EXAMEN DES ARTICLES
Article
1er
Ratification de l'ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021
portant réforme de la formation des élus locaux
L'article 1 er du projet de loi tend à ratifier l'ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux.
Constatant que l'ordonnance a outrepassé le champ de l'habilitation consentie par le Parlement, mais consciente de la nécessité de mener à bien une réforme attendue, la commission a adopté l'article sans modification.
1. Une ordonnance qui constitue le volet législatif d'une réforme bienvenue
L'ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux comporte vingt articles. Elle fixe le cadre général de la réforme, dont l'ordonnance n° 2021-71 du 27 janvier 2021 constitue la déclinaison en Nouvelle-Calédonie. Composée de quatre titres, elle vise trois objectifs :
- faciliter l'exercice par les élus locaux de leurs droits à la formation ;
- garantir la soutenabilité financière du fonds de financement du droit individuel à la formation des élus locaux (DIFE) ;
- améliorer la qualité des formations dispensées aux élus locaux en renforçant le contrôle des organismes de formation.
Le titre I er entend faciliter l'accès à la formation pour les élus locaux. À cet effet, les articles 1 er à 5 tendent à ouvrir la possibilité de cofinancements, par les collectivités territoriales 16 ( * ) , de formations accessibles aux élus au titre de leur droit individuel à la formation . L'article 6 prévoit :
- la comptabilisation des droits, non plus en heures, mais en euros ;
- la possibilité pour un élu de cofinancer des formations éligibles au DIFE au moyen de droits acquis au titre de son compte personnel d'activité 17 ( * ) , ou par un apport personnel « augmentant les sommes engagées au titre de son droit individuel à la formation » ;
- la suppression de la possibilité de cumul pluriannuel des droits.
L'article 7 prévoit enfin un dispositif de mutualisation, à l'échelle intercommunale, de la formation des élus municipaux . Ce dispositif serait décliné en deux volets :
- d'une part, le transfert de la compétence dont disposent les communes en matière de formation de leurs élus serait encouragé . Ce transfert, dont la possibilité est ouverte depuis 2002 18 ( * ) , serait favorisé par l'obligation pour les conseils municipaux de délibérer, dans les six mois suivant leur installation après le renouvellement général, sur son principe. L'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre serait également incité à se voir transférer une telle compétence par une délibération obligatoire sur ce sujet devant intervenir dans les neuf mois suivant le renouvellement général des conseils municipaux ;
- d'autre part, à défaut d'un tel transfert, il serait désormais prévu un mécanisme souple permettant à l'EPCI à fiscalité propre de se saisir de « l'opportunité de proposer des outils communs visant à développer la formation liée à l'exercice du mandat des élus des communes membres ».
Le titre II de l'ordonnance n° 2021-45 vise à « moderniser et renforcer la gouvernance de la formation des élus ». Son article 8 prévoit, à titre principal, le principe et les modalités de l'équilibre financier du fonds , y compris en ouvrant la possibilité à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) de consentir une avance de trésorerie au fonds 19 ( * ) . L'article 9 précise les attributions de la CDC , en tant que gestionnaire du fonds, notamment en ce qui concerne l'accès des élus à leurs droits par le service dématérialisé « mon compte formation ». Les articles 10 et 11 tendent à renforcer les pouvoirs du conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL), désormais doté d'un rôle de régulation plus actif du marché, et à créer auprès de lui un conseil d'orientation à même d'assurer la représentation, dans cette gouvernance repensée, des organismes de formation.
Le titre III de l'ordonnance n° 2021-45 a pour objet de « garantir la transparence et la qualité des formations ». Il renforce en particulier les procédures d'agrément, de contrôle et, le cas échéant, de sanction applicables aux organismes de formation . Il vise en particulier à aligner ces procédures de contrôle sur celles ayant cours pour les organismes de formation de droit commun et à supprimer l'agrément de droit dont disposaient les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE).
Enfin, le titre IV, qui comprend diverses mesures transitoires, a pour principal objet de prévoir, à son article 18, que « les élus locaux peuvent utiliser les droits individuels à la formation comptabilisés en heures qu'ils détiennent (...) sous cette forme dans la limite d'un délai » courant jusqu'au 22 juillet 2021 20 ( * ) .
2. La position de la commission : bien qu'outrepassant le champ de son habilitation, une ordonnance dont la ratification s'impose
L'habilitation consentie par le Parlement au Gouvernement pour légiférer par voie d'ordonnances était relativement large.
Le champ de l'habilitation à
légiférer par ordonnances,
tel que défini par
l'article 105 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019
relative à l'engagement dans la vie locale et la proximité de
l'action publique
« Afin d'améliorer les conditions d'exercice des mandats et de renforcer les compétences des élus locaux pour les exercer, le Gouvernement est habilité, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnances, dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi, toutes dispositions relevant du domaine de la loi visant à :
« 1° Permettre aux élus locaux de bénéficier de droits individuels à la formation professionnelle tout au long de la vie et d'accéder à une offre de formation plus développée, en mettant en place un compte personnel de formation analogue à celui mis en place dans le cadre des dispositions de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel relatives au compte personnel d'activité et en assurant la portabilité des droits avec les comptes personnels de formation des secteurs public et privé ;
« 2° Faciliter l'accès des élus locaux à la formation, tout particulièrement lors de leur premier mandat, et clarifier les différents dispositifs de formation des élus locaux selon qu'ils sont ou non liés à l'exercice du mandat ;
« 3° Définir un référentiel unique de formation en s'adaptant aux besoins des élus locaux, en garantissant une offre de formation accessible dans les territoires et mutualiser le financement entre les collectivités et leurs établissements publics de coopération intercommunale ;
« 4° Assurer la transparence et la qualité des dispositifs de formation et renforcer le contrôle exercé sur les organismes de formation des élus locaux, en particulier s'ils sont liés à un parti politique. »
Le champ de cette habilitation a néanmoins été outrepassé par certaines dispositions de l'ordonnance . En particulier, les dispositions relatives à l'équilibre financier du fonds DIFE ne semblent pas entrer dans le champ de l'ordonnance, de même que les dispositions relatives aux prérogatives de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) en tant que gestionnaire du fonds.
