E. L'ACTION 05 : UN VOLET AGRICOLE À LA MISE EN oeUVRE RALENTIE

La présente action, qui vise à accélérer la transition industrielle, sanitaire et écologique de l'agriculture et de l'alimentation, a fait l'objet d'une ouverture de 1,124 milliard d'euros d'autorisations d'engagement et de 390 millions d'euros de crédits de paiement en loi de finances initiale pour 2021.

Pour 2022, le projet de loi de finances initiale prévoit l'ouverture de 730,3 millions d'euros de crédits de paiement.

Crédits de l'action 05 « Transition agricole »

prévision 2021

2022

AE

CP

CP

Accélérer la transition agro-écologique

(plan de communication)

10

5

1,8

Accélérer la transition agro-écologique

(entreprises)

124

30

94

Plan protéines végétales

100

38

71

Filières animales

250

48

111

Renouvellement et développement des agro-équipements

250

107

235

Forêt

200

82

108

Accélérer la transition agro-écologique (collectivités territoriales)

190

80

110

Total action 05

1 124

390

730,3

La somme des CP en 2021 et 2022 peut être supérieure à la somme des AE dans la mesure où, d'une part, les crédits 2021 correspondent à une prévision et non une consommation effective, et, d'autre part, la répartition des crédits par action et sous-action dans les documents budgétaires est indicative.

Source : commission des finances, à partir des projets annuels de performances pour 2021 et 2022

À la fin septembre 2021, 599 millions d'euros d'AE étaient consommées, et 189 millions d'euros de CP, soit 53 % des AE et 48 % des CP votés en LFI 2021. Ces résultats décevants inquiètent le rapporteur spécial quant à la mise en oeuvre effective des actions portées par le volet agricole du plan de relance. L'ouverture conséquente de crédits de paiement demandée pour 2022 par le présent projet de loi de finances permettrait certes de solder la quasi-intégralité des restes à payer, mais paraît ambitieuse compte tenu de l'exécution provisoire des crédits pour 2021.

En effet, les crédits de paiement demandés pour 2022 couvriraient la quasi-intégralité des autorisations d'engagement votées l'année dernière. Le plan de relance, à supposer qu'il soit pleinement exécuté en 2022, laisserait ainsi moins de 4 millions d'euros de restes à payer sur les engagements 2021 au terme de l'exercice 2022.

L'action comporte 5 volets principaux .

S'agissant de l'accélération de la transition agro-écologique , diverses mesures sont prévues à destination des collectivités territoriales et des entreprises, complétées par un plan de communication d'ores et déjà déployé par le ministère au niveau national depuis 2019. Le plan de relance complète ce plan de communication par 10 millions d'euros d'autorisations d'engagement, notamment en prévoyant la mise en place d'une convention pour promouvoir les métiers agricoles avec l'Opérateur de compétences pour la coopération agricole, l'agriculture, la pêche et l'industrie agro-alimentaire et les territoires (OCAPIAT). Les CP proposés pour 2022 visent à financer des dépenses de communication relatives à l'enseignement agricole et des métiers auxquels il prépare, crédits qui paraissent bienvenus.

Dans ce volet, 94 millions d'euros de CP sont destinés aux transferts aux entreprises . Il s'agit par exemple de crédits délégués à FranceAgriMer (54 millions d'euros d'AE) dans le cadre d'appels à projets « structuration de filière », lancés en 2021, visant à faire monter en puissance les filières agroécologiques : par exemple l'opérateur a lancé en 2021 un appel à projets ciblant les besoins en recherche pour la culture de la betterave sucrière. Le Fonds Avenir Bio, géré par l'Agence Bio, bénéficie de 10 millions d'euros de crédits d'engagement supplémentaires qui s'ajoutent à ceux versés par le programme 149 de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». Ces crédits sont bienvenus dans la mesure où le développement de l'agriculture biologique se heurte à des limites de capacités de l'aval. Des crédits sont également prévus à destination des jeunes agriculteurs, afin de leur permettre d'effectuer un « bilan carbone » de leur système de production et d'engager un processus d'amélioration de leur performance environnementale (10 millions d'euros d'AE). 50 millions d'euros d'AE sont également prévus pour la replantation de haies.

