II. PLUS DES DEUX TIERS DES ABROGATIONS SUGGÉRÉES FINALEMENT RETENUES PAR LA COMMISSION DES LOIS

In fine , les travaux de la commission de lois ont conduit à écarter 49 des 163 lois dont la proposition de loi proposait l'abrogation . Ce nombre peut sembler important mais il doit être regardé à la lueur de l'extrême prudence qui a guidé les travaux du rapporteur. En cela, il témoigne de la qualité du texte déposé. Ces retraits ont été motivés par quatre motifs qui se sont parfois cumulés.

A. DES LOIS TOUJOURS UTILISÉES OU QUI POURRAIENT L'ÊTRE

La commission des lois a naturellement écarté les lois dont les conséquences de l'abrogation seraient dommageables ou risquées dès lors que leurs dispositions produisent toujours des effets de manière certaine ou sont toujours susceptibles de fournir une base légale à des situations ou des actes.

Elle a, par exemple, écarté l'abrogation de la loi du 27 décembre 1975 portant réforme du régime d'indemnisation des sapeurs-pompiers communaux non professionnels victimes d'un accident survenu ou d'une maladie contractée en service commandé, puisque cette loi constitue encore le fondement légal du versement de la pension de 22 anciens sapeurs-pompiers .

Parmi les textes qui ne sont pas nécessairement utilisés mais qui pourraient toujours se révéler utiles , la commission des lois a souhaité conserver la loi n° 78-727 du 11 juillet 1978 de programme sur les musées dont l'article 3 prévoit, au bénéfice du Parlement, des pouvoirs de contrôle spécifiques relatifs au musée d'Orsay.

B. DES LOIS DONT L'ABROGATION NUIRAIT À L'INTELLIGIBILITÉ DU DROIT EN VIGUEUR

Parmi les lois qu'envisage d'abroger la proposition de loi, certaines comportent des articles ayant introduit ou modifié des dispositions toujours en vigueur au sein d'un code ou d'une autre loi. Le rapporteur s'est donc interrogé, d'une part, sur l'effet juridique que pourrait avoir l'abrogation d'une disposition introductrice ou modificatrice et, d'autre part, sur l'intelligibilité d'une telle démarche vis-à-vis du public.

À ce sujet, l'avis du Conseil d'État est éclairant puisqu'il indique qu'une disposition A qui introduit, modifie ou abroge une disposition B épuise ses effets dès son entrée en vigueur. En conséquence, l'abrogation ultérieure de la disposition A est sans effet sur la disposition B , raison pour laquelle « abrogation sur abrogation ne vaut » 2 ( * ) .

Si cet adage juridique est aussi connu qu'admis, il n'en va pas de même pour les autres solutions auxquelles ce raisonnement aboutit. Beaucoup ne sont pas instinctives et risquent de créer de la confusion là où la présente proposition de loi cherche, au contraire, à introduire de la lisibilité. À la question « Que se passe-t-il si on abroge la loi du 28 décembre 1977 qui a créé l'article 112 du code civil ? », certains juristes, praticiens ou « simples » citoyens répondront que l'article 112 est abrogé, d'autres que cet article est toujours en vigueur, mais tous témoigneront de leur absence de certitude sur la réponse qu'ils fournissent.

Afin d'éviter que cette question se pose et qu'il revienne, le cas échéant, au juge d'y répondre à l'occasion d'un contentieux, la commission des lois a choisi de ne pas abroger les lois ayant introduit ou modifié des dispositions toujours en vigueur afin de garantir l'intelligibilité du droit positif.


* 2 L'abrogation d'une disposition A qui a elle-même abrogé une disposition B n'emporte pas le retour en vigueur de la disposition B .

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