La commission des lois ne peut que regretter la liberté dont a cru pouvoir faire usage le pouvoir réglementaire , rendant ces mesures illégales. Ce faisant, le pouvoir réglementaire fragilise juridiquement une réforme dont la nécessité est pourtant indiscutée .
Néanmoins, constatant que les mesures prévues par l'ordonnance n° 2021-45 contribuent à l'assainissement financier et à l'amélioration des dispositifs de formation des élus locaux , la commission des lois a adopté cet article de ratification sans modification.
La commission a adopté l'article 1 er sans modification .
Article 1er bis (nouveau)
Correction d'une erreur matérielle
L'article 1 er bis , ajouté par la commission à l'initiative de la rapporteure 21 ( * ) , corrige une erreur matérielle dans l'intitulé du titre IV de l'ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021.
La commission a adopté l'article 1 er bis ainsi rédigé .
Article 1er ter (nouveau)
Cumul du droit individuel à la formation sur toute la durée
du mandat
Ajouté en commission à l'initiative de la rapporteure, l'article 1 er ter rétablit la possibilité du cumul du droit individuel à la formation des élus (DIFE) sur toute la durée du mandat.
1. L'ordonnance n° 2021-45 supprime la possibilité d'un cumul pluriannuel des droits à la formation des élus locaux
Avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2021-45, les élus locaux pouvaient, sur toute la durée de leur mandat, cumuler leurs droits individuels à la formation comptabilisés en heures. Les articles L. 2123-12-1, L. 3123-10-1, L. 4135-10-1, L. 7125-12-1 et L. 7227-12-1 du code général des collectivités territoriales prévoyaient ainsi qu'il était octroyé aux élus concernés un crédit « d'une durée de vingt heures, cumulable sur toute la durée du mandat ». Ces dispositions permettaient donc d'accumuler un capital d'heures de formation, en particulier dans la perspective de la fin de mandat et d'une reconversion professionnelle.
L'article 6 de l'ordonnance n° 2021-45 rompt avec cette logique, en ne prévoyant pas explicitement que les montants de droits acquis par les élus, désormais décomptés en euros, seraient cumulables. Il revient donc à supprimer la possibilité pour les élus locaux concernés de cumuler leurs droits individuels à la formation sur la durée de leur mandat .
La rapporteure a estimé qu'une telle suppression posait une double difficulté. Premièrement, elle se traduirait dans les faits par un amoindrissement mécanique de l'exercice effectif des droits à la formation par les élus locaux : sauf à consommer chaque année l'ensemble des droits qu'ils acquièrent, les élus concernés perdraient chaque année la portion de leurs droits qu'ils n'ont eu ni le temps ni l'opportunité de consommer. Un tel cas paraît d'autant plus envisageable que les élus, en particulier dans les communes de petite taille, ont d'ores et déjà des difficultés à se former, en raison notamment des fortes contraintes horaires imposées par leur mandat. La suppression du cumul des droits est donc dommageable, en ce qu'elle prive les élus qui en ont potentiellement le plus besoin de l'accès à une part de leurs droits. Au demeurant, l'accumulation de ces droits peut d'autant mieux se prêter à l'exercice de certaines formations, celles relatives à la reconversion professionnelle pouvant, en particulier, être coûteuses et être dispensées sur plusieurs mois.
Deuxièmement, le choix retenu par le Gouvernement pour les élus locaux apparait peut cohérent avec le cumul - plafonné 22 ( * ) - des droits à la formation ouvert aux salariés et fonctionnaires disposant d'un compte personnel de formation (CPF). Par souci de cohérence avec les dispositions préexistantes en matière de formation professionnelle et faute d'une différence objective de situation 23 ( * ) motivant un traitement juridique distinct, la rapporteure a estimé injustifié de prévoir des modalités de décompte des droits à la formation des élus dérogatoires par rapport au droit commun de la formation professionnelle .
2. La position de la commission : rétablir le principe du cumul dans le respect de l'équilibre financier
En conséquence, la commission a souhaité rétablir le cumul des droits à la formation des élus sur toute la durée du mandat afin de leur permettre d'utiliser leurs droits acquis sur plusieurs années .
Toutefois, consciente de la nécessité de trouver un équilibre entre la préservation des droits des élus à la formation et le nécessaire assainissement budgétaire du fonds de financement du DIFE, ce cumul des droits s'exercerait dans le respect du principe d'équilibre financier posé par l'article 8 de l'ordonnance n° 2021-45.
La commission a adopté l'article 1 er ter ainsi rédigé .
Article 1er quater (nouveau)
Cofinancement des formations éligibles au DIFE
Ajouté en commission à l'initiative de la rapporteure, l'article 1 er quater élargit les possibilités de cofinancement déjà ouvertes par l'ordonnance n° 2021-45.
1. De nouveaux dispositifs de cofinancement des formations des élus locaux bienvenus
Les articles 1 er à 6 de l'ordonnance n° 2021-45 prévoient des dispositifs de cofinancement des formations éligibles au titre du droit individuel à la formation des élus locaux (DIFE).
Ces modifications du droit en vigueur répondent directement aux objectifs fixés par le Parlement dans l'habilitation consentie au Gouvernement de légiférer par ordonnances . L'article 105 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique prévoyait ainsi que les ordonnances devaient permettre d'« assur[er] la portabilité des droits avec les comptes personnels de formation des secteurs public et privé ».
Désormais, deux modalités de cofinancement des formations éligibles au DIFE seraient prévues :
- d'une part, serait assurée la portabilité des droits de l'élu sur son compte personnel de formation (CPF) pour financer des formations visant à la reconversion professionnelle. Dès lors, les élus locaux pourraient effectuer des abondements complémentaires issus de leur CPF lorsque le montant de leurs droits comptabilisés en euros au titre du DIFE sera insuffisant pour financer une formation tant à l'exercice de leur mandat qu'à leur reconversion professionnelle ;
- d'autre part, les collectivités territoriales qui le souhaitent pourraient abonder le compte DIFE d'un élu afin de financer une formation éligible au titre de l'exercice du mandat comme de la reconversion professionnelle 24 ( * ) .
