Rapport n° 532 (2020-2021) de MM. Hugues SAURY et Rachid TEMAL , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 14 avril 2021
Disponible au format PDF (1,6 Moctet)
Synthèse du rapport (477 Koctets)
-
L'ESSENTIEL
-
I. UN PROJET DE LOI ATTENDU DEPUIS DEUX ANS
-
A. UNE POLITIQUE DOTÉE DE MOYENS EN FORTE
HAUSSE MAIS ENCORE DÉSÉQUILIBRÉE, INSUFFISAMMENT
PILOTÉE ET MAL ÉVALUÉE
-
B. UN PROJET DE LOI QUI APPORTE DES
AMÉLIORATIONS SANS RÉPONDRE À CERTAINS ENJEUX
ESSENTIELS
-
1. Des avancées certaines
-
2. Des lacunes importantes
-
a) Une « programmation » qui ne
programme... que sur une année !
-
b) Des critères de concentration sur les
pays pauvres qui restent insuffisants et un déséquilibre
prêts/dons et bilatéral/multilatéral qui risque de
persister
-
c) Des grands principes et des objectifs qui
peuvent encore être clarifiés
-
d) Une organisation du pilotage qui reste
marqué par une forte complexité
-
a) Une « programmation » qui ne
programme... que sur une année !
-
1. Des avancées certaines
-
A. UNE POLITIQUE DOTÉE DE MOYENS EN FORTE
HAUSSE MAIS ENCORE DÉSÉQUILIBRÉE, INSUFFISAMMENT
PILOTÉE ET MAL ÉVALUÉE
-
II. LES APPORTS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES
ÉTRANGÈRES, DE LA DÉFENSE ET DES FORCES
ARMÉES
-
1. Clarifier les grands axes et les objectifs de la
politique de développement solidaire
-
2. Compléter la programmation
financière : fixer un cap pour 2025
-
3. Améliorer l'information du Parlement dans
le cadre du rapport annuel prévu à l'article 2
-
4. Renforcer et clarifier le pilotage de la
politique de développement solidaire, réaffirmer la tutelle de
l'Etat sur l'AFD
-
5. Recentrer la politique de développement
solidaire sur les pays prioritaires
-
6. Plus de dons, plus de bilatéral
-
7. Construire une commission d'évaluation
indépendante et efficace
-
1. Clarifier les grands axes et les objectifs de la
politique de développement solidaire
-
I. UN PROJET DE LOI ATTENDU DEPUIS DEUX ANS
-
EXAMEN DES ARTICLES
DU PROJET DE LOI
-
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT SOLIDAIRE ET DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS MONDIALES ET À LA PROGRAMMATION
-
Article 1er A
Principaux objectifs de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales
-
Article 1er
Grands axes de la politique de développement solidaire, programmation financière et approbation du cadre de partenariat global (rapport annexé)
-
Article 2
Rapport annuel au Parlement sur la politique de développement
-
Article 2 bis (nouveau)
Rôle de la société civile
-
Article 1er A
-
TITRE II
DISPOSITIONS NORMATIVES INTÉRESSANT LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT SOLIDAIRE ET DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS MONDIALES
-
Article 3
Cadre de référence des politiques de l'État et des collectivités territoriales
-
Article 4
Financement d'actions de coopération par les autorités organisatrices de la mobilité
-
Article 4 bis (supprimé)
Prise en compte de l'action des organisations de la société civile dans le champ de compétence de la commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD)
-
Article 5
Conseil national du développement et de la solidarité internationale
-
Article 6
Réciprocité du volontariat de solidarité internationale
-
Article 6 bis (non modifié)
Devoir de vigilance des organisations proposant des actions de volontariat
-
Article 7
Renforcement de la tutelle de l'agence française de développement (AFD)
-
Article 8
Rapprochement d'Expertise France
avec le groupe Agence française de développement (AFD)
-
Article 9
Création d'une commission indépendante d'évaluation
compétente en matière de développement solidaire
-
Article 3
-
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES
-
Article 10 (non modifié)
Habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance sur l'attractivité
-
Article 10 bis (nouveau)
Information sur les besoins en fonds propres de l'AFD
-
Article 11 (non modifié)
Abrogation des articles de la précédente loi du 7 juillet 2014
-
Article 12 (non modifié)
Rapport sur la stratégie de la France en matière de mobilité internationale en entreprise et en administration
-
Article 13 (non modifié)
Rapport sur une dispense de criblage des bénéficiaires finaux pour certaines actions de stabilisation en situation de crise
-
Article 10 (non modifié)
-
COMPTES RENDUS DES AUDITIONS EN COMMISSION
-
EXAMEN EN COMMISSION
-
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU
SÉNAT (« CAVALIERS »)
-
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES
RAPPORTEURS
-
LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 532
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021
Enregistré à la Présidence du Sénat le 14 avril 2021
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de programmation, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ,
Par MM. Hugues SAURY et Rachid TEMAL,
Sénateurs
(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Olivier Cigolotti, Robert del Picchia, André Gattolin, Guillaume Gontard, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean-Marc Todeschini , vice-présidents ; Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Philippe Paul, Hugues Saury , secrétaires ; MM. François Bonneau, Gilbert Bouchet, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Alain Cazabonne, Pierre Charon, Édouard Courtial, Yves Détraigne, Mme Nicole Duranton, MM. Philippe Folliot, Bernard Fournier, Mme Sylvie Goy-Chavent, M. Jean-Pierre Grand, Mme Michelle Gréaume, MM. André Guiol, Ludovic Haye, Alain Houpert, Mme Gisèle Jourda, MM. Alain Joyandet, Jean-Louis Lagourgue, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Panunzi, Gérard Poadja, Mme Isabelle Raimond-Pavero, MM. Stéphane Ravier, Bruno Sido, Rachid Temal, Mickaël Vallet, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Richard Yung .
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : |
3699 , 3887 et T.A. 574 |
|
Sénat : |
404 , 529 et 533 (2020-2021) |
L'ESSENTIEL
I. UN PROJET DE LOI ATTENDU DEPUIS DEUX ANS
Les ambitions, les outils et les moyens de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales ont évolué, rendant nécessaire une mise à jour de la loi du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.
A. UNE POLITIQUE DOTÉE DE MOYENS EN FORTE HAUSSE MAIS ENCORE DÉSÉQUILIBRÉE, INSUFFISAMMENT PILOTÉE ET MAL ÉVALUÉE
1. Des moyens en hausse depuis plusieurs années...
L'aide publique au développement française est passée de 9 milliards d'euros en 2009 à 12 milliards d'euros en 2019 . La France s'est ainsi légèrement rapprochée de l'objectif, fixé par la communauté internationale, de 0,7% du RNB, restant toutefois en retrait par rapport à des pays comparables :
Source : OCDE CAD1
* Les chiffres 2018 et 2019 sont calculés selon la méthode de l'équivalent-don, réforme passée en 2018, qui comptabilise les prêts de manière plus adéquate pour les pays en développement. Les chiffres des années précédentes sont en en flux nets.
Les engagements de l'Agence française de développement (AFD), principal opérateur de cette politique, sont passés de 6 milliards d'euros en 2009 à 14 milliards d'euros en 2019 . L'opérateur Expertise France a également connu une forte croissance, passant de 105 millions d'euros de chiffre d'affaires pour les opérateurs fusionnés en 2014 à 230 millions en 2019.
2. ...mais une politique encore déséquilibrée
Le volume de l'aide ne doit pas constituer l'alpha et l'omega de la politique de développement solidaire . La commission insiste depuis de nombreuses années sur les déséquilibres de cette politique , auxquels la récente augmentation des moyens en dons n'a pas mis fin :
- un excès de prêts par rapport aux dons : les dons représentaient sur les dix dernières années en moyenne seulement 59% en flux bruts de l'APD française , contre 97% pour le Royaume-Uni, 75% pour les États-Unis et 84% pour la moyenne des pays du comité d'aide au développement de l'OCDE ;
- une proportion d'aide aux pays les plus pauvres insuffisante : seule une part très minoritaire de l'APD française bénéficie aux 47 pays les moins avancés (PMA) et à plus forte raison aux 19 pays prioritaires de la politique de développement solidaire. Ce phénomène est particulièrement net en ce qui concerne l'aide pays programmable 1 ( * ) (APP), qui constitue le « coeur » de l'APD :
En M€, données brutes |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
|
France |
APP |
4 205,5 |
4 142,6 |
4 455,6 |
5 273,4 |
5 344,8 |
APP allouée aux PMA |
844,7 |
820,6 |
747,5 |
901,3 |
951,3 |
|
%PMA |
20% |
20% |
17% |
17% |
18% |
|
APP allouée aux 19 PP |
644,4 |
595,7 |
541,1 |
673,9 |
707,4 |
|
%PP |
15% |
14% |
12% |
13% |
13% |
|
Pays-Bas |
APP |
691,5 |
631,3 |
852,2 |
741,2 |
939,2 |
APP allouée aux PMA |
353,5 |
288,3 |
329,4 |
349,7 |
401,3 |
|
%PMA |
51% |
46% |
39% |
47% |
43% |
|
Suède |
APP |
971,7 |
975,4 |
1 076,0 |
1 259,0 |
1 372,5 |
APP allouée aux PMA |
470,7 |
520,8 |
526,1 |
639,8 |
733,7 |
|
%PMA |
48% |
53% |
49% |
51% |
53% |
|
Etats-Unis |
APP |
11 160,8 |
12 209,3 |
12 918,8 |
12 820,2 |
12 153,6 |
APP allouée aux PMA |
4 820,3 |
5 341,2 |
5 767,6 |
5 647,5 |
5 160,1 |
|
%PMA |
43% |
44% |
45% |
44% |
42% |
|
Allemagne |
APP |
5 785,1 |
6 926,0 |
7 389,3 |
7 451,0 |
8 303,4 |
APP allouée aux PMA |
1 067,7 |
1 048,7 |
1 225,0 |
1 220,3 |
1 326,4 |
|
%PMA |
18% |
15% |
17% |
16% |
16% |
|
Royaume-Uni |
APP |
4 147,2 |
5 073,0 |
5 077,5 |
4 714,5 |
4 566,0 |
APP allouée aux PMA |
2 101,8 |
2 365,4 |
2 123,4 |
1 863,9 |
1 800,0 |
|
%PMA |
51% |
47% |
42% |
40% |
39% |
- au sein de la mission « Aide publique au développement », une part majoritaire de l'APD française est composée d'aide multilatérale . La volonté de se réapproprier la politique de développement solidaire passe nécessairement par une augmentation de la part bilatérale de l'aide.
3. Un pilotage complexe et pas assez efficace, une AFD trop indépendante
Le pilotage de la politique de développement solidaire est dispersé entre trois ministres (chargés du développement, de l'économie et du budget, et de l'Outre-mer), une instance interministérielle (le CICID) et son co-secrétariat assuré par deux ministères et, pour l'AFD, par un conseil d'orientation stratégique. Il existe en outre deux instances de concertation : le Conseil national pour le développement et la solidarité internationale (CNDSI) et la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD).
L'AFD, dotée d'une « force de frappe » financière en constante augmentation et d'une propension à intervenir dans un nombre de pays et sur des thématiques de plus en plus étendues, n'aligne pas toujours sa stratégie avec celle de ses tutelles . Dans son rapport sur les opérateurs de l'action extérieure de l'Etat (juin 2020), la Cour des comptes a ainsi estimé que « Les outils de pilotage dont dispose le MEAE demeurent insuffisants pour lui permettre d'exercer une véritable tutelle stratégique, au niveau central, sur l'AFD ».
4. Une politique insuffisamment évaluée
Un montant total de près de 11 milliards d'euros en 2019, des engagements de l'AFD qui atteignent près de 12 milliards d'euros : la politique d'aide publique au développement se traduit désormais par des financements très importants. Il est d'autant plus essentiel qu'un dispositif d'évaluation efficace et transparent soit mis en place . Actuellement, l'évaluation interne (au sein des ministères et de l'AFD) souffre d'une certaine dispersion et d'un manque d'indépendance. Et il n'existe pas d'évaluation externe dotée de capacités d'expertise suffisante. En outre, les évaluations sont insuffisamment orientées vers l'analyse de l'impact final des projets.
B. UN PROJET DE LOI QUI APPORTE DES AMÉLIORATIONS SANS RÉPONDRE À CERTAINS ENJEUX ESSENTIELS
Le nouveau projet de loi de programmation permet d'entériner les ambitions plus fortes affichées depuis quelques années par la politique de développement solidaire. Cependant, sur certains sujets essentiels, ce texte ne répond pas aux enjeux .
1. Des avancées certaines
Le projet de loi comporte une programmation financière qui entérine l'atteinte de l'objectif des 0,55% du RNB consacrés à l'aide publique au développement en 2022 . En outre, il est prévu une poursuite de la hausse des moyens devant transiter par les organisations de la société civile , domaine dans lequel la France est actuellement très en retrait par rapport aux pays comparables.
Par ailleurs, le texte améliore la « redevabilité » de la politique de développement solidaire via deux dispositions :
-un rapport annuel du Gouvernement au Parlement suivi d'un débat. Ce rapport comportera toutes les informations nécessaires à la bonne compréhension des actions menées au cours de l'année qui précède. Les députés y ont ajouté une information essentielle : la liste des pays dans lesquels intervient l'AFD, ce qui permettra de débattre des financements en directions de certains pays émergents (Chine, Turquie...).
- la création, conformément aux préconisations de la commission, d'une commission indépendante d'évaluation de la politique de développement solidaire . Celle nouvelle institution serait similaire à l' « Independant commission on aid impact » (ICAI) britannique. Elle serait placée auprès de la Cour des comptes et son secrétariat serait assuré par cette dernière.
- la transformation d'Expertise France en société par actions simplifiée (SAS) au sein du groupe AFD. Le modèle économique de l'agence d'expertise est ainsi conforté et les synergies entre les deux organismes seront mieux exploitées.
Le projet de loi clarifie également les dispositions relatives au volontariat international , afin de dynamiser cet outil précieux d'implication de nos concitoyens dans la politique de développement solidaire.
Enfin, il comporte un rapport annexé nommé « Cadre de partenariat global » qui présente l'intérêt de donner un « narratif » à la politique de développement solidaire, d'en énumérer les grands principes et les parties prenantes et de rappeler les objectifs de concentration sectorielle et géographique de l'aide. Il a été largement complété par les députés.
2. Des lacunes importantes
a) Une « programmation » qui ne programme... que sur une année !
Du fait du retard avec lequel a été présenté le projet de loi, la programmation financière prévue par l'article premier ne couvre paradoxalement que les années 2020, 2021 et 2022. Dans la mesure où les crédits prévus pour 2021 sont déjà fixés par la loi de finances initiale pour 2021, la seule année couverte par cette programmation est 2022 .
b) Des critères de concentration sur les pays pauvres qui restent insuffisants et un déséquilibre prêts/dons et bilatéral/multilatéral qui risque de persister
Le « cadre de partenariat » annexé reprend les critères de concentration géographique de l'aide depuis longtemps en vigueur 2 ( * ) . Or, bien qu'ils soient globalement déjà respectés, ces critères de concentration n'ont pas permis d'orienter suffisamment notre aide vers les pays les plus pauvres .
Les données relatives à l'évolution de l'APD française bilatérale selon les pays au cours des cinq dernières années reflètent cette difficulté à faire passer les priorités géographiques dans les faits malgré les critères repris par le projet de loi . La priorité sahélienne peine ainsi à se concrétiser :
En outre, l'article premier du projet de loi prévoit une augmentation des crédits en dons et des crédits bilatéraux, mais sans fixer d'objectif chiffré .
c) Des grands principes et des objectifs qui peuvent encore être clarifiés
Les finalités de l'aide publique au développement ont évolué. Aux objectifs « classiques » de lutte contre la pauvreté et de réduction des inégalités mondiales se sont ajoutés la promotion d'un développement compatible avec la protection de la planète et des objectifs transversaux tels que la promotion de l'égalité femmes/hommes, la défense des droits humains et la bonne gouvernance . La stratification dans le temps de ces objectifs appelait une clarification et une hiérarchisation. Le projet de loi s'y essaye sans pleinement y parvenir, malgré la mise en exergue par les députés de certains grands principes au sein d'un article liminaire.
d) Une organisation du pilotage qui reste marqué par une forte complexité
Le Cadre de partenariat annexé à la loi tente de préciser le pilotage de la politique de développement solidaire. Toutefois, plutôt qu'à un toilettage du dispositif, il procède à une énumération des compétences des échelons, sans que la distinction entre ces compétences n'apparaisse nettement. En outre, deux nouveaux échelons de pilotage font leur apparition : le conseil de développement, présidé par le Président de la République, et le conseil local de développement dirigé par l'ambassadeur dans chaque pays partenaire.
II. LES APPORTS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
La commission a adopté 84 amendements afin de rééquilibrer la politique de développement solidaire et d'en renforcer le pilotage et l'évaluation.
1. Clarifier les grands axes et les objectifs de la politique de développement solidaire
Afin d'améliorer l'intelligibilité de la politique de développement solidaire pour nos concitoyens, la commission a introduit une hiérarchisation entre les grands objectifs de cette politique et a placé les trois principaux d'entre eux en exergue au début du dispositif et du rapport annexé :
• l'éradication de la pauvreté et l'accès des populations aux services essentiels
• la promotion des droits humains, en particulier des droits des enfants, et le renforcement de l'État de droit et de la démocratie, l'égalité femmes/hommes
• la protection des biens publics mondiaux, en particulier la protection de la planète
2. Compléter la programmation financière : fixer un cap pour 2025
Le projet de loi « de programmation » ne programme en réalité de crédits que pour l'année 2022, trois mois seulement avant la loi de finances pour la même année. La commission a adopté une programmation des crédits de la mission « Aide publique au développement » devant permettre d'atteindre environ 0,6% du RNB consacrés à cette politique en 2025 . Avant la fin de l'année 2023, une fois les incertitudes liées à la pandémie de la covid-19 surmontées, cette programmation sera révisée afin d'examiner la possibilité d'atteindre l'objectif des 0,7% du RNB.
Parallèlement, la commission a rendu la Taxe sur les transactions financière à sa vocation première, en prévoyant que 60% de son produit bénéficierait à la politique de développement solidaire par le biais du FSD à compter de 2022.
3. Améliorer l'information du Parlement dans le cadre du rapport annuel prévu à l'article 2
• Une comparaison des flux d'APD avec les flux financiers privés à destination des pays aidés
• La répartition des montants de l'aide publique au développement française entre prêts et dons, en distinguant par pays, par programme et par opérateur
• Des informations sur la coordination entre acteurs militaires et acteurs de l'aide au développement au Sahel, afin de contribuer à un décloisonnement des approches dans cette région où la France mène une stratégie dite des « 3D » (défense, diplomatie, développement).
4. Renforcer et clarifier le pilotage de la politique de développement solidaire, réaffirmer la tutelle de l'Etat sur l'AFD
La commission a renforcé, au sein du cadre de partenariat global, le rôle du ministre chargé du développement dans la définition et la mise en oeuvre de la politique de développement solidaire. En lien avec le ministre chargé de l'économie, il lui reviendra d'animer l'ensemble de cette politique publique et de mettre en application les axes prioritaires réaffirmés dans l'article liminaire du projet de loi.
La tutelle de l'AFD sera renforcée grâce à un Contrat d'objectifs et de moyens (COM) rénové , comportant l'ensemble des objectifs fixés à l'agence par le ministre chargé du développement et les instances de coordination interministérielle. L'ensemble des documents stratégiques élaborés par l'AFD devront se conformer à ce COM, présenté au préalable aux commissions compétentes des deux assemblées. Le ministre chargé du développement et le ministre chargé de l'économique devront contrôler annuellement l'atteinte des objectifs fixés par le COM au cours d'une revue exhaustive.
La commission a également précisé les missions d'Expertise France afin de préserver son autonomie au sien du groupe AFD.
5. Recentrer la politique de développement solidaire sur les pays prioritaires
La commission a fixé pour la première fois un objectif de concentration de l'ensemble de l'aide programmable pays (APP), qui constitue le « coeur » de l'aide publique au développement, vers les 19 pays prioritaires de la politique de développement solidaire française. Seule la fixation d'un tel objectif ( 30% de l'APP consacrée aux pays prioritaires en 2025, contre environ 15% actuellement ) est en effet à même d'infléchir l'ensemble de cette politique vers les pays prioritaires, alors que les critères fixés depuis de longues années, repris sans changement par le texte initial, ne l'ont pas permis.
6. Plus de dons, plus de bilatéral
La commission a fixé un objectif de 65 % de dons et 35 % de prêts (contre 59 %/41 % en 2019 en flux bruts), afin de remédier au déséquilibre de l'APD française, dont la part de prêt n'est dépassée au sein du CAD de l'OCDE que par le Japon. Cet objectif est cohérent avec le recentrage sur les pays prioritaires puisque ceux-ci reçoivent une APD majoritairement formée de dons. Il permettra également de mettre l'accent sur les secteurs sociaux de base qui sont généralement financés par des subventions.
Parallèlement, la commission a fixé un objectif de 70 % d'aide bilatérale (contre 61% actuellement), afin de renforcer la maîtrise de la France sur sa politique de développement solidaire, celle-ci constituant désormais un outil d'influence essentiel face à la concurrence des puissances émergentes.
7. Construire une commission d'évaluation indépendante et efficace
La commission a fixé la composition de la nouvelle commission indépendante d'évaluation placée auprès de la Cour des comptes en prévoyant notamment la présence de quatre représentants du Parlement, de manière à assurer un lien fort avec la représentation nationale, chargée de l'évaluation des politiques publiques. Cette commission sera également composée de personnalités qualifiées compétentes en matière d'évaluation et de développement.
La commission a adopté le projet de loi ainsi modifié.
Le projet de loi sera examiné en séance publique à partir du mardi 11 mai 2021.
EXAMEN
DES ARTICLES
DU PROJET DE LOI
TITRE
IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE
DÉVELOPPEMENT SOLIDAIRE ET DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS
MONDIALES ET À LA PROGRAMMATION
Article 1er A
Principaux
objectifs de la politique de développement solidaire et de lutte contre
les inégalités mondiales
L'article 1 er A de la proposition de loi, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, décline les grands objectifs de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales, qui ne figuraient, au sein du texte initial, que dans le rapport annexé.
1. De grands objectifs qui font consensus
Introduit par un amendement du rapporteur adopté par la Commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, le présent article vise à mettre en exergue les principaux objectifs de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales . Cette mise en exergue est effectuée « dans un souci de visibilité et d'intelligibilité de la politique que la France entend mettre en oeuvre dans ce domaine ». Dans le texte initial, ses objectifs ne figuraient que dans le rapport annexé (dit « cadre de partenariat global » ou CPG).
Il est ainsi précisé que la politique de développement solidaire de la France vise l'éradication de la pauvreté dans toutes ses dimensions, la protection des biens publics mondiaux, la lutte contre les inégalités, la lutte contre l'insécurité alimentaire et la malnutrition, la protection de la planète, la promotion des droits humains, le renforcement de l'État de droit et de la démocratie et la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes. Il est également indiqué qu'elle inclut l'action humanitaire, veille à assurer la continuité entre les phases d'urgence, de reconstruction et de développement et promeut les normes internationales en matière de droits humains, de droit international humanitaire et de réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies.
L'article 1 er A se réfère en outre à trois engagements internationaux de la France : le programme de développement durable à l'horizon 2030 adopté le 25 septembre 2015 par l'Assemblée générale des Nations unies, l'accord de Paris sur le climat adopté le 12 décembre 2015 et le Programme d'action d'Addis-Abeba sur le financement du développement, approuvé le 27 juillet 2015. La France entend ainsi placer son action dans un cadre multilatéral et partagé dans lequel la nécessité de s'orienter vers un développement durable et solidaire fait consensus.
2.°Clarifier et hiérarchiser les objectifs de la politique de développement solidaire
Votre commission partage l'objectif de conférer un « narratif » clair à la politique française de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales et de la rendre plus intelligible aux yeux de nos concitoyens . La présentation des grands principes et objectifs de cette politique dans un article séparé en tête de la loi est ainsi bienvenue. Toutefois, elle estime que l'objectif de clarté est insuffisamment atteint par la rédaction actuelle qui, en particulier, ne distingue ni ne hiérarchise les objectifs entre eux.
Dès lors, votre commission a adopté un amendement COM-1 de ses rapporteurs précisant que la politique de développement solidaire poursuit essentiellement trois objectifs, le troisième étant transversal :
- la priorité est d'éradiquer la pauvreté et d'assurer l'accès aux services essentiels pour la population des pays pauvres. Ceci correspond à la compréhension ordinaire et traditionnelle de la politique d'aide au développement ;
- la protection des biens publics mondiaux est la seconde priorité, qui s'est progressivement affirmée comme un objectif de l'ensemble de la communauté internationale, notamment en ce qui concerne la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodiversité. Cet objectif vaut aussi bien dans les pays en développement que dans les pays « riches » ;
- en troisième lieu vient l'objectif transversal de promotion des droits humains, qui fait partie intégrante de l'identité de l'aide française et européenne par opposition à celle d'autres pays donateurs.
En outre, la commission a adopté un amendement COM-5 de M. Canévet rappelant le rôle important de la francophonie ainsi qu'un amendement COM-12 rect . de M. Gontard ajoutant la notion d'égalité filles/garçons à celle de l'égalité femmes/hommes déjà présente dans le texte.
Enfin, la commission a adopté un amendement COM-2 de ses rapporteurs rappelant que l'objectif premier des actions d'APD est bien de « répondre aux besoins des populations », ainsi qu'un amendement COM-9 de Mme Carlotti mettant en exergue le principe de non-discrimination dans l'attribution de l'aide aux bénéficiaires.
Enrichi de ces modifications, la commission a adopté l'article 1 er A.
La commission a adopté l'article 1 er A ainsi modifié .
Article 1er
Grands axes
de la politique de développement solidaire, programmation
financière et approbation du cadre de partenariat global (rapport
annexé)
L'article 1 er du projet de loi fixe à la fois les grands axes et la programmation financière de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales pour la période 2020-2022. La commission a prolongé la programmation financière jusqu'en 2025 et précisé certains objectifs afin que les priorités géographiques (pays prioritaires) et l'accent mis sur les dons et sur les actions bilatérales soient mieux mis en oeuvre.
1. Les grands axes de la politique de développement solidaire et la programmation financière
L'article 1 er du projet de loi a pour objet de fixer les grands axes de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales et d'instaurer une programmation financière pour la période 2020-2022.
Le paragraphe I de l'article 1 er annonce une programmation financière « complétée, avant la fin de l'année 2022, pour les années 2023, 2024 et 2025 ». En effet, le présent projet de loi a été élaboré il y a plus de deux ans et la programmation financière, qui à l'origine devait couvrir une partie significative du quinquennat, ne concerne finalement plus, en l'état, que l'année 2022. Votre commission a regretté ce retard, qui prive la programmation incluse dans cet article d'une grande partie de son intérêt. Elle note en outre que, comme pour la programmation militaire, le Gouvernement disposait d'au moins une partie des éléments nécessaires pour fixer dès à présent une programmation jusqu'en 2025, notamment en ce qui concerne les crédits budgétaire de la mission « Aide publique au développement ».
En commission, les députés ont adopté un amendement précisant que le complément de la programmation financière pour les années 2023 à 2025 serait ajouté « après consultation et vote du Parlement », ce que votre commission ne peut qu'approuver.
La cible des 0,7 %
Le paragraphe III dispose que la France consacrera 0,55 % de son revenu national brut (RNB) à l'aide publique au développement en 2022, ce qui correspond à l'engagement pris par le Président de la République. Le texte initial indiquait également que la France a « l'objectif de porter ultérieurement » la part de l'APD à 0,7 % du RNB, sans préciser de date pour atteindre cet objectif. Toutefois, les députés ont adopté en séance publique un amendement précisant que la France « s'efforcera d'atteindre 0,7 % de ce revenu national brut en 2025 ».
Rappelons que l'objectif des 0,7 % provient du rapport final de la Commission sur le développement international, plus connue sous le nom de « Commission Pearson », du nom de son président, l'ex-premier ministre du Canada et prix Nobel, Lester Pearson, remis à McNamara en septembre 1969. Ce rapport énonce : « Nous recommandons par conséquent que chacun des pourvoyeurs d'aide augmente ses engagements d'aide publique au développement de façon à ce que les décaissements nets atteignent 0,70 % de son produit national brut en 1975 ou peu après, mais en tout cas pas plus tard que 1980 ». Repris par les Nations unies dans les années 80, ce chiffre de 0,7 %, établi d'après des calculs économiques désormais obsolètes, est ensuite progressivement devenu un « mantra » des défenseurs de l'augmentation de l'APD. Il est notamment devenu une référence législative officielle pour le Royaume-Uni en mars 2015 (le pays a récemment décidé de diminuer sa contribution en raison de la crise économique actuelle).
Votre commission estime que cet objectif, bien que dépourvu de valeur économique précise, constitue une référence utile du fait de son acceptation générale et de son réalisme par rapport aux montants actuellement consacrés par les pays du comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE à l'APD. Dès lors, lui donner une certaine efficacité plaidait pour fixer une date, ainsi que les députés l'ont fait.
Des montants en hausse
Le IV (1°) de l'article 1 er dispose ensuite que les crédits de paiement de la mission APD, hors charges de pension, après avoir atteint 3 251 millions d'euros en 2020, se monteront à 3 935 millions d'euros en 2021, puis à 4 800 millions d'euros en 2022. Il précise en outre que 50 millions d'euros de crédits de paiement de la mission « Plan de relance » (programme 364 « Cohésion ») sont alloués à la politique de développement en 2021 : 25 millions pour une contribution à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans le cadre de l'initiative ACT-A et 25 millions pour d'autres organismes de santé internationaux.
En outre (3°), les ressources du Fonds de solidarité pour le développement (FSD) seront augmentées de 100 millions d'euros en 2022 par rapport à leur niveau de 2020 et 2021, atteignant 838 millions d'euros en 2022. Créée en 2005, ce fonds géré par l'Agence française de développement (AFD) est consacré à des dépenses multilatérales, en particulier dans les domaines de la santé, du climat et de l'environnement. Il est alimenté par deux taxes affectées, considérées comme faisant partie des « financements innovants » : la taxe de solidarité sur les billets d'avion, dont le produit s'est effondré avec la crise sanitaire, et une part du produit de la taxe sur les transactions financières (TTF), cette dernière ayant été créée spécialement pour alimenter l'aide publique au développement et ayant un rendement croissant (1,7 milliard d'euros de produit en 2020). Le projet de loi indique également qu'en l'absence d'une telle augmentation des ressources du FSD, l'augmentation de 100 millions d'euros alimentera directement la mission « APD ». Cette augmentation de 100 millions d'euros ne proviendra donc pas nécessairement d'une augmentation du prélèvement sur le produit de la TTF, actuellement fixé à 528 millions d'euros.
Enfin, le IV (4°) consolide ces différentes lignes de financement pour indiquer que l'addition des crédits de la mission « APD », de ceux de la mission « Plan de relance » et de ceux du FSD aboutit à un montant global de 3 989 millions d'euros en 2020, 4 723 millions d'euros en 2021 et 5 638 millions d'euros en 2022. Le V précise par ailleurs que l'évolution des autres ressources concourant à l'aide publique au développement, est donnée, mais seulement à titre indicatif, dans le cadre de partenariat global, et que ces ressources seront prises en compte pour l'atteinte de l'objectif de 0,55 % du RNB en 2022. En effet, l'APD française est très dispersée entre de multiples véhicules budgétaires et la mission « APD » proprement dite n'en représente qu'une partie minoritaire. En particulier, les frais d'écolage (frais consacrés en France aux étudiants en provenance des pays étrangers en développement) et de prise en charge des réfugiés sont comptabilisés au titre de l'APD, conformément aux règles fixées par l'OCDE. Il est donc logique, même si cela n'est pas pleinement satisfaisant intellectuellement, qu'ils soient pris en compte dans l'atteinte de l'objectif des 0,55 % du RNB.
Une répartition des financements qui doit suivre les grands objectifs
Plusieurs dispositions de l'article 1 er viennent ensuite préciser la manière dont les financements programmés seront répartis.
D'abord, le paragraphe VI indique, selon un axe déjà défini dans les conclusions du comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de février 2018, que la hausse de ces moyens « contribuera notamment au renforcement, d'ici 2022, de la composante bilatérale de l'aide publique au développement de la France et de la part de cette aide qui est constituée de dons. Ces moyens sont concentrés sur les pays les moins avancés, en particulier les pays prioritaires de la politique française de développement ». Il s'agit d'objectifs très importants et totalement partagés par votre commission, qui regrette d'autant plus qu'aucune disposition nouvelle ne soit proposée au sein du projet de loi pour en renforcer la mise en oeuvre, alors même que celle-ci n'est pas satisfaisante.
Ensuite, le paragraphe VII précise que les moyens transitant par la société civile augmenteront pour doubler en 2022 par rapport à 2017, puis que la France tendra vers la moyenne des pays de l'OCDE dans ce domaine. Le montant de 2017 était de 310 millions d'euros ; l'objectif à atteindre est donc de 620 millions d'euros en 2022.
Montant en M€ |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
APD bilatérale française transitant par la société civile française et internationale |
168,7 |
241,7 |
310,4 |
374,2 |
460 |
Part de l'APD bilatérale française transitant par la société civile française et internationale |
3,63% |
4,44% |
5,31% |
6,57% |
6,96% |
Source DGM/CIV 3 ( * )
Comme indiqué dans le tableau ci-dessus, la part de l'APD transitant par les organisations de la société civile augmente, correspondant en 2019 à 6,9 % de l'APD bilatérale totale. Les perspectives d'évolution de ces financements permettent d'établir une cible à 9 % de la part de l'APD bilatérale qui transitera par les organisations des sociétés civiles (OSC) en 2023. En comparaison avec les bailleurs issus des pays de l'OCDE, la France reste toujours en retrait sur ce point , l'APD bilatérale transitant par les OSC s'élevant en moyenne à 15 % 4 ( * ) .
Le VIII affiche la reconnaissance de l'importance des OSC tant du Nord que du Sud , et prévoit la mise en place d'un dispositif dédié à l'initiative de ces OSC sur des projets en vue de l'octroi d'une subvention. Or un tel dispositif existe déjà : il s'agit du dispositif Initiatives OSC (I-OSC) de l'Agence française de développement (AFD), principal mécanisme de cofinancement des OSC françaises et de leurs partenaires locaux, qui a permis en 2019 l'engagement en cofinancement de 93M€. Toutefois, le fonctionnement de ce dispositif n'offre pas totalement satisfaction aux OSC, qui estiment qu'il ne garantit pas suffisamment un véritable droit d'initiative et que les appels à projets favorisent à l'excès les très grosses organisations au détriment des structures plus légères, comme l'ont indiqué les représentants de Coordination Sud lors de leur audition par vos rapporteurs.
Le IX de l'article 1 er traite des collectivités territoriales, en prévoyant que les fonds consacrés au soutien de l'action extérieure des collectivités augmenteront pour atteindre en 2022, eux-aussi, le double du montant de 2017, objectif déjà fixé par le CICID de février 2018 . Depuis 2014, l'AFD cofinance directement des projets identifiés et mis en oeuvre dans les pays en développement par les collectivités françaises, à travers la Facilité de financement des collectivités territoriales françaises (FICOL). L'AFD a ainsi accompagné 72 projets, représentant un cofinancement AFD de 42 M€. L'enveloppe en 2020 atteint 9 M€. Par ailleurs, les cofinancements de projets de coopération des collectivités territoriales par la délégation à l'action extérieure des collectivités territoriales (DAECT) s'élevaient en 2020 à 5 936 500 €.
Outre celles déjà mentionnées, les députés ont apporté les modifications suivantes au présent article :
- par un amendement adopté en commission, ils ont précisé que les services de l'État concourant à la politique de développement solidaire devraient disposer des moyens humains correspondants . Il s'agit de s'assurer que le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) bénéficiera, dans les postes diplomatiques des pays éligibles à l'aide publique au développement et dans ses services centraux, des effectifs et des compétences nécessaires pour mener à bien ses missions de pilotage renforcé ainsi que le renouvellement des actions partenariales avec la société civile ;
- par un deuxième amendement adopté en séance publique, ils ont prévu dans un paragraphe X que le Gouvernement devrait mettre en place une base de données ouverte sur l'APD . En effet, le manque de données disponibles et de transparence sur l'aide publique au développement française est un reproche récurrent, alimenté par le classement de l'ONG « Publish What You Found », où la France occupe une place peu valorisante. Les députés ont également prévu que le Gouvernement remette au Parlement un rapport étudiant les différentes activités pouvant être comptabilisées au titre de l'APD de la France. Il s'agit notamment de poser la question de l'intégration des frais d'écolage et de bourses à l'APD, prévue par l'OCDE mais contestable du point de vue de la finalité de ces dépenses. Votre commission partage pleinement cette préoccupation .
Un nouveau dispositif pour les biens mal acquis
Enfin, les députés ont ajouté en séance publique un paragraphe XI instaurant un dispositif de restitution des biens mal acquis confisqués . Une proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Sueur avait été adoptée sur ce sujet par le Sénat en mai 2019, avec un champ infractionnel plus large, comprenant toutes les infractions de blanchiment et de recel quelles que fussent les infractions sous-jacentes, dès lors qu'elles ont été commises dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, au préjudice d'un État étranger. Elle prévoyait ainsi que les sommes confisquées par la justice seraient versées à un fond consacré à « l'amélioration des conditions de vie des populations et au renforcement de l'état de droit ainsi qu'à la lutte contre la corruption dans le ou les pays où les infractions susvisées ont eu lieu . »
Le dispositif introduit par les députés vise, quant à lui, le recel, le blanchiment ou le blanchiment de recel de certaines infractions précises :
- article 314-1 du Code pénal : abus de confiance ;
- articles 432-11 et 432-11-1 du même code : corruption passive et trafic d'influence commis par des personnes exerçant une fonction publique au niveau national ;
- articles 432-12 et 432-13 du même code : prise illégale d'intérêts ;
- article 432-14 du même code : favoritisme ;
- articles 432-15 et 432-16 du même code : détournement de fonds public, y compris par négligence ;
- articles 433-1 et 433-2 du même code : corruption active et trafic d'influence commis par les particuliers ;
- article 433-4 du même code : soustraction et détournement de biens contenus dans un dépôt public ;
- articles 434-9, 434-9-1 du même code : corruption et trafic d'influence par ou à l'encontre de personnel judiciaire national ;
- articles 435 - 1 à 435-4 du même code : corruption et trafic d'influence passifs et actifs d'agents publics étrangers ;
- et articles 435-7 à 435-10 du même code : corruption et trafic d'influence par ou à l'encontre de personnel judiciaire étranger ou international.
Ce dispositif prévoit que les recettes issues de la confiscation des biens « donnent lieu à ouverture de crédits budgétaires au sein de la mission « Aide publique au développement ».
2. Le cadre de partenariat global
Le paragraphe II du présent article approuve le cadre de partenariat global (CPG) annexé au présent projet de loi.
Ce CPG remplace le rapport annexé à la loi de 2014. Il se compose de six parties : les objectifs et principes d'action ; les axes prioritaires, le pilotage, les moyens, les prévisions financières, et enfin le cadre de résultats.
Des objectifs consensuels
Au sein des objectifs de la politique de développement solidaire sont énumérés la protection des biens publics mondiaux, l'éradication de la pauvreté, la lutte contre l'insécurité alimentaire et la malnutrition, la protection de la planète, la promotion des droits humains, le renforcement de l'État de droit et de la démocratie et l'égalité entre les femmes et les hommes. Il est également fait référence à la paix et à la sécurité en complément de l'action diplomatique et militaire (« approche globale »), ainsi que le rayonnement et l'influence culturelle, diplomatique et économique de la France.
