LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement majorant de 30 millions d'euros les crédits du programme 200, visant à couvrir les remboursements d'impôt en 2021 imputables :

- à la création d'un crédit d'impôt destiné à soutenir les représentations théâtrales. Ce crédit d'impôt de 15 % de certaines dépenses concerne les spectacles programmés pour plus de vingt dates, engageant au moins six acteurs au plateau dont au moins 90 % de professionnels. Le taux est porté à 30 % pour les petites et moyennes entreprises ;

- à l'instauration d'un crédit d'impôt pour les dépenses de rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire des petites et moyennes entreprises, dispositif dont le Sénat a adopté la prorogation jusque fin 2022.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 27 octobre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial, sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».

M. Claude Raynal , président . - Nous poursuivons cet après-midi l'examen des missions budgétaires. Vous avez reçu vendredi le programme de travail de la commission, avec les dates de passage de toutes les missions. La Conférence des Présidents arrêtera demain le calendrier d'examen du projet de loi de finances en séance. Je peux d'ores et déjà vous indiquer que l'examen devrait se dérouler en séance publique du jeudi 19 novembre au mercredi 25 novembre pour la première partie, puis du jeudi 26 novembre au mardi 8 décembre pour la seconde partie. Compte tenu du temps nécessaire pour l'examen des articles de première partie, et de la discussion sur la nouvelle mission « plan de relance », qui a occupé une dizaine d'heures à l'Assemblée nationale, certaines missions budgétaires devront nécessairement être programmées le samedi 28 novembre.

Pour ce qui concerne nos réunions de commission, je vous indique que les notes de présentation des rapporteurs spéciaux sur leurs missions sont disponibles la veille du passage en commission sur l'espace intranet Demeter. Je vous invite, ainsi que vos collaborateurs, à vous y reporter, ces notes ne faisant dès lors plus l'objet d'un envoi par courriel. En cas de difficultés pour accéder à cet espace, les services de la commission sont à votre disposition.

Enfin, nous privilégions, dès lors que c'est possible, les réunions dans des grandes salles pour permettre à tous les membres de la commission d'y participer dans le respect des normes sanitaires, mais à partir d'aujourd'hui, ces réunions sont également ouvertes en visioconférence pour les sénateurs qui seraient empêchés de se déplacer en raison de la situation sanitaire.

M. Philippe Dallier . -Ne voteront cependant que les membres présents physiquement ?

M. Claude Raynal , président . - Oui, et une seule délégation de vote sera autorisée par personne.

Nous examinons désormais le rapport de M. Savoldelli sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».

M. Pascal Savoldelli , rapporteur spécial de la mission « Remboursements et dégrèvements » . - La mission « Remboursements et dégrèvements » retrace les dépenses budgétaires résultant mécaniquement de l'application des dispositions prévoyant des dégrèvements, des remboursements ou des restitutions d'impôt. Le caractère mécanique de ces dépenses implique que les crédits de la présente mission soient évaluatifs ; ils ne constituent pas un plafond, à la différence des missions budgétaires classiques.

La mission est composée de deux programmes, l'un consacré aux remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, l'autre aux mêmes opérations pour les impôts directs locaux.

Pour 2020, 126 milliards d'euros de crédits - c'est plus que le plan de relance annoncé par le Gouvernement ! - sont demandés au titre de la présente mission, soit une baisse significative de près de 14 milliards d'euros par rapport à la loi de finances pour 2020, Cette baisse très importante s'explique notamment, s'agissant des impôts d'État, par un ralentissement des restitutions de TVA en 2021. En effet, afin d'aider les entreprises à faire face aux difficultés de trésorerie rencontrée pendant la crise, les restitutions de TVA se sont accélérées en 2020, une baisse de 5 milliards d'euros étant prévue pour 2021. Le coût de plusieurs contentieux devrait également se réduire en 2021.

Elle s'explique également par la contraction des crédits du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » dans le contexte de la réforme de la taxe d'habitation et des impôts de production.

Au total, l'augmentation des dépenses du programme depuis 2013 devrait atteindre 55 milliards d'euros cette année. Ce montant considérable justifierait un renforcement des dispositifs d'évaluation des politiques publiques financées par le programme ainsi que l'augmentation des moyens affectés au contrôle, en particulier en matière de fraude à la TVA. À titre de comparaison, l'augmentation des crédits en sept ans correspond à la totalité des crédits dédiés annuellement à la mission « Enseignement scolaire ».

Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État sont évalués à 119,2 milliards d'euros en 2021. Ce montant est en augmentation d'1,5 milliard d'euros par rapport à la prévision pour cette année, dans le prolongement de la hausse quasi ininterrompue de ces crédits depuis 2010.

Il y a lieu de constater que l'année 2020 a été marquée par un plus haut historique, à près de 130 milliards d'euros, la consommation des crédits ayant été de plus de 11 milliards d'euros supérieure à la prévision de la loi de finances initiale.

Plusieurs paramètres permettent d'expliquer cette augmentation pour 2020. Les remboursements de crédits de TVA représentent en valeur la part la plus importante des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État et sont particulièrement dynamiques. Avec 56,6 milliards d'euros évalués pour 2021, ces opérations devraient redescendre en 2021 au niveau de 2019 après une année 2020 marquée par un record de consommation à plus de 61 milliards d'euros. En sept ans, la sous-action relative aux restitutions de TVA a augmenté de 14,2 milliards d'euros. Je considère qu'il est nécessaire de fournir une information approfondie aux parlementaires sur les causes de cette trajectoire de hausse.

D'autre part, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) continue à peser sur les remboursements et dégrèvements. Après avoir atteint quasiment 20 milliards d'euros en 2019, le coût budgétaire du dispositif en 2020 est resté élevé, et même supérieur aux prévisions initiales pour 2020. La sous-action dédiée devrait être en baisse en 2021, mais le dispositif ayant été transformé en nouvelles réductions de cotisations sociales employeurs, le coût pour les finances publiques reste conséquent.

Les coûts des contentieux fiscaux sont retracés au sein du programme 200. Il s'agit principalement des grands contentieux fiscaux de droit de l'Union européenne, dont le coût pour l'État est très élevé. Pour fournir quelques exemples, il s'agit notamment du contentieux OPCVM, qui devrait représenter près de 11 milliards d'euros, de celui sur la taxe additionnelle sur les dividendes, pour 9,5 milliards d'euros, ou sur le précompte mobilier, pour un peu plus de 5 milliards d'euros. Je relève dans mon rapport la priorité donnée par les institutions de l'Union aux marchés et à l'égalité de traitement entre les entreprises par rapport aux objectifs qui devraient constituer des priorités pour l'Union : urgence sociale, économique et environnementale.

De plus, la course au moins disant en matière de fiscalité des entreprises, tant au niveau européen que mondial, conduit à réduire toujours davantage le niveau d'impôt sur les sociétés sans jamais conduire à s'interroger sur le niveau le plus juste d'imposition des entreprises dans une société avancée.

J'ai fait le choix de m'intéresser particulièrement à trois sujets en partie retracés sur le programme 200: la question de la TVA, celle du crédit impôt recherche (CIR) et celle des règlements d'ensemble opérés par l'administration fiscale.

Dans son rapport de décembre dernier, la Cour des comptes a estimé la fraude à la TVA à près de 15 milliards d'euros. À l'instar de la Cour, je considère qu'un chantier de grande ampleur et de long terme doit être mené afin de parvenir à une estimation fiabilisée du niveau de la fraude. La mobilisation de l'ensemble des administrations concernées doit permettre de corriger les biais de sélection et de détection qui affectent les estimations disponibles à ce jour.

Il me semble, chers collègues, que nous sommes tous d'accord pour renforcer la lutte contre la fraude fiscale. Pour ce faire, l'information doit être décloisonnée et les services doivent travailler de façon coordonnée, autant au niveau national qu'européen et international. Les moyens humains doivent être renforcés et mieux spécialisés. Ce sont les conclusions que tirait déjà la Cour des comptes dans son référé de décembre 2018.

La lutte contre la fraude doit aussi permettre de dégager de nouvelles ressources publiques. Les taux de TVA doivent être revus à la baisse pour les produits et les services essentiels aux personnes et au maintien de leur dignité. Je pense par exemple au savon, au dentifrice, au gel douche ou encore au shampooing.

J'ai bien conscience que les taux réduits font l'objet d'un encadrement strict par le droit de l'Union européenne et c'est pourquoi je considère que la France doit impérativement porter une initiative au niveau européen concernant l'extension de ces taux réduits.

Par ailleurs, concernant le crédit impôt recherche, je considère le dispositif comme inadapté pour répondre aux grands enjeux de la recherche et du développement.