Dans la rédaction actuelle de l'ordonnance, les possibilités d'abondements complémentaires du DIFE par les collectivités territoriales seraient encadrées par la nécessité d'une délibération des collectivités afin de fixer en particulier le montant, le type et le nombre de formations ainsi cofinancées. Lors des auditions conduites par la rapporteure, l'hypothèse d'une suppression de cette délibération a été évoquée. Elle viserait à fluidifier les abondements des collectivités territoriales au fonds de financement du DIFE et, ainsi, à améliorer ses perspectives financières.
Une telle évolution n'a néanmoins pas été retenue par la commission, car elle reviendrait à induire une confusion entre deux systèmes répondant à deux logiques distinctes : le DIFE permet aux élus locaux de financer leurs formations indépendamment du programme de formation porté par leur collectivité d'appartenance ; le dispositif de formation issu de la loi du 3 février 1992, qui est financé par les collectivités territoriales, doit permettre à ces dernières de définir les formations qu'elles souhaitent financer pour leurs élus. La suppression de la délibération qui permet à la collectivité territoriale contributrice de définir un programme de formation reviendrait ainsi à installer une confusion dommageable entre deux systèmes qui ont vocation à être complémentaires 25 ( * ) .
2. La position de la commission : clarifier ces dispositifs de cofinancement et élargir les possibilités d'abondements complémentaires
La commission a salué la portabilité nouvelle des droits à la formation des élus locaux avec le compte personnel de formation (CPF), inscrite à l'article 6 de l'ordonnance n° 2021-45. En cette matière, l'ordonnance remplit ainsi l'un des objectifs de l'habilitation consentie au Gouvernement par le Parlement.
La commission a néanmoins souhaité préciser les modalités de ces abondements complémentaires pour assurer la complémentarité des sources de financement sans qu'elles ne traduisent une réduction du montant du DIFE. La commission a en conséquence, par l'adoption d'un amendement COM-15 de sa rapporteure, préservé la spécificité du dispositif du DIFE, qui obéit à une logique de financement et à un droit particuliers, qui ne sauraient être remis en cause par des abondements complémentaires aux logiques financières distinctes. La commission a, en outre, précisé que ces possibilités d'abondements multiples ne pouvaient être utilisées qu'à la demande de l'élu local afin de préserver la liberté des élus dans l'exercice de leur DIFE .
Enfin, la commission a souhaité prolonger la logique de cofinancement dont témoigne l'ordonnance n° 2021-45. Par l'adoption du même amendement COM-15 de sa rapporteure , la commission a étendu les possibilités d'abondement complémentaires à des personnes publiques telles que l'État, Pôle emploi ainsi que d'autres collectivités territoriales . Elle a toutefois désiré limiter ces nouveaux dispositifs de co-financement aux seules formations assurant la reconversion professionnelle des élus .
La commission a adopté l'article 1 er quater ainsi rédigé .
Articles 1er quinquies, 1er sexies
et 1er septies (nouveaux)
Modalités de garantie de l'équilibre
financier du fonds DIFE
Ajoutés en commission à l'initiative de la rapporteure, les articles 1 er quinquies , 1 er sexies et 1 er septies tendent à encadrer les modalités de rétablissement de l'équilibre financier du fonds DIFE.
1. Une ordonnance accordant de larges prérogatives au ministre en charge des collectivités territoriales en cas de déséquilibre financier
1.1. La nécessaire garantie d'un équilibre financier
La dégradation rapide de l'équilibre financier du fonds DIFE est l'une des principales justifications de la réforme dont l'ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux constitue le cadre.
En effet, l'incapacité pour le fonds d'assurer le service des prestations auxquelles les élus ont droit pose à terme une double difficulté :
- pour les élus , elle pose la question de la pérennité de l'accès à leur droit individuel à la formation : l'exercice d'un droit qui n'est pas financé court nécessairement le risque de devenir caduc ;
- pour les organismes de formation , dont le modèle économique dépend de la ressource que constitue le fonds de financement du DIFE. L'État ne pouvant laisser perdurer indéfiniment un système structurellement déficitaire et financé sur fonds publics, il pourrait faire le choix d'y mettre fin, ce qui priverait les organismes de formation concernés d'une ressource essentielle.
1.2. Les dispositions prévues par l'ordonnance n° 2021-45 octroient à l'État de larges prérogatives pour garantir cet équilibre
En conséquence, l'article 8 de l'ordonnance n° 2021-45 prévoit divers mécanismes permettant à l'État de garantir l'équilibre financier du DIFE.
En premier lieu, il inscrit dans la loi le principe de l'équilibre financier du fonds de financement du DIFE , ce qui a pour effet de contraindre l'État à garantir cet équilibre. En deuxième lieu, il prévoit un dispositif d'intervention en cas de déficit ponctuel : la Caisse des dépôts et consignations (CDC), gestionnaire du fonds, pourrait consentir des avances au fonds « afin de répondre à un besoin de trésorerie », dans le cadre d'une convention conclue avec l'État. Enfin, une procédure de rétablissement de l'équilibre , associant le conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL), est prévue pour assurer la traduction concrète de l'exigence d'équilibre :
- tenu informé « régulièrement de la situation financière du fonds » par la CDC 26 ( * ) , le CNFEL serait en mesure de constater que « l'équilibre financier du fonds est susceptible d'être compromis » ;
- il serait alors tenu de formuler des propositions à même de rétablir cet équilibre, qui porteraient sur trois paramètres : la valeur des droits que les élus acquièrent, le montant de leurs cotisations ou les conditions de prise en charge des formations ;
- ces propositions seraient transmises au ministre en charge des collectivités territoriales , qui endosserait alors la responsabilité de leur mise en oeuvre. Il ne serait donc aucunement lié par les propositions formulées par le CNFEL.
2. La position de la commission : une procédure de retour à l'équilibre à mieux encadrer
Il est apparu à la rapporteure que la procédure de rétablissement de l'équilibre financier, pour indispensable qu'elle soit au regard de la situation financière actuelle du fonds, demeurait perfectible. La commission a en particulier estimé nécessaire de mieux encadrer les prérogatives de l'État en la matière et garantir une meilleure visibilité , pour les élus comme pour les organismes de formation, sur les évolutions du montant du DIFE.