Le cadre multilatéral et européen dans lequel la France poursuit ces objectifs est ensuite évoqué : objectifs de développement durable adoptés dans le cadre de l'Agenda 2030 des Nations unies en 2015, Accord de Paris sur le climat, Cadre stratégique mondial pour la biodiversité 2011-2020, Programme d'action d'Addis-Abeba sur le financement du développement et Consensus pour le développement de l'Union européenne. Les députés ont adopté un amendement en séance publique, ajoutant à ces engagements internationaux de la France la convention internationale des droits de l'enfant. De manière plus générale, le groupe de travail « Enfance » de l'Assemblée nationale est à l'origine, par le biais des amendements de ses membres adoptés par les députés, de plusieurs modifications mettant en exergue la nécessité de tenir compte davantage des droits des enfants au sein de la politique de développement solidaire.
Le rapport évoque ensuite la notion de partenariat , autant avec les pays qu'avec les collectivités territoriales et les organisations de la société civile (syndicats, entreprises, jeunesse, diasporas, établissements d'enseignement supérieur, de recherche et de formation). L'État français doit ainsi mobiliser l'ensemble de ces partenaires aussi bien sur le territoire national que dans les pays de l'aide. Les ambassadeurs, en particulier, doivent mener un « dialogue partenarial renforcé avec les autorités locales ».
La commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements relatifs à ces partenariats afin de mettre en exergue l'importance du renforcement du tissu économique local, en particulier celui des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME), de mentionner le rôle important joué par les diasporas et de souligner la nécessité de prendre en compte les stratégies de développement des pays aidés et les besoins des populations. En outre, les orientations stratégiques définies par l'ambassadeur au niveau local devront s'appuyer sur un dialogue avec les élus locaux des Français établis à l'étranger ainsi que, le cas échéant, les organisations françaises de la société civile, les acteurs de la coopération décentralisée et les parties prenantes locales de la solidarité internationale.
En outre, il est précisé que la politique de développement solidaire s'appuie sur des principes partagés en matière d'efficacité de l'aide, définis par la Déclaration de Paris (2005) et réaffirmés à Busan (2011) et à Nairobi (2016) dans le cadre du Partenariat mondial pour une coopération efficace au service du développement. La France adhère ainsi aux principes de l'appropriation des priorités de développement par les pays partenaires, d'harmonisation, de priorité accordée aux résultats et de responsabilité mutuelle.
De plus, il est précisé que la France veille à l'absence de contradiction entre sa politique de développement solidaire et les politiques qu'elle mène en matière commerciale, fiscale, migratoire, de sécurité et de défense, d'appui aux investissements à l'étranger, de francophonie ou encore de développement durable (cette dernière politique étant matérialisée par la Feuille de route nationale de mise en oeuvre des ODD adoptée en 2019).
Par ailleurs, la notion de cohérence entre les différentes politiques pour le développement durable est réaffirmée , dans l'optique d'une mise en oeuvre des ODD et de l'accord de Paris, et suivant la feuille de route nationale de mise en oeuvre des ODD de 2019. Cette partie met enfin en exergue l'importance de la francophonie.
Les axes prioritaires fixés par le CPG
Au premier rang des axes prioritaires figurent les priorités géographiques de l'aide . C'est dans ce cadre qu'est rappelé l'objectif de la France de consacrer à la zone « Afrique et Méditerranée » 75 % de l'effort financier total de l'État en subventions et en prêts, et au moins 85 % de celui mis en oeuvre via l'AFD, fixé par le CICID en 2013. Le projet de loi ne fixe donc pas de nouvel objectif dans ce domaine . Sont également à nouveau évoqués les dix-neuf pays prioritaires définis par le CICID du 8 février 2018, appartenant tous à la catégorie des Pays les Moins Avancés (PMA). Ces pays prioritaires bénéficieront de la moitié de l'aide projet de l'État et des deux tiers des subventions mises en oeuvre par l'AFD, objectif également fixé en 2013 et par ailleurs globalement déjà atteint.
La commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a par ailleurs adopté un amendement précisant que, au sein du continent africain, la région du Sahel mobilise tout particulièrement les efforts et l'engagement de la France compte tenu du caractère aigu des crises et des fragilités qu'on y rencontre et des liens forts et anciens tissés par la France avec les pays de cette région. Ils ont en outre précisé que, sur la part de 50 % de l'aide projet de l'État consacrée aux pays prioritaires, un tiers est concentrée sur les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad).
Le cadre de partenariat définit ensuite quatre priorités thématiques de nature transversale :
- relever les défis environnementaux et climatiques les plus urgents de la planète ;
- soutenir l'égalité femmes-hommes. Sur ce point, la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a adopté un amendement mentionnant également l'égalité filles/garçons. Par un autre amendement, les députés ont également précisé que l'État s'engageait à tendre vers un marquage « égalité femmes-hommes » conforme aux recommandations du plan d'action sur l'égalité des genres de l'Union européenne, soit, en pourcentage de l'aide publique au développement bilatérale programmable : 85 % avec objectif principal ou significatif et 20 % comme objectif principal, suivant les marqueurs de l'OCDE. Dans cette perspective, l'État s'engage à ce qu'en 2025, 75 % des volumes annuels d'engagements de l'aide publique au développement bilatérale programmable française aient l'égalité entre les femmes et les hommes pour objectif principal ou significatif et 20 % pour objectif principal. Ces objectifs semblent particulièrement difficiles à atteindre : en effet, en 2019, l'APD bilatérale de la France contribuant à l'égalité entre les femmes et les hommes s'est élevée à 1,7 Md€, soit 25 % de notre APD bilatérale. Une part de 3 % (143 M€) de l'APD bilatérale avait l'égalité femmes-hommes comme objectif principal (marqueur CAD 2) ;
- prévenir et traiter les crises et les fragilités ;
- défendre une approche fondée sur les droits humains.
Enfin, le cadre de partenariat met en avant six priorités thématiques à caractère sectoriel :
- renforcer l'action pour lutter contre les maladies et soutenir les systèmes de santé ;
- renforcer l'effort sur l'éducation, la formation professionnelle, l'enseignement supérieur, la recherche et l'innovation, au profit de l'employabilité des jeunes ;
- continuer à oeuvrer pour la sécurité alimentaire, la nutrition et l'agriculture durable ;
- améliorer la gestion de l'eau et l'assainissement ;
- renforcer les capacités commerciales pour une croissance économique inclusive et durable ;
- promouvoir la gouvernance démocratique, économique et financière.
Un pilotage toujours complexe
Le cadre de partenariat global précise les modalités du pilotage de la politique de développement solidaire . Loin de simplifier la situation actuelle, il crée une nouvelle « couche » de gouvernance avec un « conseil de développement » présidé par le Président de la République .
Ce nouveau conseil s'ajoute ainsi au Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), réunissant les ministres concernés sous l'égide du Premier ministre et dont le suivi des travaux est assuré par un co-secrétariat affaires étrangères/finances (COSEC/CICID), au Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI), instance de concertation large, à la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), enfin au Conseil d'orientation stratégique de l'AFD, composé des représentants de l'État au conseil d'administration de l'agence et présidé par le Ministre chargé du développement. En outre, il est confirmé que la définition et la mise en oeuvre de la politique de développement solidaire sont confiées au ministre chargé du développement, « en lien avec les ministres chargés de l'économie et du budget et les autres ministres concernés ». La marge de manoeuvre du ministre chargé du développement semble ainsi réduite compte-tenu de la « comitologie » qui fixe les orientations stratégiques et des autres ministres responsables de cette politique à ses côtés.
L'autorité de l'État sur l'AFD est réaffirmée, avec le Conseil d'orientation stratégique déjà cité et le contrat d'objectifs et de moyens (COM) liant l'agence à l'État. Il est précisé que les activités des opérateurs de l'action extérieure de l'État doivent « s'inscrire en pleine conformité et cohérence avec les orientations stratégiques et priorités définies par l'État dans le cadre de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales ».
En outre, l'action à l'étranger de l'AFD doit s'exercer sous l'autorité du chef de mission diplomatique, conformément aux orientations et priorités définies par un nouveau conseil local du développement présidé par l'ambassadeur . Ce conseil regroupe les services de l'État, les opérateurs du développement sous tutelle de l'État ainsi que, le cas échéant, les organisations françaises de la société civile, les acteurs de la coopération décentralisée et les acteurs locaux. Il élabore des projets de stratégie-pays et de programmation-pays, dont l'ambassadeur supervise la mise en oeuvre.
S'agissant de ce conseil local du développement, la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a adopté des amendements prévoyant qu'y sont conviés les acteurs de la société civile, les acteurs de la coopération décentralisée, les élus locaux, dont ceux des Français établis hors de France, et les parties prenantes locales de la solidarité internationale. En outre, l'ambassadeur devra veiller à susciter la présence de femmes au sein de ce conseil et à tendre vers une représentation équilibrée et paritaire en termes de genre. Il pourra également y convier les entreprises qui peuvent apporter une contribution au développement du pays par leur activité propre, mais aussi par leur engagement en matière de responsabilité sociale et environnementale et de gouvernance.
Il est enfin précisé que la relation entre l'État et l'AFD « repose sur une transparence et une redevabilité renforcées, s'agissant en particulier des sujets opérationnels, stratégiques et budgétaires, et des relations entre les postes et le groupe AFD dans les pays partenaires ». Par ces dispositions, l'État entend « reprendre la main » sur une AFD souvent considérée comme trop autonome, ainsi par la Cour des comptes (dans son rapport sur « Le pilotage des opérateurs extérieurs de l'État », juin 2020). Toutefois, l'insuffisance des moyens humains de la tutelle au niveau central et l'importance des moyens financiers dont disposent les agences de l'AFD au niveau local comparés à ceux de l'ambassadeur rendent hypothétique un tel renforcement du contrôle exercé par l'État sur son opérateur . La Cour des comptes relevait ainsi que « les outils de pilotage dont dispose le MEAE demeurent insuffisants pour lui permettre d'exercer une véritable tutelle stratégique, au niveau central, sur l'AFD ». De même, au niveau local, la Cour soulignait que « la capacité de l'ambassadeur à influencer les choix qui lui sont présentés s'avère, dans certaines circonstances, assez limitée . »
Les instances de pilotage de la politique de développement solidaire
- le nouveau Conseil du développement, présidé par le président de la République en présence des « principaux ministres concernés ». Il « prend les décisions stratégiques » ;
- le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), réunissant les ministres concernés sous l'égide du Premier ministre. Il « fixe le cadre général des interventions de l'État et l'articulation entre les différentes politiques et les différents acteurs » et « fixe les orientations relatives aux objectifs et aux modalités de la politique de développement solidaire » ;
- le co-secrétariat affaires étrangères/finances du CICID (COSEC CICID), assuré par conjointement le ministre chargé du développement et celui chargé de l'économie, qui « prend les décisions nécessaires à la réalisation » des politiques mises en oeuvre ;
- le ministre chargé du développement (actuellement le ministre de l'Europe et des affaires étrangères), compétent pour « mettre en oeuvre et définir la politique de développement solidaire en lien avec les ministres chargés de l'économie et du budget et les autres ministres concernés » ;
- le Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI), instance de concertation large comprenant des représentants de la société civile ;
- la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), qui assure le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales ;
- le Conseil d'orientation stratégique de l'AFD, composé des représentants de l'État au conseil d'administration de l'agence et présidé par le ministre chargé du développement ;
- le conseil d'administration de l'AFD ;
- au niveau des pays partenaires, le nouveau Conseil de développement local présidé par l'ambassadeur, qui « élabore un projet de stratégie-pays et un projet de programmation-pays » et supervise leur mise en oeuvre.
Les moyens
Le cadre de partenariat global décrit ensuite les moyens et les instruments de la politique de développement solidaire . Ces dispositions reprennent les objectifs de l'article premier : 0,55 % du RNB consacrés à l'APD en 2022, puis 0,7 % dans un second temps. La part accordée aux dons, à l'action bilatérale et aux moyens transitant par les organisations de la société civile devra augmenter. Les dix-neuf pays prioritaires bénéficieront d'ici 2022 de la moitié de l'aide-projet de l'État et des deux tiers des subventions mises en oeuvre par l'AFD, objectifs fixés depuis 2013.
En ce qui concerne les canaux, l'importance de l'aide bilatérale est réaffirmée, notamment via les opérateurs AFD et Expertise France, mais aussi l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), Canal France international et l'Institut Pasteur. L'aide mise en oeuvre directement par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (Fonds de solidarité pour les projets innovants, FSPI), en croissance au cours des trois dernières années, est également évoquée, tout comme les crédits gérés par le Centre de crise et de soutien (notamment le Fonds humanitaire d'urgence, FUH), l'aide alimentaire programmée, l'expertise technique, les fonds de soutien aux dispositifs de volontariats et de coopération décentralisée des collectivités territoriales et les bourses octroyées aux étudiants des pays en développement. L'aide apportée par les collectivités territoriales dans le cadre de la coopération décentralisée est également mentionnée.
Les canaux de financement multilatéraux sont ensuite évoqués : instruments de coopération de l'Union européenne (FED), banques multilatérales de développement, fonds de développement qui y sont rattachés, fonds verticaux tels que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme (FMSTP), le Fonds vert pour le climat et le Partenariat mondial pour l'éducation (PME).
Le cadre de partenariat aborde ensuite le sujet du financement du développement, en rappelant le cadre du programme d'action d'Addis-Abeba de 2015. L'accent est mis sur l'effet de levier que doivent exercer les financements français, tant il est vrai que ceux-ci ne peuvent prétendre, à eux seuls, avoir un effet significatif sur le développement économique des pays visés.
Les députés ont par ailleurs adopté, en séance publique, un amendement mettant l'accent sur la responsabilité sociétale des acteurs publics et privés .
Les prévisions
Cette partie comprend un tableau présentant l'évolution des principales composantes de l'APD entre 2017 et 2022, de manière à ce que l'objectif des 0,55 du RNB consacré à l'APD soit atteint en fin de période (cet objectif étant largement dépassé en 2021 du fait d'allégements de dette d'un montant exceptionnel, notamment au bénéfice du Soudan, et de la crise économique). Il énumère ensuite les dépenses françaises comptabilisables au titre de l'aide publique au développement en application des règles fixées par le Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE :
- crédits de la mission budgétaire « Aide publique au développement » (programmes 110 et 209) permettant de financer l'activité en subventions de l'AFD, l'aide-projet du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (FSPI) et les crédits de gestion de crise (FUH, aide alimentaire programmée, aide budgétaire) ainsi que de contribuer aux principaux fonds multilatéraux et au FED ;
- prêts bilatéraux de l'AFD ;
- instruments d'aide au secteur privé (prêts, prises de participation et garanties au bénéfice du secteur privé) ;
- autres programmes du budget de l'État et de ses opérateurs (frais d'écolage, frais d'accueil et de santé des réfugiés, travaux de recherche sur le développement conduits par l'IRD et le CIRAD) ;
- les autres prêts, principalement les prêts du Trésor ;
- les prêts multilatéraux au bénéfice des organisations éligibles à l'APD ;
- la contribution française au budget de l'Union européenne finançant l'APD européenne ;
- les opérations de traitement de la dette (allègements et annulations de dettes, contrats de développement et de désendettement) ;
- l'APD financée par les taxes affectées au Fonds de solidarité pour le développement (FSD) (taxe de solidarité sur les billets d'avion et une part de la taxe sur les transactions financières) ;
- l'APD hors budget de l'État : APD réalisée par les collectivités territoriales, frais administratifs de l'AFD, capitalisation de fonds tels que le fonds STOA, filiale conjointe de la Caisse des dépôts et de l'AFD.
Le cadre de résultats
Le cadre de partenariat global présente enfin un « cadre de résultats » sous forme d'un tableau reprenant toutes les priorités thématiques de l'APD telles qu'énoncées ci-dessus, avec pour chaque priorité des indicateurs de résultats, bilatéraux ou multilatéraux. Le tableau précise également les ODD correspondant à chaque priorité.
3. Inscrire une véritable programmation des moyens, fixer des priorités permettant davantage de concentration sur les pays pauvres
Des moyens programmés jusqu'en 2025, une répartition plus conforme aux priorités françaises
Le projet de loi présenté au Parlement ne comporte pas de véritable programmation des moyens puisqu'il ne couvre que l'année 2022. La commission a estimé qu'à l'instar de la recherche ou des moyens des armées, le développement solidaire devait pouvoir bénéficier d'une trajectoire financière sur plusieurs années , permettant de porter ses moyens à un niveau suffisant pour atteindre ses ambitions. En conséquence, elle a adopté un amendement COM-15 rect de ses rapporteurs fixant une telle programmation financière pour les années 2022-2025 .
En outre, afin de redonner à la TTF sa vocation première, la commission a adopté un amendement COM-16 affectant à compter de 2022 une part de 60 % de TTF , avec un minimum de 1020 millions d'euros (soit 60 % du produit de la TTF en 2020), au Fonds de solidarité pour le développement (FSD).
Les objectifs en volume de financement ne devant pas constituer l'alpha et l'omega de la politique de développement solidaire, la commission a adopté une série de trois amendements de ses rapporteurs visant à concentrer davantage les crédits sur les priorités affichées :
- l'amendement COM-19 rect a pour but de porter et de maintenir pendant la période de programmation la part d'aide bilatérale à 70 % du total de l'APD (contre 61 % en 2019) ;
- l'amendement COM-17 rect tend à prévoir que la part des dons (par rapport aux prêts) ne pourra pas descendre en dessous de 65 % (en flux bruts) du total de l'APD pendant la période de programmation (contre 50 % environ en 2019);
- l'amendement COM-18 prévoit que 30 % de l'aide pays programmable (APP) devra bénéficier aux pays prioritaires de la politique de développement solidaire française d'ici 2025 (contre environ 15 % actuellement).
En outre, en adoptant un amendement COM-33 rect . de Mme Carlotti, la commission a prévu qu'en 2022, un milliard d'euros d'APD devrait transiter par les organisations de la société civile (OSC).
Par ailleurs, la commission a adopté un amendement COM-34 de M. Sido permettant d'exclure les dépenses de solidarité internationale des collectivités territoriales du total des dépenses soumises au « pacte de Cahors » relatif au contrôle de l'augmentation des dépenses de fonctionnement de ces collectivités.
Un dispositif relatif aux biens mal acquis précisé
La commission a enrichi le dispositif introduit par les députés relatif à la restitution des biens mal acquis. Rappelons qu'une proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Sueur relative à l'affectation des avoirs issus de la corruption transnationale avait été adoptée par le Sénat en mai 2019. Plusieurs amendements ( COM-44, COM-45 et COM-46 ) de M. Sueur ont ainsi été adoptés par la commission, ayant pour objet d'ajouter l'infraction de recel de blanchiment aux infractions visées par le dispositif de restitution des biens mal acquis et d'améliorer la transparence et la redevabilité des procédures de restitution. Un amendement de M. Requier au nom de la commission des finances a également précisé le dispositif ( COM-145 ).
4. Des précisions apportées au cadre de partenariat global annexé
La commission a apporté de nombreuses modifications au cadre de partenariat global annexé à la loi .
En particulier, la commission a adopté un amendement COM-47 de ses rapporteurs afin de hiérarchiser les principaux objectifs de l'aide, dans l'esprit des modifications déjà apportées à l'article 1 er A et à l'article 7 relatif à l'AFD (mettant en exergue le triptyque lutte contre la pauvreté / défense des droits humains / préservation des biens publics mondiaux).
Afin de renforcer le pilotage de la politique d'APD en général et de l'AFD en particulier, la commission a adopté deux amendements de ses rapporteurs :
- un amendement COM-52 qui renforce le rôle de pilotage du ministre chargé du développement et prévoit que le CICID, instance de coordination interministérielle, se réunit au moins annuellement ;
- un amendement COM-53 prévoyant que l'ensemble des priorités fixées par les acteurs responsables du pilotage de la politique de développement solidaire se traduisent par une série réduite d'objectifs fixés au sein du contrat d'objectifs et de moyens (COM) de l'agence.
Elle a notamment adopté des amendements COM-75, COM-77, COM 79 rect de Mme Carlotti précisant l'importance de la recherche en matière de santé et en particulier de vaccination, le fait que la France contribuera au fonds pour l'enregistrement des naissances et s'engagera pour un traité international permettant de mieux réagir collectivement aux pandémies.
Elle a par ailleurs adopté des amendements de M. Yung, en particulier les COM-57, COM-64 complétant la mention de l'égalité femmes/hommes par celle de l'égalité filles/garçons et inscrivant la protection des militants syndicaux dans les objectifs associés de l'APD.
Enfin, elle a complété le dispositif relatif aux biens mal acquis introduit à l'article premier en adoptant des amendements COM-56 de M. Sueur et COM-85 de M. Yung.
La commission a adopté l'article 1 er ainsi modifié.
Article 2
Rapport annuel au Parlement sur la politique de
développement
L'article 2 dispose que le Gouvernement transmet chaque année un rapport au Parlement sur différents aspects de la politique de développement solidaire, notamment sur sa stratégie, ses résultats et sa cohérence avec les autres politiques publiques.
La commission a enrichi le contenu de ce rapport en demandant des informations sur les autres flux financiers à destination des pays aidés (transferts des diasporas et dons issus de la générosité privée), sur la répartition de l'aide entre prêts et dons, et sur la coordination entre acteurs militaires et acteurs de l'aide au développement dans le cadre de la « stratégie globale » conduite par la France au Sahel.
1. Une information du Parlement qui s'est enrichie au fil des années.
L'article 15 de la loi du 7 juillet 2014 prévoyait la remise d'un rapport bisannuel au Parlement, dans les termes suivants : « Le Gouvernement transmet tous les deux ans aux commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi qu'au Conseil national du développement et de la solidarité internationale et à la Commission nationale de la coopération décentralisée un rapport faisant la synthèse de la politique de développement et de solidarité internationale conduite par la France dans les cadres bilatéral et multilatéral. Ce rapport présente en particulier la synthèse des évaluations (...), les modalités d'utilisation des différents instruments de la politique de développement et de solidarité internationale, l'équilibre entre les subventions, les autres dons et les prêts, ainsi que les activités de l'Agence française de développement et l'utilisation de son résultat. Il présente également l'activité de l'ensemble des organismes européens et multilatéraux oeuvrant en matière de développement et auxquels la France contribue ou dont elle est partie. Ce rapport est débattu publiquement à l'Assemblée nationale et au Sénat. » 5 ( * ) .
L'information du Parlement ne se limite pas à ce rapport bisannuel. Outre les documents fournis dans le cadre de l'examen parlementaire de la mission « Aide publique au développement », la loi de finances rectificative pour 2005 6 ( * ) prévoit que la politique de développement est l'objet d'un document de politique transversale (DPT) présenté annuellement en annexe au projet de loi de finances initiale. Le contenu de ce DPT a été progressivement enrichi (voir encadré ci-dessous).
Le document de politique transversale sur la politique de développement
De façon générale, les documents de politique transversale (DPT) portent sur des politiques interministérielles couvertes par plusieurs missions budgétaires.
Ces documents, annexés au projet de loi de finances initiale, développent « la stratégie mise en oeuvre, les crédits, objectifs et indicateurs y concourant. Ils comportent également une présentation détaillée de l'effort financier consacré par l'État à ces politiques, ainsi que des dispositifs mis en place, pour l'année à venir, l'année en cours et l'année précédente ».
S'agissant en particulier de la politique de développement, la loi prévoit, en outre, la fourniture des informations suivantes :
« - une présentation détaillée de l'évolution à titre rétrospectif sur les cinq dernières années et de façon prévisionnelle pour la durée de la programmation triennale des finances publiques :
a) De l'effort français d'aide publique au développement en proportion du revenu national brut comparé avec celui des autres États membres du comité d'aide au développement de l'Organisation de coopération et de développement économiques ;
b) De la répartition entre les principaux instruments de coopération des crédits consacrés à l'aide au développement tels qu'ils sont présentés dans les documents budgétaires et de l'aide publique au développement qui en résulte permettant d'identifier les moyens financiers respectivement affectés à l'aide multilatérale, communautaire et bilatérale, à l'aide bilatérale qui fait l'objet d'une programmation, ainsi qu'aux subventions, dons, annulations de dettes et prêts ;
c) De la répartition de ces instruments par secteurs, par public atteint, en particulier les femmes ;
c bis) De l'effort français d'aide publique au développement en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes et de l'autonomisation des femmes, et de la prise en compte du genre, pour au moins 50 % des projets et programmes financés, à travers le marqueur genre du Comité d'aide au développement de l'Organisation de coopération et de développement économiques ;
d) Du montant net et brut des prêts ;
- un récapitulatif des engagements internationaux de la France en matière d'aide publique au développement et un état des lieux de leur mise en oeuvre ;
- une information détaillée sur les remises de dettes consenties à titre multilatéral et bilatéral sur le fondement de l'article 64 de la loi de finances rectificative pour 1991 (n° 91-1323 du 30 décembre 1991) ;
- une présentation détaillée des ressources budgétaires et extra-budgétaires de l'Agence française de développement, de l'emploi de ces ressources et des activités de l'agence prises en compte dans les dépenses d'aide publique au développement ;
- la répartition géographique, sectorielle, et par public atteint, en particulier les femmes, des concours octroyés par l'Agence française de développement, et la ventilation de ces concours par catégorie, en particulier entre prêts, dons, garanties et prises de participation. »
Source : loi de finances initiale pour 2005 (article 128).
2. Un nouveau rapport sur la stratégie, les résultats, et la cohérence de la politique d'aide au développement
Le projet de loi prévoit la transmission au Parlement, non plus à un rythme bisannuel, mais annuellement , d'un rapport portant sur la stratégie et les résultats obtenus, ainsi que sur la cohérence des politiques publiques françaises entre elles. Ce rapport devra également faire un point sur la mise en oeuvre de la trajectoire financière prévue par la loi (crédits budgétaires, ressources extrabudgétaires) et sur les contributions aux fonds et programmes multilatéraux et bilatéraux et leur répartition vers les secteurs et pays prioritaires.
D'après l'étude d'impact, ce rapport sera élaboré par le ministre en charge du développement, en lien avec le ministre de l'économie et des finances et les autres ministres concernés.
Le dernier alinéa de l'article prévoit que ce rapport fasse l'objet d'un débat annuel « en séance publique (...) à l'Assemblée nationale et au Sénat ». Cette disposition est inutile : elle n'est pas nécessaire pour que ce débat ait lieu et ne saurait contraindre l'ordre du jour des deux assemblées. Il est prévu, par ailleurs, qu'un débat ait lieu, sur la base du rapport annuel du Gouvernement, au Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI) et à la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD).
L'Assemblée nationale a avancé la remise de ce rapport, initialement prévue au 15 septembre, au 15 juin , afin de permettre aux parlementaires d'avoir les informations requises en amont du débat budgétaire.
Le contenu du rapport a été, en outre, enrichi par l'Assemblée nationale. Devront être fournis, dans le cadre de ce rapport :
- Une présentation de la contribution des collectivités territoriales et des acteurs territoriaux à l'APD ;
- La liste des pays où l'AFD intervient ;
- Des informations sur la communication relative à l'APD et sa perception par nos concitoyens et par nos partenaires ;
- Les positions défendues par la France au sein des institutions financières internationales ;
- La liste des pays prioritaires ;
- Des éléments sur les progrès réalisés en matière de gouvernance, de droits de l'Homme et de lutte contre la corruption dans les pays bénéficiant de l'APD.
3. Une amélioration de l'information du Parlement
L'amélioration de l'information du Parlement est une évolution positive, de même que le recentrage de ce rapport sur la stratégie suivie et les résultats obtenus , au-delà de la seule information sur les instruments mis en oeuvre.
La quantité ne devra pas nuire à la qualité de l'information fournie. Néanmoins, ce rapport doit être l'occasion de préciser un certain nombre d'informations qui ne sont pas suffisamment explicites dans le cadre existant.
À l'initiative des rapporteurs, la commission a donc enrichi le rapport en demandant l' ajout des informations suivantes :
- Une comparaison des flux d'APD avec les autres flux financiers à destination des pays aidés, en particulier les transferts monétaires effectués par les diasporas et les flux issus de la générosité privée (COM-90) ;
- La répartition des montants de l'aide publique au développement française entre prêts et dons, en distinguant par pays, par programme et par opérateur (COM-92) ;
- Des informations sur la coordination entre acteurs militaires et acteurs de l'aide au développement au Sahel (COM-95), afin de contribuer à un décloisonnement des approches dans cette région où la France mène une stratégie dite des « 3D » (défense, diplomatie, développement).
La commission a également adopté l'amendement COM-146 de M. Requier avançant au 1 er juin la date de remise du rapport, afin de la faire coïncider avec la date limite de dépôt du projet de loi de règlement.
La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié
Article
2 bis (nouveau)
Rôle de la société civile
La commission a adopté un amendement COM-88 rect . de Mme Carlotti, portant article additionnel après l'article 2, tendant à reconnaître le rôle essentiel de la société civile dans la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales.
La commission a adopté un article 2 bis ainsi rédigé
TITRE
II
DISPOSITIONS NORMATIVES INTÉRESSANT LA POLITIQUE DE
DÉVELOPPEMENT SOLIDAIRE ET DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS
MONDIALES
Article 3
Cadre de référence des politiques de l'État et des
collectivités territoriales
L'article 3 du projet de loi tend à introduire les objectifs de développement durables (ODD) des Nations unies dans le cadre de référence des politiques de l'État et des collectivités territoriales.
Ainsi, d'une part, les indicateurs de l'Agenda 2030 feraient l'objet d'un suivi dans le cadre du rapport sur les « nouveaux indicateurs de richesse » prévu par la loi du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques.
D'autre part, les ODD serviraient également de référence pour l'élaboration des rapports que les collectivités locales de plus de 50 000 habitants sont tenues d'examiner chaque année sur leur situation en matière de développement durable, en application de la loi de 2010 portant engagement national pour l'environnement (« Grenelle II »).
La Commission a modifié le texte pour préserver la lisibilité du rapport sur les nouveaux indicateurs de richesse et pour avancer sa présentation au 1 er juin, afin que les conclusions de ce rapport puissent être prises en compte plus en amont dans l'élaboration du projet de loi de finances.
1. L'évaluation de l'action publique au regard du développement durable
Au cours de la dernière décennie, les collectivités publiques ont été incitées à justifier leur action au regard de la notion de développement durable (soit « un développement qui répond[e] aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs » 7 ( * ) ).
1.1 Les nouveaux indicateurs de richesse
La loi n°2015-411 du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques, issue d'une proposition de loi, déposée en 2015 à l'Assemblée nationale, vise à remettre en cause la seule prise en compte de l'indicateur de PIB dans la construction des lois de finances ainsi que dans l'élaboration et l'évaluation, en général, des politiques publiques. Cette proposition de loi a été adoptée sans modification par le Sénat.
Elle se fondait sur les travaux d'économistes soulignant les limites de l'indicateur de PIB - notamment le rapport de la Commission sur la Mesure de la Performance Économique et du Progrès Social 8 ( * ) - ainsi que sur des travaux de France Stratégie et du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
L'article unique de cette loi dispose :
« Le Gouvernement remet annuellement au Parlement, le premier mardi d'octobre, un rapport présentant l'évolution, sur les années passées, de nouveaux indicateurs de richesse, tels que des indicateurs d'inégalités, de qualité de vie et de développement durable, ainsi qu'une évaluation qualitative ou quantitative de l'impact des principales réformes engagées l'année précédente et l'année en cours et de celles envisagées pour l'année suivante, notamment dans le cadre des lois de finances, au regard de ces indicateurs et de l'évolution du produit intérieur brut. Ce rapport peut faire l'objet d'un débat devant le Parlement. »
Cette disposition devait permettre d'infléchir l'évaluation des politiques publiques dans un sens plus qualitatif et moins quantitatif, en référence à une grille de lecture nouvelle mettant l'accent, non sur le taux de croissance, mais sur la soutenabilité de celle-ci dans d'autres dimensions (économique, sociale et environnementale).
Ce nouveau cadre d'évaluation des politiques publiques avait vocation à être diffusé, autant que possible, dans les médias et le grand public : loin d'être réservé à des cercles d'experts, il devait permettre plus généralement un autre regard sur l'action du gouvernement.
Le 27 septembre 2015, le Gouvernement a publié le premier rapport annuel sur « Les nouveaux indicateurs de richesse » 9 ( * ) . À la suite d'une consultation citoyenne conduite au printemps 2015 par France Stratégie et par le Conseil économique, social et environnemental (CESE), 10 indicateurs ont été retenus pour former le nouveau cadre d'évaluation des politiques publiques.
Le rapport présentait, non seulement l'évolution desdits indicateurs, mais aussi l'évaluation, à l'aune de cette nouvelle grille de lecture, de quelques mesures phares du gouvernement : par exemple, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), la loi relative à la transition énergétique, le plan très haut-débit ou encore la réforme du collège.
Depuis le rapport pour 2017, toutefois, le rapport sur les nouveaux indicateurs de richesse ne comporte plus d'évaluations de politiques publiques spécifiques. Il se borne à décrire l'évolution des indicateurs, à donner des éléments de comparaison européenne, et à détailler les ambitions du gouvernement pour chaque indicateur. On peut regretter ce changement de format : la succession des gouvernements ne devrait pas être un obstacle à l'évaluation des politiques publiques dans la durée . L'évaluation a posteriori de mesures spécifiques, au regard des nouveaux indicateurs de richesse, constituait un exercice intéressant.
Par ailleurs, les rapports 2017 et 2018 ont été publiés en février de l'année suivante donc avec 4 mois de retard alors que la loi prévoit une publication « le premier mardi d'octobre », c'est-à-dire, logiquement, avant et non après l'examen par le Parlement du projet de loi de finances. Le rapport pour l'année 2019 n'a pas été publié.
Les 10 « nouveaux indicateurs de richesse » (rapport 2018 10 ( * ) )
Dimension économique
0. Taux de croissance du PIB réel par habitant (indicateur traditionnel)
1. Taux d'emploi des 15-64 ans (%)
2. Dépense de recherche & développement / PIB (%)
3. Dette publique au sens de Maastricht (% PIB)
Dimension sociale
4. Espérance de vie en bonne santé (en années)
5. Satisfaction dans la vie (note de 1 à 10)
6. Inégalités de revenus (rapport masse de revenu détenu par quintile supérieur/masse quintile inférieur)
7. Taux de pauvreté en conditions de vie (%)
8. Sorties précoces du système scolaire (en % de la population des 18-24 ans)
Dimension environnementale
9. Émission de gaz à effet de serre (en tonnes éq. CO2 par personne)
10. Artificialisation des sols (en % du territoire)
1.2 L'action des collectivités locales dans le domaine du développement durable
Depuis 2011, les collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants sont tenues de rédiger chaque année un rapport sur leur situation en matière de développement durable. Ce rapport est discuté et approuvé par les assemblées de ces collectivités à l'occasion des débats budgétaires.
Introduit par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, l'article L. 2311-1-1 du Code général des collectivités territoriales dispose en effet que « dans les communes de plus de 50 000 habitants, préalablement aux débats sur le projet de budget, le maire présente un rapport sur la situation en matière de développement durable intéressant le fonctionnement de la collectivité, les politiques qu'elle mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation. ».
Cette obligation concerne également :
- les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants (même article) ;
- les départements (article L. 3311-2 du même code) ;
- la métropole de Lyon (article L. 3661-2) ;
- les régions (article L. 4310-1) ;
- la collectivité territoriale de Corse (L. 4425-2)
- les métropoles (L. 5217-10-2)
- la Guyane (L. 71-110-2) ;
- la Martinique (L. 72-100-2).
Le contenu de ces rapports est fixé par un décret du 17 juin 2011 11 ( * ) et une circulaire du 3 août 2011. Ces rapports s'articulent autour de 5 finalités : lutte contre le changement climatique et protection de l'atmosphère, protection de la biodiversité, des milieux et des ressources, épanouissement de tous les êtres humains, cohésion sociale et solidarité entre territoires et entre générations, dynamiques de développement suivant des modes de production et de consommation responsables.
2. La prise en compte des objectifs de développement durable de l'ONU (ODD)
En septembre 2015, soit cinq mois après l'adoption de la loi précitée, les 193 États membres de l'ONU se sont engagés à mettre en oeuvre 17 objectifs universels, contenus dans un Programme de développement durable à l'horizon 2030. Ces objectifs sont déclinés en 169 cibles.
Cet agenda 2030 n'était pas entièrement nouveau puisqu'il fusionnait l'agenda du développement et celui des Sommets de la Terre. Les objectifs se caractérisent par leur universalité c'est-à-dire qu'ils s'appliquent à tous les pays (Nord et Sud).
Pour mettre en oeuvre cet Agenda 2030, l'ONU a adopté, en 2017, un jeu de 232 indicateurs pour le suivi des progrès accomplis.
En France, le 27 juin 2018, à l'issue de la réunion du bureau du Conseil national de l'information statistique (CNIS), 98 indicateurs de suivi français ont été publiés , constituant ainsi un tableau de bord.
Le rapport 2018 sur les nouveaux indicateurs de richesse souligne la cohérence déjà existante entre les 10 « nouveaux indicateurs de richesse » retenus et les ODD.
L'article 3 du projet de loi intègre l'Agenda 2030 et ses 17 ODD dans le droit national.
Il intègre, en premier lieu, les nouveaux indicateurs de richesse dans le cadre des ODD. Cette évolution doit permettre davantage de cohérence et une mutualisation des moyens de suivi des politiques publiques : comme le précise l'étude d'impact, le rapport sur les nouveaux indicateurs de richesse et celui sur la mise en oeuvre de la stratégie nationale de développement durable sont actuellement élaborés par des services distincts (le premier, par les services du Premier ministre et le second, par le Commissariat général au développement durable).
Dans la rédaction initiale du projet de loi, il était simplement prévu que les nouveaux indicateurs de richesse correspondent aux ODD ; la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale précise que ces nouveaux indicateurs comprennent « notamment, les indicateurs de suivi mondiaux du programme de développement durable à l'horizon 2030 adopté le 25 septembre 2015 par l'Assemblée générale des Nations unies, définis par la commission statistique des Nations unies ».
Rappelons que ces indicateurs définis par la commission statistique des Nations unies sont au nombre de 232. Le nouveau rapport sur les indicateurs de richesse comprendra donc, non plus 10 indicateurs, mais un nombre beaucoup plus important, l'insertion d'un « notamment » permettant, en outre, au Gouvernement de ne pas se « limiter » aux 232 indicateurs définis par l'ONU.
En second lieu, l'article 3 intègre l'action des collectivités locales en matière de développement durable dans le cadre de l'Agenda 2030. Pour ce faire, il fait évoluer le rapport débattu annuellement au sein des collectivités de plus de 50 000 habitants : ce rapport devra présenter les actions entreprises pour contribuer à l'atteinte des ODD .
La modification s'appliquera aux communes et groupements de la Polynésie française, soit, en pratique, au seul établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de Polynésie française dépassant la barre des 50 000 habitants : la communauté de communes de Terehçamanu qui regroupe plus de 52 000 habitants (créée fin 2020).
3. La position de la commission : mieux exploiter le rapport sur les « nouveaux indicateurs de richesse »
Cet article 3 n'a qu'une relation très indirecte avec l'objet de ce projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Il s'y intègre au titre de la cohérence entre les différentes politiques publiques françaises ayant pour objectif l'atteinte des ODD.
On peut légitimement craindre que la profusion des indicateurs onusiens ne nuise à la lisibilité du rapport sur les nouveaux « indicateurs de richesse » . L'objectif de la proposition de loi de 2015, qui a institué ce rapport, n'était pas de fournir une expertise exhaustive, mais d'évaluer l'impact de quelques mesures particulièrement emblématiques de politique publique à l'aune d'une série d'indicateurs complémentaires de la mesure du PIB.