En effet, la plupart des études concluent à un effet de levier très limité, voire nul : pour 1 euro de CIR dépensé par l'État, les entreprises n'engagent pas ou peu de dépenses supplémentaires. Cette absence d'effet de levier est signe d'une profonde inadaptation du dispositif. De plus, malgré un coût élevé pour les finances publiques, de plus de 6 milliards d'euros, l'outil ne permet pas à l'État de déterminer des priorités stratégiques pour la recherche et le développement afin de répondre aux grandes problématiques actuelles, notamment sanitaires, environnementales ou encore sociales.

Enfin, cette dépense est en grande partie imputable aux grandes entreprises qui utilisent souvent le CIR au sein de stratégies d'optimisation fiscale. Une étude d'Oxfam indique en effet qu'en « 2015, sur 14 000 entreprises ayant bénéficié du CIR, 42 grandes entreprises, soit 0,3 % des bénéficiaires, se sont accaparé à elles seules 31 % des créances du CIR. »

Ainsi, je plaide pour le rétablissement d'un plafonnement du bénéfice de ce dispositif à 16 millions d'euros, apprécié au niveau du groupe.

Enfin, je souhaite aborder la question des « règlements d'ensemble », qui permettent à l'administration d'accorder au contribuable une minoration du montant des pénalités dues, mais également des droits demandés. Cette pratique est utilisée lors de redressements complexes, en matière de fiscalité internationale notamment. D'après le rapport récemment remis au Parlement sur le sujet, la pratique vise à faciliter la conclusion de certains contrôles dans les cas où il existe « des difficultés à établir avec suffisamment d'exactitude le quantum des rectifications [...] ou un véritable aléa juridique . »

Dans ces affaires, l'État renonce non seulement à percevoir certaines pénalités, mais accepte également de voir les droits réduits. Sur les 116 règlements d'ensemble opérés en 2019, portant sur une remise totale 1,6 milliard d'euros, les droits ont été minorés de 1,12 milliard d'euros.

Alors que les bases légales de cette procédure ne sont pas clairement définies, le pouvoir discrétionnaire laissé à l'administration de renoncer à des droits qui devraient être perçus en vertu de dispositions législatives ne peut aucunement satisfaire le Parlement.

J'en viens maintenant au second programme de cette mission qui est consacré aux dégrèvements et remboursements d'impôts locaux. En 2021, les crédits du programme s'effondrent puisqu'ils passent de 23 milliards d'euros à 7 milliards d'euros. Deux évènements expliquent cette contraction. D'abord, la réforme de la taxe d'habitation et, ensuite, la réforme des impôts de production.

S'agissant de la réforme de la taxe d'habitation (TH), il est utile de se rappeler que nous arrivons, en 2021, dans la deuxième phase de la réforme. Jusqu'ici, l'allègement introduit en loi de finances pour 2018 avait pris la forme d'un dégrèvement et, par voie de conséquence, son coût était retracé par la mission dont je rapporte les crédits.

La mise en oeuvre progressive de ce dégrèvement s'était ainsi traduite par une hausse importante des crédits de la mission : + 3 milliards d'euros en 2018, + 6 milliards d'euros en 2019 et + 14 milliards d'euros en 2020.

À compter de 2021, ce dégrèvement est transformé en exonération et le produit de la taxe d'habitation est perçu par l'État. Des 15 milliards d'euros de dégrèvement de taxe d'habitation retracés l'année dernière que reste-t-il à rapporter ? 700 millions d'euros composés principalement de quelques contentieux résiduels.

C'est ainsi qu'avec la taxe d'habitation sur les résidences principales, disparaissent quasiment les deux tiers des crédits du programme.

Néanmoins, si on allège la charge de votre rapporteur spécial, mes chers collègues, on renforce son inquiétude d'élu local. Il faut rappeler, en effet, qu'à compter de l'année à venir les EPCI et les départements percevront de la TVA dans le cadre de cette réforme. Une TVA inéquitable par construction et dont le produit est fortement soumis aux aléas économiques de surcroît.

Qu'on se rassure, toutefois, car le ministre de l'action et des comptes publics avait rappelé lors de nos débats sur le PLF l'an dernier qu'une contraction de la TVA était assez improbable. Cela doit nous rassurer d'autant plus que pour les départements, par exemple, ces recettes de TVA vont représenter plus de 20 % de leurs recettes de fonctionnement. En économie on appelle cela un cygne noir, c'est-à-dire un évènement dont la survenue est plutôt improbable, mais dont les effets sont dévastateurs.