Enfin, 110 millions d'euros de CP sont destinés sur ce volet aux transferts aux collectivités territoriales . Ces crédits sont destinés par exemple aux petites communes rurales souhaitant proposer des repas scolaires composés de produits de qualité, frais et respectueux de l'environnement, et locaux. Ils viennent également en appui aux projets alimentaires territoriaux des collectivités et soutiennent le développement de jardins partagés.

Sur ce premier volet, les crédits proposés devraient donc couvrir la quasi-intégralité des engagements ouverts en 2021 . Il est toutefois regrettable que le projet annuel de performances ne précise pas la déclinaison des CP proposés par type de mesures, ni le niveau de mise en oeuvre de ces mesures en 2021 . Il est donc impossible d'estimer le montant d'AE et de CP alloué en 2021 et 2022 à chaque mesure et évaluer le reste à payer sur chaque type de dispositif.

Un volet doté initialement de 100 millions d'euros d'AE est ensuite consacré à un plan « Protéines végétales », complété par des crédits du quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4). Ce plan, qui vise à réduire la dépendance de nos agriculteurs aux importations de matières premières pour l'alimentation animale, bénéficierait de 71 millions d'euros de CP en 2022. L'information budgétaire reste néanmoins particulièrement évasive sur les actions financées dans le cadre de ce plan.

S'agissant du volet « filières animales », 111 millions d'euros de CP sont prévus pour 2022 . Les mesures de ce volet ne sont globalement pas destinées aux éleveurs. Les fonds mis en place pour élever les garanties sanitaires des exploitations ont finalement fait l'objet d'un transfert à la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » 26 ( * ) . Mais, la consommation de cette enveloppe passe par un contrat avec les régions axé sur la recherche et la formation pour prévenir les maladies animales, de sorte que l'impact en exploitation devrait être assez indirect. Par comparaison, 25 millions d'euros de CP étaient prévus en 2021 (pour 130 millions d'euros d'AE initialement prévus) pour améliorer les chaînes d'abattage avec, là également, un accent mis sur la formation. Des crédits sont également prévus afin d'assurer la prise en charge des animaux abandonnés ou en fin de vie par les refuges ou associations pour l'accueil et la stérilisation des animaux. Une nouvelle fois, l'information budgétaire ne précise pas la déclinaison des CP demandés pour 2022 par type de mesure.

235 millions d'euros de CP sont demandés en 2022 sur le volet concernant le renouvellement et le développement des agro-équipements, qui concernent les filières végétales. Une prime à la conversion est ainsi offerte aux exploitants qui s'engagent dans des plans de réduction de la consommation de produits phytosanitaires ou de modifications des conditions culturales pour acheter des agro-équipements (71 millions d'euros de CP en 2021, pour 135 millions d'euros d'AE). Une aide à l'investissement pour lutter contre les effets du changement climatique est également prévue (32,5 millions d'euros de CP en 2021 pour 100 millions d'euros d'AE). Il s'agit d'une aide individuelle pour l'acquisition de dispositifs de protection contre le gel, la grêle ou la sécheresse, mais également d'un financement de projets collectifs de gestion de l'eau, en complément de financements du FEADER, des agences de l'eau et des régions.

Enfin, 108 millions d'euros de CP sont prévus sur le volet « forêt » dans le PLF 2022. La technologie Lidar devait être soutenue en 2021 par une enveloppe de 22 millions d'euros en AE et CP dans le but d'améliorer la connaissance des situations sylvicoles. Par ailleurs, 178 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 60 millions d'euros de CP étaient prévus en 2021 pour participer au renouvellement et la diversification des forêts publiques et privées, afin de renforcer leur résilience et d'accroître leur rôle de puits de carbone. Cette stratégie se traduit par des opérations d'amélioration de parcelles pauvres ou vulnérables et de reconstitution des forêts endommagées par les récentes attaques d'insectes (en Grand-Est et Bourgogne-Franche-Comté). Ces opérations s'accompagnent d'un soutien à l'investissement au bénéfice de la filière forêt-bois, pour accélérer sa modernisation et son adaptation aux changements induits par le dérèglement climatique. Les collectivités territoriales bénéficient également de ces aides.

Lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2021, la commission des finances du Sénat a souhaité que le volet « forêt » bénéficie de 10 millions d'euros supplémentaires d'AE et de CP, à destination des travaux préalables à la reforestation. La commission mixte paritaire a conservé cet apport du Sénat.

La mesure « Renouvellement forestier » du plan de relance

L'enveloppe globale de la mesure « Renouvellement forestier » est de 150 millions d'euros. Elle est ventilée de la manière suivante.

Concernant les forêts des propriétaires privés et des collectivités, 35 opérateurs économiques lauréats ont été sélectionnés via un appel à manifestation d'intérêt (AMI) « Renouvellement forestier » pour faciliter l'émergence et le bon déroulement des projets. Les lauréats ont pour rôle de conseiller et susciter l'adhésion des propriétaires forestiers potentiellement concernés par cette mesure d'aide et de les représenter auprès des services de l'État en charge de leur instruction (première tranche de 95 millions d'euros). Les propriétaires peuvent également déposer directement leur dossier en ligne sur le site dédié à cette mesure (deuxième tranche de 25 millions d'euros).

Concernant les forêts domaniales, une convention a été signée avec l'ONF qui est en charge de la mise en oeuvre de ces mesures de renouvellement (troisième tranche de 30 millions d'euros).

Les taux d'aide proposés aux propriétaires forestiers sont les suivants :

- pour le volet n° 1 relatif aux peuplements sinistrés par des phénomènes de sécheresse ou biotiques : 80 % ;

- pour le volet n° 2 relatif aux peuplements vulnérables aux effets du changement climatique : 60 % ;

- pour le volet n° 3 relatif aux peuplements pauvres : 60 %.

Enfin, l'aide de l'État bénéficie aux propriétaires forestiers publics ou privés ou leurs groupements dans la limite du plafond de minimis entreprises, fixé à 200 000 euros au cours des trois derniers exercices fiscaux. Ce plafond pourra être supprimé au cours de l'opération, sous réserve des suites données par les services de la Commission européenne sur les régimes d'aide notifiés par les autorités françaises.

À mi-parcours, le montant total de subventions demandées incluant les demandeurs individuels ainsi que les lauréats de l'AMI s'élève à 40 millions d'euros pour une surface totale de 9 400 hectares.

Source : réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales »

D'après les réponses au questionnaire budgétaire, parmi les principaux abondements et redéploiements déjà décidés et qui pourraient connaître une traduction budgétaire dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de fin de gestion, figurent les aides pour la conversion des agroéquipements et les investissements de transition en matière agricole (180 millions d'euros) ainsi que le renforcement du soutien à la filière forêt et bois (100 millions d'euros) déjà annoncé par le Premier ministre en juillet.

Au total, l'information budgétaire ne permet pas de suivre les réallocations de crédits qui ont pu avoir eu lieu en 2021 entre les volets de l'action, pas plus qu'elle ne permet de conduire une évaluation de la mise en oeuvre, mesure par mesure, du volet « agricole » du plan de relance.


* 26 Sur les 100 millions d'euros d'AE et les 20 millions d'euros de CP prévus en 2021, respectivement 30 millions d'euros et 6 millions d'euros ont été transférés vers le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture » de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », destiné au financement de la biosécurité en élevage par le décret n° 2021-84 du 28 janvier 2021 portant transfert de crédits. De nouveau, un transfert de crédits hors titre 2 d'un montant de 19 millions d'euros en AE et 3,8 millions d'euros en CP a été réalisé par le décret n° 2021-831 du 28 juin 2021 portant transfert de crédits à destination du programme 149, également destiné au financement du Pacte biosécurité - bien-être animal.

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