Les 10 nouveaux indicateurs de richesse embrassaient, certes, un champ limité, mais ils avaient le mérite de la lisibilité. En outre, leur utilisation, les deux premières années, pour évaluer les effets de mesures gouvernementales spécifiques, a constitué un exercice intéressant d'évaluation des politiques publiques, malheureusement sans suites.
Au I, la commission a adopté l'amendement COM-105 de ses rapporteurs, tendant à avancer au 1 er juin la remise du rapport sur les nouveaux indicateurs de richesse, reprenant en cela une préconisation de notre collègue Antoine Lefèvre, rapporteur au Sénat de la loi du 13 avril 2015. Cette date permettra en effet de mieux prendre en compte les nouveaux indicateurs de richesse dans l'élaboration des réformes 12 ( * ) : « De cette manière, (...) ce rapport pourrait être utilisé à l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement du budget de l'exercice écoulé, du débat d'orientation des finances publiques (DOFP), de même que de la réception des recommandations de la Commission européenne et du Conseil de l'Union européenne portant sur le programme de stabilité et le programme national de réforme (PNR) français, rendues dans le cadre du semestre européen - qui constituent autant d'éléments exerçant une influence forte sur les lois financières et les réformes appelées à être examinées lors de la session parlementaire à venir. »
Ce même amendement vise, par ailleurs, à préserver la lisibilité du rapport sur les nouveaux indicateurs de richesse .
La rédaction issue de l'Assemblée nationale tend en effet à prendre en compte l'ensemble des indicateurs définis par l'ONU, au nombre de 232. Il est même loisible au Gouvernement de considérer davantage d'indicateurs (« notamment »). Or les indicateurs de l'ONU ne sont pas tous adaptés à l'analyse de la situation française. Il convient de se fonder sur les travaux du Conseil national de l'information statistique, qui a constitué un tableau de bord de 98 indicateurs de suivi pour la France, et de ne retenir en définitive qu'une série d'indicateurs significatifs, utiles à l'analyse de la situation française au regard du développement durable.
La démarche instituant de « nouveaux indicateurs de richesse » n'a de sens que si elle est fondée sur un petit nombre d'indicateurs, particulièrement significatifs et visibles dans le débat public. À défaut, il y a fort à craindre que l'indicateur « PIB » ne monopolise encore longtemps l'attention des médias et du public.
Lors de l'examen au Sénat de la loi de 2015, le rapporteur de la commission des finances, M. Antoine Lefèvre, l'a exprimé en ces termes : « il apparaît donc que les nouveaux indicateurs de richesse ne manquent pas. Toutefois, ces derniers ont pour principale faiblesse de présenter une visibilité limitée et ne sont, par conséquent, pas en mesure de « modifier » la perception qu'ont les acteurs publics et les citoyens des politiques qui sont menées. Aussi la finalité de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui est-elle de renforcer la saillance de ces nouveaux indicateurs de richesse et de prévoir que ces derniers soient régulièrement actualisés et suivis. » 13 ( * )
Le prochain rapport, attendu donc avant le 1 er juin 2021 , devrait s'attacher à évaluer l'impact de la crise sanitaire et des mesures prises par le Gouvernement tout au long de l'année 2020, au regard d'indicateurs pertinents .
La loi prévoit la possibilité d'un débat au Parlement sur ce rapport : cette disposition est inutile puisque les assemblées ont, en tout état de cause, la possibilité d'initier un tel débat. Celui-ci serait néanmoins bienvenu dans le contexte sanitaire, économique et social actuel.
La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.
Article 4
Financement d'actions de coopération par les
autorités organisatrices de la mobilité
L'article 4 du projet de loi met en place un nouveau dispositif de financement de l'action internationale des collectivités territoriales : en complément des dispositifs « 1 % eau », « 1 % énergie », « 1 % déchets », il instaure un nouveau financement facultatif sur les budgets des services de mobilité (« 1 % mobilité »).
La Commission a adopté cet article sans modification.
1. L'aide publique au développement des collectivités territoriales
1.1. Une compétence de principe et des dispositifs de financement particuliers
Depuis la loi du 2 février 2007 14 ( * ) relative à l'action extérieure des collectivités territoriales (loi « Thiollière »), les collectivités territoriales disposent, aux termes de l'article L. 1115-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), d'une compétence de principe pour « mettre en oeuvre ou soutenir toute action internationale annuelle ou pluriannuelle de coopération, d'aide au développement ou à caractère humanitaire », dans le respect des engagements internationaux de la France. À cette fin, les collectivités territoriales concluent des conventions avec des autorités locales étrangères, précisant l'objet des actions envisagées et le montant prévisionnel des engagements financiers.
La loi du 9 février 2005 15 ( * ) , dite loi « Oudin-Santini » a institué un dispositif de financement particulier, dit « 1 % eau », complété en 2006 par le « 1 % énergie » 16 ( * ) . Aux termes de ces dispositifs : « Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes chargés des services publics de distribution d'eau potable et d'assainissement ou du service public de distribution d'électricité et de gaz peuvent, dans la limite de 1 % des ressources qui sont affectées aux budgets de ces services, mener des actions de coopération avec les collectivités territoriales étrangères et leurs groupements, dans le cadre des conventions prévues à l'article L. 1115-1, des actions d'aide d'urgence au bénéfice de ces collectivités et groupements, ainsi que des actions de solidarité internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement et de la distribution publique d'électricité et de gaz » (article L. 1115-1-1 CGCT).
Cette possibilité concerne également les agences de l'eau (article L. 213-9-2 du code de l'environnement 17 ( * ) ).
La loi d'orientation du 7 juillet 2014 18 ( * ) a institué, de la même façon, un dispositif de financement « 1 % déchets », dans le domaine de la collecte et du traitement des déchets ménagers (article L. 1115-2 CGCT).
1.2 Les dispositifs « 1 % » : des succès inégaux
L'aide publique au développement des collectivités territoriales (hors aide aux réfugiés sur le territoire français) s'élève à 51,4 M€, en augmentation de 3,6 % sur un an 19 ( * ) . Ce chiffre repart à la hausse après une décennie de baisse : il s'élevait en effet à 72 M€ en 2008. La baisse est donc de 30 % entre 2008 et 2018. Parallèlement, l'aide des collectivités territoriales aux réfugiés en France (également comptabilisée au titre de l'APD des collectivités territoriales) a fortement augmenté, passant de 34,9 M€ en 2016 à 70,5 M€ en 2019 (multipliée par deux). L'aide aux réfugiés en France représente donc aujourd'hui 58 % de l'APD des collectivités territoriales (70,5 M€ sur un total de 121,9 M€).
Les dix premiers pays bénéficiaires de l'APD des collectivités territoriales (hors aide aux réfugiés sur le territoire français) sont les suivants : Madagascar, Sénégal, Burkina Faso, Mali, Maroc, Haïti, Bénin, Territoires palestiniens, Guinée, Togo. 65 % de l'APD des collectivités territoriales est destinée au continent africain. 47 % de l'APD bilatérale des collectivités territoriales françaises est destinée à l'un des 19 pays prioritaires de l'aide au développement de la France (CICID du 8 février 2018). D'un point de vue thématique, le principal secteur de l'APD des collectivités territoriales françaises est l'eau et l'assainissement (25 % du total).
L'APD des collectivités a évolué différemment dans les trois secteurs du 1 %, le premier dispositif de financement de ce type mis en place (« 1% eau ») étant le plus dynamique . En 2019, les montants déclarés par les collectivités territoriales s'élèvent à 12,9 M€ pour l'eau et l'assainissement, 1,2 M€ pour l'énergie et 1 M€ pour les déchets.
Évolution de l'APD bilatérale des collectivités territoriales dans les secteurs du 1 % depuis 2014
Source : rapport précité sur l'APD des collectivités territoriales françaises en 2019
Le bilan annuel 2019 de pS-Eau 20 ( * ) apporte les précisions suivantes : « Tandis que les financements issus des budgets généraux des collectivités territoriales tendent à diminuer, le recours à la loi Oudin-Santini est en augmentation constante et atteint son maximum en 2019 avec la mobilisation de 13 M€ par 75 collectivités, soit près de 90 % du total qu'elles ont engagé sur le secteur [16,4 M€] ». Au total, « 31,9 M€ ont été mobilisés en 2019, dont 16,4 M€ par les collectivités territoriales et 15,5 M€ par les agences de l'eau. Cela représente une augmentation de 3,6 M€, soit 13 % par rapport à 2018 ».
Les montants engagés dans le cadre des dispositifs de 1 % permettent de mobiliser les budgets annexes des collectivités, en plus de leurs budgets généraux, et donc de mobiliser des moyens complémentaires en faveur de la coopération. Par ailleurs, ces dispositifs de financement sont un levier important pour mobiliser des fonds complémentaires.
2. L'introduction d'un dispositif « 1 % mobilité »
En premier lieu, à l'initiative de l'Assemblée nationale, l'article 4 inscrit l'action internationale des collectivités locales dans le cadre de la mise en oeuvre de l'Agenda 2030 des Nations unies. Comme à l'article 3, il s'agit d'introduire dans le droit français les objectifs de développement durable (ODD).
En second lieu, après les articles L. 1115-1-1 (« 1 % eau », « 1 % énergie) et l'article L. 1115-2 (« 1 % déchets ») du code général des collectivités territoriales, l'article 4 insère un article L. 1115-3 instituant un dispositif de financement du même type dans le domaine des transports (ou de la mobilité, selon le terme désormais consacré).
L'étude d'impact du projet de loi note qu'ainsi « 4 thématiques au coeur des ODD seront concernées par ces financements innovants (...). Par ailleurs, ces vecteurs de coopération, de nature à soutenir les exportations, offrent des opportunités de développement pour les entreprises françaises présentes dans ces secteurs ».
L'étude d'impact évalue le potentiel d'un tel dispositif à 100 M€ , soit deux fois plus que le potentiel estimé du « 1 % eau » (50 M€ 21 ( * ) ) et trois fois plus que les financements effectifs au titre du « 1 % eau » (32 M€).
La loi du 24 décembre 2019 22 ( * ) d'orientation des mobilités (LOM) vise à ce que l'ensemble du territoire national soit couvert par des autorités organisatrices de la mobilité (AOM). En application du nouveau dispositif mis en place par l'article 4, ces AOM pourront mobiliser, dans la limite de 1 % des ressources hors versement mobilité 23 ( * ) affectées au budget des services de mobilité, des actions de coopération avec des collectivités locales étrangères. Ce financement sera consacré à des actions d'aide d'urgence ou de solidarité internationale dans le domaine de la mobilité.
Les ressources tirées du versement mobilité sont exclues de l'assiette du « 1 % mobilité ». Cette exclusion correspond à un souhait des collectivités territoriales. Il s'agit d'éviter que l'usage de l'option du 1 % mobilité n'ait pour conséquence une augmentation de la fiscalité des entreprises. Il était en effet souhaitable de dissiper toute ambiguïté à ce sujet.
À l'initiative du Groupe « Agir Ensemble », la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale avait introduit dans le texte un dispositif de « 1 % Logement solidarité internationale » autorisant les bailleurs sociaux à financer des actions de coopération et de solidarité internationales, dans la limite de 1 % de leur budget d'investissement. Jugeant ce dispositif intéressant mais insuffisamment mûr, le Gouvernement a obtenu sa suppression en séance (« Il importe de sauvegarder les capacités d'investissement du secteur HLM et de les sanctuariser sur leurs missions premières ») et il ne figure donc plus dans le texte.
3. Un nouveau financement facultatif offrant des perspectives intéressantes au-delà de la crise actuelle
D'après l'étude d'impact, l'assiette du dispositif serait de près de 10 Mds € :
- « En dehors de l'Ile-de-France, les ressources des autorités organisatrices et les recettes du trafic des sociétés d'exploitation s'élèvent à 7,3 Mds€ en 2015, dont 3,7 Mds€ de versement transport »;
- « En Ile-de-France, ces ressources étaient d'environ 10 Mds€ en 2015, dont près de 4 Mds€ de versement transport ».
L'exclusion du versement mobilité réduit donc l'assiette du « 1 % mobilité » de 7,7 Mds€ et le potentiel mobilisable de 77 M€ environ.
À court terme, le nouveau dispositif pourrait être peu opérant , en raison de la crise sanitaire qui a fortement réduit les recettes des sociétés de transport. La baisse de la fréquentation induit des pertes de recettes substantielles, s'agissant tant des recettes tarifaires (2 Mds€ de recettes voyageurs perdues pendant le premier confinement) que du versement mobilité (1 Md€ perdu). Au-delà de la situation actuelle, les effets pourraient se poursuivre à plus long terme, puisque, d'après une enquête de l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP) 24 ( * ) , 30 % des voyageurs habituels des transports prévoient de s'en détourner une fois la crise sanitaire passée. La question de la soutenabilité du modèle actuel de financement des transports du quotidien se pose.
Ainsi, pour monter en puissance, le dispositif du « 1 % mobilité » nécessitera quelques projets pilotes qui auront valeur de modèle. Cette montée en puissance sera, en tout état de cause, progressive.
Néanmoins, ce nouveau financement facultatif offre des perspectives intéressantes dans l'un des domaines cruciaux de l'aide au développement (ODD 11). Il aura aussi vocation à créer un effet de levier, c'est-à-dire à susciter des cofinancements permettant le bouclage de projets dans un secteur clef pour promouvoir la croissance économique et réussir la transition énergétique au niveau mondial. Ces actions seront aussi un facteur de notoriété et d'attractivité des collectivités et entreprises françaises à l'international.
La commission a adopté l'article 4 sans modification .
Article 4 bis (supprimé)
Prise en compte de l'action des
organisations de la société civile dans le champ de
compétence de la commission nationale de la coopération
décentralisée (CNCD)
L'article 4 bis du projet de loi étend le champ de compétence de la commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD) à l'action des organisations de la société civile contribuant à la coopération entre territoires.
La Commission a supprimé cet article afin de préserver la spécificité de la CNCD comme organe de dialogue à parité entre l'État et les collectivités territoriales.
1. La commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD)
La Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD) réunit deux fois par an, à parité, des représentants des associations nationales de collectivités territoriales et de tous les ministères concernés par la coopération décentralisée.
En application de l'article R. 1115-8 du CGCT, cette commission est présidée par le Premier ministre ou le ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Elle comprend, en outre, quarante-quatre membres, dont :
- 14 représentants des collectivités territoriales et d'associations dont l'objet est relatif à l'action extérieure des collectivités territoriales et 14 représentants de l'État , qui ont voix délibérative ;
- 12 représentants d'établissements publics, d'associations ou d'organismes ayant une activité en relation avec l'action extérieure des collectivités territoriales ou la francophonie, qui ont voix consultative, désignés par arrêté du ministre des affaires étrangères ;
- 4 personnalités qualifiées dans le domaine du développement local et de la coopération internationale, qui ont voix consultative.
L'article L. 1115-6 du CGCT dispose que la CNCD « établit et tient à jour un état de l'action extérieure des collectivités territoriales », qu'elle « favorise la coordination » et, enfin, qu'elle « peut formuler toute proposition relative à l'action extérieure des collectivités territoriales ».
2. L'extension du champ de compétence de la CNCD
L'Assemblée nationale a inséré dans le texte un article 4 bis tendant à ce que la CNCD, aujourd'hui compétente pour formuler « toute proposition relative à l'action extérieure des collectivités territoriales » soit également compétente pour formuler toute proposition sur l'action « des organisations de la société civile contribuant à la coopération entre territoires ».
D'après les auteurs de l'amendement qui a introduit cette modification : « Ceci permettra d'élargir l'approche de la CNCD à l'ensemble des acteurs territoriaux partenaires des collectivités (chambres consulaires, réseaux multi-acteurs...). Cette modification dans la loi pourra, au besoin, ouvrir la voie à des modifications relevant du décret, comme la composition ou les modalités de fonctionnement de la CNCD. »
Il s'agit donc potentiellement d'une modification en profondeur de la CNCD , impliquant une ouverture vers les organisations de la société civile.
3. La nécessité de préserver la spécificité de la CNCD
La CNCD est déjà ouverte, à titre consultatif, aux organisations de de la société civile, par l'intermédiaire des réseaux régionaux multi-acteurs, qui sont des dispositifs régionaux d'échange, d'appui et de concertation entre acteurs de la coopération internationale.
Il ne paraît pas pertinent d'aller plus loin car il convient de préserver la spécificité de la CNCD qui est l'instance de dialogue à parité entre l'État et les collectivités locales sur la coopération décentralisée .
La coopération décentralisée recouvre, au demeurant, non seulement la politique de développement solidaire des collectivités territoriales mais aussi leur politique de rayonnement et d'attractivité. Les collectivités locales mènent des actions dans le domaine de l'aide au développement mais coopèrent aussi avec des pays ne relevant pas de l'APD, dans le cadre, par exemple, de leur coopération européenne ou transfrontalière .
Enfin, la gouvernance de la politique de développement solidaire est suffisamment complexe pour ne pas introduire de confusion supplémentaire :
- La CNCD est l'enceinte de dialogue entre États et collectivités.
- Le Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI) est l'enceinte de concertation entre les principaux acteurs du développement et l'État. Les collectivités ainsi que les différentes composantes de la société civile, notamment les ONG, sont représentées, à ce titre, au sein du CNDSI.
La commission a adopté les amendements identiques COM-108 des rapporteurs et COM-109 de M. Yung supprimant cet article.
La commission a supprimé l'article 4 bis.
Article 5
Conseil national du développement et de la
solidarité internationale
L'article 5 reconduit le Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI), dont l'existence, au niveau législatif, résulte de la loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (LOPDSI) du 7 juillet 2014.
La Commission a modifié cet article afin que les conditions de nomination des parlementaires au sein de cet organisme soient conformes aux principes généraux fixés par la loi du 3 août 2018.
1. Le Conseil national du développement et de la solidarité internationale
Suite aux « Assises du développement et de la solidarité internationale » de 2012-2013, l'article 4 de la loi du 7 juillet 2014 25 ( * ) a créé un Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI) « qui a pour fonction de permettre une concertation régulière entre les différents acteurs du développement et de la solidarité internationale sur les objectifs, les orientations, la cohérence et les moyens de la politique française de développement ».
L'article 6-1 de la même loi précise, en outre, que le CNDSI comprend deux députés et deux sénateurs, ainsi qu'un représentant au Parlement européen élu en France.
La loi de 2014 ne s'appliquant que jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi de programmation suivante, une disposition était nécessaire afin de prolonger l'existence législative du CNDSI . C'est l'objet de l'article 5, dont la rédaction est proche de celle précitée de la LOPDSI.
Le CNDSI, qui se réunit deux ou trois fois par an, depuis sa création, est composé de 53 membres, réunis en huit collèges (ONG, syndicats, employeurs, entreprises, parlementaires, collectivités territoriales, universités et centres de recherches, personnalités étrangères).
Par un décret du 30 décembre 2020 26 ( * ) , le gouvernement a modifié la composition du CNDSI, qui comporte désormais 10 collèges : parlementaires et membre du CESE, collectivités territoriales, acteurs associatifs, syndicats, acteurs économiques, acteurs de l'économie sociale et inclusive, fondations, organismes universitaires, scientifiques, de recherche et de formation, plateformes multi-acteurs et personnalités étrangères. Ce décret prévoit, en outre, que le CNDSI se réunira au moins trois fois par an.
2. Les conditions de nomination des parlementaires au sein de la CNDSI
L'article 5 ne reconduit pas la présence d'un membre du Parlement européen élu en France, au sein du CNDSI : en effet, d'après l'étude d'impact, la procédure de désignation par le président du Parlement européen, d'un élu français du Parlement européen, pour siéger dans une instance de droit français, n'a jamais pu aboutir. La disposition n'était donc pas effective.
À l'initiative du Sénat, l'article 13 de la loi organique du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique 27 ( * ) prévoit qu'un parlementaire ne peut plus être désigné en cette qualité dans une institution ou un organisme extérieur qu'en vertu d'une disposition législative.
S'agissant des modalités de désignation de ces parlementaires , la loi du 3 août 2018 28 ( * ) , issue d'une proposition de loi identique des présidents des deux assemblées , prévoit qu'en principe « les nominations, en cette qualité, de députés et de sénateurs dans un organisme extérieur au Parlement sont effectuées, respectivement, par le Président de l'Assemblée nationale et par le Président du Sénat ». Fruit d'une réflexion commune de l'Assemblée nationale et du Sénat, ce texte vise à rationaliser les procédures de nomination des députés et des sénateurs dans les organismes extraparlementaires (OEP).
En application de cette loi, les parlementaires membres d'un OEP sont systématiquement nommés par le président de l'Assemblée nationale ou par le président du Sénat , sauf disposition législative contraire. Ces nominations doivent respecter les principes de parité et de pluralisme .
Afin de tenir compte des principes généraux de la loi de 2018, et de l'effort de rationalisation de la présence de députés et de sénateurs au sein d'OEP, réalisé à l'initiative des deux assemblées au cours des années récentes, la commission a adopté deux amendements identiques (COM-110 des rapporteurs et COM-150 de M. Requier) renvoyant aux principes généraux désormais applicables : nomination par les présidents des assemblées, parité et pluralisme .
La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié
Article 6
Réciprocité du volontariat de solidarité
internationale
L'article 6 permet des mobilités croisées réciproques en ouvrant le volontariat de solidarité internationale (VSI) à des étrangers de pays tiers (non UE/EEE) souhaitant réaliser des missions en France.
Il inscrit le VSI dans le cadre de la réalisation des objectifs de développement durable de l'ONU (ODD).
L'article 6 permet, non seulement à des associations agréées, mais aussi à des groupements d'intérêt public, de conclure des contrats de VSI.
Dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, l'article 6 comporte, enfin, une disposition visant à lutter contre les dérives du « volontourisme ».
La commission a adopté un amendement visant à ce que les groupements d'intérêt public souhaitant faire appel au concours de volontaires soient, tout comme les associations, agréés pour l'exercice de cette activité.
1. Le volontariat international : une réciprocité insuffisante
1.1 Le volontariat international, une contribution à la politique de développement
Les dispositifs de volontariats internationaux sont un levier de mobilisation citoyenne en faveur de la politique de développement solidaire. Le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) du 8 février 2018 prévoit une augmentation de l'effort dans ce domaine.
Créé par la loi n°2005-159 du 23 février 2005, le volontariat de solidarité internationale (VSI) permet à toute personne majeure, sans condition de nationalité ni limite d'âge, de s'engager dans des actions de solidarité dans un pays situé à l'étranger (hors Union européenne/Espace économique européen) 29 ( * ) , dont le volontaire n'est pas le ressortissant ou le résident régulier.
Le contrat de VSI est d'une durée maximale de deux ans , la durée cumulée des missions accomplies de façon continue ou non par un même volontaire ne pouvant excéder six ans. Ce contrat est conclu avec l'une des 29 associations agréées par le ministère des affaires étrangères. Il a pour objet l'accomplissement de missions d'intérêt général « dans les domaines de la coopération au développement et de l'action humanitaire ».
Les associations sont tenues de former les volontaires avant leur départ et de les affilier à un régime de sécurité sociale ainsi qu'à des dispositifs d'assurance. Ceux-ci perçoivent une indemnité dont les montants minimum et maximum sont fixés par arrêté. L'État contribue aux dépenses des associations par le versement d'aides financières. Dans la pratique, le dispositif permet une formation et un suivi des volontaires, et apporte ainsi des garanties de sérieux. Ainsi encadré, le volontariat se distingue fondamentalement des pratiques relevant du « volontourisme » , consistant à proposer des activités de pseudo-volontariat à but touristique et lucratif, ne répondant pas toujours ni à l'attente de l'acheteur de ce service, ni aux besoins des pays d'accueil.
Le soutien du MEAE au volontariat international
Les différents dispositifs d'appui du MEAE ont permis de financer en 2019 le déploiement de plus de 3 500 volontaires associatifs, intervenant dans le champ de la coopération au développement et de l'action humanitaire, dont 1963 volontaires de solidarité internationale (VSI) . Près de 62% de ces volontaires ont moins de 30 ans.
France Volontaires , opérateur du MEAE, est au coeur du dispositif d'appui du ministère. Le contrat d'objectifs et de performance (COP) 2018-2020 de cet opérateur est actuellement en cours de renégociation.
L'augmentation des moyens du Volontariat s'inscrit en cohérence avec les conclusions du CICID du 8 février 2018. En 2021 les crédits (24 M€) seront répartis de la manière suivante :
. 9,9 M€ à France Volontaires pour ses fonctions de plate-forme (réseau des espaces volontariat, information du public, services aux associations d'envoi de volontariat, plaidoyer et communication...) et d'envoi de volontaires ;
. 10,6 M€ en faveur du dispositif de volontariat de solidarité internationale (VSI) mis en oeuvre par les associations agréées ;
. 2,4 M€ en faveur des dispositifs d'appui aux engagements relevant du volontariat d'initiation et d'échanges (programmes « Jeunesse Solidarité Internationale » et «Ville Vie Vacances Solidarité Internationale ») ;
. 0,8 M€ pour le volontariat d'échanges et de compétences (congés solidarité, retraités).
L'augmentation de l'enveloppe doit permettre de poursuivre la dynamique engagée sur ces trois dernières lignes, toutes gérées par le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP).
Pour le VSI, la dynamique est repartie à la hausse depuis 2019 (barre des 2000 volontaires presque à nouveau franchie) grâce à la prise en charge de la totalité des coûts sociaux rendue possible par l'augmentation de l'enveloppe de près de 2 M€ en 2019 ; l'interruption de nombreuses missions de volontaires et la suspension des nouvelles missions en raison de la pandémie devrait enclencher un flux à la hausse de « rattrapage » en 2021 et une nouvelle politique de communication avec l'opérateur France Volontaires et le CLONG (Comité de liaison des ONG de volontariat) devrait développer l'intérêt pour ce type d'engagement (les marges de progrès sont importantes, si on compare la situation en France et dans d'autres pays européens ou américains).
Pour les chantiers de jeunes, il y a également une grande appétence que les moyens actuels sont loin de pouvoir satisfaire (environ 130 projets financés par an), de même que pour le volontariat « senior » (600 missions par an).
Source : PLF 2021 (documents annexés)
En 2019, 1963 VSI ont été déployés ; 62 % des volontaires étaient des femmes.
En 2018, les VSI sont principalement concentrés en Afrique subsaharienne (45 %), en Asie (30 %), puis dans les régions américano-caribéennes (13,4 %) et en Afrique du Nord et au Moyen Orient (10,9 %). Les 19 pays prioritaires définis par le Comité Interministériel de la Coopération Internationale et du Développement (CICID) concentrent 33 % des VSI. Les trois pays où l'engagement est le plus important en 2018 sont Madagascar (173 VSI), le Cambodge (156) et les Philippines (125).
Le volontariat de solidarité international ne représente qu'une partie (22 %) des volontariats internationaux d'échange et de solidarité.
1.2 Une réciprocité insuffisante
Le principe de réciprocité permet aux pays accueillant des volontaires français d'envoyer, en retour, des volontaires en France.
Le VSI ne permet pas de réciprocité puisqu'il ne peut être accompli qu'à l'étranger (hors UE/EEE).
D'autres dispositifs permettent une certaine réciprocité :
- Le Service civique , ouvert à tous les jeunes de 16 à 25 ans, a principalement pour objet de mobiliser les jeunes sur le territoire national (140 000 volontaires en 2019). Entre 2010 et 2019, plus de 6000 volontaires ont effectué un Service Civique à l'international. L'envoi de jeunes à l'étranger permet l'accueil de jeunes provenant de pays étrangers en France. Pour être éligibles au service civique, en effet, les candidats de nationalité étrangère (hors EEE et Suisse) doivent séjourner en France depuis plus d'un an en application de l'un des titres de séjour prévus par l'article L.120-4 du code du service national, ou être en possession d'un titre de séjour éligible (étudiants, réfugiés, protection subsidiaire), ou encore venir réaliser une mission en France dans le cadre d'un projet de réciprocité. En 2019, la réciprocité a permis l'accueil de 220 jeunes de toutes nationalités, principalement en provenance de Tunisie et du Maroc.
- Les programmes Jeunesse solidarité internationale (JSI) et Ville-vie-vacances solidarité internationale (VVV/SI) permettent à des groupes de jeunes de rencontrer d'autres jeunes autour de la réalisation de projets de solidarité internationale de courte durée à l'étranger comme en France (« chantiers »).
L'étude d'impact du projet de loi confirme que ces dispositifs ne suffisent pas à assurer une véritable réciprocité du volontariat : en 2018, moins de 200 jeunes provenant de 40 pays partenaires ont effectué un service civique en France, auxquels il faut ajouter une cinquantaine de jeunes prenant part aux programmes JSI et VVV/SI, soit en tout environ 250 volontaires chaque année, au titre de la réciprocité .
L'accueil de jeunes Européens est, par ailleurs, possible grâce au Corps européen de solidarité qui permet d'envoyer de jeunes européens (18-30 ans) réaliser des missions de volontariat dans des pays européens ou non-européens, grâce à un partenariat entre une organisation d'envoi et une organisation d'accueil.
L'Allemagne fait figure de « modèle » en matière de réciprocité, grâce au dispositif Weltwärts , qui s'inscrit explicitement dans le cadre des 17 objectifs de développement durable (ODD) de l'ONU. Outre l'engagement des jeunes dans la politique de développement, l'accent est mis sur l'apprentissage et le renforcement des partenariats entre les organisations de la société civile d'Allemagne et de pays d'Asie, d'Afrique, d'Amérique latine, d'Océanie et d'Europe orientale. En 2019, ce dispositif a permis à 3293 jeunes (dont 69 % de femmes) de réaliser une mission de volontariat à l'étranger, tandis que 713 jeunes (dont 55 % de femmes) d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine effectuaient une mission en Allemagne .
2. L'ouverture du VSI à des mobilités croisées réciproques
L'article 6 modifie la loi de 2005 afin de permettre à des étrangers de pays tiers (non UE/EEE) de réaliser des missions de VSI en France.
Le dispositif n'est pas ouvert aux personnes résidant dans l'UE ou l'EEE, car celles-ci bénéficient des actions du Corps européen de solidarité : des jeunes volontaires de ces pays peuvent déjà être accueillis, à ce titre, en France.
L'étude d'impact anticipe environ 80 missions financées la première année puis 300 missions en tout à l'horizon 2022.
L'article 6 ouvre, en outre, la possibilité de conclure un contrat de VSI non seulement aux associations agréées mais aussi aux groupements d'intérêt public (GIP). L'Assemblée nationale a adopté des amendements en ce sens pour tenir compte de la volonté du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères de transformer France Volontaires, qui a aujourd'hui un statut associatif, en GIP . Cette transformation du statut de France Volontaires répondrait à une préconisation de la Cour des comptes, qui juge que la structure actuelle de l'opérateur est trop légère compte tenu de son budget et de ses missions.
D'après la Cour des comptes, en effet, le risque de qualification de « gestion de fait » rend nécessaire une évolution juridique rapide de la structure associative de France Volontaires . Lors de la création en 2009 de France Volontaires, par transformation de l'Association française des volontaires du progrès (AFVP), le choix avait été fait de conserver le statut associatif en instituant une cogestion entre pouvoirs publics, collectivités territoriales et associations. La gouvernance de l'association s'est révélée complexe. La présence importante des pouvoirs publics dans cette gouvernance, conjuguée à une contribution financière de l'État qui couvre 85 % de la masse salariale, crée les conditions d'une qualification d' « association transparente » au sens de la jurisprudence administrative.
Il est dès lors nécessaire de prévoir la possibilité, pour un GIP, de signer des contrats de VSI : en effet, France Volontaires gère directement l'envoi d'un petit nombre de volontaires (environ 200 chaque année), bien que ce ne soit pas sa mission principale. Cette possibilité lui permet d'agir en complémentarité avec les associations, notamment sur des missions en lien avec la coopération décentralisée, pour répondre aux demandes des postes diplomatiques, ou pour lancer des expérimentations et projets pilotes.
L'Association française des volontaires du progrès était l'une des principales associations d'envoi de VSI avant sa transformation en France Volontaires en 2009. Le MEAE a maintenu une mission d'envoi de l'opérateur, estimant que ces envois devaient permettre de développer des partenariats stratégiques, et de dynamiser les dispositifs français. À ce titre, France Volontaire dispose d'une subvention d'intervention versée annuellement par le MEAE. La convention signée avec le MEAE, ainsi que le contrat d'objectif et de performance, encadrent cette activité d'envoi.
Par ailleurs, l'article 6 reformule l'objet du contrat de VSI afin d'inscrire ce dispositif dans le cadre des objectifs onusiens : le VSI aura désormais pour objet l'accomplissement d'une mission d'intérêt général visant à participer à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).
La commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a introduit à l'article 6 une disposition visant à lutter contre les dérives du « volontourisme », pratique consistant à proposer des séjours touristiques en les faisant passer pour du volontariat. À cette fin, elle a adopté une disposition tendant à assimiler à un dol 30 ( * ) l'utilisation des termes « volontariat » et « bénévolat » ou leurs dérivés pour caractériser ces activités payantes lorsque la contribution financière ne participe pas au financement du projet d'intérêt général.
D'après la députée Anne Genetet, à l'origine du dispositif, le « volontourisme » recouvre des « séjours courts alliant volontariat et tourisme, qui sont parfois l'objet de dérives, allant de la tromperie des volontaires à des situations de traite des êtres humains. Il convient donc pour l'État de contrer ce phénomène par une approche plus ambitieuse et plus opérationnelle ».
3. Le volontariat, levier de mobilisation en faveur du développement
Le service civique, seul, ne suffit pas à assurer une réciprocité du volontariat : il est limitant par nature puisqu'il ne s'adresse qu'aux jeunes (16-25 ans), alors que le VSI ne comporte pas de limite d'âge. En outre, le service civique est de durée limitée (6 à 12 mois) tandis que le VSI peut aller jusqu'à 2 ans (cumulables jusqu'à 6 ans). Enfin, le volontariat est fondé sur les compétences du volontaire tandis que le service civique est un volontariat d'initiation.
L'instauration d'un VSI de réciprocité, fondé sur la notion de partage de compétences, permettra de remédier aux limites des dispositifs existants.
La montée en puissance du dispositif sera nécessairement progressive, d'autant que la crise sanitaire freine fortement la dynamique du volontariat. Il conviendra d'accompagner cette évolution.
Comme le mentionne l'étude d'impact, des questions telles que celles du visa, du titre de séjour et du logement des volontaires se poseront .
La réciprocité ne signifie pas une égalité en volume entre volontariat « sortant » et volontariat « entrant ». C'est une simple faculté, qui nécessitera une augmentation des moyens si l'on veut éviter de devoir arbitrer entre l'envoi et l'accueil de volontaires .
Enfin, s'il faut encourager un tourisme plus équitable et solidaire, le « volontourisme » entraîne des dérives, voire une forme de tromperie qu'il convient de prévenir. Certains jeunes s'engagent ainsi dans des missions moins solidaires que lucratives, parfois inadaptées aux besoins des pays visités. Toute ambiguïté sur la nature réelle de ces missions risque de nuire à l'image du volontariat français. Un travail de sensibilisation à ce phénomène doit être engagé au niveau national, afin d'inciter chacun à la vigilance. La montée en puissance du volontariat doit permettre de limiter ce « volontourisme », en répondant à une demande croissante d'engagement dans des missions utiles à l'international.
La commission a adopté un amendement COM-111 précisant que tout GIP signant un contrat de volontariat doit, comme les associations, être agréé pour l'exercice de cette activité.
La commission a adopté deux amendements complémentaires, au sein du Cadre de partenariat global (CPG) :
- un premier amendement pour ajouter l'opérateur France Volontaires à la liste des opérateurs de l'État contribuant à l'aide publique au développement française ;
- un second amendement pour préciser que l'augmentation des moyens de l'APD devra permettre de développer le volontariat international, afin que l'offre de missions puisse répondre à la demande croissante d'engagement et contribuer ainsi à endiguer les pratiques de « volontourisme ».
La commission a adopté l'article 6 ainsi modifié .
Article 6 bis (non modifié)
Devoir de vigilance des
organisations proposant des actions de volontariat
L'article 6 bis soumet les organisations proposant des actions de volontariat au contact de mineurs à une obligation de vigilance.
La Commission a adopté cet article sans modification.
1. Une obligation de vigilance : la vérification du « bulletin n°3 »
L'article L.133-6 du code de l'action sociale et des familles instaure un régime d'incapacité d'exercer au sein des accueils collectifs de mineurs à caractère éducatif à la suite du prononcé de certaines condamnations. Un principe identique existe dans le secteur sportif (article L. 212-9 du code du sport).
Par analogie, afin d'instaurer un principe de vigilance lors de l'envoi à l'étranger de volontaires, la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a introduit dans le texte une disposition visant à soumettre les organisations proposant des actions de volontariat au sein de structures oeuvrant auprès de mineurs à des règles comparables à celles appliquées par les organisations travaillant en France, en empêchant l'accès à ces séjours touristiques ou missions aux personnes ayant été condamnées pour crime ou pour certains délits.
Les organisations concernées sont donc tenues de vérifier l'absence de condamnation des candidats volontaires à une peine d'interdiction d'exercer une mission impliquant un contact habituel avec des mineurs .
Il s'agit, en pratique, d'obtenir l'extrait de casier judiciaire dit « bulletin n° 3 », contenant uniquement les condamnations les plus graves. Cette vérification est déjà possible, puisque toute personne peut demander pour lui-même, gratuitement en ligne ou par courrier ce « bulletin n° 3 » (qui ne peut en revanche pas être demandé par un tiers).
Article 777 du code de procédure pénale : le bulletin n°3
Le bulletin n° 3 est le relevé des condamnations suivantes prononcées pour crime ou délit, lorsqu'elles ne sont pas exclues du bulletin n° 2 :
1° Condamnations à des peines privatives de liberté d'une durée supérieure à deux ans qui ne sont assorties d'aucun sursis ou qui doivent être exécutées en totalité par l'effet de révocation du sursis ;
2° Condamnations à des peines privatives de liberté de la nature de celles visées au 1° ci-dessus et d'une durée inférieure ou égale à deux ans, si la juridiction en a ordonné la mention au bulletin n° 3 ;
3° Condamnations à des interdictions, déchéances ou incapacités prononcées sans sursis, en application des articles 131-6 à 131-11 du code pénal, pendant la durée des interdictions, déchéances ou incapacités ;
4° Décisions prononçant le suivi socio-judiciaire prévu par l'article 131-36 - 1 du code pénal ou la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, pendant la durée de la mesure.
2. L'instauration d'une obligation de vigilance dans le cadre du volontariat
Bien que ce bulletin n°3 soit déjà bien souvent demandé, lors de l'envoi de volontaires, il s'agit ici de rendre cette vérification obligatoire . Pour le volontariat à l'international, cette proposition, introduite par un amendement de la députée Anne Genetet, cible en priorité les organismes proposant des missions de volontariat en dehors des dispositifs existants, et notamment des missions relevant du « volontourisme ».
Le parcours du volontaire au sein des dispositifs existants est, plus généralement, un facteur de limitation des risques. Le volontaire se voit en effet dispenser une formation portant notamment sur la sécurité, les risques de tous ordres et l'interculturalité : il s'agit de donner aux volontaires les « codes » nécessaires à l'expatriation. Si le « risque zéro » n'existe pas, le parcours associé à l'engagement volontaire contribue à limiter les risques.