Elle a en conséquence ajouté, par l'adoption de trois amendements COM-11, COM-12 et COM-13 proposés par la rapporteure, trois articles additionnels 1 er quinquies , 1 er sexies et 1 er septies .
L'article 1 er quinquies prévoit que le CNFEL serait tenu de formuler annuellement des prévisions triennales « sur les perspectives financières et les conditions de l'équilibre financier du fonds ». Ces prévisions incluraient en particulier « une estimation prévisionnelle du montant annuel des droits » acquis par les élus. Ces dispositions contribuent ainsi au renforcement du rôle du CNFEL et inscrivent sa gouvernance du fonds dans une perspective pluriannuelle demandée par les élus comme par les organismes de formation.
Les articles 1 er sexies et 1 er septies renforcent l'encadrement des prérogatives du ministre en charge des collectivités territoriales dans le rétablissement de l'équilibre financier du fonds. L'article 1 er sexies tend à prévoir que le CNFEL est tenu de privilégier, dans les propositions de rétablissement de l'équilibre qu'il formule, les leviers « qui n'ont ni pour objet ni pour effet de diminuer la valeur des droits que les élus acquièrent ou d'augmenter le montant de leurs cotisations ». Il serait ainsi appelé à prioriser les outils de retour à l'équilibre proposés au ministre dans un sens favorable aux droits des élus.
Au surplus, l'article 1 er septies renforce l'association du CNFEL à la décision rendue par le ministre en prévoyant que le ministre formule, en réponse aux propositions du CNFEL, un projet de rétablissement de l'équilibre financier prenant en compte ces dernières. Le CNFEL serait saisi pour avis de ce projet : dans le cas où son avis serait défavorable, le ministre transmettrait un projet modifié ou « des informations complémentaires en vue d'une seconde délibération », sur le modèle de la procédure applicable pour les avis du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) 27 ( * ) . À l'issue de cette seconde délibération ou si le CNFEL s'est prononcé favorablement au projet présenté par le ministre, ce dernier arrêterait les mesures nécessaires.
Ce faisant, la commission a entendu assurer une meilleure association du CNFEL , qui a vocation à représenter les élus locaux, tout en garantissant que la responsabilité politique des mesures soit in fine assumée par le ministre en charge des collectivités territoriales.
La commission a adopté les articles 1
er
quinquies
,
1
er
sexies
et 1
er
septies
ainsi rédigés
.
Articles 1er octies et 1er nonies
(nouveaux)
Accès des élus locaux aux formations par un
service dématérialisé
Les articles 1 er octies et 1 er nonies , ajoutés par la commission à l'initiative de la rapporteure 28 ( * ) , tendent à renforcer les informations et les contenus disponibles sur la plateforme en ligne permettant l'exercice du droit individuel à la formation des élus locaux (DIFE).
1. Le nécessaire renforcement de l'information et du contenu des formations accessibles aux élus locaux
L'ordonnance n° 2021-45 prévoit à son article 10 le déploiement , sur la plateforme « mon compte formation » 29 ( * ) , d'un espace dédié au DIFE , accessible à tous les élus locaux afin non seulement de faciliter leur information sur leurs droits mais également de simplifier le traitement des demandes d'inscription aux formations.
Les auditions menées par la rapporteure, particulièrement celles des associations représentant les élus locaux, ont démontré le consensus entourant la nécessité d'un droit à l'information renforcé. Ainsi, une telle réforme du DIFE ne sera effective qu'à la condition d'une pleine appropriation de ces nouveaux dispositifs par les élus locaux. En effet, un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de 2020, relevait comme l'un des principaux freins à la formation des élus le manque d'information « sur le droit d'accès à la formation ou sur les modalités à remplir pour en bénéficier » 30 ( * ) . Ce défaut d'information est l'une des explications du très faible taux de recours - inférieur à 3 % - des élus au DIFE. Ce constat, partagé par l'ensemble des personnes auditionnées par la rapporteure, est d'autant plus regrettable que les besoins de formation des élus locaux sont avérés.
Outre une meilleure information des élus, la dématérialisation des procédures ainsi prévue par l'article 10 de l'ordonnance n° 2021-45 devrait permettre d'automatiser les procédures d'inscription aux formations qui sont aujourd'hui réalisées manuellement par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) . La lourdeur de ces procédures conduit à d'importantes restrictions dans l'exercice des droits à la formation des élus, le délai d'instruction moyen de leurs demandes s'établissant à près de deux mois selon le rapport de l'IGA et de l'IGAS précité. En particulier, la CDC a connu au cours de l'année 2019 de sérieuses difficultés à maintenir un délai raisonnable d'instruction des demandes de formation en raison du volume de ces dernières 31 ( * ) . Enfin, entendus par la rapporteure, les représentants de la CDC ont reconnu que ces procédures représentaient des coûts de gestion importants. La CDC mobilise ainsi près de 50 emplois équivalents temps plein pour le traitement des 25 087 demandes de formation des élus 32 ( * ) .
2. La position de la commission : renforcer l'information des élus et créer un « kit de survie » de l'élu
Cette dématérialisation ne résoudra pas seule les difficultés d'information des élus locaux sur leurs droits. Par ailleurs, les inégalités d'accès au numérique persistent et constituent une limite inhérente à de tels outils.
La commission n'en reconnaît pas moins l'intérêt du déploiement de ce service dématérialisé à destination des élus. Au surplus, la diminution ainsi induite de coûts de gestion supportés par le fonds de financement du DIFE devrait augmenter mécaniquement les droits des élus. La commission a ainsi voulu prolonger les dispositions de l'ordonnance n° 2021-45 en la matière.
En premier lieu, la commission a complété, par l'adoption d'un amendement COM-16 de sa rapporteure, les informations figurant sur la plateforme en ligne afin de parfaire l'information des élus locaux. À cette fin, elle a précisé que ce service dématérialisé est tenu d'informer les élus locaux des possibilités d'abondements complémentaires dont ils peuvent bénéficier. Elle a également prévu que la CDC assure, à l'instar des obligations d'information existantes pour les salariés, une information annuelle des élus sur le DIFE par l'intermédiaire de leur compte personnel de formation (CPF), dès lors qu'ils disposent d'un tel compte.
