C. DES EFFORTS À POURSUIVRE POUR AMÉLIORER LA LISIBILITÉ DES CRÉDITS OCTROYÉS À LA TRANSFORMATION ET À LA FONCTION PUBLIQUE

Les progrès qui pourraient éventuellement être constatés sur l'année 2021, et la clarification du portage budgétaire pour les années à venir, ne sont pas de nature à totalement effacer les critiques émises contre la mission. En particulier, demeurent valides celles qui craignent que la création de cette mission relève avant tout d'un « effet de communication », par la création de programmes spécifiques en lieu et place d'une dotation directe des administrations porteuses de projets de modernisation ou de restructuration nécessitant un financement supplémentaire. Certes, la volonté d'isoler les crédits dédiés à la mise en oeuvre de réformes structurelles est compréhensible, mais pas si cela se fait au prix de l'efficience budgétaire.

1. L'intégration bienvenue du Fonds d'accompagnement interministériel RH au programme 148

Les rapporteurs spéciaux, qui avaient recommandé dans leurs travaux précédents le rattachement du FAIRH au programme 148 81 ( * ) , ne peuvent que soutenir ce pas vers davantage de lisibilité .

En effet, sur cette mission, le Gouvernement a eu tendance à confondre effet de communication et efficacité budgétaire : créer un programme ad hoc pour chacun des fonds de transformation relevait de l'affichage et non de la recherche de la plus grande efficience budgétaire. Les rapporteurs spéciaux, comme la Cour des comptes, soulignaient ainsi, pour le programme 351, sa proximité avec les priorités de politiques publiques du programme 148, ce qui justifiait son rattachement 82 ( * ) .

Le programme 148 porte en effet déjà, sur l'action 03 « Appui et innovation des ressources humaines », quatre fonds aux crédits morcelés :

- le fonds pour l'innovation RH, destiné à soutenir l'innovation en matière RH dans la fonction publique d'État, sur la base d'appels à projets (0,97 million d'euros en 2022) ;

- le fonds interministériel d'amélioration des conditions de travail, qui vise à cofinancer des projets soumis par les employeurs afin d'améliorer les conditions de travail de leurs employés (0,97 million d'euros en 2022) ;

- le fonds des systèmes d'information RH (1,3 million d'euros) ;

- le fonds égalité professionnelle (1 million d'euros), créé par une circulaire du 22 février 2019 du secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics et renouvelé ensuite. À terme, une partie de ses crédits a vocation à être financée par les pénalités dues par les employeurs publics de l'État ne respectant pas leurs obligations en matière de nominations équilibrées.

Cette intégration apparaît d'autant plus justifiée que la mise en oeuvre du programme 351 se traduisait par la nécessité de procéder à des contournements budgétaires pour effectivement allouer les crédits aux lauréats de l'appel à projets. Le programme est en effet fortement contraint par les principes de la gestion publique. 80 % de ses crédits relèvent du titre 2 « dépenses de personnel », alors même que le programme ne porte aucun emploi. Pour cofinancer les projets sélectionnés, il doit donc procéder par décret de virement, à destination du programme porteur du projet, mais dans la limite d'un plafond maximal correspondant à 2 % des crédits ouverts sur le titre 2 sur le programme récipiendaire du transfert. En 2019, la DGFiP (programme 156) a rapidement dépassé ce plafond et la direction du budget a dû se livrer à une contorsion budgétaire : lever une partie de la réserve de précaution du programme 156 à hauteur du montant alloué par le programme 351 aux projets de la DGFiP et annuler à due proportion les crédits du programme 351, en loi de finances rectificative pour 2019. Il en a été de même en 2020.

Enfin, les crédits spécifiquement alloués au FAIRH connaissent, par rapport à la loi de finances initiale pour 2021 (50 millions d'euros, dont 28,7 millions d'euros notifiés à date 83 ( * ) ), une nette baisse, pour s'établir à 20 millions d'euros (CP) en 2022. Trois réformes seraient cofinancés par ce qui relève désormais de l'action 04 du programme 148 : le nouveau réseau de proximité de la DGFiP (10 millions d'euros), l'instauration de secrétariats généraux communs aux préfectures et aux directions départementales interministérielles (4 millions d'euros) et la réforme de l'organisation territoriale des ministères sociaux (6 millions d'euros).

2. Une interrogation sur l'avenir du programme 352

Le programme 352 portait initialement le fonds pour l'accélération des start-ups d'État . Depuis la loi de finances pour 2021, il porte également des dépenses de personnel , afin de cofinancer le recrutement de compétences rares et spécialisées dans le numérique et d'entrepreneurs d'intérêt général (près de 3 millions d'euros), en plus des dépenses de fonctionnement , pour le financement des start-ups d'État (8,8 millions d'euros pour 2022). Cette hausse des crédits (+ 14 %), supposée contribuer à favoriser l'émergence de produits numériques et le développement de recrutements innovants, ne doit pas masquer l'ampleur limitée des crédits (12,1 millions d'euros). Ainsi, le maintien d'un programme ad hoc pour l'innovation et la transformation numériques n'est pas conforme aux recommandations des rapporteurs spéciaux ou de la Cour des comptes .

S'ajoute de surcroît le plan de relance, dont les crédits dédiés à la numérisation de l'État - 291 millions d'euros au total en 2022, sont 24 fois plus élevés que ceux demandés sur le programme 352 . La numérisation de l'État est en réalité une priorité éclatée au sein du budget général, sur plusieurs dizaines de programmes, ce qui conduit légitimement à s'interroger sur la capacité de la Dinum a pouvoir, dans ce contexte, conduire une vraie révolution des usages dans l'ensemble des ministères.

La portée interministérielle de cette priorité et le poids de la Dinum pourraient sans doute être renforcés si le programme 352 était supprimé, et les crédits liés transférés sur l'action 16 du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » , qui correspond à la coordination de la politique numérique et constitue l'action support de la Dinum. C'est l'une des recommandations de la Cour des comptes 84 ( * ) , reprise par les rapporteurs spéciaux dans leurs travaux de contrôle 85 ( * ) . La logique interministérielle serait en effet préservée et le Fonds pourrait s'intégrer aux autres actions déjà portées par la Dinum, à l'instar du rattachement du FAIRH au programme 148.


* 81 Rapport n° 743, tome II, annexe 15, volume 1 (2020-2021) de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN, déposé le 7 juillet 2021 : Gestion des finances publiques et des ressources humaines - Crédits non répartis - Action et transformation publiques, dans le cadre de l'examen par la commission des finances de la loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020. Se reporter également à la communication en commission des rapporteurs spéciaux, en date du 7 juillet 2021.

* 82 NEB.

* 83 D'après les données inscrites dans le Bilan des réformes de productivité de l'action publique , publié en octobre 2021 par le ministère de l'économie, des finances et de la relance.

* 84 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission « Action et transformation publiques » en 2020 , avril 2021.

* 85 Rapport n° 743, tome II, annexe 15, volume 1 (2020-2021) de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN, déposé le 7 juillet 2021 : Gestion des finances publiques et des ressources humaines - Crédits non répartis - Action et transformation publiques, dans le cadre de l'examen par la commission des finances de la loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020. Se reporter également à la communication en commission des rapporteurs spéciaux, en date du 7 juillet 2021.

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