En réponse à nos questions, le MEAE a précisé que les conventions passées avec les associations d'envoi de volontaires responsabilisent celles-ci quant au recrutement, à la formation des volontaires, notamment concernant les publics avec lesquels le volontaire sera amené à travailler. Ces dispositifs engagent donc la responsabilité des partenaires associatifs sur le comportement des volontaires : les conventions d'agrément pour l'envoi de VSI stipulent ainsi que la responsabilité juridique des associations agréées est entière vis à vis des pouvoirs publics, pour tous les volontaires envoyés. Les formations au départ incluent des éléments sur les violences sexistes et la conduite à tenir auprès de publics vulnérables. Le ministère a mené avec les opérateurs un travail sur les questions de « tolérance zéro », qui pourrait conduire à des avenants aux conventions d'agrément des associations mentionnant les questions de prévention et de lutte contre l'exploitation et les abus sexuels et la conduite à tenir avec des publics vulnérables.
La commission a adopté l'article 6 bis sans modification.
Article 7
Renforcement de la tutelle de l'agence française de
développement (AFD)
L'article 7 précise les dispositions relatives aux missions et à la tutelle de l'AFD. La commission a précisé les missions de l'agence en distinguant nettement l'aide aux pays les plus pauvres et la contribution au développement des pays à revenu intermédiaire et des pays émergents.
Créée dès 1941 en tant que « Caisse centrale de la France libre », l'Agence française de développement (AFD) est un établissement public industriel et commercial (EPIC), dont les missions et l'organisation sont prévues par les articles L. 515-13, et R. 515-5 et suivants du code monétaire et financier (CMF). Conformément à l'article R. 515-6 du CMF, elle a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'Etat à l'étranger et contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie.
Le présent article a pour but de clarifier les dispositions législatives relatives à l'AFD.
En premier lieu (I), il reprend au sein de l'article L. 515-13 du code monétaire et financier les missions de l'AFD, qui figurent actuellement au sein de l'article R. 515-6 du même code :
« réaliser des opérations financières de toute nature en vue de :
a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'Etat à l'étranger ;
b) Contribuer au développement des collectivités territoriales mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution . »
Selon l'étude d'impact, ce rehaussement des missions de l'AFD au niveau législatif répond à « l'intérêt marqué du Parlement et notamment des commissions compétentes du Sénat et de l'Assemblée s'agissant des missions de l'agence et du pilotage de l'Etat ».
En second lieu, le présent article indique que « l'AFD est un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle de l'Etat ». Par cette disposition, Le Gouvernement souhaitait placer les dispositions relatives à la tutelle de l'AFD à un niveau équivalent, dans la hiérarchie des normes, à celles relatives aux autres établissements publics concourant à l'action extérieure de l'Etat, encadrés par la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat (Campus France, Institut français, Expertise France).
En troisième lieu, le présent article rattache explicitement l'AFD à la catégorie des établissements publics concourant à l'action extérieure de l'Etat, créée par cette même loi du 27 juillet 2010, et vis-à-vis desquels le chef de mission diplomatique exerce son autorité , en vertu de l'article 1 er de cette loi. En effet, l'AFD n'est pas explicitement mentionnée dans le texte de la loi de 2010, d'où, selon le Gouvernement, une incertitude juridique. Cette disposition se veut cohérente avec le renforcement du pilotage de l'AFD au niveau local, par la mise en place d'un conseil local du développement , présidé par le chef de mission diplomatique, regroupant les services de l'Etat, les opérateurs du développement sous tutelle de l'Etat, afin d'orienter leurs efforts vers une stratégie commune en matière de développement dans le pays partenaire. Ce dispositif est par ailleurs plus précisément décrit dans le titre III du cadre de partenariat global annexé à la présente loi (cf. ci-dessus). S'agissant des autres règles fixées par l'article 1 er de la loi de 2010, l'AFD, selon l'étude d'impact, les respecte toutes, à l'exception de la transmission de son rapport annuel d'activité à l'Assemblée des français de l'étranger.
En quatrième lieu (II), le présent article reprend les dispositions prévoyant que l'AFD est autorisée à gérer, sous la forme de fonds de dotation, des fonds publics ou privés . Ces dispositions étaient déjà présentes dans la loi du 7 juillet 2014 précitée, mais leur période de validité était limitée à cinq ans. Elles permettent à l'AFD de mettre en oeuvre des fonds délégués d'autres acteurs, comme l'Union européenne, des acteurs nationaux, multilatéraux ou des fondations privées. L'autorisation donnée à l'AFD de déléguer des fonds à d'autres institutions de développement permet inversement le recours à des organisations de la société civile ou à des partenaires locaux pour mener des projets.
Enfin, le présent article prévoit que l'AFD est autorisée à détenir tout ou partie du capital de la société par actions simplifiée (SAS) Expertise France 31 ( * ) .
Dans sa rédaction initiale, l'article 7 ne prévoyait pas la présence de parlementaires dans le conseil d'administration de l'AFD, alors que l'actuel article L. 515-13 du CMF prévoit que le conseil d'administration de l'agence comprend deux députés et deux sénateurs. Or la présence des parlementaires dans les organismes extérieurs au Parlement doit obligatoirement être prévue par la loi. La commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur portant à trois députés et à trois sénateurs le nombre de parlementaires membres du conseil d'administration de l'AFD, selon des modalités de désignation respectant la configuration politique de chaque assemblée. Le passage de deux à trois représentant devait permettre d'assurer un meilleur pluralisme de la représentation.
Toutefois, en séance, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement revenant à deux sénateurs et deux députés, mais prévoyant également deux suppléants pour chaque assemblée. Selon le Gouvernement, cette configuration garantit « une représentation pluraliste et équilibrée des différentes sensibilités politiques (8 sièges à pourvoir au total entre la majorité et les oppositions) tout en contenant la taille du CA, afin d'assurer la qualité des débats, d'accroître l'efficacité des délibérations et de conforter le rôle de pilotage stratégique dévolu à cette instance ».
Enfin, les députés ont adopté un amendement prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les coopérations opérationnelles entre l'AFD et la Caisse des dépôts et consignations.
Clarifier les missions de l'agence
Votre commission a souligné à plusieurs reprises la nécessité de renforcer la tutelle de l'Etat sur l'AFD . Cet opérateur a en effet changé de dimension au cours des dix dernières années en connaissant une très forte hausse de ses engagements, alimentés par des recapitalisations successives effectués par l'Etat et par des crédits octroyés par la mission « Aide publique au développement ». Cette montée en puissance, le caractère mixte EPIC/établissement financier de l'agence ainsi que sa nouvelle doctrine en matière de financement des biens publics mondiaux, ont conduits à une certaine émancipation de l'AFD par rapport la tutelle de l'Etat . Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport sur le pilotage des opérateurs extérieurs de l'Etat, « la relative abondance de ses ressources lui permet d'apparaître comme une « caisse universelle » ayant vocation à intervenir partout et sur tous les sujets, sur la base d'objectifs de développement durable à vocation holistique. L'AFD cherche à être identifiée comme une agence ayant pour mission de favoriser des transitions mondiales, sur tous les champs et sur tous les terrains ».
Outre l'affirmation de ses moyens et une nouvelle doctrine d'intervention, la dilution du pilotage de l'agence est l'autre cause principale de l'affaiblissement de la tutelle exercée par l'État . En effet, non seulement l'AFD n'a pas un seul ministre référent, mais deux ou trois (les ministres chargés du développement, des finances et du budget), mais d'autres instances exercent des missions stratégiques en matière de développement, comme le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), le secrétariat de celui-ci, ou encore le Comité d'orientation stratégique de l'AFD. Le Premier ministre ou le président de la République peuvent également confier des missions directement à l'AFD. Comme le souligne à nouveau la Cour des comptes, « sur le plan institutionnel, l'Agence entretient des relations avec l'ensemble des autorités publiques. N'ayant pas de ministère référent, elle peut, en permanence, faire des offres de services à l'ensemble des autorités publiques. Des demandes d'instruction d'un projet particulier lui sont faites directement par la présidence de la République, ou par les services du Premier ministre. »
Dès lors, votre commission a adopté un amendement de vos rapporteurs ayant pour objet de préciser et hiérarchiser les missions de l'AFD (COM-112) . Il s'agit de préciser et d'afficher clairement que la lutte contre la pauvreté et contre les inégalités mondiales, notamment au sein des pays les moins avancés, reste au coeur des missions de l'agence , et de bien en distinguer les missions universelles de protection des biens publics mondiaux ou de convergence économique qui concernent aussi bien les pays émergents.
La commission a également adopté un amendement COM-114 de M. Yung prévoyant que chaque année, le ministre chargé du développement et le ministre chargé de l'économie remettent au directeur général de l'agence une lettre d'objectifs. Il s'agit de l'application d'une recommandation de la Cour des comptes dans son rapport précité.
Enfin, la commission a adopté des amendements identiques COM-113 de ses rapporteurs et COM-151 de M. Requier au nom de la commission des finances, replaçant la nomination des parlementaires membres du CA de l'AFD dans le cadre de la loi n° 2018-699 du 3 août 2018 visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination. Celle-ci sera ainsi effectuée par le président de chaque assemblée.
La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié.
Article 8
Rapprochement d'Expertise France
avec le groupe Agence
française de développement (AFD)
L'article 8 réécrit les dispositions de la loi du 27 juillet 2010 relatives à Expertise France, dans l'optique de l'intégration de cet opérateur au sein du groupe AFD. La commission a précisé les missions d'Expertise France afin de préserver les relations de l'opérateur avec les ministères, d'une part, et avec les institutions internationales, d'autre part.
1. La transformation d'Expertise France en une société par actions simplifiée et son rattachement au groupe AFD
L'article 8 tend à modifier la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État, afin de transformer l'établissement public Expertise France en société par actions simplifiée dont le capital est public et, à la date de sa transformation, entièrement détenu par l'État.
Un opérateur en forte croissance depuis sa création en 2014
Expertise France a été créée en 2014 sous l'impulsion, notamment, de votre commission, afin de remédier à une véritable « atomisation » de l'expertise française internationale entre une multitude d'organismes et de services, généralement de petite taille et disposant de très faibles moyens. L'organisme s'est développé très rapidement, passant d'environ 104 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2015 (CA des opérateurs d'expertise regroupés) à plus de 230 millions d'euros en 2019, ce qui est nettement supérieur aux prévisions du précédent contrat d'objectifs et de moyens (qui prévoyait environ 200 millions d'euros).
L'agence est ainsi devenue un opérateur de référence dans le champ de l'expertise internationale et a développé une gamme complète de projets dans les secteurs de l'économie et des finances, de la gouvernance, de la santé, de la décentralisation et des politiques sociales. Expertise France a réalisé cette croissance rapide en allant bien au-delà des traditionnels « jumelages » ministériels internationaux, décrochant en particulier de nombreux contrats auprès de l'Union européenne, qui représentent aujourd'hui la majorité de son chiffre d'affaires. Elle a également mis en oeuvre des « offres intégrées » contenant la fourniture d'équipements, avec les projets emblématiques que sont l'appui à la MINUSMA, l'appui à la force conjointe du G5 Sahel et le projet PARSEC pour la sécurité dans le centre du Mali. Expertise France est ainsi devenue un acteur clef du continuum sécurité-développement. L'agence a acquis une légitimité, une force de frappe et une réactivité qui ont connu un nouveau « test » avec la réponse à la crise du coronavirus en Afrique.
Grâce à ces succès, Expertise France est aujourd'hui un acteur d'expertise internationale de dimension européenne , loin encore de la GIZ allemande dont les financements publics sont beaucoup plus massifs, mais comparable aux autres agences d'expertise internationale de nos partenaires européens.
Un modèle économique non stabilisé
Ces succès reconnus n'ont pas empêché Expertise France de rencontrer des difficultés importantes. Son équilibre économique est fragile depuis sa création, l'Etat français lui ayant fixé un objectif de quasi autofinancement et les commandes européennes ne permettant pas de dégager une marge suffisante. L'augmentation du volume moyen des projets, de 1,4 million d'euros en 2016 à 2,7 millions d'euros aujourd'hui, a fait « exploser » le chiffre d'affaires sans pour autant améliorer la rentabilité.
Ceci avait conduit votre commission à préconiser dans son rapport-bilan de 2018 un financement supplémentaire de l'Etat pour certains projets de caractère stratégique mais pas assez rémunérateurs , à l'instar de ce qui existe déjà pour les opérateurs allemand ou belge. De même, le rapprochement avec l'Agence française de développement (AFD), dans le cadre d'une convention signée dès 2015, n'a produit à l'origine que très peu de résultats tangibles, faute de vision stratégique préalable sur ce que pourrait être l'alliance d'une banque de développement et d'une agence d'expertise internationale. Les relations entre Expertise France et plusieurs ministères ont en outre été parfois marquées par des incompréhensions. Certaines administrations ont sans doute regretté la perte de leur propre organisme d'expertise international et ont parfois eu du mal à se reconnaître dans les gros projets mis en oeuvre par l'agence, d'autant que ceux-ci ne leur paraissaient pas toujours alignés sur leurs propres priorités.
En outre, alors que la loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale du 7 juillet 2014 prévoyait la poursuite de la fusion des opérateurs d'expertise ministériels au sein d'Expertise France afin de rationaliser ce secteur et d'améliorer la force de frappe de l'opérateur unifié, cette fusion n'a pas abouti pour plusieurs d'entre eux, en particulier Civipol Conseil (sécurité), l'agence pour le développement de la coopération internationale dans les domaines de l'agriculture, de l'alimentation et des espaces ruraux (ADECIA) ou encore France Vétérinaires international (FVI). La coopération entre Expertise France et ces opérateurs restés indépendants, inévitable sur certains projets conséquents financés par l'Union européenne, a été marquée par un certain manque de fluidité.
Enfin, l'agence a connu à l'interne une « crise de croissance » liée notamment à la transformation des missions de ses salariés, qui ont dû conquérir des projets sur un marché très concurrentiel et suivre la progression rapide du chiffre d'affaires tout en améliorant la productivité.
Des améliorations récentes
Le Contrat d'objectifs et de moyens (COM) pour 2020-2022 a cependant apporté en mai 2020 un certain nombre d'avancées qui ont contribué à permettre de surmonter ces difficultés. Conformément aux préconisations de votre commission, le COM a en effet prévu un soutien financier compensatoire de l'Etat pour certains contrats ayant une portée stratégique, mais qui n'offrent pas une rentabilité suffisante . Le COM a également prévu que les opérations bilatérales financées par la commande publique des ministères soient « rémunérées au juste prix pour permettre à Expertise France de couvrir ses coûts ». De plus, la commande publique des ministères est censée progresser, atteignant environ 75 millions d'euros à partir de 2020, ce qui représente une part non négligeable du chiffre d'affaires de l'agence. Enfin, Le COM a prévu un nouveau dispositif pour améliorer les relations entre Expertise France et les ministères pourvoyeurs d'expertise : il s'agit de la mise en place de comités consultatifs opérationnels rassemblant les représentants des ministères qui mobilisent l'agence. Ces nouvelles instances doivent permettre de faire vivre ces relations entre Expertise France et les ministères, mieux que ne l'ont permis jusqu'à présent les 61 accords-cadres déjà signés.
Concernant par ailleurs l'achèvement du regroupement des opérateurs d'expertise internationale, prévu par la loi du 7 juillet 2014 précitée afin de supprimer les doublons et de donner au nouvel opérateur une taille critique, le Comité interministériel de la transformation publique a décidé le 15 novembre 2019 de rattacher le GIP « Justice coopération internationale » (JCI) à Expertise France. Expertise France met notamment en oeuvre des projets confiés par l'Union européenne en gestion déléguée dans le champ du renforcement des services judiciaires et de l'amélioration de la chaîne pénale : cette fusion donnera ainsi davantage de cohérence et d'impact à l'expertise française dans ce domaine. En revanche, le Comité interministériel de la transformation publique du 15 novembre 2019 a décidé que l'opérateur agricole ADECIA ne serait pas rattaché à Expertise France, mais à FranceAgriMer, l'Établissement national des produits de l'agriculture et de la mer, et que France vétérinaire international (FVI) serait intégré à l'école VetAgroSup.
Au total, Expertise France devrait pouvoir continuer sa croissance sur des bases plus solides.
Le dispositif prévu par le présent article : une intégration à l'AFD dont les bénéfices sont encore à confirmer
Après un début difficile, les financements dont bénéficie Expertise France en provenance de l'AFD sont désormais beaucoup plus importants, avec 130 millions d'euros de projets financés en 2019 contre moins de 40 millions d'euros en 2018. En revanche, de nombreuses inconnues subsistent sur les effets de l'intégration d'Expertise France au groupe AFD. Votre commission avait ainsi estimé que les modalités retenues pour cette intégration devraient impérativement préserver les atouts spécifiques d'Expertise France : capacité à contracter avec les grands bailleurs internationaux ; rapidité d'intervention et agilité ; champ géographique et sectoriel large, y compris sur le continuum sécurité-développement ; enfin lien privilégié avec les administrations françaises. Au-delà des démarches de rationalisation des achats, de rapprochement des fonctions support, d'échange de personnels, de partage de certaines formations et de réflexion opérationnelle conjointe, déjà engagées, se pose aussi à terme la question du rapprochement des statuts des salariés.
La préservation de l'autonomie d'Expertise France dépendra également du renouvellement de l'accréditation à la gestion des fonds européens, qui conditionne la première source de financement de l'agence.
Ainsi, conformément aux objectifs du CICID, les dispositions de l'article 8 du projet de loi rendent possible l'intégration au groupe AFD d'Expertise France .
L'alinéa 4 crée un I de l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010 prévoyant la transformation d'Expertise France, à compter du 1 er juillet 2021, en société par actions simplifiée (SAS). L'étude d'impact souligne que le statut de la société par actions simplifiée a été préféré à celui de la société anonyme, dans la mesure où il « permet de bénéficier de la robustesse du cadre légale et réglementaire s'imposant aux sociétés commerciales tout en permettant certaines adaptations en matière de gouvernance, incompatibles avec le statut de société anonyme mais indispensables pour maintenir un lien fort entre la société et ses tutelles ». Par ailleurs, selon l'étude d'impact, la création d'un GIE aurait limité les synergies attendues du rapprochement entre les deux agences, tandis que la création d'un groupement d'EPIC a été écartée en raison des problèmes observées lors de l'expérimentation menée par la SNCF entre 2014 et 2018. Il est également prévu que le capital d'Expertise France est public et entièrement détenu par l'État à sa date de transformation. Par ailleurs, rappelons que l'article 7 prévoit que l'AFD pourra, à terme, détenir « tout ou partie » de son capital.
L'alinéa suivant prévoit la soumission d'Expertise France aux dispositions du présent article, et, dans la mesure où elles ne lui sont pas contraires, aux dispositions du chapitre Ier du titre Ier de la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat, ainsi qu'aux dispositions législatives applicables aux sociétés par actions simplifiées et à celles applicables aux sociétés dans lesquelles l'Etat détient directement ou indirectement une participation. Ces mentions permettent d'organiser pour Expertise France un statut spécifique, à la foi organisme participant à l'action extérieure de la France, société soumise à la législation sur les SAS (loi n°66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciale) et structure soumise à des dispositions particulières prévues par le présent article (par exemple la présence d'un directeur général, cf. ci-dessous), et donc insérées au sein de la loi du 27 juillet 2010.
L'alinéa suivant précise que la transformation prévue par le présent article n'emporte ni création d'une personne morale nouvelle, ni cessation d'activité, et prévoit explicitement le transfert des biens, droits et obligations, contrats et conventions de l'agence actuelle à la nouvelle entité. Il précise également que les opérations résultant de cette transformation ne donnent lieu au paiement d'aucune taxe.
En outre, le régime du personnel d'Expertise France ne sera pas affecté par cette transformation . Au demeurant, les salariés de l'agence, actuellement un EPIC, sont déjà des salariés de droit privé. Comme le souligne l'étude d'impact, ils relèvent de la convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (SYNTEC), adaptée dans un accord d'entreprise établi le 22 septembre 2016 dans le cadre des articles L. 2232-11 et suivants du code du travail. Le personnel relève par ailleurs du régime général de la sécurité sociale et la transformation d'Expertise France en société par actions simplifiée sera sans incidence en la matière. Par ailleurs, selon l'étude d'impact, « la constitution d'un groupe n'impose pas en elle-même une harmonisation des conditions d'emploi » malgré la possibilité de rechercher une articulation des statuts du personnel. Un accord d'entreprise propre à Expertise France devrait ainsi être maintenu.
Le nouveau II de l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010 résultant du présent article précise par ailleurs les missions d'Expertise France , de manière toutefois beaucoup moins détaillée que les dispositions actuelles. Les nouvelles dispositions prévoient en effet que « La société Expertise France participe à des missions d'intérêt public au service de la politique extérieure, de développement, d'influence et de diplomatie économique de la France, dans le cadre des orientations stratégiques définies par l'État . ». Il ne serait ainsi plus spécifié qu'Expertise France concourt à la promotion de l'assistance technique et de l'expertise internationale publique françaises à l'étranger, et qu'elle contribue au développement de l'expertise technique internationale et à la maîtrise d'oeuvre de projets de coopération sur financements bilatéraux et multilatéraux.
Le nouveau III de l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010 met ensuite en place une gouvernance spécifique pour Expertise France. Cette gouvernance vise à préserver un lien fort avec la puissance publique et avec l'expertise des administrations . Elle consiste ainsi en un Conseil d'administration composé de quatorze membres, dont un député et un sénateur, quatre membres représentant l'État, dont deux membres nommés par le ministre chargé du développement et deux membres nommés par le ministre chargé de l'économie, quatre membres représentant l'Agence française de développement, deux personnalités désignées en raison de leurs compétences dans le domaine d'activité de la société, et nommées par décret pris sur le rapport du ministre chargé du développement et du ministre chargé de l'économie, enfin deux membres représentant le personnel.
Adoptant un amendement du rapporteur, les députés de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale ont rétabli un nombre de deux députés et deux sénateurs membres du Conseil d'administration. En outre, en séance publique, ils ont adopté un amendement ajoutant un membre « représentant des organisations de la société civile de solidarité internationale ».
Par ailleurs, le IV nouveau de l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010 définit les fonctions de président du Conseil d'administration. En principe, le droit commun des SAS implique l'existence d'un président de la SAS doté des plus larges pouvoir, qui dirige aussi le Conseil d'administration. Pour déroger au droit commun du code du commerce, le dispositif prévu dans le projet de loi prévoyait de distinguer, au sein des futurs statuts de l'entreprise, les fonctions de président de la SAS, doté des pouvoirs exécutifs, de celles de président du conseil d'administration, chargé de l'organisation des travaux du conseil d'administration comme c'est le cas aujourd'hui. La fonction de directeur général, qui existe actuellement n'était donc pas prévue par le texte initial.
Toutefois, les députés ont adopté un amendement de leur rapporteur rétablissant la fonction de directeur général . En effet, selon eux, le dispositif proposé présentait un risque de confusion entre les fonctions des deux présidents, notamment à l'égard des tiers, ce qui aurait pu générer un risque juridique en cas de litige, et aurait également pu recréer des problèmes de gouvernance entre les dirigeants de la SAS, comme Expertise France en a d'ailleurs connu par le passé.
Dès lors, l'amendement adopté distingue les fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général. Les fonctions de président de la société et de président du conseil d'administration sont ainsi fusionnées, mais une disposition ad hoc limite les fonctions du président à celles des présidents de conseil d'administration, par mimétisme avec les fonctions de président de conseil d'administration de société anonyme (art. L. 225-51 du code du commerce). Le paragraphe IV bis nouveau relatif au directeur général introduit par ailleurs une dérogation au code du commerce pour prévoir la désignation d'un directeur général (précisée dans les statuts de la SAS), qui sera bénéficiaire des prérogatives de gestion opérationnelle de la société normalement dévolues au Président de la SAS (larges pouvoirs).
Enfin, les députés ont adopté en séance publique un amendement prévoyant qu'Expertise France remet tous les deux ans au Gouvernement et au Parlement un rapport recensant le nombre d'experts techniques internationaux français et détaillant leur secteur d'intervention, dans le but de renforcer l'attractivité de ce métier.
2. Préserver les missions actuelles d'Expertise France
Le présent article ne mentionne que de manière très générale les missions d'Expertise France : « missions d'intérêt public au service de la politique extérieure, de développement, d'influence et de diplomatie économique de la France ». Ni la notion même d'expertise, ni les relations avec les administrations publiques pourvoyeuses d'expertise, ni le fait qu'Expertise France puisse mener des projets à la fois sur fonds bilatéraux et multilatéraux, ne sont mentionnés. Ces éléments figurent pourtant actuellement dans l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010. Au moment où l'agence va être absorbée par le groupe AFD, il est impératif de rappeler que ces missions pourront continuer à être exercées. Le but de la réforme doit rester de créer des synergies entre deux organismes dont chacun a son identité et ses missions propres . Il est également important d'évoquer les relations de l'agence avec les ministères publics, un des risques de l'opération, identifié notamment par la Cour des comptes, étant que ces relations se distendent du fait, précisément, du passage dans le giron de l'AFD.
En conséquence, votre commission a adopté un amendement COM-119 de ses rapporteurs précisant qu'Expertise France a toujours vocation à entretenir des relations directes avec les ministères pourvoyeurs d'expertise ainsi que, en tant qu'organisme chargé d'une mission de service public, avec les institutions internationales susceptibles de lui confier des missions d'expertise.
En outre, la commission a adopté un amendement COM-122 de M. Yung précisant qu'Expertise France peut soutenir les collectivités territoriales d'outre-mer dans leurs actions de coopération décentralisée. Enfin, elle a adopté des amendements identiques COM-120 de ses rapporteurs et COM-152 de M. Requier au nom de la commission des finances prévoyant que la procédure de nomination des parlementaires au CA d'Expertise France sera celle de droit commun en vertu de la loi n° 2018-699 du 3 août 2018 visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination, ainsi qu'un amendement COM-121 de ses rapporteurs prévoyant la présence d'un représentant élu des collectivités territoriales au conseil d'administration. Les collectivités territoriales sont en effet un vivier d'expert en matière de gestion décentralisée.
La commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.
Article 9
Création d'une commission indépendante
d'évaluation
compétente en matière de
développement solidaire
L'article 9 crée une commission indépendante d'évaluation de la politique de développement, placée auprès de la Cour des comptes. La commission a précisé sa composition, qui comportera deux députés et deux sénateurs, ainsi que le « droit de tirage » du Parlement sur les travaux de cette commission.
1. Une institution nouvelle
Le présent article tend à créer une commission indépendante d'évaluation de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales.
Actuellement, l'évaluation interne des projets d'aide publique au développement est assurée en France par trois pôles distincts :
- l'unité d'évaluation des activités de développement (UEAD) du ministère de l'Économie et des Finances (quatre à cinq évaluations par an) ;
- le pôle de l'évaluation et de la performance du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (quatre à cinq évaluations par an également) ;
- le département de l'évaluation et de l'apprentissage (EVA) de l'Agence française de développement, qui réalise environ 35 évaluations par an.
Ces trois entités rendent compte à leurs directions générales respectives et au Parlement et pilotent des évaluations soit individuellement, soit conjointement. Concrètement, les évaluations pilotées par ces services sont en général réalisées par des cabinets de conseil sélectionnés sur appels d'offres, sous la direction d'une équipe de responsables administratifs des ministères concernés et de l'AFD. Les évaluations sont encadrées par un groupe de référence garantissant une pluralité de points de vue (parlementaires, représentants de la société civile, du monde de recherche, autres administrations...) et elles font l'objet d'une restitution publique. Elles sont effectuées avec sérieux et compétence et peuvent permettre aux services d'améliorer leurs pratiques, mais elles présentent aussi de nombreuses limites et aboutissent souvent à des conclusions stéréotypées, mettant l'accent sur la réussite globale du projet ou programme concernés et relevant des marges de progression, comme la nécessité de meilleurs effets d'apprentissage, une meilleure coordination, etc.
Le suivi externe de la politique d'aide au développement est réalisé par plusieurs acteurs :
- comme pour l'ensemble des politiques de l'État, la Cour des comptes peut contrôler tel ou tel aspect ou acteur de la politique d'aide publique au développement ;
- l'Assemblée nationale et le Sénat produisent des rapports de contrôle de la politique du Gouvernement en matière d'aide publique au développement ;
- l'OCDE (Comité d'aide au développement) organise un contrôle par les pairs des dispositifs nationaux d'aide au développement ;
- les ONG effectuent également un suivi régulier et interviennent publiquement sur la politique d'aide au développement : la coordination française « Coordination SUD » intervient ainsi dans le débat sur l'APD en y apportant ses analyses sur les stratégies, les programmes ainsi que les aspects budgétaires.
Toutefois, la France est en retard en ce qui concerne la transparence de l'aide et malgré d'importants efforts de l'AFD, qui a rendu disponible une brève description de l'ensemble de ses projets sur son site Internet, l'ONG Publish What You Fund ne classait en 2020 la France qu'au 30 e rang sur 47 en matière de transparence de l'aide.
Par ailleurs, l'évaluation reproduit l'éclatement du pilotage de la politique d'aide publique au développement française entre deux ministères et un établissement public , ce qui rend plus difficile des appréhensions transversales ou globales de cette politique.
En outre, comme l'a souligné le rapport d'Hervé Berville en 2018, c'est la nature même de l'évaluation réalisée qui apparaît insatisfaisante : « le suivi de la politique d'aide publique au développement constitue rarement une évaluation à proprement parler. Une évaluation est une analyse ayant pour objet d'apprécier l'efficacité d'une politique en comparant ses résultats aux objectifs assignés et aux moyens mis en oeuvre. Or, les différentes instances françaises mentionnées précédemment concentrent leur analyse sur les processus de gestion, l'organisation institutionnelle et les enjeux financiers et budgétaires (...) les différentes évaluations menées abordent peu la cohérence externe, l'efficacité, l'efficience, l'impact et la durabilité des interventions françaises et ne suivent pas systématiquement le cadre de la chaîne d'évaluation ».
Si la loi du 7 juillet 2014 a prévu la mise en place d'un observatoire de la politique de développement et de solidarité internationale afin de permettre une évaluation plus indépendante, cette instance s'est peu réunie et ne dispose pas de l'expertise et des moyens nécessaires.
Dès lors, le présent article propose la création d'une commission indépendante d'évaluation, sur le modèle de l'« Independant committee on aid impact (ICAI) » britannique . L'ICAI a été explicitement créée comme une sorte de contrepartie à la fixation de l'objectif des 0,7 % du RNB dans la loi, celui-ci impliquant une forte hausse des moyens consacrés à l'aide publique au développement. Il s'agissait ainsi de donner des gages au public et aux opposants politiques de cette hausse de crédits, leur garantissant que chaque livre investie le serait sous le regard d'un organisme indépendant à même d'en vérifier le bon usage et l'efficacité. L'ICAI est ainsi conçu comme un organisme indépendant du Gouvernement et dont la mission est de rendre des comptes au Parlement, plus précisément à la Commission parlementaire chargée du développement ( International Development select Committee , IDSC). Elle est dirigée par trois commissaires, dispose d'un secrétariat de dix membres et fait appel à des consultants externes pour conduire les évaluations sous la direction des commissaires.
Ainsi, le présent article prévoit (I) qu'il est institué une « commission indépendante d'évaluation de la politique de développement solidaire », qui, comme le précise une disposition ajoutée par un amendement du rapporteur de la commission des affaires étrangères, « conduit des évaluations portant sur la politique de développement, notamment sur son efficacité et son impact ».
Le II prévoit que cette commission est composée de personnalités compétentes en matière d'évaluation et de développement, dont les modalités de désignations sont fixées par décret. Le III précise que la commission arrête de manière indépendante son programme de travail et, disposition importante, que l'Etat et les autres personnes publiques sont tenues de répondre à ses demandes d'information.
La commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements de son rapporteur au présent article.
Tout d'abord, elle a prévu que la nouvelle commission serait placée auprès de la Cour des comptes, et que son secrétariat serait assuré par celle-ci, afin de faire bénéficier la commission de « l'expertise, de l'expérience et de la renommée de cette institution de référence, tant dans le domaine du contrôle que dans l'évaluation des politiques publiques ». Ce rattachement s'inscrirait également dans une logique de « rationalisation et de mutualisation des moyens ». En outre, la commission pourra être saisie de demandes d'évaluation par le Parlement, et lui adressera ses rapports d'évaluation.
Par ailleurs, trois amendements ont été adoptés par les députés en séance publique, prévoyant que :
- la commission remet annuellement au Parlement un rapport faisant état de ses travaux ;
- le CNDSI est destinataire des rapports de la commission d'évaluation ;
- la commission coopère en tant que de besoin avec les institutions et organismes d'évaluation des pays bénéficiaires intervenant dans le domaine du développement.
2. Assurer l'indépendance et l'efficacité de la nouvelle commission d'évaluation
La commission a adopté un amendement COM-153 de M. Requier au nom de la commission des finances précisant que le rôle d'une telle commission ne peut être d'évaluer l'ensemble de la politique publique de développement solidaire (un tel rôle revenant au Parlement) mais plutôt, en évaluant les projets et programmes de développement , de fournir les outils pour une telle évaluation globale.
La commission a souhaité préciser la composition de la commission d'évaluation afin d'en assurer à la fois l'indépendance et l'efficacité. Dans cette optique, elle a adopté un amendement COM-128 de ses rapporteurs prévoyant que cette composition est la suivante, comprenant notamment la présence de deux députés et deux sénateurs :
1°- trois magistrats de la Cour des comptes en activité à la Cour, désignés par son premier président ;
2°- deux députés et deux sénateurs ;
3°- une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé des affaires étrangères ;
4 - une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé de l'économie ;
5°- une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé de la transition écologique;
6°- un représentant des collectivités locales, nommé par la Commission nationale de la coopération décentralisée ;
7°- un représentant des pays partenaires de la politique de développement solidaire, nommé par décret pris sur le rapport du ministre chargé du développement.
Par ailleurs, la commission a adopté un amendement COM-129 de ses rapporteurs précisant le droit de tirage des parlementaires : les assemblées pourront ainsi demander des évaluations et la commission devra répondre dans un délai de 8 mois. Elle a enfin adopté un amendement COM-127 prévoyant que la commission devra élaborer un cadre d'évaluation scientifique global de la politique de développement dans un délai de deux ans.
La commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.
TITRE
III
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 10 (non modifié)
Habilitation du Gouvernement à
procéder par ordonnance sur l'attractivité
L'article 10 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de définir les modalités d'octroi par le Gouvernement de privilèges et immunités, sur le territoire national, aux organisations internationales et aux associations ou fondations de droit français ou étranger qui installeraient leur siège en France. La commission n'a pas modifié cet article.
L'article 10 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de définir les modalités d'octroi par le Gouvernement de privilèges et immunités, sur le territoire national, aux organisations internationales et aux associations ou fondations de droit français ou étranger qui installeraient leur siège en France. L'article vise également celles qui souhaitent organiser en France des conférences internationales.
Selon l'étude d'impact, la France serait pénalisée en la matière par la lenteur de ses procédures. Ainsi, la procédure d'approbation d'un accord de siège, soumis à l'autorisation préalable du Parlement, dure en moyenne dix-huit mois. Plusieurs organismes importants ont ainsi récemment choisi de s'implanter dans d'autres pays plus attractifs de l'Union européenne, comme la Suisse ou l'Autriche. En particulier, la Suisse a accueilli des organisations internationales de santé parfois créées à l'initiative de la France comme le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et GAVI (Alliance du vaccin). En outre, des projets d'accueil d'organismes font actuellement l'objet de discussions, comme celui du Partenariat mondial pour l'éducation (PME).
L'article 10 prévoit ainsi que l'ordonnance définira les modalités d'octroi des privilèges et immunités pour :
1° des organisations internationales ou des agences décentralisées de l'Union européenne qui envisagent de s'installer en France ou qui souhaitent y organiser des conférences internationales, de leurs personnels, des représentations et des représentants des États membres, des personnes officiellement invitées à participer à leurs travaux ainsi que des experts en mission pour le compte de leur compte ;
2° des associations ou fondations de droit français ou étranger assimilables à ces organisations internationales qui envisagent de s'installer en France ou qui souhaitent y organiser des conférences internationales, ainsi que de leurs personnels et des personnes officiellement invitées à participer à leurs travaux.
L'Assemblée nationale n'a pas apporté de modification à ces dispositions.
La commission a adopté l'article 10 sans modification.
Article 10 bis (nouveau)
Information sur les besoins en fonds propres
de l'AFD
La commission a adopté un amendement COM-154 de M. Requier au nom de la commission des finances, visant à compléter le document de politique transversale (DPT) sur la politique française en faveur du développement, afin d'y inclure une évaluation pluriannuelle des besoins en fonds propres de l'Agence française de développement (AFD).
En effet, la loi de finances pour 2021 a renforcé les fonds propres de l'AFD par une opération en deux temps :
- le projet de loi de finances initiale prévoyait la conversion de la ressource à condition spéciale (RCS) en fonds propres, pour un montant de 953 millions d'euros ;
- puis, lors de la nouvelle lecture du texte à l'Assemblée nationale, un amendement gouvernemental a procédé à une recapitalisation additionnelle d'un montant de 500 millions d'euros.
Si cette recapitalisation apparait nécessaire compte tenu de la montée en charge des activités de l'AFD depuis plusieurs années, il est regrettable qu'elle soit intervenue à la faveur d'un amendement en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, privant ainsi le Parlement d'un débat éclairé sur cette opération. En outre, en dépit du montant important de cette recapitalisation, celle-ci ne devrait pas suffire pour couvrir les besoins prudentiels de l'AFD dans les prochaines années.
Par conséquent, il convient d'assurer l'information du Parlement sur l'évolution des besoins en fonds propres de l'AFD de façon prévisionnelle.
La disposition introduite complète ainsi le document de politique transversale annexé chaque année au projet de loi de finances, et qui contient déjà des informations relatives aux ressources budgétaires de l'AFD, plutôt que le rapport annuel prévu par l'article 2 du projet de loi qui vise à dresser un état des lieux global de la politique de développement.
La commission a adopté un article 10 bis ainsi rédigé.
Article 11 (non modifié)
Abrogation des articles de la
précédente loi du 7 juillet 2014
L'article 11 vise à abroger les dispositions de la loi du 7 juillet 2014 d'orientation relative à la solidarité internationale, à l'exception de ses articles 11, 13 et 14. La commission n'a pas modifié cet article.
L'article 15 de la loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale prévoyait que cette loi s'appliquerait jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi de programmation.
Toutefois, les dispositions normatives de la précédente loi resteront en vigueur :
- l'article 11, qui complète le titre I er du livre II du code monétaire et financier par un chapitre VIII relatif à l'offre d'opérations de banque à des personnes physiques résidant en France par des établissements de crédit ayant leur siège social dans un État figurant sur la liste des États bénéficiaires de l'aide publique au développement et qui n'est pas partie à l'accord sur l'espace économique européen ;
- l'article 13 de la loi du 7 juillet 2014, qui modifie le chapitre IV du titre I er de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État et portant création d'Expertise France comme établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'économie ;
- l'article 14 de la loi du 7 juillet 2014, qui prévoit notamment l'instauration du dispositif « 1 % déchets » permettant aux collectivités territoriales et autorités responsables de la collecte et du traitement des déchets de financer, dans la limite de 1 % des ressources affectées à ces services, des actions de coopération dans ce domaine avec les collectivités territoriales étrangères et leurs groupements, ainsi que l'organisation de campagnes d'information sur la solidarité internationale des territoires.
Les députés ont adopté en commission un amendement prévoyant que le Gouvernement remette au Parlement deux nouveaux rapports :
- l'un sur une évaluation du dispositif dit de « bi-bancarisation » établi par l'article 11 de la loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014,
- l'autre examinant les modalités de réduction des coûts de transaction des envois de fonds effectués par des personnes résidant en France vers des personnes résidant dans des pays éligibles à l'aide publique au développement.
La commission a adopté l'article 11 sans modification.
Article 12 (non modifié)
Rapport sur la stratégie de la
France en matière de mobilité internationale en entreprise et en
administration
L'article 12 vise à vise à demander au Gouvernement un rapport au Parlement sur la stratégie de la France en matière de mobilité internationale en entreprise et en administration.