En second lieu, les auditions conduites par la rapporteure ont démontré l'intérêt d'un dispositif de formation permettant aux élus, en début de mandat, d'appréhender au mieux leurs fonctions. Constatant qu'un tel « kit de survie » n'était pas prévu par l'ordonnance n° 2021-45, la commission a prévu, par l'adoption d'un amendement COM-17 de sa rapporteure, que soient accessibles aux élus locaux, dès la première année de leur mandat et gratuitement, des modules de formations élémentaires nécessaires à l'exercice de leur mandat.
La commission a adopté les articles 1 er octies et 1 er nonies ainsi rédigés .
Articles 1er decies et undecies
(nouveaux)
Clarification du fonctionnement
du conseil national de la
formation des élus locaux
Ajoutés en commission à l'initiative de la rapporteure, les articles 1 er decies et 1 er undecies tendent à clarifier le fonctionnement du conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL), dont les attributions sont renforcées par l'ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021.
1. Une instance nécessaire, aux prérogatives renforcées
Le conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL) a été créé en 1996 par la loi n° 96-142 du 21 février 1996 relative à la partie législative du code général des collectivités territoriales. Présidé par un élu local, « composé de personnalités qualifiées et, pour moitié au moins, de représentants des élus locaux », le CNFEL était chargé de « définir les orientations générales de la formation des élus locaux concernés par les dispositions relatives aux droits des élus locaux à la formation et de donner un avis préalable sur les demandes d'agrément . » 33 ( * ) Le CNFEL a donc d'emblée été chargé d'exercer un contrôle , limité à la délivrance d'un avis au sujet des demandes d'agrément, sur les organismes de formation.
Bien que renforcé par l'article 66 34 ( * ) de la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale 35 ( * ) , ce cadre juridique a néanmoins été assez largement dépourvu d'effet sur la qualité des formations délivrées aux élus. La légitimité du CNFEL , dont l'avis sur les demandes d'agrément est généralement suivi par le ministère de l'intérieur 36 ( * ) apparaît néanmoins fragile , comme le relevait le rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de janvier 2020 relatif à la formation des élus locaux 37 ( * ) . Cette fragilité résulte en partie du défaut de base juridique solide pour rendre ses avis, fondés davantage sur une « doctrine » tacite que des règles explicitement définies 38 ( * ) .
Outre l'amélioration des procédures de contrôle des organismes de formations 39 ( * ) , l'ordonnance n° 2021-45 procède donc à son article 10 à un renforcement nécessaire des prérogatives du CNFEL . Désormais chargé de rendre des avis et recommandations « relatifs à la formation des élus locaux afin d'en renforcer l'efficacité, d'en assurer la transparence et d'en garantir l'équilibre financier », le CNFEL élaborerait un répertoire des formations , en lien avec un conseil d'orientation qui lui serait adossé. Ce répertoire permettrait en particulier d'objectiver les refus d'agrément. Par ailleurs, le CNFEL serait amené à jouer un rôle de premier plan dans la gouvernance financière du fonds DIFE 40 ( * ) .
2. La position de la commission : clarifier le fonctionnement du CNFEL
La commission a jugé bienvenues les évolutions proposées par l'ordonnance n° 2021-45, qui sont à même de mieux asseoir la légitimité du CNFEL et d'améliorer la gouvernance du système de formation des élus locaux. Elle a néanmoins estimé que le fonctionnement du CNFEL pouvait être clarifié sur deux points précis.
En premier lieu, la commission a souhaité, par l'adoption d'un amendement COM-18 proposé par la rapporteure, que la Caisse des dépôts et consignations (CDC), gestionnaire du fonds de financement du DIFE, participe aux réunions du CNFEL . Déjà tenue d'informer le CNFEL sur la situation financière du fonds, la CDC verrait son rôle de conseil financier du CNFEL renforcé par la participation aux réunions de ce dernier. Elle n'y disposerait que d'une voix consultative, le CNFEL ayant vocation à représenter en premier lieu les élus locaux.
En second lieu, la commission a jugé souhaitable de renforcer la transparence des travaux du CNFEL. Elle a en conséquence adopté un amendement COM-5 de Cécile Cukierman prévoyant que le rapport annuel d'activité du CNFEL serait rendu public .
La commission a adopté les articles 1 er decies et 1 er undecies ainsi rédigés .
Article 1er duodecies
(nouveau)
Renforcement du contrôle des organismes de formation
agréés
et encadrement du recours à la
sous-traitance
Ajouté en commission à l'initiative de la rapporteure, l'article 1 er duodecies vise à renforcer le contrôle des organismes de formation agréés et les conditions de sous-traitance des prestations de formation dont bénéficient les élus locaux par ces mêmes organismes.
1. Un contrôle inefficient de la qualité des formations délivrées aux élus et de la gestion des organismes de formation
1.1. Un agrément insuffisamment objectif et peu contrôlé
Préalablement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2021-45, l'article L. 1221-1 du code général des collectivités territoriales prévoyait que tout organisme privé ou public souhaitant dispenser des formations aux élus locaux était tenu de disposer d'un agrément du ministre de l'intérieur. Distinct du régime de déclaration et d'enregistrement auquel sont soumis les organismes de formation professionnelle , ce régime d'agrément constituait une dérogation au droit commun applicable en la matière 41 ( * ) .
Auditionné par la rapporteure, le directeur général des collectivités territoriales (DGCL) a précisé que 56 % des premières demandes d'agrément avaient été refusées par le ministre au cours de l'année 2020. Toutefois, cette proportion importante de rejets ne suffit pas à asseoir seule la légitimité de cette procédure . La délivrance des agréments et leur renouvellement semblent aujourd'hui intervenir « sur le fondement d'une doctrine mouvante », ainsi que l'a souligné le rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) précité 42 ( * ) .
Par ailleurs, si la délivrance de l'agrément repose sur le respect de certaines obligations, celles-ci ne font pas l'objet d'un contrôle suivi une fois l'agrément délivré .