Pourtant peut-on considérer comme improbable un évènement qui est survenu deux fois en un peu de plus de dix ans, c'est-à-dire lors de la crise de 2008 et au cours de cette année ? Le cygne me semble plus gris que noir.

Que penser, alors, des mécanismes de garanties - presque inexistants - qui accompagnent cette réforme ? Que dire de l'amendement introduit à l'initiative du Gouvernement à l'Assemblée nationale et qui vise à rendre contemporain les versements de TVA, c'est-à-dire à s'assurer qu'une chute de la TVA frappe bien immédiatement les collectivités locales ?

Je crois que les inquiétudes exprimées à l'encontre de cette réforme par presque chacun d'entre nous l'année dernière sont plus que légitimes et doivent être entendues.

La seconde raison pour laquelle les crédits diminuent cette année réside dans la mise en oeuvre de la réforme des impôts de production prévue aux articles 3 et 4 du projet de loi de finances. La première mesure consiste à supprimer la part de contribution sur la valeur ajoutée (CVAE) actuellement perçue par les régions. La seconde mesure consiste à réformer les modalités d'évaluation de la valeur locative des locaux industriels.

Au total, le Gouvernement s'attend à une diminution de l'ordre de 10 milliards d'euros de la CVAE, de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) acquittées par les entreprises. En conséquence, le montant des dégrèvements et des remboursements opérés au titre de ces impôts et retracés par le programme 201 diminuera également.

Là encore, j'estime que ces réformes sont contestables. D'abord, il y a le principe même d'organiser des allègements de cette ampleur sans que ne soit proposée aucune contrepartie.

Ensuite, il y a la méthode retenue pour compenser les collectivités locales. Pour les régions, un accord a été trouvé entre l'État et l'association des régions de France pour remplacer les anciennes recettes de CVAE par de la TVA.

Avant que nous n'entamions dans quelques jours le débat sur ce sujet en commission comme en séance, il me semble utile de rappeler que c'est encore le législateur qui détermine les règles de la libre administration des collectivités locales et les ressources dont elles disposent. Il me semble que nous aurions tout à fait le droit et qu'il serait utile de nous interroger sur le caractère souhaitable ou non de cet accord qu'on nous demande d'avaliser. Pour le bloc communal, on propose d'instituer un prélèvement sur les recettes de l'État. Or, il faut garder à l'esprit que ce qu'une loi de finances fait, une autre loi de finances peut le défaire. Ainsi, je pense qu'il faut être optimiste pour croire que cette compensation ne sera pas ajustée à l'avenir comme l'ont été toutes celles qui l'ont précédée.

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, je vous invite à ne pas adopter les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » ont un caractère purement évaluatif. La mission retrace des mouvements mécaniques de crédits, liés directement aux modalités des différents impôts, à des politiques publiques, comme les crédits d'impôt, ou encore à la gestion des produits d'imposition, comme les dégrèvements. Le vote de la mission revient simplement à valider la prévision proposée par le Gouvernement sur les mouvements de crédits attendus en 2021 en application des dispositions législatives, et en particulier fiscales.

J'aurais trois questions. Tout d'abord, quelles ont été les conséquences de la mise en oeuvre du prélèvement à la source sur les crédits de la mission ?

Ensuite, au-delà de la diminution des dégrèvements de CVAE et de CFE, quels sont les facteurs qui peuvent expliquer la réduction des crédits de l'action « Remboursements et dégrèvements d'imposition économique » ?

Enfin, quel est le montant de la provision passée au titre du contentieux lié à la contribution au service public de l'électricité (CSPE) ?

M. Philippe Dallier . - Je veux revenir sur le coût pour les finances publiques de la suppression de la taxe d'habitation. On constate que le coût est de + 3 milliards d'euros en 2018, + 6 milliards d'euros en 2019 et + 14 milliards d'euros en 2020, soit 23 milliards au total. Mais, inversement, il faut aussi déduire le montant des exonérations qui existaient déjà avant et que l'État compensait déjà. Au total, j'estimais le coût de cette suppression à 19 milliards d'euros. Cette évaluation est-elle bonne ?