Selon les auteurs de l'amendement, le succès des programmes de volontariat international en entreprise (V.I.E) et de volontariat international en administration (V.I.A) doit en effet servir de base pour déployer une stratégie en faveur des mobilités internationale en entreprise, en dehors de ce qui est fait en matière de mobilité étudiante et de mobilité associative ou humanitaire.
La commission a adopté l'article 12 sans modification.
Article 13 (non modifié)
Rapport sur une dispense de criblage
des bénéficiaires finaux pour certaines actions de stabilisation
en situation de crise
L'article 13 concerne le criblage, dispositif mis en place pour des raisons de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.
Issu d'un amendement des députés adopté en séance publique, le présent article concerne le criblage, dispositif mis en place pour des raisons de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.
Selon les auteurs de l'amendement, dans les zones caractérisées par une situation de crise persistante et l'existence de groupes armées non étatiques, les mesures de criblage « peuvent faire porter des risques sécuritaires et juridiques sur les ONG humanitaires, leurs opérations et leurs personnels, alourdissent les procédures, augmentent les coûts de fonctionnement, restreignent l'accès humanitaire et réduisent la résilience des populations ».
Ce rapport aurait donc pour objet d'évaluer la possibilité, pour la France, d'autoriser une dispense de criblage des bénéficiaires finaux pour certaines actions de stabilisation dans certaines zones précisément définies.
La commission a adopté l'article 13 sans modification.
COMPTES RENDUS DES AUDITIONS EN COMMISSION
I. AUDITION DE M. JEAN-YVES LE DRIAN, MINISTRE DE L'EUROPE ET DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Christian Cambon, présiden t. - Nous entendons cet après-midi M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, pour évoquer le projet de loi relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, qui a connu une genèse difficile : sa présentation a été maintes fois retardée, à tel point que c'est désormais une loi de programmation qui ne programme que sur un an, 2022 !
Ce texte comporte de nombreux aspects positifs, dont certains répondent à des recommandations formulées par notre commission depuis plusieurs années, notamment dans les travaux d'Henri de Raincourt et d'Hélène Conway-Mouret, puis de Jean-Pierre Vial et Marie-Françoise Pérol-Dumont, dont nos deux rapporteurs, Hugues Saury et Rachid Témal, ont pris la relève depuis la fin de l'année dernière.
Les grands principes de cette politique, auxquels nous sommes très attachés, sont réaffirmés. Dans un monde de plus en plus chaotique, où certaines puissances refusent de participer pleinement à la communauté internationale, la France tente de soutenir le multilatéralisme et la lutte contre les inégalités mondiales. Elle est particulièrement attachée à l'aide aux pays les plus pauvres, notamment sur le continent africain. Nourrir, soigner, former : tel est le triptyque prioritaire que ce projet de loi doit mettre au centre de notre action, sans négliger toutefois les défis environnementaux et autres biens publics mondiaux.
Le projet de loi s'efforce également, sans toujours y parvenir, de préciser l'organisation et la gouvernance de cette politique. Celle-ci implique en effet au moins deux ministères, deux agences - l'Agence française de développement (AFD) et Expertise France -, ainsi que de multiples organismes de coordination, du Conseil du développement au Conseil national pour le développement et la solidarité internationale (CNDSI), en passant par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) et la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD). Vous avez choisi, monsieur le ministre, de conserver l'ensemble de ces couches de gouvernance, en tentant toutefois d'en clarifier le positionnement et le fonctionnement ; nous ne sommes pas totalement convaincus.
L'autonomie parfois excessive de l'AFD, ainsi que son activité très orientée vers les prêts au bénéfice des pays à revenu intermédiaire, a maintes fois été soulignée ces dernières années. Certaines des mesures avancées par le projet de loi apportent un début de réponse, d'autres nous semblent un peu timorées.
Nous sommes très attachés à l'évaluation de cette politique de développement solidaire et donc favorables à la création d'une commission indépendante. Reste à en définir plus précisément les contours et à s'assurer que le Parlement, autant que le Gouvernement, bénéficiera pleinement de ses analyses.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères . - Enfin ! Cette loi, maintes fois repoussée, était attendue. Les budgets successifs ont certes précédé ce projet de loi, mais il convenait de structurer nos priorités. Je tiens à remercier tous ceux qui, depuis trois ans, ont travaillé à l'aboutissement de ce texte. La convergence de ce projet de loi avec la crise que nous traversons en démontre toute la pertinence.
Nous vivons dans un monde de compétition exacerbée, où l'influence est devenue un enjeu de puissance majeur. L'aide au développement ne fait pas exception : elle est devenue un enjeu d'influence dans la conflictualité des modèles et des valeurs.
La France est revenue dans le jeu : notre aide publique au développement (APD) a dépassé les 10 milliards d'euros par an, atteignant 12,8 milliards d'euros en 2020. Il s'agit d'un véritable changement de braquet, conformément à l'engagement pris par le Président de la République au début de son mandat. Notre aide publique au développement, qui représentait 0,38 % de notre richesse nationale en 2016, s'établit actuellement à 0,48 % du PIB et notre objectif est d'atteindre 0,55 % en 2022. Dans la crise, nous avons tenu à maintenir notre engagement en volume, avec une augmentation de 18 % entre 2019 et 2020 et de 33 % entre 2020 et 2021. Nous devrions dépasser le Royaume-Uni en 2021, pour nous classer au quatrième rang mondial des bailleurs d'APD.
Il fallait faire plus, mais il faut aussi faire mieux. C'est pourquoi ce projet de loi propose un changement de méthode, en profondeur, dans le sillage des efforts de rénovation engagés depuis le Cicid de février 2018.
Nos priorités sont clairement définies, à commencer par nos priorités géographiques, avec une concentration de nos dons sur les pays les plus vulnérables ; il s'agit des dix-neuf pays prioritaires appartenant à la catégorie des pays les moins avancés - Haïti et dix-huit pays d'Afrique subsaharienne. Ces pays seront destinataires de la moitié de l'aide projet mise en oeuvre par mon ministère, soit 70 millions d'euros, et de deux tiers de l'aide projet mise en oeuvre par l'AFD, qui s'élève à 816 millions d'euros en 2021 ; à cela s'ajoute une augmentation de 10 % de notre contribution à l'association internationale de développement de la Banque mondiale.
Nous réaffirmons aussi nos priorités thématiques. Nous voulons investir dans l'avenir et les biens communs mondiaux, selon le triptyque que vous avez rappelé : « nourrir, former, soigner. »
C'est ainsi que nous contribuons au renforcement des systèmes de santé primaire des pays les plus fragiles, au travers notamment de l'initiative « Santé en commun », qui a permis d'améliorer la prise en charge des malades au Sénégal, en Guinée, au Burkina Faso et en République centrafricaine.
Nous agissons également en faveur de la préservation du climat et de la biodiversité. Notre contribution au Fonds vert pour le climat a doublé depuis 2017, pour passer de 750 millions à 1,5 milliard d'euros, ce qui nous permet de renforcer notre crédibilité diplomatique dans les enceintes multilatérales. Cinq ans après les accords de Paris, l'urgence environnementale est une urgence absolue et elle prend un relief particulier en cette année du Congrès de l'union internationale pour la conservation de la nature qui se tiendra à Marseille, de la COP26 qui aura lieu à Glasgow et de la COP15 sur la biodiversité qui est prévue à Kunming. Tous les financements de l'AFD sont bien entendu compatibles avec l'accord de Paris, mais pour moitié d'entre eux ils présentent même un co-bénéfice climat. Le gigantesque projet de la Grande Muraille verte, qui va du Sénégal à Djibouti, a été relancé par le One Planet Summit de janvier dernier qui a permis de mobiliser 14 milliards de dollars pour lutter notamment contre la désertification. Nous menons également des actions en Chine et en Turquie et je tiens à préciser d'emblée qu'il ne s'agit pas de prêts de faveur : ils sont réalisés aux taux de marché.
Nous investissons aussi dans l'éducation. Nous sommes le troisième bailleur mondial dans ce secteur, avec une multiplication par dix de notre contribution au Partenariat mondial pour l'éducation, qui atteint 200 millions d'euros sur 2018-2020. Les résultats en sont significatifs, avec le soutien à la scolarisation de plus de 22 millions d'enfants.
Nous travaillons enfin à la promotion de l'égalité de genre. Nous aborderons ces enjeux lors du Forum Génération Égalité se tiendra dans quelques mois à Paris.
Ces priorités géographiques et thématiques doivent être traitées ensemble et non pas en silo, car la crise de la covid a montré leur enchevêtrement et la nécessité de mettre en oeuvre une approche transversale.
Nous devons également refonder nos partenariats : il ne s'agit plus seulement de faire « pour » nos partenaires du sud, mais « avec » eux, dans une logique de codéveloppement, car nos responsabilités et nos intérêts sont communs. Il faut sortir d'une logique d'assistance ou de charité, pour entrer dans une logique de développement solidaire : en aidant nos partenaires du sud, nous nous aidons nous-mêmes, car les réponses aux grandes questions du XXI e siècle se trouvent à la fois chez nous et chez eux. Pensons seulement au défi de l'immigration irrégulière et aux tragédies humaines qu'elle occasionne. Ce renforcement de la dimension partenariale de notre politique se joue aussi en France : les acteurs de la société civile française se verront reconnaître un droit d'initiative renforcé qui leur permettra de proposer eux-mêmes des projets - avec le doublement des financements prévus - et nous associerons à nos efforts les diasporas africaines en France.
Le pilotage de notre politique d'APD par l'État sera renforcé, avec une chaîne de commandement clarifiée, depuis le Conseil présidentiel du développement, jusqu'au plus près du terrain grâce à une implication renforcée de nos ambassades. C'est le sens de la création des conseils locaux de développement qui seront créés dans chaque poste. Présidés par l'ambassadeur, ils veilleront à la cohérence des efforts de l'ensemble des acteurs, y compris de l'AFD. À chacun de mes déplacements - comme je l'ai fait vendredi dernier à Niamey -, je présiderai moi-même ces conseils et je souhaite qu'y soient associés les autres acteurs du développement, y compris non français, qui sont parties prenantes dans les projets.
Depuis maintenant un an, j'organise désormais une réunion de cadrage avec le directeur général de l'AFD tous les deux mois, afin que les orientations votées par le Parlement soient concrètement mises en oeuvre sur le terrain : cela me permet de piloter l'Agence en temps réel.
Nous devons aussi mieux mesurer l'impact de nos projets avec une commission indépendante d'évaluation, comme il en existe au Royaume-Uni et en Allemagne, et comme l'avait proposé le Sénat. Cette commission devra évaluer les stratégies, les outils et les projets et formuler des recommandations. Elle effectuera une évaluation de l'opportunité et de l'efficacité de la politique menée ; il ne s'agit pas de vérifier les comptes, d'autres organismes existent pour cela ! Je souhaite que cette commission rapporte devant le Parlement, selon ce que l'on appelle désormais la redevabilité. Je suis très ouvert sur sa composition, mais je tiens à ce qu'elle reste indépendante.
Ce projet de loi comporte en outre un volet destiné à attirer en France les fondations et organisations internationales qui jouent un rôle majeur en matière de développement et de promotion des biens publics mondiaux. Les organismes multilatéraux dont nous avons été à l'initiative - Unitaid, le Fonds mondial, la Fondation Aliph, etc. - se sont installés à Genève où les procédures sont plus rapides : je propose donc que nous légiférions par ordonnance sur chaque demande d'implantation. La France doit devenir un carrefour mondial de la coopération internationale et les trois premières éditions du Forum de Paris sur la paix ont montré que nous avions une vraie capacité de mobilisation.
Ce texte a été significativement enrichi lors de son examen par l'Assemblée nationale, qui y a notamment introduit trois dispositions majeures.
Un nouvel article 1erA fixe désormais les grands objectifs de la politique d'APD et rappelle notamment que cette politique est un pilier de la politique étrangère de la France et qu'elle contribue à construire et à assurer la paix et la sécurité. Il y est également précisé que cette politique a pour objectif transversal la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, dans le cadre de la diplomatie féministe de la France.
Avec mon accord, l'année 2025 a été retenue comme date cible pour l'atteinte de l'objectif onusien de 0,7 % : c'est un bon objectif sur lequel nous devons nous mobiliser.
Le dispositif de restitution des produits de cession des biens dits mal acquis - sur lequel votre collègue Jean-Pierre Sueur a mené des travaux - a été amélioré : les produits de cession de ces biens donneront lieu à des ouvertures de crédits au sein d'un nouveau programme budgétaire afin de financer des actions de coopération et de développement. Il s'agit d'une grande innovation qui se fera dans une parfaite transparence à l'égard du Parlement.
L'Assemblée nationale a également apporté des avancées en termes de redevabilité : création d'une base de données ouverte, élargissement du champ du rapport annuel au Parlement relatif à la politique de développement, positionnement de la nouvelle commission d'évaluation auprès de la Cour des comptes et possibilité de saisine par le Parlement.
Elle a également prévu que la France prendrait désormais en compte l'exigence de responsabilité sociétale des acteurs publics et privés sur le devoir de vigilance des entreprises ; elle a renforcé notre exigence d'accès à un état civil fiable ; elle a prévu un rapport au Parlement sur les dispenses de criblage des destinataires finaux ; et elle a réduit les coûts de transaction de certains transferts de fonds et revu notre stratégie s'agissant des volontaires internationaux.
Après un long et très fructueux débat, ce projet de loi a été adopté à l'unanimité, une première depuis le début de ce quinquennat !
M. Christian Cambon, président . - Je vous remercie de cette présentation. Permettez-moi de profiter de cette occasion pour saluer la mémoire de Marielle de Sarnez avec laquelle j'avais beaucoup travaillé dans la perspective de ce texte.
M. Hugues Saury, rapporteur . - Je vous remercie pour votre disponibilité qui a permis un dialogue direct avec vous-même, vos services et votre cabinet.
Après avoir été retardé, le calendrier de ce texte s'est subitement accéléré : il a été présenté en conseil des ministres en décembre et devrait avoir été examiné par les deux chambres d'ici à la fin du mois de mai.
Avec ses treize articles, c'est un texte court, mais le rapport annexé est touffu.
Il prend clairement en compte les remarques qui avaient été formulées, notamment par le Sénat, et comporte de nombreuses avancées : l'augmentation du budget ; la définition claire des pays prioritaires ; la répartition de notre aide entre dons et prêts ; la création d'une commission d'évaluation indépendante ; ou encore la création des conseils locaux de développement.
Quelques points d'amélioration demeurent cependant.
L'APD telle qu'elle est définie par l'OCDE comporte des dépenses comme l'aide pour les réfugiés en France ou les frais des étudiants étrangers. En revanche, l'aide-pays programmable ne comprend que les dons et prêts accordés aux pays aidés. Or la part de cette aide programmable aux pays les moins avancés a stagné, voire régressé : elle était de 20 % en 2014, contre 18 % en 2018, alors qu'elle atteint 39 % au Royaume-Uni, 43 % aux Pays-Bas, 53 % en Suède et 42 % aux États-Unis. Et la part de cette aide programmable destinée aux dix-neuf pays prioritaires n'est que de 13 % : ne devrions-nous pas nous fixer un objectif d'aide programmable atteignable et raisonnable ?
Je regrette également que le projet de loi ne fixe pas d'objectif de rééquilibrage de nos aides entre prêts et dons. Ici aussi, il serait temps de se fixer un objectif atteignable et raisonnable.
Les pays endettés sont de plus en plus nombreux, notamment en Afrique. L'AFD risque donc de devoir diminuer encore ses volumes de prêts sur le continent. En outre, la faiblesse actuelle des taux d'intérêt ne rend pas nos prêts aux pays à revenu intermédiaire très compétitifs. L'Agence ne devrait-elle pas changer de modèle ?
M. Rachid Temal, rapporteur . - Je salue la qualité du texte qui nous est proposé. Il s'inscrit dans le prolongement de la loi adoptée sous le précédent quinquennat et présente de vraies avancées : concentration de notre aide sur les dix-neuf pays prioritaires ; nouvel article 1er ; définition de nos thématiques d'intervention ; création d'une commission d'évaluation ; réforme du pilotage de l'AFD. La France doit conserver ses capacités d'intervention et demeurer un acteur majeur de l'aide au développement.
S'agissant du pilotage de notre politique d'APD, plusieurs rapports - de la Cour des comptes et du Conseil économique, social et environnemental (CESE) - ont souligné les rapports déséquilibrés entre l'AFD et ses multiples tutelles. Or le projet de loi ajoute encore des instances, avec, notamment, le Conseil présidentiel et les conseils locaux de développement. Le texte ne va pas assez loin sur la question du pilotage.
La taxe sur les transactions financières (TTF) a été créée pour financer l'APD, mais seulement un tiers de son produit - il s'établit à 1,7 milliard d'euros - alimente le Fonds de solidarité pour le développement (FSD). Il est question d'y ajouter 100 millions d'euros, mais ne faudrait-il pas envisager un accroissement véritablement significatif pour passer à 40 %, voire à 50 % du produit de la taxe affecté au Fonds ?
La création d'une commission d'évaluation indépendante est un vieux combat du président Cambon. Comment envisagez-vous son fonctionnement et sa composition ? Quel sera le rôle des parlementaires ?
Cette loi de programmation court jusqu'en 2025, mais ses données chiffrées s'arrêtent dès 2022. Une clause de revoyure est certes prévue en 2022, mais aucune donnée n'est prévue pour 2023, 2024 et 2025 : c'est dommage.
M. Jean-Claude Requier , rapporteur spécial de la commission des finances. -Ce projet de loi était devenu une arlésienne... Nous sommes très heureux qu'il soit enfin finalisé.
Quelles sont vos ambitions budgétaires au-delà de 2022 ? Quels montants faudrait-il inscrire pour atteindre vos objectifs ?
M. Michel Canevet, rapporteur spécial de la commission des finances . - Comment le Fonds de solidarité pour le développement sera-t-il financé, à l'heure où les difficultés actuelles du transport aérien fragilisent son financement ?
Le transfert d'Expertise France ne devrait-il pas être réalisé directement au profit de l'AFD ?
Pourquoi ne pas déconcentrer les décisions de l'AFD lorsqu'un consensus local existe ?
Les frais administratifs de l'AFD, qui étaient de 400 millions d'euros en 2020, augmenteront de 10 % d'ici à 2022 : cela correspond-il à un véritable besoin ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - Les critères de l'APD sont établis par l'OCDE. C'est ainsi que les frais d'écolage des étudiants chinois relèvent de l'APD : la Chine est donc toujours considérée comme un pays en développement...
La part dans l'APD liée à l'écolage des étudiants chinois signifie deux choses. Premièrement, la Chine est toujours considérée comme un pays en développement ; deuxièmement, de nombreux étudiants chinois viennent en France et nous les aidons avec des bourses et de l'accueil. Cela paraît peut-être une contradiction, mais explique une partie de cette interprétation.
L'aide pilotable a augmenté de manière significative ces dernières années ; elle correspond actuellement à un tiers de l'aide globale et devrait atteindre 40 % en 2022. C'est un indice pour apprécier notre véritable aide au développement.
L'aide bilatérale ne cesse de croître ; nous sommes passés de 57 % en 2015 à 61 % en 2019 et, en 2020, nous devrions frôler les 70 %. J'ai toujours dit que l'aide bilatérale devait se renforcer par rapport à l'aide multilatérale.
L'APD est constituée à 81 % de dons, auxquels s'ajoutent 14 % de prêts et 5 % d'appuis au secteur privé. Depuis mon arrivée aux responsabilités, la part de l'activité de l'AFD liée aux dons est passée de 4 % à 13 %.
Si votre interrogation porte sur les référentiels qui nous permettraient de juger les parts pilotable et non pilotable, je suis prêt à examiner des amendements sur le sujet. Ce n'est pas facile de fixer des critères, car, dans la part non pilotable, des éléments demeurent variables.
On peut se poser la question de la relation entre les prêts et les dons au sein de l'AFD. La part des dons dans l'APD, comme je l'ai dit précédemment, s'élève à 81 %. Une part importante de ces dons est extérieure à l'AFD, mais nous avons souhaité que celle-ci oeuvre également en ce sens, et il importe que cela se poursuive. En 2021, la somme des dons de l'AFD représente 878 millions d'euros.
Dans beaucoup de cas, notamment dans les 19 pays concernés, il s'agit d'articuler à la fois les dons et les prêts. Les prêts, en général, sont dédiés aux infrastructures, et les dons s'orientent plutôt vers le fonctionnement ; mais nous sommes souvent amenés à lier les deux. Je pense à l'exemple de l'Institut Pasteur à Dakar, soutenu par l'AFD, qui combine les subventions - à hauteur de 2,7 millions d'euros - et les prêts pour aider à financer la construction d'une unité permettant de doubler la capacité de production des vaccins.
Il est désormais inscrit dans la loi que l'AFD soit sous la tutelle de l'État. Concernant le pilotage, le conseil présidentiel a pour vocation de se réunir une fois par an, avec les ministres concernés et le Premier ministre, afin de donner les orientations. La création de cette instance démontre que la politique de développement est un élément central de la politique étrangère de la France. Loin d'être un encombrement supplémentaire, cela donne l'impulsion nécessaire et contribue à l'accélération pour la mise en oeuvre de ce texte de loi.
Le Cicid a pour vocation, une fois par an, de définir les enjeux de la politique de développement, et ensuite il m'incombe de les mettre en oeuvre. Un rattachement théorique est prévu avec deux ministères, mais, de fait, j'assume la fonction de ministre du développement. Les responsabilités ne sont pas peut-être pas suffisamment clarifiées, mais, je vous rassure, cela n'entraîne aucune difficulté avec Bruno Le Maire sur ces sujets.
Concernant l'engagement de consacrer 0,7 % de la richesse nationale à l'aide au développement d'ici à 2025, je m'interroge aujourd'hui sur la pertinence de présenter des chiffres. Quand on fixe un pourcentage, on ne tient pas compte de l'ensemble des facteurs, notamment le volume de financement auquel cela correspond. En 2021, nous allons atteindre 0,69 % - soit un pourcentage supérieur à l'objectif fixé de 0,55 % - pour une double raison : d'une part, avec la crise, le PIB baissant, cela favorise la hausse du pourcentage ; d'autre part, nous allons régler cette année la question de la dette soudanaise.
Mais, en 2022, ce pourcentage risque de baisser. Il serait opportun d'attendre la sortie de crise pour évaluer les engagements financiers permettant d'atteindre 0,7 %. Malgré un PIB en récession, j'ai obtenu que l'on maintienne les engagements financiers de progression de nos dépenses de développement, ce qui n'est pas le cas de tous les pays ; je pense, notamment, au Royaume-Uni.
Au sujet de la TTF, le projet de loi prévoit 100 millions d'euros supplémentaires. Il ne faut surtout pas toucher au taux ni à l'assiette, mais je suis ouvert à vos propositions pour aller plus loin concernant la réaffectation d'une partie de la recette au développement.
De même, au sujet de la commission d'évaluation, je suis très ouvert à vos propositions. De manière générale, comme je l'ai dit à l'Assemblée nationale, il s'agit d'un texte de loi majeur pour la présence de la France dans le monde, et nous devons prendre en considération toutes les contributions pertinentes. Au préalable, je soumets trois principes de fond : premier principe, l'indépendance ; deuxième principe, cette commission devra rendre compte au Parlement ; troisième principe, elle pourra également être saisie par les parlementaires.
Le rattachement de cette commission à la Cour des comptes a été acté, ce qui me paraît un gage d'indépendance. Cette commission ne vérifie pas la justesse des comptes, mais celle de la politique menée. Faut-il y associer des parlementaires ? Est-ce un critère d'indépendance ? Lorsque la question m'a été posée à l'Assemblée, j'ai émis quelques réserves...
M. Christian Cambon, président . - C'est un point très important pour nous. Dans de nombreux organismes - la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), le Comité national d'éthique (CNE) ou encore la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) -, la présence de parlementaires ne rompt pas le lien d'objectivité, bien au contraire. Avec Hervé Berville, rapporteur du projet de loi devant l'Assemblée nationale, nous sommes en accord sur cette idée, y compris en prévision de la commission mixte paritaire (CMP).
On ne demande pas que les parlementaires dirigent la commission, mais il nous semble que la présence de deux sénateurs et de deux députés, par exemple, est précisément un gage d'indépendance. La nomination d'experts indépendants - on le voit sur d'autres sujets, en matière sanitaire notamment - est sujette à débat. Les parlementaires qui viennent siéger dans ces organismes, à commencer par l'AFD, ont toujours tenu leur rôle ; il est important que vous n'y soyez déjà pas totalement hostile...
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - Cela se discute...
M. Christian Cambon, prés ident. - Le président de la Cour des comptes y est lui-même très favorable. Il trouve légitime que le Parlement, dont la mission est de contrôler l'action du Gouvernement, puisse siéger dans un organisme évaluant la justesse des opérations menées.
M. Jacques Le Nay . - Monsieur le ministre, le rôle des ambassadeurs se trouve renforcé par le projet de loi, avec la réunion annuelle du conseil local de développement (CLD). Cette relocalisation d'une partie de la gouvernance de notre APD doit être saluée. Cependant, les retours et les conclusions de ces conseils locaux doivent être examinés et pris en compte. Comment notre réseau de développement va-t-il se restructurer autour de cette nouveauté à l'échelle locale, afin de peser sur le choix des projets et d'en effectuer le suivi ?
Le modèle d'aide au développement multilatéral proposé par la France peut-il concurrencer les aides chinoises, notamment sur le continent africain ? Alors que les aides chinoises sont connues et reconnues au niveau international, les aides françaises passent trop souvent inaperçues. N'y a-t-il pas un déficit de communication autour des projets financés par la France ?
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Monsieur le ministre, ce texte était très attendu. J'y vois des avancées certaines, comme le droit d'initiative des associations, le devoir de vigilance, les biens mal acquis - même si des dispositions restent à mettre en oeuvre pour rendre cela applicable.
Je m'interroge sur la trajectoire financière. Cela aurait nécessité, malgré la clause de revoyure, que l'on se projette jusqu'en 2025.
Je constate une dispersion des fonds. La priorité affichée est de favoriser les 19 pays prioritaires ; ce n'est pas le cas, puisque seulement 15 % de l'APD va aujourd'hui vers les pays prioritaires. Et si l'on fait des projections sur la fin de l'année 2021, ce pourcentage pourrait descendre à 5 %. Comment comptez-vous redresser le tir ? On sait, notamment, qu'il convient de mettre l'accent sur l'Afrique et le G5 Sahel, car, si l'on veut installer la paix dans la région, il faudra aussi lutter contre la misère.
Ma deuxième question concerne le pilotage. Il y a des points positifs dans ce texte ; vous confortez le CNDSI, créé en 2014 ; vous donnez naissance aux CLD, et tout le monde se satisfait de voir le rôle de nos ambassadeurs renforcer, d'autant que ces conseils favoriseront le développement de projets précis, en lien avec les populations.
Pour le reste, monsieur le ministre, je ne suis pas d'accord avec vous. Précédemment, vous avez évoqué une chaîne de décisions clarifiée ; je la trouve, au contraire, extrêmement complexe et peu lisible. Le Conseil autour du Président de la République, une fois par an, va recadrer ou revalider les orientations. Je ne comprends pas, cela crée un système pyramidal. Par ailleurs, vous assumez la fonction du ministre du développement. Ma question est la suivante : qui commande en fin de compte ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - C'est moi !
M. Philippe Folliot . - Monsieur le ministre, vous avez insisté sur les enjeux relatifs à l'éducation. Une stratégie de développement, pour être efficace, doit être associée à une stratégie d'éducation, et plus particulièrement dans les 19 pays qui bénéficient de cette aide au développement.
Je souhaite vous alerter sur la nécessité de mettre en cohérence cette stratégie avec la promotion et la défense de la francophonie. Au travers de la langue française, nous promouvons une certaine idée de nos valeurs. Aurons-nous un engagement fort pour favoriser l'apprentissage du français ? Les pays francophones pourront-ils aussi bénéficier d'une forme d'aide spécifique, au regard de nos liens historiques avec eux ?
M. Richard Yung . - Vous n'avez pas évoqué Expertise France dans votre propos liminaire. Le rapprochement entre Expertise France et l'AFD me paraît une excellente chose. Mais pourquoi la mécanique mise en place est-elle aussi compliquée ? Pourquoi n'avons-nous pas intégré directement Expertise France au sein de l'AFD ?
Un point m'a semblé faible dans ce projet de loi, concernant le rôle des collectivités d'outre-mer. Celles-ci peuvent jouer un rôle important dans les actions de développement. Il faudra, dans la discussion, sans doute ajouter quelques références.
Au sujet de la commission d'évaluation, il serait utile d'y associer des représentants de pays recevant l'aide, qui pourraient juger des actions. Il serait intéressant, par exemple, de connaître l'avis du président de la Cour des comptes du Sénégal ou de la Côte d'Ivoire.
M. Olivier Cadic . - Monsieur le ministre, j'ai particulièrement apprécié votre remarque sur la Chine, pays en voie de développement... L'ambassadeur du Japon, reçu ici même ce matin, observait que la Chine était un pays en voie de développement militaire en mer de Chine méridionale.
L'un des objectifs poursuivis avec ce projet de loi est de promouvoir la gouvernance démocratique, économique et financière. Je vous cite : « La gouvernance démocratique et l'État de droit sont des conditions essentielles de l'efficacité de l'aide au développement. » Il est toujours sain de rappeler cela et nous sommes nombreux à vous soutenir dans cette démarche.
D'autres pays n'ont pas la même démarche et nous font concurrence. Ils rejettent la gouvernance démocratique, au prétexte que le développement passe avant les droits humains. Comment faire en sorte que des acteurs économiques venant de pays qui ne partagent pas notre vision des droits humains ne puissent pas gagner des marchés financés par l'APD de la France ? Pouvons-nous envisager d'établir une liste noire de pays qui ne respectent pas les droits humains, afin que les entreprises de ces pays soient automatiquement exclues des marchés bénéficiant de l'AFD ?
M. Christian Cambon, président . - Cela va éclaircir le paysage...
Mme Joëlle Garriaud-Maylam . - Monsieur le ministre, je souhaite vous remercier pour l'intégration des femmes dans le développement. Je suis membre de cette commission depuis 2004, et j'ai plaidé pendant des années pour un « fléchage » envers les femmes. Dans tous les rapports présentés depuis des années, les femmes n'étaient même pas mentionnées. Elles sont pourtant les premiers acteurs et les premiers moteurs du développement. À ce titre, concernant le remboursement des microcrédits, la différence de taux entre les hommes et les femmes est très instructive.
Vous avez évoqué les CDL. C'est une excellente initiative d'inviter d'autres partenaires, d'autres États. Il serait important, me semble-t-il, que soient associés les représentants élus des Français de l'étranger. Beaucoup de Français, établis depuis longtemps dans ces pays, ont été exclus pendant des années de l'AFD ou de Proparco, alors qu'ils ont beaucoup de choses à apporter.
Concernant la francophonie, je souhaite évoquer l'audiovisuel extérieur, très important pour le développement de l'information sanitaire par exemple et, plus globalement, pour l'éducation et l'enseignement.
M. André Guiol . - Vous avez précisé qu'il existe des critères pour mesurer les résultats de nos actions de solidarité, dans les domaines aussi importants que l'éducation et la protection de l'environnement. Existe-t-il des indicateurs qui mesurent la manière dont la France est perçue par les populations de tous ces pays ? Je pense à la tristesse que j'ai pu ressentir en voyant des manifestations hostiles à la France durant l'épisode des caricatures, qui gomment injustement la solidarité insufflée par notre pays.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - Concernant le pilotage, madame Carlotti, je ne vois pas en quoi il est compliqué. Le Président de la République est dans son rôle de réunir une fois par an les ministres directement concernés pour préciser ses orientations ; il l'a fait, par exemple, au mois de décembre, et cela a permis de débloquer beaucoup de choses. Il ne s'agit pas d'un organisme d'action, mais d'un lieu d'orientation stratégique. Le Cicid, de son côté, est le lieu de la mise en oeuvre de l'ensemble des politiques de développement, et je suis ensuite chargé de l'exécution. À côté de cela, le CNDSI et le CNCD formulent des conseils. Et enfin, il y a l'opérateur au niveau de chacun des pays concernés. Cela me paraît simple.
L'AFD est désormais tenue de répondre à un contrat d'objectifs et de moyens (COM). Dans ce contrat, je fixe 48 cibles à l'AFD - dont la question de l'égalité femmes/hommes -, qui me permettent de vérifier si, dans la globalité, l'organisme remplit bien son rôle. Je souhaite que ce contrat soit présenté aux deux assemblées. En revanche, je trouve prématurée l'idée d'une gestion décentralisée de l'AFD ; il convient d'abord de mettre en place les outils locaux.
M. Christian Cambon, président . - Monsieur le ministre, au sujet de tous ces conseils, l'important est que cela ne ralentisse pas les opérations. Au Fonds européen de développement (FED), un euro décidé l'après-midi arrive quatre ou cinq ans plus tard dans le village en question. C'est cela le sujet, et il ne s'agit pas de discuter la compétence des personnes... Inspirons-nous de la situation sanitaire pour en tirer des leçons sur le fonctionnement des administrations.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - Il y a trois sujets concernant l'intervention. J'ai souhaité renforcer l'aide humanitaire et l'intervention en situation de crise ; cela va aboutir, en 2022, à 500 millions d'euros de mobilisation financière immédiate par le centre de crise du Quai d'Orsay - dont, par exemple, 50 millions d'euros pour le Nord-Ouest syrien.
Avec le développement, c'est obligatoirement plus long. Quand on lance des projets comme celui de l'Institut Pasteur à Dakar, cela suppose un certain temps ; il faut identifier les acteurs, respecter des normes, faire des études... Je souhaite que l'on accélère les procédures afin qu'un projet n'attende pas quatre ou cinq ans avant d'être mis en oeuvre ; cela vaut pour l'AFD comme pour les différents fonds, auquel vous avez fait référence, au niveau européen.
Et, pour moi, le sujet central est la phase intermédiaire, que l'on appelle également phase de stabilisation. Les acteurs du développement doivent être beaucoup plus réactifs dans cette phase qui, en général, intervient après des crises, des conflits, voire des guerres civiles. Nous avons donc décidé de mettre en place, dans ces pays, un outil d'accélération pour être au rendez-vous. Cela est valable pour l'ensemble des acteurs.
Concernant la trajectoire financière, nous avons fait une loi de programmation a posteriori. Elle a permis une mobilisation progressive des financements, qui se compte en milliards d'euros supplémentaires ; tous les acteurs du développement le reconnaissent.
Dans les pays les moins avancés parmi les 19 prioritaires, nous avons engagé 1 milliard d'euros supplémentaires en 2019 par rapport aux trois années précédentes. En faisant la comparaison au sein de l'ensemble de l'aide publique au développement, certains pourcentages, même en progression, ne sont pas satisfaisants. Mais, dans cette aide, il faut compter l'écolage des étudiants chinois, d'autres dimensions encore...
M. Christian Cambon, président . - De tous les pays destinataires, la Turquie était en tête en 2019...
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - Il y avait des raisons à cela. Par exemple, le financement des fonds permettant de soutenir les réfugiés - qui sont en Turquie - rentre dans ce budget. Nous devons clarifier ces chiffres, identifier ce qui relève directement de l'APD.
Monsieur Folliot, la francophonie est essentielle. Dans le projet de loi, il est rappelé, avec le contrat de partenariat, l'importance de la francophonie. Sur les 19 pays prioritaires, la grande majorité est francophone. Les fonds affectés dans les pays francophones pour le développement de l'éducation contribuent indirectement au développement de la francophonie. Il est essentiel de se battre pour la langue française ; c'est un élément d'influence considérable. Cette année, si la situation sanitaire et politique le permet, un sommet de la francophonie se tiendra en Tunisie.
Une des conséquences de ces orientations, c'est de revaloriser la filière développement au Quai d'Orsay. Je souhaite qu'elle soit mieux prise en compte et considérée, par les agents, comme une filière noble.
Cela implique que l'on renforce la formation des conseillers de coopération et d'action culturelle (Cocac) dans les postes. Il faut valoriser l'action de développement de notre pays et faire en sorte qu'elle soit conçue comme un élément de la diplomatie française. Auparavant, il n'avait jamais été dit que la politique de développement était un élément de la politique étrangère. Au reste, cette évolution peut présenter des inconvénients : elle implique une direction. La bataille d'influence est permanente.
M. Le Nay m'a interrogé sur la concurrence. Oui, nous sommes trop timides. Nous ne sommes pas assez visibles. Ce n'est pas parce que l'on met quelques milliers de vaccins sur un tarmac en Afrique que l'on règle la question vaccinale africaine ! Cette question se réglera par l'initiative Covax, qui permettra de mobiliser 2 milliards de doses d'ici à la fin de l'année et de diffuser les vaccins dans les pays concernés - 100 pays en ont d'ores et déjà bénéficié. Il est indispensable de considérer que l'immunité sera globale ou ne sera pas.
À cet égard, donner l'illusion que les vaccins Sinopharm ou Spoutnik régleront la question vaccinale dans ces pays est une opération de propagande. C'est par une politique d'échantillons que certains mènent leur politique d'influence. Ce n'est pas notre manière de faire. Cela dit, nous ne savons sans doute pas communiquer suffisamment sur notre présence... L'ensemble de l'aide au développement souffre d'un problème de lisibilité globale, y compris au plan européen. Nous devons, sur ce plan, agir bien davantage.
Monsieur Yung, il est indispensable que nous puissions répondre à la demande d'un pays par une offre globale, associant une offre de prêt, une offre de don et une offre d'expertise, comme le font les acteurs dont a parlé Jacques Le Nay. C'est ce qui explique qu'Expertise France rejoigne le groupe AFD. Cependant, ce ne sera pas une filiale de l'AFD comme peut l'être Proparco, qui travaille avec les entreprises privées. Nous voulons qu'Expertise France garde une forme d'autonomie, de manière que l'on puisse lui passer des commandes directes sans passer automatiquement par l'AFD. Le dispositif proposé permet l'autonomie d'Expertise France dans le champ d'action de l'AFD, ce qui permettra de répondre très rapidement à des demandes ou d'identifier les projets réalisables en apportant la garantie technique nécessaire. C'est ce que nous faisons déjà, mais nous le ferons plus efficacement avec Expertise France.
J'ajoute que nous avons décidé de doubler le nombre d'experts techniques internationaux, qui sont aujourd'hui au nombre de 140, pour être en mesure de répondre à une demande immédiate entraînant la mobilisation de l'AFD. C'est une bonne manière de répondre à la pénétration d'autres acteurs, en particulier sur le territoire africain.
Monsieur Cadic, il y a dans le texte un dispositif qui consacre un devoir de vigilance des entreprises et de leurs filiales à l'égard d'acteurs qui ne respecteraient pas les principes fondamentaux des droits humains. Cette conditionnalité est prise en compte dans les orientations de notre politique de développement, en particulier pour éviter que des entreprises qui ne respectent pas ces principes fondamentaux ne puissent bénéficier de prêts que nous aurions consentis à des pays. Ce point est très important. Le fait qu'il y ait désormais un comité ad hoc par site autour des ambassadeurs, associant non seulement le responsable de l'AFD, le Cocac, mais aussi le responsable des services économiques, permettra aussi d'être vigilant sur cette question.
Madame Garriaud-Maylam, nous avons pris en considération les femmes dans le texte. Les enfants ont également fait l'objet d'une attention particulière.
La présence des conseillers des Français de l'étranger est prévue au sein du conseil local du développement.
Je n'ai pas bien compris la question de M. Guiol.