1.2. Le contournement des obligations de l'agrément par le recours massif à la sous-traitance
Au surplus, selon un constat partagé par l'ensemble des acteurs auditionnés, les obligations fixées par la procédure d'agrément sont en tout état de cause contournées par certains organismes de formation agréés qui ont recours à la sous-traitance généralisée de leurs actions de formation . Cette pratique, qui permet à des organismes agréés d'offrir contre rémunération à des acteurs non agréés l'accès au marché de la formation des élus locaux, ne fait l'objet d'aucun contrôle, ce qui conduit à des dérives. La pratique du « porte-avions » 43 ( * ) , par laquelle des organismes agréés portent les actions de formation d'un nombre important d'organismes non agréés ou ayant vu leur demande d'agrément rejetée, vide ainsi la procédure d'agrément de tout intérêt 44 ( * ) . Au-delà des interrogations qu'elle peut soulever tant elle peut témoigner d'une volonté de contournement des règles existantes, une telle pratique sape l'effort de contrôle de la qualité des formations dispensées puisqu'elle octroie à des organismes n'étant soumis à aucune obligation le bénéfice de l'accès au marché.
2. Le renforcement des obligations des organismes de formation agréés et des procédures de sanction
2.1. De nouvelles obligations sur le modèle de celles applicables aux organismes de formation professionnelle
La nécessité d'« assurer la transparence et la qualité des dispositifs de formation et [de] renforcer le contrôle exercé sur les organismes de formation des élus locaux » constituait l'un des objectifs fixés par le législateur dans l'habilitation consentie au Gouvernement pour légiférer par ordonnances à l'article 105 de la loi dite « Engagement et proximité ».
L'ordonnance n° 2021-45 crée pour ce faire un article L. 1221-3 au sein du code général des collectivités territoriales qui introduit non seulement de nouvelles obligations pour les organismes de formation agréés mais également des procédures de sanction à la main du ministre en charge des collectivités territoriales en cas de manquement à ces obligations . Ces obligations nouvelles seraient de trois ordres :
- l'édiction de nouvelles obligations de qualité par décret ;
- l'obligation de remise annuelle par chaque organisme de formation d'un rapport annuel d'activité relatif à la formation des élus au ministre en charge des collectivités ainsi qu'au CNFEL ;
- la mise en conformité des formations dispensées avec le répertoire des formations éligibles au DIFE en lien avec le mandat des élus locaux.
Par ailleurs, en application de ce nouvel article L. 1221-3 du code général des collectivités territoriales, seraient désormais applicables aux organismes de formation agréés les procédures de déclaration, d'enregistrement et de contrôle des organismes de formation des autres régimes de la formation professionnelle 45 ( * ) .
Ces obligations ne seraient néanmoins imposées qu'aux organismes percevant des financements des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre au titre de la formation de leurs élus, et du fonds de financement du DIFE un montant supérieur à un seuil défini par décret 46 ( * ) .
2.2. La création de procédures de sanction en cas de manquement des organismes de formation agréés à leurs obligations
Parallèlement, l'article L. 1221-3 instaure deux nouvelles procédures de sanction en cas de manquement à ces obligations par un organisme de formation agréé.
Tout d'abord, l'autorité administrative en charge de la délivrance et du contrôle des agréments serait désormais, en lieu et place du ministre de l'intérieur, le ministre en charge des collectivités territoriales . Cette modification semble une mise en cohérence bienvenue.
Par ailleurs, l'article L. 1221-3 permettrait au ministre en charge des collectivités territoriales, après mise en demeure non suivie d'effet et avis du conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL), de prononcer la suspension à titre conservatoire, et pour une durée maximale de quatre mois, de l'agrément d'un organisme de formation ne respectant pas ses obligations . Cette nouvelle procédure serait déclenchée dans trois situations :
- le manquement par le titulaire de l'agrément aux obligations prévues par l'agrément ;
- la non-conformité aux critères fixés pour l'obtention de l'agrément ;
- la commission « d'actes susceptibles de faire peser un doute sérieux sur la régularité de [la] gouvernance ou de [la] gestion, ou sur la réalité ou la qualité [des] prestations de formations ».
Enfin, faute d'une mise en conformité, le retrait de l'agrément de l'organisme de formation ayant manqué à ses obligations serait prononcé « avant l'expiration du délai de suspension de l'agrément » par le ministre en charge des collectivités territoriales, après avis du CNFEL.
3. La position de la commission : affermir le contrôle des organismes de formation agréés et encadrer strictement le recours à la sous-traitance
La commission partage l'objectif d'un renforcement du contrôle des organismes de formation comme de la qualité des prestations de formation qu'ils délivrent.
Elle a toutefois souhaité approfondir les dispositifs prévus par l'ordonnance n° 2021-45 en améliorant l'effectivité des obligations nouvellement créées et encadrant le recours à la sous-traitance .
3.1. Rendre plus effectif le contrôle de l'obligation de dépôt d'un rapport annuel d'activité par les organismes de formation agréés
Constatant que le défaut de remise au CNFEL de leur rapport annuel par les organismes de formation n'était pas assorti d'une sanction, la commission des lois a souhaité, par l'adoption d'un amendement COM-19 de la rapporteure , qu'il puisse, le cas échéant, justifier le déclenchement d'une procédure de suspension de l'agrément .
3.2. Encadrer strictement le recours à la sous-traitance
De manière à éviter le contournement des nouvelles obligations pesant sur les organismes de formation par le recours à la sous-traitance, la commission des lois a souhaité proposer deux nouvelles mesures. Premièrement, par l'adoption du même amendement COM-19 à l'initiative de sa rapporteure , elle a prévu qu'un organisme bénéficiant d'un agrément ne pourrait sous-traiter l'exécution ou la réalisation d'une action de formation financée par le DIFE et relative à l'exercice du mandat des élus qu'à condition de justifier la nécessité d'une telle sous-traitance 47 ( * ) . La commission a limité à deux situations la faculté de recourir à la sous-traitance : le besoin d'une expertise ou d'un savoir particulier, ou l'insuffisance ponctuelle d'effectifs .
Deuxièmement, la commission a souhaité interdire, en adoptant le même amendement COM-19 de sa rapporteure, la possibilité d'une sous-traitance « en cascade » en supprimant la possibilité d'une sous-traitance de second rang en matière de formation des élus à l'exercice de leur mandat.
