez Expertise France ;
- la mise en place effective d'outils communs au groupe (politique d'achats communs, mutualisation des systèmes d'information, etc.) ;
- l'évolution du volume de financements AFD délégués à Expertise France pour la mise en oeuvre de projets.
Les rapporteurs prennent acte du fait que si l'intégration d'Expertise France au sein du groupe AFD est déjà une réalité et que des rapprochements opérationnels ont pu être engagés dès 2019, les gains de cette opération ne pourront probablement pas être observés avant quelques années.
Pour autant,
ils invitent les tutelles à
définir très rapidement des objectifs quantitatifs et qualitatifs
mesurables
à l'occasion de la définition
des COM 2023
et 2025 relatifs au groupe AFD et Expertise France plus
spécifiquement.
Ils seront, dans ce cadre, particulièrement vigilants à ce que la fusion n'entraîne pas de hausse des dépenses notamment en matière de personnel.
En effet, les salariés des deux entités relèvent à ce jour de deux conventions collectives différentes (celle du secteur bancaire pour l'AFD et celle du conseil pour Expertise France).
Les rapporteurs considèrent qu'il existe un risque que l'intégration des effectifs implique une revalorisation des avantages salariaux des personnels d'Expertise France, ce qui n'est pas souhaitable.
* 3 Relevé de conclusion du comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) du 8 février 2018.