M. André Guiol . - Nous avons vu, lors de l'affaire des caricatures, que la perception de notre pays tranchait avec son action de solidarité. Les populations sont-elles conscientes ce que nous faisons ? Pouvons-nous mesurer leur « taux de satisfaction » ? La France touche-t-elle des dividendes de son action ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . - Cela dépasse largement la question du développement. Nous avons un combat permanent à mener face à des acteurs très spécialisés, en particulier en Afrique, qui utilisent des fake news ou les réseaux sociaux pour détruire notre image. Nous avons mis en place des dispositifs de contre-influence, notamment sur les réseaux sociaux, pour éviter ces dérives. Certains affirment que les anciens colonialistes ne peuvent prétendre à être les acteurs du développement d'aujourd'hui. Un certain nombre de puissances qui veulent s'installer dans les pays où nous avons de l'influence reprennent parfois ce refrain.
Comme je l'ai affirmé tout à l'heure, l'influence est un outil de puissance, mais le développement est aussi un outil de développement des valeurs. Nous sommes aujourd'hui confrontés à une conflictualité des modèles dans le monde entier.
M. Christian Cambon, président . - Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'ensemble de ces précisions.
Le travail n'est pas terminé. Nous essaierons de faire en sorte que la commission mixte paritaire soit conclusive, mais le débat sera important.
Le décrochage entre l'action militaire au Sahel et l'action de développement, qu'a évoqué Marie-Arlette Carlotti, a été confirmé dans le bureau du président du Sénat au début de la semaine par le chef d'état-major des armées. Il faut progresser sur ce plan. Je pense que nous évoquerons ce point dans la discussion. Vous devez peser de tout votre poids pour le faire comprendre. On aura beau positionner 50 000 soldats au Sahel, si l'on ne mène pas, en parallèle, des actions de développement en faveur des trois priorités que nous avons évoquées - nourrir, soigner, former -, la situation ne changera pas.
II. AUDITION DE M. RÉMY RIOUX, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT (AFD)
Projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales - Audition de M. Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française de développement (AFD)
M. Christian Cambon, président . - Monsieur le directeur général, nous sommes heureux de vous accueillir aujourd'hui pour parler du projet de loi relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Ce texte, que nous attendions depuis plus de deux ans, devrait arriver au Sénat les 11 et 12 mai. C'est une réelle satisfaction car nous y réfléchissons depuis longtemps !
On ne présente plus l'AFD, notre agence et banque de développement, qui oeuvre sur les cinq continents, dotée de moyens en forte augmentation depuis quelques années. Les engagements financiers de l'agence sont ainsi passés de 4 milliards d'euros en 2009 à 14 milliards en 2019 ! Je pense que c'est une situation unique dans la sphère publique, qui montre l'engagement des pouvoirs publics à progresser dans l'aide au développement. L'AFD a également vu ses moyens en dons augmenter récemment, avec 1 milliard d'euros d'autorisations d'engagements supplémentaires en 2019. C'était une demande constante de notre commission.
Cette augmentation des engagements est allée de pair avec un élargissement de ses missions. A la lutte contre la pauvreté et les inégalités mondiales, s'est ajoutée la protection des biens publics mondiaux tels que le climat ou la biodiversité. Cette évolution s'est effectuée en conformité avec les engagements internationaux de notre pays, notamment le programme de développement durable des Nations unies et l'accord de Paris de 2015. L'AFD mobilise désormais tous les types de financements en faveur du développement dans un grand nombre de pays, qui vont, à un bout du spectre, des plus pauvres de la planète, à des nations émergentes en passe de rejoindre les pays développés à l'autre bout.
L'AFD est ainsi l'instrument précieux et efficace de notre politique de développement. Je salue toutes les équipes sur le terrain qui mettent en oeuvre ces programmes.
Néanmoins, un certain nombre de problèmes ont été relevés ces dernières années, notamment par notre commission, mais aussi, récemment, par la Cour des comptes. Ils concernent en premier lieu le fait que l'État peine à fixer une stratégie globale qui intègre l'action de l'AFD au sein des autres dimensions de cette politique. En second lieu, l'État a du mal à assurer de manière satisfaisante la tutelle et le pilotage de son opérateur d'aide au développement principal, au niveau central aussi bien que dans les pays de l'aide. À cet égard, l'article 7 du projet de loi vise spécifiquement à renforcer la tutelle de l'agence, tandis que le rapport annexé prévoit la création de conseils de développement dirigés par les ambassadeurs.
Je voudrais rappeler une nouvelle fois l'importance de l'évaluation et du contrôle de l'activité. C'est une priorité ! Il s'agit de sommes colossales, et il est indispensable que les conditions d'une évaluation impartiale soient définies. Nos rapporteurs auront sans doute des propositions à nous faire sur ce point lorsqu'ils nous présenteront leur rapport, dans trois semaines.
Nous avons également maintes fois regretté une insuffisante concentration des financements sur les pays qui en ont le plus besoin, tandis que le volume des prêts vers les pays à revenu intermédiaire a explosé. Nous y reviendrons certainement au cours de la séance. Les causes de ces phénomènes sont multiples mais l'AFD fait partie de l'équation et nous sommes convaincus que certains paramètres peuvent, et doivent changer !
Nous souhaiterions ainsi connaître votre regard sur ce projet de loi, sur les grandes orientations fixées par le rapport annexé et sur la programmation financière, mais aussi sur ces mesures de gouvernance et de pilotage qui concernent plus spécifiquement l'AFD.
Par ailleurs, le projet de loi autorise l'AFD à détenir le capital d'Expertise France, transformée par l'article 8 en Société par actions simplifiée. Pourriez-vous faire le point sur ce rapprochement : où en est-on aujourd'hui et quel est le point d'arrivée de cette réforme ? Je rappelle que nous entendrons également sur ce sujet Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France, en visioconférence, à la suite de la présente audition.
Monsieur le directeur général, je vous laisse vous exprimer sur ces sujets avant de donner la parole aux deux rapporteurs, Hugues Saury et Rachid Temal, puis à l'ensemble de nos collègues.
M. Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française de développement . - Je vous remercie pour cette invitation. Je suis à votre disposition pour rendre des comptes sur l'action de l'AFD et débattre sur le projet de loi de programmation et la politique de développement elle-même. Ma lecture d'ensemble de ce texte est extrêmement positive. Il fournit tout d'abord l'occasion d'un débat public devant la représentation nationale sur les enjeux et les spécificités de l'action de développement, son pilotage politique, ses objectifs et ses moyens, le dernier débat ayant eu lieu en 2014. Il est essentiel pour notre agence de recevoir une orientation fixée par la loi.
Je salue l'ensemble des travaux approfondis conduits par les parlementaires depuis de longues années éclairant cette redéfinition de la politique de développement. Je pense notamment aux rapports de MM. Requier, Collin et Canevet, de Mme Keller, de M. Vial, de Mme Perol-Dumont auxquels ont succédé les sénateurs Saury et Temal. Je salue tous les travaux auxquels vous avez contribué, M. le président, avec votre regrettée collègue Marielle de Sarnez. Cette loi de programmation vient consolider ces nombreux travaux et échanges. C'est pour la première fois une loi de programmation budgétaire. Nous sommes heureux de ce signal politique. Les crédits de la mission aide publique au développement connaissent 75 % d'augmentation entre 2016 et 2022, se stabilisant à 0,55% du RNB en 2022. Ils atteignent 0,7% en 2021 compte tenu des annulations de dettes envisagées. C'est très intéressant au moment même où les Britanniques, considérés pendant vingt ans comme les leaders de la politique d'aide au développement dans le monde, ont réduit d'un tiers les crédits qui y sont alloués.
Cette loi opère aussi une redéfinition de la politique de développement. Elle mentionne les politiques partenariales, le développement solidaire, les inégalités mondiales, l'approche globale intégrée. La grande nouveauté figure à l'article 3 du projet de loi avec les objectifs de développement durable des Nations unies comme cadre de référence de cette politique qui est affirmée comme l'un des trois piliers de notre politique étrangère avec la défense et la diplomatie. C'est très important pour nous.
La loi clarifie également les modalités de pilotage de la politique de développement, depuis le conseil présidentiel pour le développement qui s'est réuni la première fois fin 2020, jusqu'au conseil local de développement qui va rassembler toute l'équipe autour de nos ambassadeurs. La loi établit le rôle leader du ministère des affaires étrangères. J'ai des réunions périodiques avec Jean-Yves Le Drian, dont je salue l'engagement et l'intérêt portés à ces questions de développement. Ce soutien politique est important, de même que la confiance dans la mise en oeuvre de ces orientations.
La loi vient considérablement renforcer l'évaluation et la transparence, ainsi que la communication. Plus les Français sont informés sur cette action, plus ils y adhèrent et la trouvent efficace. La commission indépendante d'évaluation, créée par l'Assemblée nationale, viendra apporter de l'information indépendante et scientifique dans le débat public. Je suis très favorable à ce que l'agence soit soumise à cette analyse.
Ce texte vient en fin de mandature. Nous l'attendions depuis longtemps. Cela n'enlève rien à sa force. Il clarifie et consolide le mouvement et la transformation de cette politique engagée en 2015 et accélérée depuis 2017 dont l'AFD a grandement bénéficié. Il reste des questions à régler. Elles doivent être débattues afin que notre mandat soit plus clair et légitime. Je pense que nous sommes cohérents dans notre action. Les parlementaires qui siègent dans notre Conseil d'administration sont les vigies et les acteurs de cette cohérence et nous seront heureux d'accueillir prochainement vos quatre nouveaux représentants, si le texte reste en l'état ! Ils renforcent le lien politique avec les Français.
Il y a une forte croissance des engagements de l'AFD, qui a eu lieu préalablement à la loi, suscitant des interrogations. Le texte ramène ce montant à 12 milliards d'euros d'engagement annuel. On entre dans une période de consolidation et de rééquilibrage entre les différents produits financiers. Nous avons atteint la taille d'une banque régionale de développement, ce qui nous donne une influence proportionnée à notre pays. La loi confirme les priorités géographiques fixée à l'agence, notamment l'Afrique, et les priorités sectorielles. Je serai très attentif au débat devant la Haute assemblée, cette partie du texte ayant été largement discutée à l'Assemblée nationale, notamment sur les enjeux d'égalité homme/femme et les droits de l'enfant.
Enfin, le texte nous encourage à nous transformer en plateforme au service de toutes les parties prenantes, les collectivités locales, la société civile et les entreprises. Il s'agit de « mettre notre pays en coopération ». C'est sur cette base collective de solidarité que nous pouvons bâtir une coalition internationale. Je pense à l'Alliance pour le Sahel ou au sommet « Finance en Commun ».
C'est un excellent texte qui, j'espère, recevra l'unanimité de vos suffrages, comme à l'Assemblée nationale après un débat intensif. Il y a évidemment dans le texte plusieurs dispositions concernant directement l'AFD sur lesquelles je pourrais revenir. Le renforcement d'Expertise France, auquel le Sénat est très attaché, est prévu par le texte, qui prévoit une gouvernance assurant toute l'autonomie nécessaire à Expertise France et garantit une synergie entre l'aide financière et l'aide humaine. Cela va renforcer notre action et relancer cette expertise, cette dimension humaine dont le nombre d'acteurs s'était beaucoup réduit.
Le 1% mobilité est également un outil très important. Le dispositif en matière d'eau, dite « loi Oudin », a fait ses preuves. Nous avons la réplique dans un autre domaine d'excellence de l'offre française. L'AFD se met en ordre de marche pour aller chercher les collectivités locales qui souhaitent développer leur coopération.
Il y a plusieurs dispositions qui concernent directement l'AFD : Expertise France, le 1% mobilité, la question des biens mal acquis et la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme en zone de crise. Un article a été ajouté pour qu'un rapport soit remis au Parlement sur ces sujets très sensibles, notamment dans le Sahel.
M. Hugues Saury . - Je vous remercie, Monsieur le directeur général, pour vos propos. L'une des ambitions affichées du projet de loi est de renforcer l'exercice de la tutelle de l'État sur l'AFD, au niveau national et au niveau du pays partenaire afin de garantir la bonne utilisation des crédits budgétaires de l'État et de répondre devant le Parlement de l'efficacité de ces dépenses qui vont croissantes. Nous nous félicitons de cette disposition souhaitée à la fois par le Parlement et la Cour des comptes. Toutefois, la valeur ajoutée de ce texte n'apparaît pas aussi nettement qu'annoncé. Les textes sur l'AFD restent en grande partie inchangés même s'ils passent du niveau réglementaire à législatif.
À votre avis, en quoi ce projet de loi favorise-t-il en particulier des axes stratégiques et un meilleur pilotage et quels sont les éléments qui permettent de garantir la bonne utilisation des crédits de l'État ?
Enfin, je souhaiterais évoquer le rapprochement de l'AFD et Expertise France. Comment a évolué l'activité de cette dernière depuis le début de cette union ? A-t-elle dû abandonner certains aspects de son activité ? Ses relations avec les bailleurs ont-elles continué à se développer ? Pourriez-vous nous donner des exemples de ces nouvelles « offres intégrées » dont vous nous aviez parlé lors d'une précédente audition, mises en oeuvre par les deux agences ? Enfin, la gouvernance d'Expertise France prévue par le projet de loi vous paraît-elle pertinente ?
M. Rachid Temal . - Avant tout, je voudrais faire une remarque sur ce projet de loi tant attendu. Ce texte, dit de programmation, ne couvre en réalité que l'année 2022, comme le fera la prochaine loi de finances. C'est un des reproches que l'on peut faire à ce texte, je regrette qu'il n'y ait pas d'engagements financiers pour les années 2023 à 2025. C'est un manque dans une loi de programmation. Mais nous aurons l'occasion de déposer des amendements.
Je ne pense pas que ce texte règle beaucoup de choses sur la tutelle politique. Ainsi, le conseil présidentiel vient plutôt complexifier la situation.
Ma question porte sur les engagements financiers de l'AFD, avec d'une part l'augmentation des moyens budgétaires et le réendettement progressif et conséquent d'un certain nombre de pays. Les prêts de l'AFD restent-ils un bon outil ? Allez-vous stabiliser les encours à hauteur de 12 milliards d'euros, comme le demande l'État ? C'est aussi la question du lien entre les prêts et les dons. Maintenant qu'Expertise France rentre dans le groupe AFD, pourrions-nous imaginer que le groupe AFD ait trois pôles : les prêts, les dons et l'expertise ?
Ma seconde question porte sur l'apport véritable de ce texte, le conseil local de développement, qui rassemble, sous l'autorité de l'ambassadeur, tous les acteurs du développement local. Est-ce que cela va changer vos relations avec les ambassadeurs ? Comment imaginez-vous l'intégration des sociétés civiles locales dans ce conseil ?
M. Rémy Rioux . - Il me semble que la loi permet de progresser sur l'exercice de la tutelle et le pilotage politique de l'agence. Elle élève au niveau de la loi des mécanismes qui n'étaient conçu qu'au niveau de conventions ou de textes réglementaires. Elle leur donne une force supérieure. Elle fait figurer explicitement le rôle du ministre des affaires étrangères dans le pilotage de cette politique et ajoute ce conseil local de développement autour de nos ambassadeurs, qui va apporter des précisions et de la cohérence dans la programmation des actions de développement. C'est une orientation que j'avais donné dès mon arrivée en poste à l'agence en 2016. Il est important d'être proche de l'ambassadeur. L'avis de ce dernier est requis à deux étapes du projet : très en amont lors de son identification et avant l'approbation par l'AFD.
Nous travaillons actuellement sur la déclinaison des nouvelles dispositions législatives dans le fonctionnement quotidien, au niveau de la convention-cadre entre l'État et l'AFD, et sur la gestion des dons dans les pays. L'agence aspire à un pilotage politique, seul gage d'une plus grande ambition.
Concernant les produits financiers et le rapprochement avec Expertise France, nous allons devoir organiser le groupe AFD avec cette nouvelle filiale et construire cette offre intégrée qui comprendra différents produits financiers et des interventions non financières (assistance technique, renforcement de capacités, recherche, formation...). L'idée est d'avoir les instruments d'une politique forte plutôt que de faire la politique de ses instruments, comme on l'a fait trop longtemps, au prix d'une forte réduction des moyens humains de coopération. Nous sommes en train d'inverser cette tendance. Nous avons déséquilibré notre modèle en faveur des prêts faute de moyens budgétaires suffisants. Le rééquilibrage est engagé avec ce milliard d'euros voté en 2019. Maintenant il faut trouver le meilleur instrument financier compte tenu du problème de développement qui nous est présenté. Je ne pense pas qu'il faille séparer la gestion des dons et celle des prêts. En revanche, il est utile d'isoler la partie expertise dans sa capacité à nouer d'autres partenariats. Depuis notre rapprochement avec Expertise France, ce dernier n'a rien abandonné de son champ géographique d'intervention, ni de son champ sectoriel, légèrement différent de celui de l'AFD. Notre autre filiale Proparco n'a pas non plus exactement le même champ d'intervention géographique et sectoriel que l'AFD.
Je tiens à votre disposition des fiches pays où vous pourrez voir la palette des interventions possibles des trois entités de notre groupe, avec les partenaires, les clients publics pour l'AFD, le secteur privé pour Proparco, et la partie humaine et technique pour Expertise France. Dans chaque pays, il faudra voir comment orienter et pondérer l'ensemble de ces instruments.
Il me semble que dans le texte voté par l'Assemblée nationale, l'ambition est bien poussée jusqu'en 2025. L'objectif de 0,7% de notre revenu national brut est expressément mentionné. Il est également prévu un débat dans le deuxième semestre 2022. Je m'en remets au gouvernement sur la durée de validité de la programmation budgétaire.
M. Jean-Claude Requier, rapporteur de la commission des finances . - Cette loi de programmation était très attendue. La commission des finances est saisie pour avis sur ce texte et donnera son avis sur les sujets budgétaires.
L'article 9 prévoit le rattachement de la commission d'évaluation à la Cour des comptes. En quoi la Cour des comptes est-elle spécialement compétente pour évaluer l'aide publique au développement ?
Comment les personnels de l'AFD et d'Expertise France perçoivent leur rapprochement de structure et de statut ?
M. Rémy Rioux . - Le texte ne prévoit pas de contrôle de la Cour des comptes, en tant que telle, à ce stade. Le texte prévoit juste que cette commission d'évaluation indépendante est hébergée par la Cour des comptes. Il revient au gouvernement de débattre sur sa composition et sa mission. Le rapport de votre collègue Hervé Berville, en date de septembre 2018, précisait qu'il s'agissait bien d'évaluation et non de contrôle. Le contrôle de la gestion de l'AFD est déjà assuré par la Cour des comptes et par les différents corps d'inspection de nos ministères de tutelle, ainsi que par nos dispositifs internes. Il s'agit de mesurer notre impact sur la vie des populations à qui nous apportons notre aide et sur les politiques publiques des pays où nous intervenons. Ce sont des compétences qu'il va falloir aller chercher. La Cour des comptes me semble une institution intéressante à ce titre pour deux raisons : son autorité et sa crédibilité, ainsi que l'hébergement de structures déjà existantes. Le Parlement y a d'ailleurs recours. En tout cas, nous sommes très heureux de cette instance indépendante d'évaluation.
Sur la question des ressources humaines, je pense que les salariés des deux maisons sont très enthousiasmés par ce rapprochement. C'est à l'évidence un projet stratégique. J'ai lancé la révision du statut du personnel de l'AFD. Le statut actuel résulte d'un arrêté du ministre des finances qui date de 1998. Il a vécu et n'a pas encore intégré toutes les évolutions qui ont eu lieu depuis lors. On cherche à maintenir les spécificités des statuts de chaque filiale, liées à leur cadre juridique et à leurs métiers. On cherche les éléments communs afin que la vie sociale et la mobilité au sein du groupe soit plus cohérente. Ce projet de rapprochement donne des perspectives de carrière très appréciées de nos collègues, notamment ceux d'Expertise France.
M. Christian Cambon, président . - Je vous ai entendu dire que le Parlement devait davantage se pencher sur l'évaluation, laissant le contrôle aux corps d'inspection. J'ai beaucoup de respect pour ces derniers mais le Parlement a un aussi rôle de contrôle, d'autant plus qu'il s'agit de sommes importantes, 12 milliards d'euros d'engagements ! Dans le cadre de ses compétences, le Parlement doit pouvoir contrôler l'utilisation de cet argent public en faveur du développement, sachant que les corps d'inspection font également leur travail.
M. Olivier Cigolotti . - Le 25 mai dernier, vous avez lancé, en partenariat avec le ministère des outre-mer, une initiative dénommée « Outre-mer en commun », dotée d'un fonds d'un milliard d'euros, destinée à apporter une réponse à la crise sanitaire et à l'impact économique pour les territoires ultra-marins. La pandémie a touché presque tous les territoires, or, dans le projet de loi ne figure pratiquement aucune disposition particulière sur les territoires ultra-marins. Quel est votre sentiment sur ce sujet ?
M. Jacques Le Nay . - Depuis 2015, votre agence suit une stratégie 100% accords de Paris. Elle ne soutient plus les projets allant à l'encontre de la réduction des émissions des gaz à effet de serre et de l'adaptation aux impacts du dérèglement climatique. Avez-vous pu mesurer l'impact de cette stratégie ? A-t-il été difficile de trancher contre certains projets intéressants mais ne rentrant pas dans les critères écologiques désormais défendus par votre agence ?
Devant les députés, vous avez émis le souhait de faire de nos Outre-mer des plateformes de coopération avec les pays voisins. À quels projets pensez-vous ? Les collectivités territoriales de nos territoires ultra-marins n'ont-elles pas un rôle prééminent à jouer dans le cadre d'une telle coopération ?
M. Philippe Folliot . - Certains pays font en sorte que les aides qu'ils accordent au développement entrent dans une stratégie globale de puissance et d'influence. L'objectif de ce texte est très altruiste et multilatéraliste à certains égards, en accord avec la convention de Paris. Dans votre esprit et au regard de ce texte et de la stratégie de l'AFD, peut-il y avoir un continuum entre l'action que mène la France sur le terrain, notamment au Sahel, et les actions civilo-militaires menées par nos forces armées ? A-t-on une vision à long terme ? Y a-t-il un élément de discrimination positive dans les projets financés par rapport à la défense de la francophonie ?
M. Jean-Marc Todeschini . - Expertise France devient une filiale de l'AFD, son directeur sera nommé par le gouvernement. Quelle sera l'articulation entre l'AFD et Expertise France ? Certaines parties du texte méritent des éclaircissements. Ainsi, à l'article 26, la France fait preuve d'une exigence accrue vis-à-vis des partenaires au développement et promeut une logique de réciprocité. Cela ne va-t-il pas changer la nature même de l'aide ? L'AFD est mandataire pour les actions spécifiques en outre-mer, ce qui n'est pas le cas d'Expertise France. Quelle va être la cohérence des actions menées par la filiale ?
M. Rémy Rioux . - En évoquant les corps d'inspection et la Cour des comptes, je ne visais que l'exécutif. Le contrôle parlementaire est bien évidemment présent. J'avais d'ailleurs cité en introduction les nombreux rapports parlementaires qui sont aussi des actions de contrôle sur l'AFD. Nous sommes en permanence sous votre regard !
S'agissant de l'outre-mer, on a dépassé le milliard d'euros l'année passée. « Outre-mer en commun » était la marque de réorientation de notre plan pour répondre à la crise covid dans sa dimension sanitaire et économique. Le 1,2 milliard d'euros représente une augmentation significative par rapport à 2019 pour répondre à l'urgence, notamment dans le Pacifique. Le texte porte sur la politique de développement, donc plutôt sur notre activité dans les pays étrangers. Il y a une cohérence dans notre action dans les territoires ultra-marins qui sont eux-mêmes en coopération et en lien avec les pays voisins. Nous avons changé l'organisation de l'AFD pour développer une stratégie « Trois océans » dans laquelle nous avons placé les territoires ultra-marins et les pays voisins pour une meilleure intégration régionale. Nous avons un programme sur la biodiversité dans le Pacifique, que nous menons avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Je suis très favorable à ce que vous ameniez cette dimension ultra-marine dans vos débats, de même que l'action de Proparco et d'Expertise France qui n'est pas prévu à ce stade en Outre-mer. Les filiales peuvent tout à fait recevoir des mandats distincts et des orientations différenciées de votre part.
S'agissant de l'alignement 100% accord de Paris, nous avons développé depuis plus de six ans une procédure interne à l'AFD, « l'avis développement durable ». Nous notons chacun des projets selon les différentes dimensions du développement durable, en particulier la dimension climatique et environnementale, comme la biodiversité. En cas de notes négatives, les projets ne sont pas financés. Nous garantissons ainsi que tous les financements de l'AFD aient une contribution positive pour le climat et le développement durable. En 2020, nous avons été les premiers à faire une émission obligataire « durable » sur les marchés financiers, à l'instar des obligations vertes, afin de financer notre propre agence.
Je partage l'avis du sénateur Folliot sur la stratégie globale. Je me suis félicité de notre stratégie en trois D « Défense, Diplomatie, Développement » étroitement articulée. C'est ce que nous cherchons à faire, notamment dans le Sahel, où ces trois composantes de la politique internationale de la France sont très présentes. Nous devons montrer comment nous articulons les actions de développement selon l'approche territoriale intégrée. On fait de la cartographie commune. Nous essayons de programmer nos propres actions en cohérence, en vue d'une programmation conjointe, de façon à être le plus efficace possible.
J'ai eu l'occasion d'intervenir récemment devant la section française de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF), où j'ai rappelé que 50% des financements de l'AFD étaient engagées dans un pays membre de l'organisation internationale de la francophonie. J'ai même dit que le français était la langue du développement par la diversité de ses actions. La francophonie est un axe essentiel dans la programmation de nos actions. Nous favorisons également l'enseignement du français. Je serai ravi de poursuive la discussion sur ce sujet que je considère comme majeur.
Enfin, sur la logique de réciprocité, il s'agit de parler des valeurs de notre aide, des priorités, et d'engager nos partenaires à suivre les mêmes pratiques. Nous y sommes très attentifs.
M. Richard Yung . - Je me félicite des priorisations dans le projet de loi, sur les pays et sur les thèmes. Quelles sont vos relations avec la Caisse des dépôts ? À une époque, on en entendait beaucoup parler, qu'en est-il aujourd'hui ? Et pour la BPI ?
Concernant la gouvernance, je suis inquiet de voir la multiplication de tous ces conseils : un conseil présidentiel, un Comité interministériel du développement et de la coopération internationale (CICID), un Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI) et un conseil pour les collectivités locales. Comment fait-on pour assurer la cohérence et respecter les limites de leurs actions ?
Mme Michelle Gréaume . - L'aide de la France se fait en majorité par des prêts, contrairement à la majorité des autres pays. Ne pensez-vous pas que l'endettement des pays bénéficiant de ces prêts nuise à leur capacité d'investissement et de structuration administrative ? Je regrette enfin qu'aucun travail de fonds n'ait été amorcé sur la taxe sur les transactions financières (TTF) dans ce texte. Qu'en pensez-vous ?
M. Yannick Vaugrenard . - Vous avez évoqué les trois D « Défense, Diplomatie, Développement ». Nos militaires sont au Sahel et, en particulier au Mali, depuis huit ans. La victoire ne sera pas que militaire, si elle l'est, mais également politique. Il est par conséquent nécessaire d'avoir un accompagnement économique, social, voire administratif. Durant les prochaines années, quel développement soutenu va être engagé dans cette zone du Sahel et pouvons-nous espérer une aide plus importante et efficace de nos partenaires européens ?
M. Guillaume Gontard . - Comme vous l'avez rappelé, l'AFD a fait office de pionnier en 2017 en s'engageant à rendre ses activités 100% compatibles avec l'accord de Paris. Une part importante des financements de l'AFD s'effectue via des intermédiaires financiers. Comment est-il possible d'évaluer de manière indépendante les effets de ces financements et leur alignement avec les accords de Paris ? Je voudrais prendre comme exemple un prêt de 60 millions d'euros accordé en 2015 à la First Bank du Nigéria par Proparco, destiné à soutenir le secteur privé nigérien. Or en 2017, il était évalué que 43% des prêts de cette banque étaient dirigé vers des projets d'énergie fossile, pétrole et gaz ! Des prêts peuvent ainsi financer indirectement des projets de ce type. Comment améliorer la transparence, la traçabilité et l'évaluation de ces prêts aux établissements financiers ainsi que la manière d'évaluer après coup ces projets ?
M. Rémy Rioux . - Notre alliance avec la Caisse des dépôts se poursuit. Nous avons été partenaire en novembre dernier sur les banques publiques de développement et la Caisse des dépôts est venue amener toutes son expérience dans les discussions. Les équipes techniques ont toujours continué à échanger régulièrement compte tenu de la durée de la crise économique pour faire le lien entre les enjeux internationaux. Nous avions créé un fonds d'investissement STOA, pour accompagner les entreprises françaises pour mener des projets significatifs à l'international. La quasi-totalité des fonds est désormais engagée dans des projets sur lesquels nous pouvons vous rendre des comptes.
BPI France est une filiale de la Caisse des dépôts avec laquelle nous venons de signer une nouvelle convention pour donner un mode d'emploi aux entreprises dans leur capacité à interagir avec la banque des PME en France et Proparco à l'étranger.
La France n'est pas la seule à intervenir avec des prêts, l'Allemagne, le Japon, la Banque mondiale interviennent essentiellement avec des prêts à très long terme, à taux faibles, qui permettent d'avoir un effet financier significatif.
Sur la difficulté que rencontrent un certain nombre de pays en développement compte tenu de la situation de leur endettement, il y a de nombreuses discussions sur le plan international, y compris avec les bailleurs émergents comme la Chine, pour leur redonner de l'espace financier. C'est également important d'avoir des subventions pour ne pas surendetter des pays qui seraient en difficulté, comme les Fonds verts pour le climat pour des projets dans l'Océan indien.
Je renvoie le débat sur la TTF au gouvernement, n'étant pas directement concerné.
Je suis d'accord avec le sénateur Vaugrenard sur la nécessité de faire plus de place aux questions de développement, d'éducation, de santé ...
M. Christian Cambon, président . - Mes chers collègues, je vous propose de mettre un terme à cette audition en raison des problèmes techniques de visioconférence que nous rencontrons, et de demander une réponse écrite aux dernières questions posées.
III. AUDITION DE M. JÉRÉMIE PELLET, DIRECTEUR GÉNÉRAL D'EXPERTISE FRANCE
M. Christian Cambon, président . - Monsieur le directeur général, nous sommes heureux de vous auditionner sur le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, que notre commission examinera prochainement. Nous avions déjà eu le plaisir de vous entendre, le 13 mai dernier, sur le contrat d'objectifs et de moyens (COM) d'Expertise France pour la période 2020-2022, et les mesures prises par votre agence pour lutter contre le coronavirus.
Vous connaissez l'attention toute particulière que le Sénat porte à Expertise France, créée en 2014, sous l'impulsion de notre commission, par la fusion de multiples opérateurs d'expertise ministériels. Cette réforme a ainsi mis fin à l'atomisation de l'expertise française, en nous dotant d'un opérateur unique et puissant, capable de projeter nos savoir-faire dans le monde entier, à l'instar de certains de nos voisins.
Depuis sa création, l'activité d'Expertise France connaît une croissance rapide : alors qu'en 2014 les opérateurs d'expertise réalisaient un chiffre d'affaires de 105 millions d'euros seulement, celui de l'agence issue de leur regroupement a atteint 230 millions d'euros, soit plus du double.
Expertise France a d'ailleurs connu une crise de croissance, avec un modèle économique fragile fondé sur l'autofinancement et une situation sociale parfois délicate. Cependant, dans le cadre du nouveau COM, l'État a décidé de contribuer à l'équilibre financier de l'agence, notamment lorsque celle-ci met en oeuvre des projets financés par des crédits de l'Union européenne. Nous nous félicitons de cette décision qui va permettre à votre agence de continuer à se développer.
Le projet de loi que nous allons examiner vous concerne à deux égards.
En premier lieu, il définit la stratégie globale, les objectifs et les moyens de notre politique de développement solidaire, à laquelle Expertise France contribue. Pourriez-vous nous expliquer comment votre agence trouve sa place dans ce dispositif, et nous présenter les objectifs spécifiques qui lui sont fixés ainsi que ses grandes priorités ?
En second lieu, les articles 7 et 8 du projet de loi transforment Expertise France en société par actions simplifiée (SAS) et organisent son intégration au sein du groupe de l'Agence française de développement (AFD). Pourquoi avoir choisi le statut juridique de SAS plutôt que celui de groupement d'intérêt public ou de société anonyme ? Cette forme juridique vous permettra-t-elle de poursuivre l'intégralité de vos activités actuelles, notamment en relation avec l'Union européenne, y compris dans le domaine de la sécurité ? L'intégration au sein du groupe AFD est en réalité déjà largement entamée : pourriez-vous nous en dresser le bilan ? Cette opération a-t-elle déjà eu des conséquences sur le volume et la nature de vos activités ?
Je vous donne la parole pour un exposé liminaire, puis les rapporteurs du projet de loi, Hugues Saury et Rachid Temal, et les autres membres de la commission, vous interrogeront.
M. Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France. - Je regrette de ne pas être présent parmi vous ce matin, car je me suis autoconfiné à mon retour de mission en Guinée et en Côte d'Ivoire.
À titre liminaire, je souhaite saluer le travail du Sénat, qui est à l'initiative de la création d'Expertise France, ainsi que l'action des sénateurs Marie-Françoise Pérol-Dumont, Christophe-André Frassa et Isabelle Raimond-Pavero au sein de notre conseil d'administration.
Le projet de loi marque une rupture historique en matière de coopération technique, qui s'inscrit dans le droit-fil des recommandations formulées par le Sénat dans ses rapports sur le sujet. En effet, après des années de réduction des moyens budgétaires qui lui étaient alloués, cette coopération était devenue le parent pauvre de la politique d'aide publique au développement, marquée par l'arrêt des dispositifs lancés dans les années 1970-1980. Le nombre d'experts s'est lui aussi réduit : alors qu'il existait quelques dizaines de milliers de coopérants par le passé, la France compte aujourd'hui quelque 200 experts techniques internationaux portés par Expertise France pour le compte du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, auxquels s'ajoutent environ 250 experts mobilisés sur projets. D'autres pays - Allemagne, Japon - ont maintenu un effort de coopération technique important, en s'appuyant parfois sur plusieurs milliers d'assistants techniques.
Aussi le dispositif français avait-il besoin d'être rénové et renforcé ; l'ambition affichée par le projet de loi à travers le cadre de partenariat global est donc bienvenue, de même que les décisions prises par le Conseil présidentiel du développement visant, d'une part, à augmenter le nombre d'experts techniques internationaux à travers le doublement de la commande du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et, d'autre part, le renforcement du rôle d'Expertise France pour attirer de nouveaux publics (jeunesse, diasporas) vers la coopération technique.
Pour ce faire, l'État pourra s'appuyer sur Expertise France qui est un acteur solide. Sa taille a doublé en quatre ans, et son chiffre d'affaires devrait être supérieur à 300 millions d'euros cette année. Cette forte croissance traduit le besoin d'une expertise française à travers le monde, à laquelle nous devons pouvoir répondre.
Le contrat d'objectifs et de moyens passé avec l'État a permis de définir un modèle économique durable, grâce notamment au mécanisme de soutien qui nous permet de mobiliser, chaque année, entre 150 et 200 millions d'euros de fonds européens, pour un coût d'environ 6 millions d'euros pour l'État français.
Notre agence est l'opérateur interministériel de la politique française de coopération. Expertise France a su développer des compétences dans les domaines de la santé, de la gouvernance, du développement durable, du développement humain, de la sécurité et de la défense, et prochainement dans celui de la justice avec l'intégration de Justice coopération internationale (JCI) à la fin de l'année. Expertise France est aujourd'hui la deuxième agence européenne dans le domaine de la coopération technique, après la GIZ allemande. Ce projet de loi met en avant une coopération technique plus partenariale, en rationalisant les instruments de cette politique. Il fixe en outre un cadre de partenariat global dont nous partageons les priorités. L'Afrique est la priorité absolue d'Expertise France qui y consacre l'essentiel de son activité. Nous appuyons nos États partenaires dans plusieurs domaines - santé, etc. - définis comme prioritaires par le Quai d'Orsay.
Le traitement des crises et des fragilités représente une autre part importante de l'activité de l'agence. Nous agissons dans des pays ou des régions fragiles tels que le Sahel, le Proche-Orient, la République centrafricaine et la Libye, dont la stabilité est cruciale pour la France et l'Europe. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement nous demande d'y être présents.
La question de la gouvernance est l'une des priorités de l'agence, dans tous ses aspects : gouvernance démocratique, justice, retour de l'État de droit, gouvernance économique et financière.
Le projet de loi rationalise le dispositif de coopération en intégrant Expertise France à l'AFD, sans préjudice de ses spécificités. La décision d'intégration avait été prise par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) en février 2018, ce qui nous a laissé du temps pour la préparer. Cette réforme essentielle nous a déjà permis de développer des synergies, et nous permettra d'être efficace et de nous démarquer sur le plan européen. Le renforcement de nos moyens et la complémentarité entre l'assistance technique et les financements, fait de nous un acteur unique en Europe - voire dans le monde -, auquel nos partenaires, de même que les délégations de l'Union européenne, sont attentifs.
Les spécificités d'Expertise France justifient son maintien ainsi que son rattachement au groupe AFD comme filiale, tout en conservant une certaine autonomie. L'agence aura des missions de service public qui sont définies dans le projet de loi et qui pourraient être renforcées. Elle aura le statut de SAS, ce qui est classique pour une filiale d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). La souplesse de ce statut permettra d'organiser une gouvernance avec un rôle important de l'État, la présence de parlementaires - deux sénateurs et deux députés - et d'une représentation de la société civile.
Pour son activité, Expertise France n'est pas dépendante de l'AFD. En effet, l'activité sur financement de l'AFD représente près du quart de notre activité - probablement le tiers l'an prochain -, quand les financements de l'Union européenne représentent plus de la moitié. Nous sommes également un partenaire important des Nations unies, et de fonds comme UNITAID dans le domaine de la santé ; nous conserverons ces relations, parallèlement aux mandats que l'État nous a confiés - gestion des expertises techniques internationaux, initiative 5 % en matière de santé mondiale, commande publique des ministères.
Au sein du groupe AFD, nous serons un levier de mobilisation de l'expertise publique. Nous lui apporterons notre connaissance pour coopérer avec des pays autres que ceux en développement, puisque nous sommes présents au sein même de l'Union européenne, dans des domaines tels que la sécurité et la défense.
Ce projet est aussi fédérateur sur le plan social, et suscite des attentes chez nos salariés.
Le projet de loi conforte Expertise France dans son rôle d'acteur clé de la coopération et du développement. L'amendement du rapporteur à l'Assemblée nationale, Hervé Berville, sur la gouvernance de l'agence et la clarification du rôle de directeur général, était bienvenu car il permet d'assurer la stabilité de cette gouvernance qui a connu des difficultés par le passé. En outre, il est important de conserver l'agilité d'Expertise France en précisant ses missions de service public ; cela est essentiel pour notre positionnement vis-à-vis de nos partenaires dans le monde.
Par ailleurs, nous devons être réactifs et prendre des décisions rapidement. À cet égard, je me réjouis que l'Assemblée nationale ait réduit les délais exécutoires des décisions prises par le conseil d'administration, passant de 15 à 8 jours, même si un délai de 24 ou de 48 heures serait préférable dans certains cas.
Enfin, la filialisation au sein du groupe AFD est l'un des objectifs de ce projet de loi. Ce texte parle toutefois d'un transfert d'Expertise France à l'État, sans mentionner l'AFD ; il serait donc utile d'en préciser les modalités, afin de pouvoir intégrer le groupe AFD dès le 1er juillet prochain.
Ce projet de loi ambitieux est donc nécessaire pour nous permettre d'être présents sur le terrain et renforcer notre politique d'influence, comme l'a indiqué le ministre Jean-Yves Le Drian.