La commission a adopté l'article 1 er duodecies ainsi rédigé .
Article 1er terdecies
(nouveau)
Clarifications rédactionnelles
L'article 1 er terdecies , ajouté par la commission à l'initiative de la rapporteure, procède à diverses clarifications rédactionnelles.
La commission a adopté l'article 1 er terdecies ainsi rédigé .
Article 1er quaterdecies
(nouveau)
Assouplissement des modalités de transition
Ajouté par la commission à l'initiative d'Alain Richard et de Cécile Cuikerman, cet article tend à permettre aux élus locaux de poursuivre leurs formations financées en heures et débutées avant la monétisation du DIFE.
1. Un régime transitoire insuffisamment protecteur des droits acquis des élus locaux
L'ordonnance n° 2021-45 modifie, à son article 6, les modalités de décompte du droit à la formation des élus locaux, qui serait désormais comptabilisé non plus en heures mais en euros. Les élus locaux peuvent ainsi, en application de l'article 18 de l'ordonnance précitée, s'inscrire et réaliser des formations financées en heures jusqu'au 22 juillet 2021 , date à laquelle la monétisation du DIFE serait effective.
Toutefois, en l'état actuel de sa rédaction, cette ordonnance ne prévoit aucun mécanisme transitoire afin que les élus locaux puissent conserver leurs droits à la formation acquis en heures mais non liquidés avant cette échéance. Telles que prévues par l'ordonnance n° 2021-45, les modalités de la transition d'un régime à l'autre posent des difficultés de trois ordres.
Premièrement, le passage d'une alimentation du compte DIFE en heures à une alimentation en euros pourrait être source d'inégalités entre les élus puisque la très large majorité de ceux n'ayant pas liquidé leurs droits en heures se verraient octroyer le même montant en euros que la minorité d'élus ayant bénéficié de leurs droits en heures.
Deuxièmement, une telle réforme des modalités de décompte des droits à la formation conduirait à une perte de ces droits à la formation acquis en heures lors du passage d'un système à l'autre. Ces droits étant par définition acquis, il semble injuste d'en priver les élus locaux concernés.
Enfin, lors de la monétisation du compte personnel de formation (CPF) par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, un mécanisme de conversion des heures acquises et non liquidées en euros avait été prévu afin de préserver les droits acquis en heures des salariés. Il ne semble pas exister de différence objective de situation justifiant que les élus locaux ne bénéficient pas d'un traitement similaire.
2. La position de la commission : préserver les droits acquis des élus locaux sans nuire à l'équilibre financier du système
2.1. L'introduction d'une souplesse administrative assurant la continuité des formations initiées avant la monétisation du DIFE
La commission a considéré qu'une réforme de la formation des élus locaux ne saurait poursuivre le seul objectif de la garantie de la soutenabilité du système du DIFE. Cet objectif doit être concilié avec la nécessaire préservation de l'exercice, par les élus, de leurs droits acquis à la formation .
Consciente de la nécessité d'une réforme rapide d'un système qui comporte d'importantes limites, la commission n'a pas souhaité retarder la mise en oeuvre de la monétisation du DIFE mais l'a néanmoins assortie d'une nouvelle garantie .
À l'initiative d' Alain Richard et de Cécile Cukierman , la commission a adopté deux amendements identiques COM-9 et COM-1 visant à permettre aux élus locaux ayant débuté une formation avant la date de monétisation du DIFE de la poursuivre jusqu'au 31 décembre 2021 . Cette souplesse administrative, de nature à permettre la continuité des actions de formation engagées par les élus locaux en dépit du passage d'une alimentation en heures à une alimentation en euros de leur compte DIFE, modifie le régime transitoire ainsi prévu par l'ordonnance n° 2021-45 sans pour autant dégrader l'équilibre financier du fonds DIFE.
2.2. La nécessité d'une disposition de conversion en euros des droits acquis en heures
Au-delà de cette souplesse opérationnelle, la commission appelle de ses voeux l'instauration d'un mécanisme plus ambitieux de conversion en euros des droits acquis en heures . Un tel dispositif devrait garantir un juste équilibre entre conservation des droits acquis des élus et soutenabilité budgétaire du fonds du DIFE.
Dès lors, des mesures permettant d'introduire des règles de conversion réalistes constitueraient des évolutions nécessaires et bienvenues au parachèvement de la réforme du système de formation des élus locaux.
La commission a adopté l'article 1
er
quaterdecies
ainsi rédigé
.
Article 2
Ratification de
l'ordonnance n° 2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de
la formation des élus des communes de la Nouvelle-Calédonie
L'article 2 du projet de loi tend à ratifier l'ordonnance n° 2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus des communes de la Nouvelle-Calédonie. Cette ordonnance a pour objet d'étendre aux élus des communes de Nouvelle-Calédonie les évolutions prévues par l'ordonnance n° 2021-45.
La commission a adopté cet article sans modification.
L'ordonnance n° 2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus des communes de Nouvelle-Calédonie, justifiée par la répartition particulière des compétences entre l'État et la collectivité, comporte quatre titres et sept articles.
Au titre I er , l'article 1 er prévoit la possibilité d'un cofinancement par les communes de Nouvelle-Calédonie des formations auxquelles leurs élus ont accès au titre du DIFE. Cette disposition étend à la Nouvelle-Calédonie les dispositions des articles 1 er à 5 de l'ordonnance n° 2021-45. L'article 2 prévoit au surplus l'application à la Nouvelle-Calédonie des dispositions de l'article 6 de la même ordonnance n° 2021-45, qui ouvre la possibilité d'un cofinancement par l'élu , sur ses fonds personnels ou son compte personnel d'activité (CPA), de formations financées au titre du DIFE.
Le titre II se compose d'un unique article 3, qui étend à la Nouvelle-Calédonie les dispositions de l'article 9 de l'ordonnance n° 2021-45, précisant les attributions de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) en tant que gestionnaire du fonds.
Le titre III, qui comprend un unique article 4, prévoit l'application aux organismes de formation de Nouvelle-Calédonie des procédures d'agrément prévues par l'article 12 de l'ordonnance n° 2021-45, la déclaration et l'exercice de leur activité étant soumis aux dispositions applicables localement.
