B. LE DÉBAT RÉCURRENT SUR LE STATUT DES TRAVAILLEURS DE PLATEFORMES

L'irruption des plateformes a donné une acuité nouvelle à la question de la frontière entre salariat et travail indépendant. Si la Cour de cassation a parfois reconnu l'existence d'un lien de subordination caractérisant un contrat de travail2 ( * ), il n'y a pas à ce jour de jurisprudence stabilisée.

Dans son rapport de mai 2020 sur le droit social applicable aux travailleurs indépendants économiquement dépendants 3 ( * ) , la commission des affaires sociales estimait nécessaire de dépasser le débat sur le statut de ces travailleurs et de développer leurs droits de manière pragmatique, notamment par la voie du dialogue social.

Le salariat n'est ni une revendication majoritaire des travailleurs concernés ni compatible avec un mode d'exercice qui laisse aux intéressés une large autonomie. À cet égard, la résolution du Parlement européen du 16 septembre 2021 sur le rapport de Sylvie Brunet, qui considère « qu'une présomption réfragable d'une relation de travail, conjuguée à un renversement de la charge de la preuve concernant le statut professionnel, faciliterait la classification correcte des travailleurs de plateformes », ne semble pas de nature à clarifier la situation . La création d'un « tiers statut », n'apparaît pas non plus souhaitable, même si le développement depuis plusieurs années de droits spécifiques à ces travailleurs tend à s'en rapprocher.

C. LE DÉVELOPPEMENT DE DROITS SPÉCIFIQUES

La loi « El Khomri » du 8 août 2016 a posé le principe selon lequel les plateformes, lorsqu'elles déterminent les caractéristiques de la prestation et fixent son prix, ont une responsabilité sociale à l'égard des travailleurs. Elle a également étendu aux travailleurs concernés certaines garanties fondamentales : une ébauche de droit de grève, ainsi que le droit de constituer une organisation syndicale.

La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) a introduit des dispositions spécifiques aux secteurs des VTC et de la livraison , telles que la possibilité pour les plateformes d'établir une charte de responsabilité sociale . Elle a par ailleurs prévu de nouveaux droits favorisant l'autonomie des travailleurs de ces secteurs : communication préalable par la plateforme de la distance couverte et du prix garanti, possibilité de refuser une prestation, accès des travailleurs aux données relatives à leur activité et libre choix de leurs horaires. Ces dispositions visent à sécuriser juridiquement leur statut d'indépendant tout en répondant en partie à leur attente de protections.


* 2 Décisions « Take Eat Easy » du 28 novembre 2018 et « Uber » du 4 mars 2020.

* 3 « Travailleurs des plateformes : au-delà de la question du statut, quelles protection ? », rapport de Michel Forissier, Catherine Fournier et Frédérique Puissat au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 20 mai 2020.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page