M. Hugues Saury . - Vous avez insisté sur le lien avec l'État par le biais d'un contrat d'objectifs et de moyens. Les missions d'Expertise France sont actuellement décrites avec précision dans l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010. Or l'article 8 du projet de loi lui substitue une définition lapidaire, qui n'évoque même plus la notion d'expertise, ni même les liens nécessaires avec les ministères.
N'est-ce pas un problème, d'autant que le rapprochement avec l'AFD pourrait justement avoir pour effet de distendre les liens avec les ministères pourvoyeurs d'expertise ?
En 2020, Expertise France devait renouveler l'accréditation lui permettant de recevoir des délégations de financement de la Commission européenne. Cette accréditation a-t-elle finalement été délivrée ?
M. Rachid Temal . - Les députés ont marqué des hésitations sur la nature de la gouvernance qu'il convenait de mettre en place pour votre établissement. En principe, le statut de société par actions simplifiée (SAS), prévu par le projet de loi, implique l'existence d'un Président de la SAS doté de larges pouvoirs. En même temps, le Gouvernement voulait préserver le lien fort avec l'État en assurant une présence importante au Conseil d'administration. Les députés ont finalement recréé un poste de directeur général à côté de celui de président du Conseil d'administration. Cette configuration vous paraît-elle pertinente ? De manière plus générale, n'y a-t-il pas une contradiction à vouloir en même temps rattacher Expertise France à l'AFD et maintenir un lien fort entre Expertise France et l'État ?
Comment se déroule actuellement le dialogue social au sein d'Expertise France ? Les évolutions de l'équilibre économique, avec un meilleur soutien de l'État, et le rapprochement avec l'AFD, ont-ils permis d'améliorer la situation par rapport aux premières années d'existence de l'organisme ?
M. Jacques Le Nay . - Quelle évolution du rôle de l'Union européenne dans le domaine du développement peut-on constater ? La France peut-elle apprendre des modèles nationaux européens en matière de développement ? Quel rôle jouent aujourd'hui les collectivités territoriales françaises en matière d'aide publique au développement ? Ont-elles une expertise particulière sur des projets de coopération à l'échelle locale ?
M. Jérémie Pellet, directeur général d'Expertise France . -L'Union européenne a repoussé d'un an la ré-accréditation de l'ensemble de ses partenaires à la fin de l'année 2021. Nous avons déjà réalisé l'audit blanc. Nous ne sommes pas inquiets. Sur les statuts et l'article 8 du projet de loi, ce qui relève du niveau législatif est sans doute la précision sur les missions de service public de l'agence, point qui - comme je le disais tout à l'heure - est absolument essentiel. La description des missions fera l'objet de précisions dans nos statuts, comme pour toute société, et il sera très important dans ce cadre-là de rappeler tous les points que vous avez indiqués, notamment notre mandat, notre rôle, les liens avec l'État. Nous y serons évidemment très vigilants.
Le dispositif actuel est le suivant : un président du conseil d'administration délègue ses pouvoirs au directeur général. C'est un bon système. Il assure une gouvernance saine avec un président - une présidente, en l'espèce Laurence Tubiana - dont le rôle d'animation des travaux du conseil d'administration et des administrateurs se fait de manière extrêmement fluide. C'est un dispositif satisfaisant. Le projet de loi tient compte du fait que la SAS n'a pas en principe de directeur général. Par ailleurs, la mission même d'Expertise France nécessite une proximité très grande de l'opérateur avec l'État, avec l'administration centrale, dans la gestion des outils d'intervention, des experts techniques internationaux, avec les postes diplomatiques. Nous avons mis en place un dispositif pour remplacer une comitologie qui était compliquée, afin de faire en sorte qu'il y ait des discussions stratégiques par grand secteur d'activité de l'État sur les différents aspects de la coopération technique internationale, ce qui nous permet de nourrir ce dialogue avec l'Etat et de nous assurer que nous sommes bien en lien avec les priorités, en matière de coopération internationale, des ministères. Il n'y a donc pas d'ambiguïté ou de difficulté à être au sein du groupe AFD tout en gardant une relation privilégiée avec l'État. D'autres dispositifs fonctionnent sur ce mode, comme la gestion des garanties publiques sur l'export au sein de BPI France, qui a des relations très étroites avec l'État.
Nous avons beaucoup de choses à apprendre de l'Union européenne. D'abord, comme je le disais en introduction, Expertise France est une agence aussi européenne que française dans son activité. Nous avons donc des relations très fortes avec l'Union européenne. Nous avons aussi un travail à faire en commun avec nos pairs, les autres agences de coopération technique. Je mentionnais la GIZ, il y a d'autres agences, Enabel en Belgique, la FIAP en Espagne, avec lesquelles nous montons des projets. Nous avons un même modèle au sein de l'Europe, un même modèle social, un même modèle de gouvernance, qu'il est important de promouvoir et sur lequel nous avons une expérience à partager au niveau mondial. Cette expérience est aussi le fait des collectivités locales françaises et vous avez tout à fait raison de l'indiquer. Aujourd'hui, les collectivités territoriales françaises sont une source très importante d'expertise pour nous. D'ailleurs, un certain nombre de cadres territoriaux sont extrêmement volontaires pour participer à des actions de coopération internationale. Je l'évoquais avec le président Rousset il y a quelques semaines. C'est évidemment très important, c'est un vivier. Les collectivités territoriales sont des partenaires qui jouent vraiment un rôle de plus en plus central dans les projets que nous menons à travers le monde et nous nous en réjouissons.
M. Christian Cambon, président - La commission va continuer ses travaux sur ce texte. Le rapport sur le projet de loi sera adopté dans trois semaines et nous souhaitons bon vent à Expertise France, en vous redisant l'attachement que notre commission porte à cette institution. Les succès que vous remportez montrent que ce rassemblement des énergies était justifié.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 14 avril 2021, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, présidée par M. Christian Cambon, président, a examiné le rapport et le texte proposé par la commission sur le projet de loi de programmation n° 404 (2020-2021) relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales.
M. Christian Cambon , président . - L'ordre du jour appelle l'examen du rapport et du texte de la commission sur le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Nous attendions d'être saisis de ce texte depuis plus de deux ans. Son examen va nous permettre de débattre de cette politique que notre commission suit avec beaucoup d'attention, nous sommes convaincus qu'elle joue un rôle essentiel pour relever certains grands défis, en particulier le développement de l'Afrique. La croissance très rapide de la population, les changements climatiques, les troubles politiques, les violences et les migrations de grande ampleur : tels sont ces grands enjeux du continent africain dont l'Europe ne peut à l'évidence se désintéresser.
Le texte est-il à la hauteur de ces défis ?
Sur le plan de la programmation financière, cette prétendue loi de programmation ne couvre en réalité que l'année 2022. Le texte fixe ainsi un objectif de 0,55 % du revenu national brut (RNB) consacré à cette politique en 2022, en deçà des fameux 0,7 %. Ce dernier chiffre est toutefois mentionné comme un objectif que la France « s'efforcera d'atteindre » en 2025.
Cette absence de réelle programmation nous a parue insatisfaisante et nous nous sommes efforcés d'y remédier. La loi de programmation de la recherche, adoptée en décembre dernier, ne fixe-t-elle pas les crédits de paiement de recherche jusqu'à 2030 ? Et, bien entendu, la loi de programmation militaire court jusqu'en 2025. Certes, l'exercice est rendu un peu périlleux par les incertitudes de la situation économique actuelle. Nous sommes partis des prévisions du Fonds monétaire international (FMI) et nous avons dessiné une trajectoire pour atteindre 0,6 % du RNB en 2025. Cela nous a paru un moyen terme pertinent entre un objectif à 0,7 %, qui sera, de l'avis général, très difficile à atteindre, et le statu quo, qui ne serait pas satisfaisant. La trajectoire que nous proposons suppose déjà une augmentation annuelle des crédits de la mission « Aide publique au développement » de plus de 800 millions d'euros, ainsi qu'un accroissement de la part de la taxe sur les transactions financières consacrée à cette politique : je laisserai Rachid Temal préciser ce dernier point. Nous prévoyons un rendez-vous en 2023 pour réviser ces objectifs en fonction de la conjoncture, et pourquoi pas pour remettre au premier plan les 0,7 %, si cela nous paraît alors raisonnable et pertinent.
Le volume des engagements financiers ne doit pas constituer l'alpha et l'omega de cette politique. Le choix des pays vers lesquels nous orientons nos financements, la nature des projets financés et la manière dont ils sont menés sont tout aussi importants.
À cet égard, le projet de loi, même amélioré par les députés, est un peu décevant. Nous répétons depuis des années que notre aide publique au développement (APD) ne cible pas assez les pays les plus pauvres, comporte une part de dons trop faible et qu'elle est déséquilibrée en faveur de l'aide multilatérale. La Cour des comptes ou les analyses des ONG ne disent pas autre chose. La comparaison avec nos principaux partenaires est sans appel : 18 % de notre aide programmable va vers les pays les moins avancés (PMA) quand la plupart de nos partenaires sont à 30 ou 40 % ; nous avons la deuxième plus faible part de dons et la deuxième plus faible part de dépenses bilatérales. Sur ces points essentiels, le texte ne fait que reconduire des objectifs et des critères qui datent de 2013 ou bien qui ne sont assortis d'aucune cible chiffrée. Nous vous proposerons des amendements pour remédier à cette situation de manière progressive. D'autres amendements déposés par des membres de la commission vont parfois plus loin. Selon nous, une approche trop radicale serait cependant contreproductive. Si nous disons, par exemple, qu'il faut immédiatement orienter la moitié de notre aide publique au développement vers les pays les moins avancés, le ratio prêts/dons actuel nous obligera à faire des prêts massifs à des pays déjà surendettés. Une approche progressive est donc préférable.
Le pilotage de notre aide publique au développement n'est pas non plus traité de manière satisfaisante par ce texte.
Le rapport de la Cour des comptes de 2020 sur les opérateurs de l'action extérieure de l'État a souligné la complexité actuelle de ce pilotage. Les instances sont nombreuses et leurs missions enchevêtrées. Le ministre chargé du développement est chargé de « définir et mettre en oeuvre » la politique de développement solidaire. Il est secondé par le ministre chargé de l'économie, ainsi que, s'agissant de la tutelle de l'Agence française de développement (AFD), par celui des outre-mer. En outre, le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid) fixe la liste des pays prioritaires. Le co-secrétariat du Cicid assure l'application de ses décisions. Le Conseil d'orientation stratégique de l'AFD réunit, sous l'autorité du ministre chargé du développement, les représentants de l'État au conseil d'administration de l'agence et élabore le contrat d'objectifs et de moyens (COM) de l'AFD.
À ces instances décisionnelles s'ajoutent deux organismes consultatifs : le Conseil national pour le développement et la solidarité internationale (CNDSI) et la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD).
Le projet de loi n'apporte aucune simplification à cette architecture. Il crée même deux nouvelles instances : le conseil du développement, présidé par le Président de la République, et le conseil local de développement, dirigé dans chaque pays partenaire par l'ambassadeur. Cette innovation nous semble d'ailleurs plutôt positive, car elle est susceptible d'améliorer la coordination de l'AFD et de l'ambassade au niveau local tout en permettant une meilleure concertation avec l'ensemble des partenaires concernés.
Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) regrette que « le projet de loi n'ait pu être l'occasion de donner à la politique de développement de la France un portage politique fort et unique ». Nous partageons cette analyse. Notre commission plaide depuis plusieurs années pour le retour d'un ministre ou d'un secrétaire d'État dédié au développement. Nous ne pouvons pas y obliger le Gouvernement. Cependant, nous vous proposerons de réaffirmer le rôle prééminent du ministre chargé du développement. Par ailleurs, le Cicid devra se réunir au moins une fois par an pour exercer son rôle indispensable de coordination. Nous avons également introduit des dispositions pour renforcer la tutelle de l'AFD ; je laisserai Rachid Temal les évoquer en détail.
Autre apport de ce texte, la création d'une commission indépendante d'évaluation de la politique de développement solidaire : c'est une de nos préconisations de longue date. L'évaluation interne des projets d'aide publique au développement est réalisée par des services qui dépendent des administrations conduisant ces projets. Le nouvel organisme, inspiré de la commission d'évaluation britannique, possédera l'indépendance et l'expertise technique. Il fournira ainsi, notamment au Parlement, les données nécessaires pour réaliser des évaluations plus ambitieuses de la politique de solidarité internationale.
Nous avons souhaité mieux définir sa composition, en entérinant son placement auprès de la Cour des comptes par les députés, mais en prévoyant la présence de parlementaires en son sein. Nous avons également précisé le pouvoir de saisine des assemblées, en fixant un délai de huit mois dans lequel la commission devra rendre les rapports commandés par celles-ci.
Enfin, j'évoquerai brièvement les dispositions relatives au volontariat de solidarité internationale. Le projet de loi prévoit la mise en place de volontariats réciproques, c'est-à-dire l'accueil de volontaires étrangers en France. Cela existe déjà, très marginalement, dans le cadre du service civique. L'objectif est limité puisqu'il s'agit d'accueillir 300 jeunes volontaires en France en 2022.
Pour conclure, nous nous réjouissons de pouvoir débattre d'un texte qui comporte certes des lacunes, mais aussi de nombreuses avancées pour la politique de solidarité internationale. Nous nous sommes appuyés sur les travaux antérieurs de la commission et sur les nombreuses auditions que nous avons menées, afin de proposer les modifications qui nous semblaient nécessaires. Les apports issus des nombreux amendements déposés permettront sans nul doute d'aller plus loin et d'améliorer encore le texte.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Ce projet de loi présente d'abord l'intérêt de renouveler le « narratif » de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales, notamment grâce au cadre de partenariat global (CPG). De manière pertinente, les députés en ont extrait les points essentiels pour les faire figurer dans un article liminaire.
Toutefois, nous vous proposerons de regrouper les principaux objectifs en trois catégories, au sein de l'article liminaire et du CPG : d'abord, l'aide au développement « classique », qui vise à lutter contre la pauvreté en fournissant des services essentiels ; ensuite, la défense des droits humains et de la bonne gouvernance et, enfin, la préservation des « biens publics mondiaux », par exemple le climat. Cela fera écho à la clarification des missions de l'AFD que je vais évoquer.
Nous vous proposerons également d'améliorer l'information du Parlement, dans le cadre du rapport prévu à l'article 2, qui nous permettra de débattre annuellement de la stratégie et des résultats. Nous demandons au Gouvernement de nous préciser la répartition des montants de l'aide publique au développement entre prêts et dons, en distinguant par pays, par programme et par opérateur. Nous demandons également, dans ce cadre, des informations sur la coordination entre acteurs militaires et acteurs de l'aide au développement au Sahel, dans l'optique de la stratégie « 3D » - défense, diplomatie, développement.
Nous nous soucions également de la trajectoire financière. En complément de l'augmentation des crédits de la mission « Aide publique au développement » évoquée par Hugues Saury, nous vous proposerons un amendement sur la taxe sur les transactions financières (TTF). Il nous semble en effet incohérent de ne pas davantage profiter du dynamisme de la TTF, dont le produit était d'environ 1,7 milliard d'euros en 2020, pour soutenir notre effort d'aide publique au développement. Actuellement, seulement 528 millions d'euros, soit 30 % environ du produit total, en sont prélevés pour la politique de développement, alors même qu'elle a été créée pour cela, c'est insuffisant. Nous vous proposerons donc d'affecter 60 % du produit de la TTF au Fonds de solidarité pour le développement (FSD) à partir de 2022, c'est-à-dire environ 1,02 milliard d'euros. Cet apport contribuera ainsi significativement à la trajectoire financière proposée.
Je rappelle que si le projet de loi initial inscrivait l'objectif de 0,7 % du PIB pour l'aide au développement, sans date pour l'atteindre, les députés ont adopté un amendement, avec l'accord du Gouvernement, prévoyant que la France s'efforce d'atteindre cet objectif en 2025. Nous proposons de remplacer cette formulation par des termes plus concrets : une augmentation significative des crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement » et de la part de TTF consacrée au développement.
J'en viens aux missions de l'AFD. Les engagements de cette agence sont passés de 6 milliards d'euros en 2009 à 14 milliards d'euros en 2019. Cette hausse très rapide est en grande partie responsable de la singularité de notre aide, qui comporte une forte proportion de prêts non concessionnels et qui est, pour cette raison, très orientée vers les pays émergents. Du fait des règles de comptabilisation de l'aide publique au développement, nous affichons des montants corrects d'aide tout en minimisant nos dépenses budgétaires. Tout le monde s'accorde sur le fait que cette stratégie a atteint ses limites. Nous n'aidons pas assez nos pays prioritaires et l'AFD, de son côté, continue à prospecter dans le monde entier pour y placer de nouveaux prêts auprès de pays qui n'en n'ont pas toujours un besoin évident. Nous faisons ainsi la « politique de notre instrument », l'AFD, au lieu d'avoir les instruments de notre politique. Le projet de loi initial ne remet pas fondamentalement en cause cette stratégie.
La fixation d'objectifs précis pour orienter notre aide vers les pays prioritaires et pour augmenter la proportion de dons, évoquée par Hugues Saury, constitue un début de solution. Pour aller plus loin, il aurait fallu séparer les activités de dons de l'AFD de ses activités de prêt. L'AFD est déjà un organisme multiple comprenant trois branches : l'AFD proprement dite, Proparco et maintenant Expertise France. À terme, on peut tout à fait imaginer une branche supplémentaire spécialisée dans les dons à destination des pays les plus pauvres.
Sans aller aussi loin, nous vous proposerons, dans un premier temps, de bien distinguer, au sein des missions de l'AFD, les deux axes suivants : d'une part, financer les services essentiels - santé, éducation, agriculture, infrastructures de base - dans les pays les plus pauvres, par le biais de dons et de prêts très concessionnels ; d'autre part, financer, essentiellement par des prêts, les biens publics mondiaux et la convergence économique dans les pays à revenu intermédiaire.
C'est aussi une question de lisibilité pour nos concitoyens, qui peuvent avoir du mal à comprendre pourquoi l'AFD aide à creuser des puits dans le Sahel et en même temps à rénover des centrales électriques en Chine ou en Turquie.
Outre cette clarification, nous nous sommes efforcés de renforcer la cohérence du pilotage de l'AFD. Dans son rapport de juin 2020, la Cour des comptes a fait ce constat : « Les outils de pilotage dont dispose le ministère des affaires étrangères demeurent insuffisants pour lui permettre d'exercer une véritable tutelle stratégique, au niveau central, sur l'AFD. »
Le projet de loi ne propose pas de mesure nouvelle pour y remédier. Actuellement, l'AFD est soumise à plus d'une centaine d'objectifs différents, fixés par les ministres de tutelle, par le Cicid et son secrétariat, par le président de la République ou le Premier ministre. Nous proposons que désormais, tout ceci aboutisse à un nombre limité d'objectifs figurant au sein du contrat d'objectifs et de moyens, présenté au Parlement avant sa signature. Ce COM rénové doit devenir le support d'une revue annuelle menée sous la direction du ministre chargé du développement afin de vérifier si l'AFD a atteint ses objectifs.
Notre commission n'était guère favorable à la fusion d'Expertise France et de l'AFD, dont les objectifs ne semblaient pas évidents. La décision a désormais été prise et il convient de maximiser les avantages qu'on peut en retirer, notamment sur le plan des synergies administratives. Toutefois, notre commission avait souligné qu'il fallait prendre garde à ce que l'intégration au sein du groupe AFD de nuise pas aux relations d'Expertise France avec les ministères pourvoyeurs d'expertise, ni à sa capacité à travailler avec les agences onusiennes ou avec la Commission européenne. Dans cet esprit, nous proposerons un amendement afin de préciser les missions d'Expertise France.
Enfin, le projet de loi prend pleinement en compte la contribution des collectivités territoriales à l'aide publique au développement française. L'État doit doubler son soutien à l'action extérieure des collectivités entre 2017 et 2022. Le texte instaure un nouveau dispositif de financement sur les budgets des services de mobilité. Ce « 1 % mobilité » vient compléter les « 1 % eau », « 1 % énergie » et « 1 % déchets ». Les succès de ces dispositifs sont inégaux, mais ils présentent l'intérêt d'avoir un fort effet de levier. Le « 1 % mobilité » devrait monter en puissance très progressivement, étant donné la crise actuelle qui frappe durement les transports urbains et locaux. Son introduction répond toutefois à une demande de certaines collectivités et sa mise en oeuvre sera facultative.
En conclusion, je voudrais souligner que, au cours du travail préparatoire à l'examen de ce projet de loi nous avons, avec Hugues Saury, partagé les mêmes analyses sur les apports, mais aussi sur les lacunes du texte. Les amendements que nous vous proposons reflètent cette vision commune sur un sujet dont l'importance fait consensus au sein de notre commission. La discussion que nous aurons aujourd'hui permettra d'enrichir encore ce texte avant son examen en séance publique à partir du 11 mai.
M. Christian Cambon , président . - Merci pour ce travail approfondi, pour lequel vous avez fait de nombreuses auditions ; ce texte est essentiel, nous l'attendions depuis longtemps, je me réjouis que notre commission l'améliore.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Je présenterai deux blocs d'amendements. D'abord sur le ciblage de l'aide publique au développement. Constatant une dispersion de l'aide, nous avons voulu la cibler sur les 19 pays prioritaires ainsi que sur certains secteurs comme l'éducation et les services sociaux. Ensuite, sur les biens mal acquis, un thème sur lequel le Sénat a déjà bien travaillé depuis l'adoption de la proposition de loi de Jean-Pierre Sueur, il nous reste encore un peu de chemin à parcourir pour que l'argent collecté aille véritablement aux populations spoliées - tel est l'objet de plusieurs amendements que nous avons déposés. Pour le reste, les désaccords que nous pourrions avoir sont mineurs.
M. Jean-Claude Requier , rapporteur pour avis de la commission des finances . - La commission des finances s'est saisie pour avis des articles 1 er , 2, 4, 7, 8, 9, 11 et 13. Lors de sa réunion, hier, elle a adopté 15 amendements, et a pu, notamment, avoir un débat fructueux sur la trajectoire financière de la mission « Aide publique au développement ».
Tout d'abord, la commission des finances a partagé mon constat selon lequel l'intérêt budgétaire du texte est très limité. Comme cela a déjà été souligné par les rapporteurs, la trajectoire financière proposée à l'article 1 er se contente d'entériner les moyens déjà validés par le Parlement. Les motifs avancés pour justifier cette programmation « bancale » sont d'autant plus incompréhensibles que nous avons adopté récemment la loi de programmation pour la recherche qui prévoit une trajectoire jusqu'en 2030.
Afin d'examiner une réelle loi de programmation, la commission a adopté un amendement visant à prolonger la trajectoire jusqu'en 2025. Je reste attaché à la préservation des moyens de l'aide publique au développement, mais également à la sincérité de la programmation de nos finances publiques. C'est pourquoi j'ai proposé à la commission des finances une trajectoire crédible, tout en permettant de sanctuariser les efforts budgétaires que nous consacrons à cette politique plus que nécessaire.
Les crédits de la mission « Aide publique au développement » ne constituent que l'un des canaux de l'aide publique au développement de la France. Par conséquent, le lien entre la part du revenu national brut (RNB) dédiée au développement et ces crédits n'est que partiel. Sous ces réserves, la hausse annuelle des crédits permettant de maintenir l'objectif de 0,55 % de notre RNB en 2025 peut être estimée à 500 millions d'euros environ. La commission a estimé qu'une telle augmentation était cohérente avec l'effort consenti depuis le début du quinquennat. En outre, comme les rapporteurs, je propose une révision à mi-parcours de cette trajectoire, nous permettant d'actualiser nos ambitions en la matière d'ici deux ans.
La commission des finances a adopté d'autres amendements à l'article 1 er , visant à supprimer une disposition sur le contrôle de cette politique par le Parlement qui nous a semblée inutile ; à supprimer un alinéa qui additionne plusieurs montants à l'article 1 er en raison sa portée normative limitée ; à supprimer la mention selon laquelle les services de l'État de la politique de développement disposent de moyens humains cohérents, car cette analyse ne nous semble pas pertinente compte tenu de la hausse des effectifs constante des opérateurs ; à préciser les dispositions sur la restitution des biens mal acquis.
J'ai également regretté que la question du besoin en fonds propres de l'AFD soit écartée de nos débats. Nous devons disposer d'une vision claire et actualisée de ces besoins afin d'éviter des recapitalisations de dernière minute comme lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021. C'est la raison pour laquelle la commission a adopté un amendement complétant un document budgétaire sur ce point.
S'agissant du rapport annuel prévu par l'article 2, la commission des finances a adopté trois amendements visant à le compléter, à préciser la rédaction et à avancer la date de sa transmission. Enfin, la commission a adopté un amendement tendant à supprimer la mention d'un débat en séance publique sur ce rapport, car il nous a semblé inutile qu'une disposition législative contraigne notre ordre du jour.
Pour les articles 7 et 8, j'ai dit les avantages de l'intégration d'Expertise France au sein de l'AFD, tout en précisant qu'elle posait des questions juridiques importantes. Sur ces articles, la commission des finances a adopté deux amendements visant à simplifier les modalités de désignation des sénateurs et députés qui siègent dans ces conseils d'administration. Nous partageons l'avis des rapporteurs. Par cohérence, la commission a adopté un amendement similaire à l'article 5.
Concernant la commission d'évaluation prévue à l'article 9, l'objectif d'une montée en gamme de l'évaluation me semble indispensable, compte tenu de la hausse continue des moyens budgétaires qui y sont dédiés. Toutefois, cette nouvelle instance pose plusieurs questions, en particulier celle de son articulation avec les missions d'évaluation du Parlement, auxquelles nous sommes très attachés. Par conséquent, la commission des finances a adopté un amendement visant à préciser la fonction de cette commission et à la recentrer sur une mission d'évaluation par projets de l'aide publique au développement.
M. Pascal Allizard . - Merci aux rapporteurs pour leur travail, cohérent avec les rapports d'information que notre commission a consacrés à Expertise France, à l'aide publique au développement à Madagascar, à l'aide française au Sahel : nous avons une expertise sur le sujet. Ce texte comporte des avancées réelles, en particulier la programmation budgétaire, qu'il est utile de prolonger jusqu'en 2025. C'est la condition indispensable d'une transparence exigeante, et nous avons besoin d'un continuum avec la stratégie que la France poursuit avec ses opérations extérieures. Même constat pour la commission d'évaluation, ce texte apporte une base pour un travail exigeant avec cette instance. Veillons à ne pas transformer la politique française de développement en une simple transposition de normes, qui rendrait l'aide difficilement accessible aux pays que nous voulons cibler - je le dis en particulier pour des amendements qui sont bien intentionnés, qui promeuvent nos idéaux et nos valeurs, mais qui risquent de n'être qu'un affichage contre-productif. L'APD est un outil d'influence, l'aide publique au développement est devenue un espace de rivalité entre puissances, un moyen d'affirmation des puissances, qui l'utilisent pour s'implanter dans des pays sans référence aucune aux traités visant le développement durable.
Ce texte est conforme aux résolutions de l'Assemblée générale de l'ONU et à nos engagements internationaux, nous ne revoyons pas nos objectifs à la baisse et nous devons être exigeants sur la stratégie d'utilisation de l'aide et sur la transparence, laquelle n'est pas négociable. C'est pourquoi notre groupe soutiendra le texte de notre rapporteur ; nous devons être pragmatiques et exigeants, le contexte nous l'impose.
M. Pierre Laurent . - Nous devrons avoir un débat sur la programmation, je ne suis pas convaincu par l'obstacle que constitueraient les incertitudes actuelles, la pandémie nous montre au contraire qu'on doit changer d'échelle, cette question en conditionne bien d'autres. Ensuite, nous avons des amendements pour affirmer la cohérence entre notre aide publique au développement avec nos autres politiques publiques, en particulier nos politiques commerciales. Si nous continuons à mener des politiques qui consistent à piller les ressources des pays qu'on prétend aider, l'aide publique au développement ne fonctionnera pas. Nous aurons donc une deuxième série d'amendements pour la séance plénière.
M. Jacques Le Nay . - Ce texte était attendu, il fait de la lutte contre la pauvreté et de la préservation des équilibres mondiaux une priorité de notre politique de développement. Il a été voté à la quasi-unanimité par l'Assemblée nationale, nous ne devons donc pas le modifier en profondeur. Il opère des changements utiles et équilibrés dans notre organisation, c'est une bonne chose. Cependant, nous aurons des amendements en séance plénière sur la francophonie, les outremers et l'incitation à l'apprentissage du français. Nous soutiendrons également une rédaction de l'article 9, qui mette à contribution l'expertise de nos groupes d'amitié.
M. Richard Yung . - Ce texte est important et bienvenu, nous avons une trentaine d'amendements pour l'améliorer, en particulier sur la commission d'évaluation et sur les commissions de développement local.
M. Guillaume Gontard . - Ce texte attendu va dans le bon sens, nous sommes favorables au débat sur la trajectoire financière. Nous avons déposé des amendements et nous en aurons encore en séance plénière, pour cibler en particulier les droits humains, la prise en compte des peuples autochtones, les questions de genre et celle du droit des enfants.
M. Christian Cambon , président . - Ce texte a été le seul de la législature que les députés ont adopté sans vote contre, par 502 voix pour et 41 abstentions.
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation. Seront donc déclarés irrecevables les amendements qui ne concernent pas l'objet de ce texte, à savoir l'ensemble des aspects de la politique française de développement solidaire et de lutte contre les inégalités internationales, d'aide publique au développement, d'évaluation et de contrôle de cette politique.
Examen des articles
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avec l'amendement COM-1 , je vous propose de mieux distinguer les objectifs de développement solidaire de l'aide publique au développement.
L'amendement COM-1 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-6 est satisfait par celui que nous venons d'adopter.
L'amendement COM-6 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-5 apporte une précision utile, sous réserve qu'il soit intégré à l'amendement COM-1.
L'amendement COM-5, ainsi modifié, est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-4 précise le principe de l'égalité filles-garçons, qui est déjà présent dans l'amendement COM-12 rectifié, dont la rédaction est préférable : avis défavorable.
L'amendement COM-4 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-7 ajoute des objectifs à la politique de développement solidaire, alors que nous tenons à les hiérarchiser : avis défavorable.
L'amendement COM-7 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-8 ajoute le droit à une identité juridique, nous préférons nous en tenir à la hiérarchie des objectifs telle qu'elle figure dans notre rédaction : avis défavorable.
L'amendement COM-8 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-11 mentionne les droits des peuples autochtones, ces droits sont inclus dans les droits humains : avis défavorable.
L'amendement COM-11 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-12 rectifié mentionne utilement l'égalité filles-garçons : avis favorable.
L'amendement COM-12 rectifié est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - La précision rédactionnelle de l'amendement COM-13 ne paraît pas utile : avis défavorable.
L'amendement COM-13 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-2 vise à compléter l'alinéa 2 afin de répondre aux besoins réels des populations des pays aidés.
L'amendement COM-2 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-9 pose un principe de non-discrimination ; nous y sommes favorables.
L'amendement COM-9 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-3 prévoit d'ajouter à l'alinéa 4 le cadre stratégique mondial pour la biodiversité 2011-2020 et ses objectifs dits « d'Aïchi ».
L'amendement COM-3 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-14 , dont l'objet est d'inscrire dans la loi le principe de cohérence, est satisfait par notre amendement COM-1.
L'amendement COM-14 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-10 consacre le vaccin comme bien public mondial. Or il ne s'agit pas d'un objectif permanent et structurant de la politique de développement solidaire : retrait, sinon avis défavorable.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Cet amendement va peut-être trop loin, mais je ne comprends pas pourquoi on ne tire pas les leçons de la crise sanitaire en ajoutant à la liste des priorités de l'aide publique au développement, telle qu'elle est prévue à l'article 1 er A, la lutte contre les pandémies, et en inscrivant les vaccins au rang de bien public mondial. En agissant de la sorte, nous sommes à la remorque du Président de la République, qui a signé un traité international avec 27 autres chefs d'État et le directeur de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
M. Hugues Saury , rapporteur. - C'est un sujet économique qui dépasse le cadre de ce texte. Si la recherche fondamentale est souvent publique, la conception d'un vaccin est généralement privée : les laboratoires, qui ne sont pas des philanthropes, exigent un retour sur les recherches extrêmement coûteuses qu'ils ont engagées. Nous craignons que l'adoption de cet amendement ne « stérilise » la recherche. C'est pourquoi nous y sommes défavorables. Mais il y a un autre amendement traitant du même sujet sans parler de vaccin que nous proposerons plus tard d'adopter.
L'amendement COM-10 n'est pas adopté.
L'article 1 er A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Rachid Temal , rapporteur. - Les amendements COM-15 rectifié et COM-142 portent sur la programmation financière de l'aide publique au développement. Ils ont la même philosophie, mais leurs dispositifs sont en partie concurrents. Notre amendement COM-15 rectifié trace la programmation pour 2022 à 2025 et prévoit les montants de crédits de paiement nécessaires afin que le taux de l'aide publique au développement atteigne au minimum 0,6 % en 2025, avec en perspective 0,7 %. L'amendement COM-142 que M. Requier présente au nom de la commission des finances sanctuarise, quant à lui, l'objectif de 0,55 % de notre revenu national brut jusqu'en 2025 et nous y sommes défavorables. Cette question figurera de toute façon au coeur des débats en séance publique.
M. Jean-Claude Requier , rapporteur pour avis . - Un objectif de 0,55 % ou de 0,6 %, cela peut sembler très proche, mais la différence n'est pas négligeable, car, pour atteindre le premier, il faut prévoir 500 millions d'euros de plus par an, et pour le second, 900 millions. Vu l'état des finances publiques, nous avons considéré que l'effort de 20 millions d'euros qui a été consenti était suffisant.
M. Pierre Laurent . - Ce débat aura lieu en séance publique, mais je suis très inquiet du constat de M. Requier sur les finances publiques. Nous ne votons pas des lois similaires tous les matins. Cela fait trois ans que nous attendons ; si l'on ne se dote pas dès maintenant d'une trajectoire forte avec des garanties sérieuses et si l'on s'aligne sur les objectifs les plus bas, nous en paierons les conséquences. Compte tenu de la situation mondiale liée à la crise sanitaire et de celle de l'aide publique au développement dans notre pays, il faut faire exactement l'inverse ! C'est un peu comme si je disais qu'il ne faut pas engager de plan de relance vu l'état des finances publiques. Quand on s'adresse au ministère, il nous répond que les objectifs de chiffrage relèvent d'un débat interministériel. Or l'augmentation des crédits se heurte à des pressions politiques. Je crains que l'on n'en vienne à raboter toute ambition en la matière.
M. Christian Cambon , président. - Tout dépend de ce que l'on intègre dans le pourcentage. À une époque, on y incluait même les dépenses pour l'outre-mer.
M. Olivier Cadic . - Je soutiens l'amendement COM-15 rectifié. En limitant l'objectif à 0,6 % du RNB, on prend en compte l'état des finances publiques tout en créant une dynamique, sachant que les finances publiques sont arbitrées chaque année au moment de l'examen du projet de loi de finances. N'entamons pas le débat budgétaire avant l'heure !
M. Pascal Allizard . - Je suis d'accord pour insuffler une dynamique, mais je vous invite à la prudence. Il est facile de distribuer de l'argent, mais le réveil sera rude. Il y a toujours deux façons de calculer les pourcentages, la bonne et la mauvaise. J'ai un peu le sentiment que, en raisonnant en pourcentages, on ne sait pas vraiment où l'on va.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Il ne faut pas renoncer à l'objectif de 0,7 %, même s'il date de cinquante ans et qu'on a du mal à l'atteindre. L'amendement des rapporteurs est intéressant, car il prévoit un contrôle du Parlement avec une clause de revoyure, et permet d'avancer un peu plus que ce que l'on aurait souhaité. Toutefois, il manque de clarté, et je voterai sans hésiter les amendements ultérieurs qui vont plus loin.
M. Jean-Claude Requier , rapporteur pour avis . - Si le RNB diminue, la part consacrée à l'aide publique au développement sera supérieure à 0,55 %. Pour parvenir à 0,7 %, il faudrait injecter que notre aide publique au développement totale augmente de 1,9 milliard d'euros supplémentaires entre 2023 et 2025. Par ailleurs, il faudrait augmenter la TTF pour abonder ce programme.
M. Rachid Temal , rapporteur . - C'était d'ailleurs l'objectif initial de la TTF.
M. Richard Yung . - Je partage ce qu'a dit le président Requier.
M. Hugues Saury , rapporteur. - Nous sommes effectivement face à une réalité financière qu'il faut prendre en compte, avant d'arbitrer. Mais il convient d'abord que nous trouvions un accord avec la commission des finances. Nous parlons aujourd'hui non plus d'aide humanitaire, mais d'aide publique au développement. Comme l'a dit tout à l'heure Pascal Allizard, c'est un moyen d'influence. Si nous souhaitons donner un signal à l'ensemble du monde, nous serions bien inspirés d'augmenter légèrement le pourcentage de RNB consacré à cette politique en direction des plus pauvres, même si cela se traduit par une forte augmentation en valeur absolue.
L'amendement COM-15 rectifié est adopté ; l'amendement COM-142 devient sans objet.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-141 vise à préserver l'autonomie du Parlement en matière de contrôle et d'évaluation de cette politique publique : avis favorable.
L'amendement COM-141 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-24 rectifié est sans objet du fait du vote de notre amendement sur la trajectoire financière.
L'amendement COM-24 rectifié devient sans objet.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-23 est également sans objet du fait du vote de notre amendement précisant la trajectoire financière.
M. Pierre Laurent . - D'où sort la date de 2025, qui augmente les prévisions de deux ans et annule les cinq ans qui étaient prévus à l'origine ? On choisit le milieu du quinquennat prochain ; pourquoi pas l'horizon de 2030, ce qui serait plus cohérent ? Sur des objectifs aussi fondamentaux, comme on le fait sur le climat, il faut se donner des perspectives fortes.
Les amendements COM-23, COM-36 , COM-37 , COM-25 rectifié et COM-38 deviennent sans objet.
M. Rachid Temal , rapporteur. -Notre amendement COM-16 prévoit le passage de 30 % à 60 %, du produit de la TTF qui est dévolu au Fonds de solidarité pour le développement. Il devrait faire consensus.
L'amendement COM-16 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-21 est sans objet, puisque l'alinéa visé est entièrement réécrit par notre amendement sur la TTF.
L'amendement COM-21 devient sans objet, de même que l'amendement COM-26 rectifié bis.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-143 nous semble judicieux pour sortir d'une logique d'affichage : avis favorable.
L'amendement COM-143 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-27 porte sur la répartition des financements entre prêts et dons. Or les données concernant cette répartition font l'objet d'un de nos amendements à l'article 2 ; retrait, sinon défavorable.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - J'accepte de retirer cet amendement.
L'amendement COM-27 est retiré.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-19 rectifié a trait à un sujet important, à savoir la répartition entre l'aide bilatérale et multilatérale, et tend à augmenter sensiblement la première, pour qu'elle atteigne 70 % à compter de 2022, et sur toute la période 2022-2025.
L'amendement COM-19 rectifié est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-17 rectifié vise à rééquilibrer la proportion des prêts et des dons, pour que les seconds représentent au moins 65 % du montant de l'aide publique au développement en flux bruts à compter de 2022, et sur toute la période 2022-2025.
M. Christian Cambon , président . - C'est très important !
L'amendement COM-17 rectifié est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-18 concerne la concentration de l'aide pays programmable (APP) et vise à porter cette part à 30 %, afin d'agir sur les prêts de l'AFD et sur des dons de manière à les réorienter vers les pays prioritaires. Cet outil, qui ne comprend pas les aides aux réfugiés ou les frais d'écolage, assure un pilotage plus objectif.