Le titre IV, qui se compose de trois articles, prévoit à titre principal que les « élus locaux peuvent utiliser les droits individuels à la formation comptabilisés en heures qu'ils détiennent à la date de publication de la présente ordonnance sous cette forme » jusqu'au 28 juillet 2021 , sur le modèle de ce qui est prévu par l'article 18 de l'ordonnance n° 2021-45.
La commission a adopté l'article 2 sans modification .
Article 3
(nouveau)
Coordination des dispositions applicables en
Nouvelle-Calédonie
L'article 3, ajouté par la commission à l'initiative de la rapporteure, procède à diverses coordinations au sein des dispositions applicables en Nouvelle-Calédonie.
Adopté par la commission sur proposition de la rapporteure, l' amendement COM-22 procède à plusieurs coordinations avec les dispositions applicables en Nouvelle-Calédonie de modifications adoptées par la commission au sein de l'ordonnance n° 2021-45 :
- le 1° du I étend à la Nouvelle-Calédonie le rétablissement de la possibilité de cumul pluriannuel des droits prévu à l'article 1 er ter ;
- le 2° et le 3° du même I étendent à la Nouvelle-Calédonie les possibilités de cofinancement ouvertes au titre de l'article 1 er ter ;
- le II procède à la correction d'une erreur matérielle identique à celle corrigée par l'article 1 er bis .
La commission a adopté l'article 3 ainsi rédigé .
* 16 Ainsi, les articles 1 er , 2, 3, 4 et 5 concernent respectivement les communes, les conseils départementaux, les conseils régionaux, la collectivité territoriale de Guyane et la collectivité territoriale de Martinique.
* 17 Le compte personnel d'activité comprend le compte personnel de formation (CPF), le compte professionnel de prévention (C2P) et le compte d'engagement citoyen (CEC).
* 18 Article 76 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.
* 19 Pour plus de détails, voir le commentaire des articles 1 er quinquies , 1 er sexies et 1 er septies .
* 20 Pour de plus amples développements, voir le commentaire de l'article 1 er quaterdecies .
* 21 Amendement COM-21 de la rapporteure.
* 22 Le CPF est abondé annuellement à hauteur de 500 euros et ces droits sont cumulables dans la limite d'un plafond fixé à 5 000 euros en application de l'article R. 6323-1 du code du travail.
* 23 Une telle différence ne semble pas exister eu égard à la seule acquisition des droits.
* 24 Cette possibilité, introduite aux articles L. 2123-12, L. 3123-10, L. 4135-10, L. 7125-12 et L. 7227-12 du code général des collectivités territoriales, serait respectivement applicable aux communes, aux départements, aux régions, à la Collectivité territoriale de Guyane et à la Collectivité territoriale de Martinique.
* 25 À l'heure actuelle, comme le relevait le rapport de l'IGA et de l'IGAS de janvier 2020 précité, force est néanmoins de constater que ces dispositifs sont « plus concurrents que complémentaires ». La réforme dont les ordonnances n os 2021-45 et 2021-71 constituent le volet législatif a néanmoins vocation à permettre des améliorations en la matière
* 26 Au titre de l'article 10 de l'ordonnance n° 2021-45.
* 27 Article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales.
* 28 Amendement COM-21 de la rapporteure.
* 29 Les prérogatives et modalités de gestion de ce service dématérialisé sont prévues à l'article L. 6323-8 du code du travail.
* 30 Rapport de l'IGA et de l'IGAS précité, p. 24.
* 31 Comme le relève le rapport de l'IGA et de l'IGAS précité (p. 30), les délais d'instruction étaient tels que les élus ne recevaient, en 2019, une confirmation de leur inscription à la formation demandée qu'une semaine avant la date de ladite formation.
* 32 Chiffres de la Caisse des dépôts et consignations pour 2020.
* 33 Article L. 1221-1 du code général des collectivités territoriales.
* 34 Cet article a précisé que la délivrance de ces agréments était subordonnée à la condition que la personne physique ou morale offrant la formation « n'ait pas fait l'objet d'une condamnation à une peine criminelle ou à une peine correctionnelle d'emprisonnement sans sursis, prononcée depuis moins de dix ans et inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent, pour des motifs incompatibles avec l'activité de formation considérée ».
* 35 La présence d'une telle disposition au sein d'une loi consacrée à la fonction publique territoriale peut témoigner d'une confusion regrettable entre la formation des agents publics territoriaux et celle des élus.
* 36 La délivrance et le retrait des agréments étaient arrêtés par le ministre de l'intérieur ; l'article 12 de l'ordonnance n° 2021-45 procède à une clarification bienvenue, en précisant qu'il revient au ministre en charge des collectivités territoriales de prendre ces décisions.
* 37 « La formation des élus locaux », rapport de janvier 2020 de l'IGA et de l'IGAS, p. 29.
* 38 Ibidem .
* 39 Voir à cet égard le commentaire de l'article 1 er duodecies .
* 40 Voir à cet égard le commentaire des articles 1 er quinquies , 1 er sexies et 1 er septies .
* 41 Les obligations des organismes de formations sont prévues aux articles L. 6351-1 à L. 6355-24 du code du travail.
* 42 « La formation des élus locaux », rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), janvier 2020, p. 56.
* 43 Ibidem , p. 36.
* 44 Ibidem .
* 45 Ces procédures sont définies aux articles prévues aux articles L. 6316-1 à L. 6316-5 et L. 6351-1 à L. 6363-2 du code du travail, à l'exception des articles L. 6351-7, L. 6355-24, L. 6362-2, L. 6362-4, L. 6362-6-1 et L. 6362-6-2, et seraient appliquées aux organismes de formation sous réserve des adaptation prévues à l'article L. 1221-4-I du code général des collectivités territoriales.
* 46 Lors de son audition, le directeur général des collectivités locales a indiqué à la rapporteure que le seuil envisagé était à ce stade de 100 000 euros.
* 47 Un tel dispositif constitue une dérogation aux dispositions de l'article 1 er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance qui permet la sous-traitance tout ou partie de l'exécution d'un contrat.