B. LES DÉPENSES DE PERSONNEL SONT MIEUX MAITRISÉES MALGRÉ UN ASSOUPLISSEMENT DES EFFORTS EN MATIÈRE DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS
1. Les dépenses de personnel ont été mieux évaluées grâce à la prise en compte de l'effet change-prix
Les rapporteurs spéciaux constatent que pour la première fois depuis 2015, il n'y a pas de sur-exécution des dépenses de personnel par rapport à la prévision en loi de finances initiale, ce qui doit être salué.
Cette amélioration résulte principalement d'une meilleure budgétisation, depuis la loi de finances pour 2019, de l'effet change-prix qui affecte particulièrement les dépenses de personnel.
En effet, le pouvoir d'achat des agents résidant
à l'étranger est partiellement garanti par un mécanisme
d'ajustement du montant de leur indemnité en fonction de
l'évolution du différentiel de change ou
d'inflation.
Par ailleurs, la rémunération des agents de droit local est, pour 60 % d'entre eux, versée en devises étrangères, ce qui peut engendrer une perte au change pour le ministère.
La situation préalable à la loi de finances initiale pour 2019 se caractérisait par une sous-budgétisation de l'effet change-prix qui impliquait, notamment, d'importantes ouvertures de crédits en collectif de fin de gestion et réduisait la portée de l'autorisation parlementaire.
La loi de finances initiale pour 2019 avait prévu un « rebasage » de l'effet prix qui s'est traduit par une augmentation des crédits de titre 2 de 27,9 millions d'euros.
L'exécution 2020 a poursuivi cet effort de sincérisation notamment par l'inscription en loi de finances initiale pour 2020 d'une provision :
- des effets de l'inflation mondiale sur la rémunération des agents de droit local ;
- des effets change-prix sur les indemnités de résidence à l'étranger ;
Par ailleurs, le risque d'une perte au change sur la rémunération des agents de droit local et sur les indemnités de résidence à l'étranger peut désormais être couvert par la mobilisation, en loi de finances rectificative, des crédits de la réserve de précaution.
Les rapporteurs spéciaux saluent l'effort de sincérisation mené et constatent qu'il a contribué à un plus grand respect de l'autorisation parlementaire.
2. Les effectifs continuent de se réduire mais dans des proportions moins importantes que prévu
Les rapporteurs spéciaux observent que le niveau des effectifs diminue en 2020 par rapport à 2019.
Ainsi, les emplois consommés en équivalent temps plein travaillé (ETPT) se situent en deçà du plafond inscrit en loi de finances initiale et des résultats constatés au titre de 2019.
De même, l'exécution du schéma d'emploi (- 5,1 millions d'euros) se caractérise par la suppression nette de 51 équivalents temps plein (ETP).
Exécution du schéma d'emploi
de la
mission en 2020
Catégories d'emplois |
Schéma d'emplois 2020 prévu (en EPT, hors effectifs affectés au suivi de la présidence française de l'Union européenne) |
Exécution du schéma d'emplois 2020 (en ETP) |
G1 |
+ 2 |
+ 10 |
G2 |
- 34 |
- 15 |
G3 |
- 15 |
- 17 |
G4 |
- 4 |
- 4 |
G5 |
- 30 |
- 25 |
Total |
- 81 |
- 51 |
Source : commission des finances du Sénat
Celle-ci se situe en deçà de la prévision de - 81 ETP inscrite au projet de loi de finances pour 2020 en raison de la décision, prise en cours d'exercice, de créer 30 postes supplémentaires pour le suivi de la présidence française de l'Union européenne.
Pour mémoire, ces suppressions d'emplois en ETP s'inscrivent dans le contexte d'une réforme du réseau de l'État et de ses opérateurs à l'étranger.
Sur le périmètre de la mission, les économies attendues par ses suppressions de postes (- 290 ETP) entre 2018 et 2020 s'élevaient à 23,9 millions d'euros 4 ( * ) .
Toutefois, le ministère a réalisé un effort de suppression en 2020 moins important qu'attendu afin d'assurer le suivi de la présidence française de l'Union européenne.
Ainsi, et d'après la note d'exécution budgétaire de la Cour des comptes, le niveau des économies réalisées ne s'élèverait qu'à 18,6 millions d'euros.
Le rapporteur spécial Vincent Delahaye regrette que les engagements pris en matière de contraction des effectifs n'aient pas été tenus, tout en reconnaissant que le ministère a fourni d'importants efforts sur cette question.
3. La maitrise des dépenses procède aussi de facteurs conjoncturels et doit alerter sur la persistance de faiblesses structurelles
Les rapporteurs spéciaux observent que les dépenses de personnel augmentent en 2020 (+ 0,6 %) dans une ampleur moindre que pour l'ensemble du budget général (+ 1 %).
Un tel constat se vérifie également pour la période 2017-2020 où la croissance des dépenses de personnel de la mission (+ 3,1 %) est d'un point de pourcentage inférieure à celle de l'ensemble du budget général (+ 4,2 %).
Évolution des dépenses de personnel de la mission Action extérieure de l'État (en millions d'euros) Source : commission des finances du Sénat |
Toutefois, les rapporteurs spéciaux estiment nécessaire de rappeler qu'une part de ce résultat positif s'explique, en 2020, par des facteurs essentiellement conjoncturels.
Ainsi, en raison du décalage de l'entrée en fonction de certains agents dans le contexte de la crise sanitaire, le niveau des indemnités de résidence est resté globalement stable entre 2019 et 2020 (386 millions d'euros).
En outre, l'euro s'est apprécié par rapport au dollar à partir du mois de mai 2020 (+ 12,9 % entre le 1 er mai 2020 et le 29 décembre 2020) ce qui a engendré un gain au change tant pour la rémunération des agents de droit local que pour les agents expatriés.
Ces éléments conjoncturels ne doivent donc pas occulter la nécessité d'une réflexion sur les facteurs qui favorisent une croissance continue des dépenses de personnel de la mission dont, en particulier, l'indemnité de résidence à l'étranger.
À cet égard, les rapporteurs spéciaux ont conduit plusieurs auditions avec la direction du budget et le ministère des affaires étrangères afin d'évaluer les pistes de réforme de cette indemnité qui pèse pour 40 % de la masse salariale.
Ils se montreront particulièrement vigilants quant aux évolutions que proposera le ministère à l'occasion du projet de loi de finances pour 2022.
* 4 Jaune budgétaire relatif à la mise en oeuvre de la réforme du réseau de l'État et de ses opérateurs à l'étranger annexé au projet de loi de finances pour 2021.