L'amendement COM-18 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-28 vise à dédier 85 % de l'aide au développement française à l'attribution sous forme de dons. Nous en demandons le retrait.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Je le retire.
L'amendement COM-28 est retiré.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-31 porte sur le sujet important de l'aide aux services sociaux et sera suivi d'autres propositions en la matière. Il vise à affecter au moins 50 % de l'aide publique aux services sociaux. Cela créerait un déséquilibre dans la répartition de l'aide française aux services sociaux : retrait, sinon avis défavorable.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Je le maintiens.
L'amendement COM-31 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-39 vise à préciser l'objectif pour les pays prioritaires. Nous partageons la philosophie de cette mesure, mais l'effort de 80 % n'est pas atteignable ni raisonnable, sachant qu'il est fixé aujourd'hui à 15 % : avis défavorable.
L'amendement COM-39 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-40 , qui porte sur l'objectif de dons, est satisfait par l'amendement COM-17, que nous avons adopté et qui fixe cet objectif à 65 % du montant de l'aide publique au développement.
L'amendement COM-40 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-43 rectifié vise à porter à 85 % l'aide publique contribuant à l'égalité entre les hommes et les femmes. Nous partageons l'esprit de cet amendement, mais les députés ont déjà voté un amendement en ce sens, et il ne nous semble pas souhaitable d'aller encore plus loin : avis défavorable.
L'amendement COM-43 rectifié n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-29 vise à augmenter l'aide au développement en faveur des pays les moins avancés (PMA). Si nous partageons là encore la philosophie de cette mesure, augmenter l'aide de 25 % à 50 % d'ici à 2025 nous semble quasiment impossible à atteindre : défavorable.
L'amendement COM-29 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-30 vise à augmenter de 15 % à 30 % l'APD vers les pays prioritaires. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Je le maintiens.
L'amendement COM-30 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-32 vise à augmenter progressivement l'APD totale pour l'éducation. Si nous partageons totalement l'objectif visé, la marche est trop importante et pourrait bloquer d'autres priorités comme la santé : avis défavorable.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Je le maintiens.
L'amendement COM-32 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-144 vise à supprimer l'alinéa 11 de l'article 1 er . Nous considérons qu'il faut garantir des moyens humains suffisants à hauteur des besoins. Il n'est pas question d'ajouter aveuglément des effectifs, mais la suppression de cet alinéa laisserait à penser que l'objectif peut être atteint avec des moyens moindres. C'est la raison pour laquelle nous émettons un avis défavorable.
L'amendement COM-144 n'est pas adopté.
L'amendement rédactionnel COM-20 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-33 rectifié vise à donner un rôle plus important aux organisations de la société civile : avis favorable, sous réserve de ne garder que le premier point de l'amendement.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - J'accepte de rectifier mon amendement en ce sens.
L'amendement COM-33 est adopté, sous réserve de rectification.
L'amendement COM-41 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-34 prévoit la suspension du pacte de Cahors pour les dépenses d'APD des collectivités territoriales : nous vous suggérons de voter cet amendement dans l'allégresse !
L'amendement COM-34 est adopté.
M. Christian Cambon , président . - Nous sommes dans l'allégresse !
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-22 rectifié impose des précisions sur la base de données : avis favorable à ces précisions utiles.
L'amendement COM-22 rectifié est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-42 vient compléter le contenu de base de données. Il est très précis et donne le sentiment que le reste des données ne seraient pas intégrées au dispositif : avis défavorable au profit du précédent.
M. Guillaume Gontard . - Je le retire.
L'amendement COM-42 est retiré.
M. Rachid Temal , rapporteur. - Nous entamons la série des amendements portant sur les biens mal acquis. À cet égard, je salue le travail de notre collègue Jean-Pierre Sueur.
L'amendement COM-44 prévoit d'ajouter le recel de blanchiment, ce qui améliore très sensiblement le dispositif : avis très favorable.
L'amendement COM-44 est adopté.
L'amendement rédactionnel COM-45 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-46 est très intéressant, car il réaffirme les principes de transparence et de redevabilité des biens mal acquis : avis favorable.
L'amendement COM-46 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur. - L'amendement COM-35 est satisfait par le précédent.
M. Richard Yung . - Je le maintiens.
L'amendement COM-35 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-145 vient compléter les amendements de M. Sueur : avis favorable.
L'amendement COM-145 est adopté.
L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 1 er
M. Rachid Temal , rapporteur . - Un dispositif relatif aux biens mal acquis figure déjà à l'article 1 er . L'amendement COM-86 est donc satisfait.
L'amendement COM-86 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-87 prévoit qu'au moins la moitié du produit de la taxe sur les transactions financières est affectée à l'AFD. Notre amendement prévoit un taux de 60 %. Demande de retrait.
L'amendement COM-87 est retiré.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'alinéa 143 du cadre de partenariat prévoit déjà une obligation de vigilance. L'amendement COM-89 est donc satisfait. Avis défavorable.
L'amendement COM-89 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-146 avance du 15 au 1 er juin de chaque année la date de remise du rapport annuel. Avis favorable.
L'amendement COM-146 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-104 sous réserve d'une rectification pour le placer dans un autre alinéa.
L'amendement COM-104, ainsi modifié, est adopté.
L'amendement de clarification COM-91 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-90 est relatif à la comparaison des flux d'aide publique au développement avec les flux financiers privés.
L'amendement COM-90 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Les amendements COM-100 , COM-147 sont satisfaits par notre amendement COM-92 relatif à la répartition de l'aide publique au développement entre prêts et dons. L'amendement COM-101 est également satisfait par notre amendement COM-92.
L'amendement COM-100 est retiré.
L'amendement COM-147 n'est pas adopté.
L'amendement COM-92 est adopté.
L'amendement COM-101 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-102 sur la participation de la France au fonds pour l'agenda sur l'identité juridique de l'ONU est satisfait par l'alinéa 6 du présent article qui prévoit une information sur les contributions aux fonds multilatéraux. Il ne paraît pas opportun de mentionner un fonds en particulier. Avis défavorable.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Des milliers d'enfants sont privés d'identité. Il faut passer des bonnes intentions aux actes et que la France participe au fonds et aux groupes de travail internationaux.
L'amendement COM-102 n'est pas adopté.
Les amendements identiques de clarification rédactionnelle COM-93 et COM-148 sont adoptés, ainsi que l'amendement rédactionnel COM-94 .
M. Hugues Saury , rapporteur . - Notre amendement COM-95 promeut la coordination dite « 3D » entre acteurs militaires et acteurs de l'aide au développement au Sahel.
M. Christian Cambon , président . - C'est un apport du Sénat.
L'amendement COM-95 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - En matière de transparence et de traçabilité de l'aide publique au développement, les auteurs de l'amendement COM-103 demandent un rapport sur la stratégie et les résultats, et non un audit : cela risque d'être extrêmement lourd. Demande de retrait.
L'amendement COM-103 est retiré.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-96 étend le champ du rapport prévu à l'article 2 bien au-delà du champ de l'aide au développement. Avis défavorable.
L'amendement COM-96 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - La question de la compatibilité entre l'aide publique au développement et la diplomatie économique est déjà traitée par le 2°) du présent article. C'est donc un avis défavorable aux amendements COM-97 , COM-98 et COM-99 . D'une manière générale, nous ne souhaitons pas diluer le contenu du rapport en y insérant toutes sortes de considérations sur des politiques connexes à l'aide publique au développement.
Les amendements COM-97, COM-98 et COM-99 ne sont pas adoptés.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-149 qui supprime la mention d'un débat annuel au Parlement. Certes, une telle disposition n'est pas indispensable, mais elle a valeur symbolique.
L'amendement COM-149 n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 2
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-88 rectifié relatif au rôle de la société civile.
L'amendement COM-88 rectifié est adopté et devient article additionnel.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-105 est relatif aux nouveaux indicateurs de richesse et nous proposons d'avancer la date de remise du rapport au 1 er juin de chaque année.
L'amendement COM-105 est adopté, ainsi que l'amendement rédactionnel COM-106 .
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Rachid Temal , rapporteur . - La formulation de l'amendement COM-107 n'est pas totalement satisfaisante : elle donne le sentiment qu'il y aurait d'une part, des engagements internationaux qui doivent être respectés et d'autre part, l'Agenda 2030 qui ne serait qu'à « prendre en considération »... Avis défavorable.
L'amendement COM-107 n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté sans modification.
Article 4 bis (nouveau)
Les amendements identiques de suppression COM-108 et COM-109 sont adoptés.
L'article 4 bis est supprimé.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Les amendements identiques COM-110 et COM-150 prévoient que le Parlement organise lui-même sa représentation au CNDSI.
Les amendements COM-110 et COM-150 sont adoptés.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avec notre amendement COM-111 , nous prévoyons que les groupements d'intérêt public devront être agréés pour bénéficier de l'envoi de volontaires.
L'amendement COM-111 est adopté.
L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 6 bis (nouveau)
L'article 6 bis est adopté sans modification.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-112 précise les trois missions que l'AFD réalise sous l'autorité de l'État.
L'amendement COM-112 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Chaque assemblée doit pouvoir désigner ses représentants au conseil d'administration de l'AFD selon ses propres règles. C'est le sens des amendements identiques COM-113 et COM-151 .
Les amendements COM-113 et COM-151 sont adoptés.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-117 qui n'inscrit dans la loi qu'une partie des membres du conseil d'administration de l'AFD. Cela ne nous semble pas souhaitable, hormis le cas particulier des parlementaires pour lesquels c'est obligatoire.
L'amendement COM-117 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - On peut partager l'objectif de parité posé par l'amendement COM-118 , mais cela relève d'autres textes : avis défavorable.
L'amendement COM-118 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-114 qui instaure une lettre annuelle d'objectifs pour le directeur général de l'AFD apporte une clarification utile : avis favorable.
L'amendement COM-114 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-115 sur la détention du capital d'Expertise France par l'AFD. Notre commission n'était en effet pas favorable à l'intégration d'Expertise France au sein de l'AFD : inutile d'accélérer le mouvement.
L'amendement COM-115 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-116 relatif à la participation de membres de la société civile aux conseils d'administration des établissements publics concourant à l'action extérieure de l'État : chaque organisme doit pouvoir avoir un conseil d'administration différent.
L'amendement COM-116 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-125 relatif à la fusion entre Expertise France et l'AFD, pour les mêmes raisons qu'à l'article 7.
L'amendement COM-125 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-119 est relatif aux missions d'Expertise France : il est indispensable de rappeler que ses missions de service public pourront continuer à être exercées ; Expertise France n'est pas qu'une simple extension de l'AFD.
L'amendement COM-119 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-122 relatif à l'appui d'Expertise France aux collectivités d'outre-mer. L'amendement COM-126 a le même objet, mais une rédaction moins satisfaisante : demande de retrait.
L'amendement COM-122 est adopté.
L'amendement COM-126 est retiré.
Les amendements identiques de clarification rédactionnelle COM-120 et COM-152 sont adoptés.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Demande de retrait de l'amendement COM-123 sur la question de la représentation pluraliste dans les organismes extra-parlementaires : cela est déjà prévu.
L'amendement COM-123 est retiré.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-121 instaure un représentant des collectivités territoriales au sein du conseil d'administration d'Expertise France. L'amendement COM-124 a un objet similaire : il est donc satisfait.
L'amendement COM-121 est adopté ; l'amendement COM-124 devient sans objet.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-153 apporte une clarification bienvenue sur les rôles respectifs de la commission indépendante d'évaluation et du Parlement : la commission évaluera les projets ou groupes de projets de développement, tandis que le Parlement évaluera la politique de développement. Avis favorable.
L'amendement COM-153 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Notre amendement COM-128 précise la composition de la commission indépendante d'évaluation dont les membres seraient désignés pour trois ans, sur la base d'un mandat renouvelable une fois. Les amendements COM-130 , COM-131 , COM-132 , COM-133 et COM-134 proposent des compositions différentes, donc avis défavorable.
M. Richard Yung . - Donnons-nous le temps de travailler à une position commune d'ici à la séance publique. La question de la composition exclusivement parlementaire ou non de cette instance devra être tranchée.
M. Christian Cambon , président . - Nous aurons donc ce débat en séance publique. À titre personnel, je ne suis pas favorable au fait qu'il y ait des parlementaires, mais non à une commission qui ne serait composée que de parlementaires.
L'amendement COM-128 est adopté ; les amendements COM-130, COM-131, COM-132, COM-133 et COM-134 deviennent sans objet.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Notre amendement COM-127 prévoit que la commission élabore un cadre d'évaluation dans un délai de deux ans.
L'amendement COM-127 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Il ne semble pas nécessaire d'énumérer tous les critères d'évaluation de la commission indépendante d'évaluation : avis défavorable à l'amendement COM-135 .
L'amendement COM-135 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Notre amendement COM-129 donne à la commission indépendante d'évaluation un délai de huit mois pour répondre aux demandes émanant du Parlement.
L'amendement COM-129 est adopté.
L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 9
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-136 qui crée un rapporteur spécial à l'aide publique au développement. Les commissions compétentes peuvent déjà nommer des rapporteurs et mener des travaux d'information sur l'aide publique au développement.
L'amendement COM-136 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis défavorable également à l'amendement COM-137 qui crée un office parlementaire d'évaluation de la cohérence des politiques publiques et de la transparence de l'action française en matière de développement. Les commissions sont déjà dotées de toutes les prérogatives nécessaires.
L'amendement COM-137 est retiré.
Article 10
L'article 10 est adopté sans modification.
Articles additionnels après l'article 10
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-154 qui permet de suivre l'évolution en fonds propres de l'AFD.
L'amendement COM-154 est adopté et devient article additionnel.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-138 rectifié qui instaure une obligation de vigilance, déjà prévue au rapport annexé.
L'amendement COM-138 rectifié n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-139 crée des tribunaux spéciaux pour le devoir de vigilance, qui n'ont qu'un lointain rapport avec l'objet de la présente loi : avis défavorable.
L'amendement COM-139 n'est pas adopté.
Article 11
L'article 11 est adopté sans modification.
Article 12 (nouveau)
L'amendement rédactionnel COM-140 est adopté.
L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 13 (nouveau)
L'article 13 est adopté sans modification.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-47 est relatif aux priorités de l'aide au développement. Par ailleurs, nous sommes favorables à l'amendement COM-57 sur l'égalité filles-garçons, sous réserve qu'il s'intègre à notre amendement COM-47 sous la forme d'un sous-amendement.
L'amendement COM-57, ainsi modifié, est adopté.
L'amendement COM-47 est adopté.
L'amendement rédactionnel COM-48 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-49 est relatif au pilotage des résultats.
L'amendement COM-49 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-50 réécrit l'alinéa 16 afin d'y mentionner la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Ce faisant, vous retirez la référence à la convention internationale des droits de l'enfant : je voterai contre cet incompréhensible retour en arrière !
M. Rachid Temal , rapporteur . - Nous renvoyons aux « autres instruments internationaux » : il nous a semblé préférable de ne pas lister toutes les conventions, de crainte d'en oublier certaines.
L'amendement COM-50 est adopté, ainsi que les amendements de clarification rédactionnelle COM-58 et COM-59 .
M. Rachid Temal , rapporteur . - Notre amendement COM-51 rectifié est relatif au dialogue partenarial local. Il précise que les parlementaires représentant les Français établis hors de France sont consultés et qu'une concertation avec les autres bailleurs est menée, afin d'éviter d'éventuelles redondances. L'amendement COM-82 qui apporte des précisions sur le conseil de développement est en partie satisfait par notre propre amendement. De même, l'amendement COM-60 qui traite du dialogue partenarial est également partiellement satisfait par notre amendement - à l'exception toutefois de la question des délégués consulaires.
M. Richard Yung . - Le rôle des délégués consulaires est limité aux élections sénatoriales : pourquoi les réintroduire ici ?
M. Rachid Temal , rapporteur . - Bonne question. Je vous propose de rectifier notre amendement COM-51 pour prendre en compte votre suggestion.
L'amendement COM-51, ainsi modifié, est adopté.
L'amendement COM-82 est retiré.
L'amendement COM-60 devient sans objet.
L'amendement rédactionnel COM-61 est adopté .
M. Rachid Temal , rapporteur . - Je demande le retrait de l'amendement COM-73 : le ciblage de l'aide programmable sur les pays prioritaires que nous avons adopté à l'article 1 er me semble plus pertinent.
L'amendement COM-73 est retiré.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Les critères que nous avons proposés concernant la répartition entre dons et aide programmable à destination des pays prioritaires devraient justement permettre de faire peu à peu apparaître les pays les plus pauvres dans la liste des premiers bénéficiaires de notre aide. Avis défavorable à l'amendement COM-74 .
Mme Marie-Arlette Carlotti . - Un seul pays prioritaire apparaît dans la liste des dix pays les plus aidés par la France !
L'amendement COM-74 n'est pas adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-75 apporte une précision utile sur la recherche en santé : avis très favorable.
L'amendement COM-75 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis favorable également à l'amendement COM-62 qui clarifie utilement la notion d'adaptation, en reprenant la définition qu'en donne le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC).
L'amendement COM-62 est adopté, ainsi que l'amendement de clarification rédactionnelle COM-63 .
M. Rachid Temal , rapporteur . - L'amendement COM-64 apporte une précision utile quant à la protection des militants syndicaux : avis favorable.
L'amendement COM-64 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - La contribution de la France au fonds pour l'enregistrement des naissances sera utile sur ce sujet important : avis favorable à l'amendement COM-77 .
L'amendement COM-77 est adopté.
M. Rachid Temal , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-78 sur la promotion de la santé comme bien public mondial.
L'amendement COM-78 est adopté, ainsi que l'amendement de clarification rédactionnelle COM-65 .
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-76 qui propose un ciblage de nos dons sur la santé mondiale. Il est nécessaire de conserver une certaine souplesse. Il reviendra au conseil de développement d'orienter localement l'aide vers tel ou tel secteur.
L'amendement COM-76 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-79 rectifié qui prévoit que la France promeut la signature d'un traité international sur la préparation et la riposte aux pandémies.
L'amendement COM-79 rectifié est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-80 traite d'un sujet qui n'est pas directement lié à l'aide publique au développement : avis défavorable.
L'amendement COM-80 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable à l'amendement COM-66 relatif au protocole de Cartagena, sous réserve d'une rectification.
L'amendement COM-66, ainsi modifié, est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis défavorable à l'amendement COM-71 rectifié relatif aux semences génétiquement modifiées.
L'amendement COM-71 rectifié n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Même avis concernant l'amendement COM-72 rectifié sur la mutagenèse ciblée. Le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) travaille actuellement sur les nouvelles techniques génomiques.
L'amendement COM-72 rectifié n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable aux amendements identiques COM-56 et COM-85 sur la comptabilisation des biens mal acquis.
Les amendements COM-56 et COM-85 sont adoptés.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Mon amendement COM-52 renforce le pilotage par le ministre chargé du développement. L'amendement COM-81 a le même objet : il sera donc satisfait par l'adoption de notre amendement.
L'amendement COM-81 est retiré.
L'amendement COM-52 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'action de l'AFD est évaluée à l'aune de plus d'une centaine d'objectifs. Notre amendement COM-53 met en cohérence ces objectifs - et les indicateurs qui lui sont associés - au sein du seul contrat d'objectifs et de moyens. L'atteinte de ces objectifs sera appréciée annuellement par le biais d'une revue stratégique réalisée par les ministres chargés du développement et des finances.
L'amendement COM-53 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Avis favorable aux amendements identiques COM-83 et COM-84 sur la composition du conseil local de développement. L'amendement COM-67 serait partiellement satisfait par ces deux amendements ; mais il retire aussi la mention des élus locaux et des délégués consulaires. Avis favorable sous réserve de sa rectification.
Les amendements COM-83 et COM-84 sont adoptés.
L'amendement COM-67, ainsi modifié, est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-70 sur la subsidiarité dans l'adoption des projets de l'AFD ne relève pas de la loi. Nous pourrons néanmoins avoir cette discussion sur la gouvernance de l'AFD avec le ministre en séance. Avis défavorable.
L'amendement COM-70 n'est pas adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Notre amendement COM-54 ajoute l'opérateur France Volontaires à la liste des opérateurs de l'État contribuant à l'aide publique au développement.
L'amendement COM-54 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - Notre amendement COM-55 précise que l'augmentation des moyens de l'aide publique au développement devra permettre de développer le volontariat international, afin que l'offre de missions corresponde à la demande croissance d'engagement.
L'amendement COM-55 est adopté.
M. Hugues Saury , rapporteur . - L'amendement COM-68 apporte une précision utile sur les fonds européens : avis favorable.
L'amendement COM-68 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination COM-156 ; l 'amendement COM-155 devient sans objet.
L'amendement rédactionnel COM-69 est adopté.
Le rapport annexé est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
TITRE I er : DISPOSITIONS RELATIVES AUX OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT SOLIDAIRE ET DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS MONDIALES ET À LA PROGRAMMATION FINANCIÈRE |
|||
Article 1 er A (nouveau) |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
1 |
Priorités politique de développement solidaire |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
6 |
Cohérence des politiques publiques |
Rejeté |
M. CANEVET |
5 |
Francophonie |
Adopté avec modification |
M. YUNG |
4 |
Égalité filles/garçons |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
7 |
Autres objectifs de la politique de développement solidaire |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
8 |
Droit à une identité juridique |
Rejeté |
M. GONTARD |
11 |
Droits des peuples autochtones |
Rejeté |
M. GONTARD |
12 rect. |
Égalité filles/garçons |
Adopté |
M. GONTARD |
13 |
Précision rédactionnelle |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
2 |
Répondre besoins populations |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
9 |
Principe de non-discrimination |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
3 |
Biodiversité Aichi |
Adopté |
M. GONTARD |
14 |
Principe de cohérence |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
10 |
Vaccin bien public mondial |
Rejeté |
Article 1 er |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
15 rect. |
Programmation 2022-2025 |
Adopté |
M. REQUIER |
141 |
Rôle du Parlement |
Adopté |
M. REQUIER |
142 |
Programmation financière |
Rejeté |
M. COZIC |
24 rect. |
Trajectoire financière |
Satisfait ou sans objet |
Mme GRÉAUME |
23 |
Atteinte des 0,7 % du RNB |
Satisfait ou sans objet |
M. GONTARD |
36 |
Objectif des 0,7 % du RNB |
Satisfait ou sans objet |
M. GONTARD |
37 |
Trajectoire financière |
Satisfait ou sans objet |
M. COZIC |
25 rect. |
Trajectoire financière |
Satisfait ou sans objet |
M. GONTARD |
38 |
?Trajectoire financière |
Satisfait ou sans objet |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
16 |
60 % de la TTF va au FSD |
Adopté |
M. YUNG |
21 |
TSBA |
Satisfait ou sans objet |
M. TEMAL |
26 rect. bis |
TTF à 60 % |
Satisfait ou sans objet |
M. REQUIER |
143 |
Suppression alinéa |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
27 |
Précision sur le CPG |
Retiré |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
19 rect. |
Rapport aide bi/multi |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
17 rect. |
Équilibre prêts/dons |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
18 |
Concentration APP pays prioritaires |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
28 |
Dons à 85 % |
Retiré |
Mme CARLOTTI |
31 |
Aide aux services sociaux |
Rejeté |
M. GONTARD |
39 |
Objectif pour les pays prioritaires |
Rejeté |
M. GONTARD |
40 |
Objectif de dons |
Rejeté |
M. GONTARD |
43 rect. |
Égalité F/H |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
29 |
Aide au développement aux PMA |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
30 |
30 % APD vers pays prioritaires |
Rejeté |
M. VALLINI |
32 |
Augmentation de l'APD dédiée à l'éducation |
Rejeté |
M. REQUIER |
144 |
Suppression alinéa 11 |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
20 |
Rédactionnel |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
33 rect. |
Aide transitant par les organisations de la société civile |
Adopté avec modification |
M. GONTARD |
41 |
Moyens transitant par les OSC |
Rejeté |
M. SIDO |
34 |
Suspension du pacte de Cahors pour les dépenses d'APD des collectivités territoriales |
Adopté |
M. YUNG |
22 rect. |
Précisions sur la base de données |
Adopté |
M. GONTARD |
42 |
Contenu de la base de données |
Retiré |
M. SUEUR |
44 |
Biens mal acquis |
Adopté |
M. SUEUR |
45 |
Rédactionnel |
Adopté |
M. SUEUR |
46 |
Transparence biens mal acquis |
Adopté |
M. YUNG |
35 |
Précisions biens mal acquis |
Adopté |
M. REQUIER |
145 |
Biens mal acquis |
Adopté |
Rapport annexé |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
47 |
Priorités de l'aide |
Adopté |
M. YUNG |
57 |
Égalité filles/garçons |
Adopté avec modification |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
48 |
Rédactionnel |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
49 |
Pilotage par les résultats |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
50 |
DUDH |
Adopté |
M. YUNG |
58 |
Rédactionnel |
Adopté |
M. YUNG |
59 |
Clarification rédactionnelle |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
51 rect. |
Dialogue partenarial local |
Adopté avec modification |
Mme CARLOTTI |
82 |
Précision sur le conseil de développement |
Retiré |
M. YUNG |
60 |
Dialogue partenarial |
Satisfait ou sans objet |
M. YUNG |
61 |
Rédactionnel |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
73 |
Concentration sur les pays pauvres |
Retiré |
Mme CARLOTTI |
74 |
Accroissement de la liste des pays prioritaires |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
75 |
Précision sur la recherche en santé |
Adopté |
M. YUNG |
62 |
Définition de l'adaptation |
Adopté |
M. YUNG |
63 |
Améliorations rédactionnelles |
Adopté |
M. YUNG |
64 |
Protection des militants syndicaux |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
77 |
Contribution de la France au fonds pour l'enregistrement des naissances. |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
78 |
Priorité santé |
Adopté |
M. YUNG |
65 |
Améliorations rédactionnelles |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
76 |
Ciblage santé |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
79 rect. |
Vaccin bien public mondial |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
80 |
Accord ADPIC |
Rejeté |
M. YUNG |
66 |
Protocole de Cartagena |
Adopté avec modification |
M. FOLLIOT |
71 rect. |
Autorisation des semences génétiquement modifiées |
Rejeté |
M. FOLLIOT |
72 rect. |
Mutagénèse ciblée |
Rejeté |
M. SUEUR |
56 |
Comptabilisation restitution biens mal acquis |
Adopté |
M. YUNG |
85 |
Biens mal acquis |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
52 |
Renforcement pilotage |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
81 |
Renforcement ministre en charge du développement |
Retiré |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
53 |
Renforcement COM AFD |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
83 |
Composition conseil local de développement |
Adopté |
M. SIDO |
84 |
Membres conseil local de développement |
Adopté |
M. YUNG |
67 |
Conseil local du développement |
Adopté avec modification |
M. CANEVET |
70 |
Subsidiarité projets AFD |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
54 |
Mention de France Volontaires |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
55 |
Volontariat |
Adopté |
M. YUNG |
68 |
Précision sur les fonds européens |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
156 |
Coordination |
Adopté |
M. REQUIER |
155 |
Coordination |
Satisfait ou sans objet |
M. YUNG |
69 |
Rédactionnel |
Adopté |
Article(s) additionnel(s) après Article 1 er |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Mme GRÉAUME |
86 |
Biens mal acquis |
Rejeté |
Mme GRÉAUME |
87 |
Affectation de la TTF à l'AFD |
Retiré |
Mme CARLOTTI |
89 |
Obligation de vigilance |
Rejeté |
Article 2 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. REQUIER |
146 |
Date remise rapport |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
104 |
Transmission du rapport au CESE |
Adopté avec modification |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
91 |
Clarification |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
90 |
Comparaison avec flux financiers privés |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
100 |
Répartition de l'APD entre prêts et dons |
Retiré |
M. REQUIER |
147 |
Volume des engagements de l'AFD |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
92 |
Répartition prêts/dons |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
101 |
Répartition entre prêts et dons |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
102 |
Participation de la France au Fonds pour l'agenda sur l'identité juridique de l'ONU |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
93 |
Perception/communication sur l'APD |
Adopté |
M. REQUIER |
148 |
Communication/perception |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
94 |
Rédactionnel |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
95 |
Coordination 3D |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
103 |
Transparence et traçabilité de l'APD |
Retiré |
Mme GRÉAUME |
96 |
Application par la France du droit international |
Rejeté |
Mme GRÉAUME |
97 |
Compatibilité entre l'APD et la diplomatie économique |
Rejeté |
Mme GRÉAUME |
98 |
Compatibilité de l'APD avec les accords de libre-échange |
Rejeté |
Mme GRÉAUME |
99 |
Conséquences des conventions fiscales sur les pays bénéficiant de l'APD |
Rejeté |
M. REQUIER |
149 |
Débat parlementaire annuel |
Rejeté |
Article(s) additionnel(s) après Article 2 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Mme CARLOTTI |
88 rect. |
Rôle de la société civile |
Adopté |
TITRE II : DISPOSITIONS NORMATIVES INTÉRESSANT LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT SOLIDAIRE ET DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS MONDIALES |
|||
Article 3 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
105 |
« Nouveaux indicateurs de richesse » |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
106 |
Rédactionnel |
Adopté |
Article 4 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. YUNG |
107 |
Prise en compte de l'Agenda 2030 dans le cadre de l'action extérieure des collectivités territoriales |
Rejeté |
Article 4 bis (nouveau) |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
108 |
Suppression |
Adopté |
M. YUNG |
109 |
Suppression de l'article |
Adopté |
Article 5 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
110 |
Nomination de parlementaires au CNDSI |
Adopté |
M. REQUIER |
150 |
Nominations de parlementaires au CNDSI |
Adopté |
Article 6 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
111 |
Agrément GIP / VSI |
Adopté |
Article 7 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
112 |
Clarification missions AFD |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
113 |
Parlementaires au CA de l'AFD |
Adopté |
M. REQUIER |
151 |
Parlementaires à l'AFD |
Adopté |
M. GONTARD |
117 |
Membres du CA de l'AFD |
Rejeté |
M. GONTARD |
118 |
Parité CA de l'AFD |
Rejeté |
M. YUNG |
114 |
Lettre d'objectifs DG AFD |
Adopté |
M. CANEVET |
115 |
Détention du capital d'EF par l'AFD |
Rejeté |
Mme CARLOTTI |
116 |
Participation membres société civile |
Rejeté |
Article 8 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. CANEVET |
125 |
Fusion AFD/EF |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
119 |
Missions d'Expertise France |
Adopté |
M. YUNG |
122 |
Appui d'EF aux collectivités d'Outre-mer |
Adopté |
Mme CARLOTTI |
126 |
Action d'EF pour les collectivités. |
Retiré |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
120 |
Composition du CA d'EF |
Adopté |
M. REQUIER |
152 |
Parlementaires EF |
Adopté |
M. YUNG |
123 |
Représentation pluraliste OEP |
Retiré |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
121 |
Représentant collectivités territoriales à EF |
Adopté |
M. YUNG |
124 |
Composition du CA d'EF |
Satisfait ou sans objet |
Article 9 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. REQUIER |
153 |
Rôle de la commission |
Adopté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
128 |
Composition commission d'évaluation |
Adopté |
M. YUNG |
130 |
Composition de la commission d'évaluation |
Satisfait ou sans objet |
M. CANEVET |
131 |
Placement de la commission d'évaluation auprès du Sénat |
Satisfait ou sans objet |
Mme GRÉAUME |
132 |
Composition de la commission indépendante |
Satisfait ou sans objet |
M. GONTARD |
133 |
Composition de la commission : deux députés et deux sénateurs |
Satisfait ou sans objet |
M. GONTARD |
134 |
Composition commission article 9 |
Satisfait ou sans objet |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
127 |
Élaboration cadre d'évaluation |
Adopté |
M. GONTARD |
135 |
Missions de la commission d'évaluation |
Rejeté |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
129 |
Droit de tirage Parlement |
Adopté |
Article(s) additionnel(s) après Article 9 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Mme GRÉAUME |
136 |
Création d'un rapporteur spécial à l'APD |
Rejeté |
Mme GRÉAUME |
137 |
Création d'un office parlementaire d'évaluation de la cohérence des politiques publiques et la transparence de l'action française en matière de développement |
Retiré |
TITRE III : DISPOSITIONS DIVERSES |
|||
Article(s) additionnel(s) après Article 10 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. REQUIER |
154 |
Fonds propres AFD |
Adopté |
M. GONTARD |
138 rect. |
Obligation de vigilance |
Rejeté |
M. GONTARD |
139 |
Tribunaux spéciaux pour le devoir de vigilance |
Rejeté |
Article 12 (nouveau) |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
MM. SAURY et TEMAL, rapporteurs |
140 |
Rédactionnel/coordination |
Adopté |
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 32 ( * ) .
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 33 ( * ) .
Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 34 ( * ) .
Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 35 ( * ) .
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
Le texte du projet de loi relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales comporte des dispositions relatives :
- À l'ensemble des aspects de la politique française de développement solidaire et de lutte contre les inégalités internationale, d'aide publique au développement, d'évaluation et de contrôle de cette politique ;
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS
Mardi 9 mars 2021
Coordination Sud : Mmes Elvira RODRIGUEZ ESCUDEIRO , Responsable financements institutionnels, Bettina PETIT , Responsable de plaidoyer, Laura AUDOUARD , Chargée de plaidoyer, MM. Louis-Nicolas JANDEAUX , Chargé de plaidoyer Aide publique au développement, dette des pays du sud, Valentin BROCHARD , Chargé de mission.
Jeudi 18 mars 2021
Audition en commun avec la commission des Finances :
- Direction générale du Trésor : MM. Christophe BORIES , Sous-directeur des affaires financières multilatérales et du développement (Multifin), Paul TEBOUL , Chef du bureau Multifin 2, Mme Virginie GALLERAND , Cheffe du bureau Multifin 5 ;
- Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) : M. Michel EDDI , Président-Directeur général, Mmes Élisabeth CLAVERIE DE SAINT MARTIN , Directrice générale déléguée à la recherche et à la stratégie, Émilie KLANDER , Déléguée aux affaires publiques.
Mardi 23 mars 2021
- Banque mondiale : M. Mario SANDER , Représentant spécial et directeur pour l'Europe, Mme Cristina MEJIA , Conseillère principale pour la France.
Jeudi 25 mars 2021
- Ministère de l'Europe et des affaires étrangères, Direction général de la mondialisation : MM. Philippe LACOSTE , Directeur du développement durable, Aymeric CHUZEVILLE , Sous-directeur du développement ;
- Ministère de l'action et des comptes publics : M. Morgan LARHANT , Sous-directeur de l'action extérieure de l'État de l'aide publique au développement, des prêts à des États étrangers et de l'agriculture de la direction du Budget.
Mardi 30 mars 2021
- France Volontaires : MM. Jacques GODFRAIN , Président, Yann DELAUNAY , Délégué général ;
- Cour des comptes : MM. Pierre MOSCOVICI , Premier président, Yves ROLLAND , Conseiller maître, Paul SERRE , Secrétaire général adjoint, Mme Justine BONIFACE , Chargée de mission du Premier président ;
- Cités unies France (CUF) : Mme Geneviève SEVRIN , Directrice générale ;
- CLONG-Volontariat : MM. Olivier LAGARDE , directeur du Service de coopération au développement (SCD) et membre du bureau, Guillaume NICOLAS , Vice-président, délégué général de la Délégation catholique pour la Coopération (DCC), Sébastien RADISSON , coordinateur.
Mercredi 31 mars 2021
- La Ferdi : M. Patrick GUILLAUMONT, Professeur, Président , Mme Sylviane GUILLAUMONT, Professeur émérite , conseiller spécial ;
- Direction des Affaires criminelles et des grâces (DACG) : M. Manuel RUBIO-GULLON , sous-directeur de la négociation et de la législation pénales, Mme Sarah OLIVIER , adjointe au chef du bureau de la législation pénale spécialisé.
Jeudi 8 avril 2021
- Ministère de l'Europe et des affaires étrangères : Mme Christine MORO , Ambassadrice déléguée à la coopération décentralisée du ministère de l'Intérieur, direction de l'action extérieure des collectivités territoriales (DAECT);
- Institut de recherche pour le développement (IRD) : Mme Corinne BRUNON-MEUNIER , Directrice générale déléguée ;
- Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD) : M. André VIOLA , Vice-président.
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl20-404.html
* 1 L'APP ne comprend pas les dépenses « non pilotables » de l'APD telles que les dépenses pour les réfugiés dans le pays de destination, les dépenses pour les étudiants étrangers, ou encore les allègements de dettes.
* 2 Notamment, la moitié des dons-projets de l'Etat et les deux tiers des subventions de l'AFD doivent être destinés aux 19 pays prioritaires.
* 3 Cette étude est basée sur un calcul en année N sur la base des décaissements de l'année N-1.
* 4 OCDE, janvier 2019.
* 5 Loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.
* 6 Loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.
* 7 Mme Gro Harlem Brundtland, Premier Ministre norvégien (1987).
* 8 Rapport de Joseph Stiglitz, Amartya Sen et Jean-Paul Fitoussi en date du 15 septembre 2009. La création de la Commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social (CMPEPS) a été décidée au début de 2008 par le Président de la République, en réponse aux interrogations sur la pertinence des mesures actuelles de la performance économique, notamment celles fondées sur les chiffres du Produit intérieur brut (PIB).
* 9 Rapport disponible sur le site de France Stratégie .
* 10 Ce rapport, publié le 28 février 2019, est disponible sur le site internet du gouvernement .
* 11 Décret n° 2011-687 du 17 juin 2011 relatif au rapport sur la situation en matière de développement durable dans les collectivités territoriales.
* 12 Rapport n° 362 (2014-2015) de M. Antoine LEFÈVRE, fait au nom de la commission des finances, déposé le 25 mars 2015.
* 13 Séance du 2 avril 2015.
* 14 Loi n° 2007-147 du 2 février 2007 relative à l'action extérieure des collectivités territoriales et de leurs groupements. Auparavant, la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République est la première à avoir fourni un cadre juridique à la « coopération décentralisée ».
* 15 Loi n° 2005-95 du 9 février 2005 relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l'eau dans les domaines de l'alimentation en eau et de l'assainissement.
* 16 Loi n°2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie.
* 17 « Dans le respect des engagements internationaux de la France et dans le cadre de conventions soumises à l'avis du comité de bassin, l'agence peut mener des actions de coopération internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, dans la limite de 1 % de ses ressources, le cas échéant et suivant les règles statutaires en vigueur pour chaque catégorie de personnels, avec le concours de ses agents. »
* 18 Loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.
* 19 Données issues du rapport annuel 2019 sur l'Aide publique au développement des collectivités territoriales françaises (MEAE).
* 20 Bilan 2019 de l'action extérieure des collectivités territoriales et des agences de l'eau dans le domaine de l'eau et de l'assainissement, programme Solidarité-Eau (pS-Eau).
* 21 D'après pS-Eau
* 22 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.
* 23 Le Versement mobilité, qui succède au Versement transport, est un impôt payé par les entreprises de 11 salariés et plus, dont l'assiette est constituée des revenus d'activité (masse salariale), dans les conditions fixées par les articles L. 2333-64 et suivants du CGCT.
* 24 Observatoire de la mobilité de l'Union des transports publics et ferroviaires UTP (2020).
* 25 Loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale
* 26 Décret n° 2020-1756 du 30 décembre 2020 portant modification du décret n° 2013-1154 créant un Conseil national du développement et de la solidarité internationale.
* 27 Loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.
* 28 Loi n° 2018-699 du 3 août 2018 visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination.
* 29 Le VSI est nécessairement accompli dans un État situé hors de l'Union européenne et de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein, Norvège).
* 30 « Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. » (article 1137 du code civil).
* 31 Ce sujet est traité dans le commentaire de l'article 8 relatif à Expertise France.
* 32 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 33 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 34 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique .
* 35 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.