Nombre de communes sont surprises lorsqu'elles reçoivent les états des services fiscaux qui leur notifient leurs bases de taxe d'habitation. Certaines communes, qui gagnent de la population, voient leur taxe foncière progresser, mais la TH progresse nettement moins... Il arrive parfois que la première notification de TH soit très basse et qu'elle soit suivie d'une forte correction ensuite. Avec la forfaitisation, les communes souhaitent être sûres que la totalité des bases ont bien été prises en compte. Comment s'assurer, auprès des services de l'État, que quelques centaines de millions d'euros, voire plus, ne s'évaporeront pas en 2021 ?

M. Claude Raynal , président. - Ils ne seront pas perdus pour tout le monde !

M. Éric Bocquet . - Un rapport de l'Assemblée nationale proposait il y a quelques années de faire le ménage parmi les niches fiscales. Le débat est ancien, mais la matière est mouvante. On comptait 451 niches fiscales en 2017 ; on en compte aujourd'hui 475. De petites niches peu rentables ont certes disparu, mais d'autres ont été créées. Il est donc difficile de s'y retrouver et d'estimer leur coût pour les finances publiques. Certaines niches, en outre, n'ont que des crédits estimatifs : seules 234 dépenses fiscales sur 475 font l'objet d'un chiffrage précis. Disposera-t-on à un moment ou à un autre, en loi de règlement par exemple, du coût de ces niches ?

M. Marc Laménie . - Vous avez évoqué la lutte contre la fraude à la TVA. Mais sur le terrain les effectifs des services de la direction générale des finances publiques baissent, des trésoreries ferment. Si les moyens humains se réduisent, comment lutter contre la fraude ?

Les élus sont aussi inquiets quant à la compensation de la suppression de la taxe d'habitation, alors que les recettes de TVA ne progressent pas.

M. Michel Canevet . - J'ai découvert dans le rapport que deux contribuables s'étaient vu imposer des niveaux d'imposition très élevés pour corriger des erreurs déclaratives. S'agit-il d'erreurs de traitement ou bien de contribuables particulièrement fortunés ?

Nous devons être prudents sur le CIR, qui me semble très important pour l'innovation et l'esprit d'entreprise en France. Nous avions constaté, lors des travaux de la commission d'enquête du Sénat sur la réalité du détournement du crédit d'impôt recherche, à quel point ce dispositif était apprécié par les entrepreneurs, non seulement les grandes entreprises, mais aussi les PME, qui peuvent mener une politique de recherche grâce à ce mécanisme. L'innovation est fondamentale dans l'économie d'aujourd'hui. Soyons donc prudents, pour ne pas prendre le risque de voir l'effort de recherche s'effondrer en France.

Enfin, peut-on être sûr que la baisse des impôts de production visera bien les entreprises industrielles ?

M. Sébastien Meurant . - À chaque déplacement de la délégation aux entreprises, la question du CIR est posée. Il s'agit de PME. La recherche permet de soutenir l'innovation et la croissance. Faut-il risquer de remettre en cause un dispositif qui bénéficie aux petites entreprises, et dont l'intérêt est clair dans l'enfer fiscal que constitue la France pour les chefs d'entreprise ? Je rappelle que la France est le pays de l'OCDE où les impôts sont les plus élevés.

M. Pascal Savoldelli , rapporteur spécial . - Vos propos contiennent des questions, auxquelles je m'efforcerai de répondre, et des appréciations, qui relèvent de l'opinion de chacun.

Concernant la mise en oeuvre du prélèvement à la source : trois éléments sont retracés sur la mission. D'une part, le crédit d'impôt de modernisation du recouvrement mis en oeuvre en 2019 pour résoudre la question de l'année blanche et éviter les doubles impositions, a représenté 6 milliards d'euros. D'autre part, à chaque début d'année, un acompte de 60 % des réductions et crédits d'impôt est versé aux contribuables, pour un coût annuel de 5,5 milliards d'euros. Enfin, les restitutions en cas de trop-perçu sont versées l'année suivante et ont représenté en 2020 un peu plus de 11 milliards d'euros.

Le Gouvernement estime que la réforme des impôts de production - CVAE, CFE et TFPB - représente une économie d'impôt de 10 milliards d'euros pour les entreprises. Quant à la provision liée à la CSPE, je vous répondrai plus précisément ultérieurement.

La suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales représente une moindre recette de l'ordre de 23 milliards d'euros ; l'estimation avancée par M. Dallier est donc juste. En 2020, les bases de TH ont évolué de 0,9 %, et non par rapport à l'inflation comme le prévoyait le droit antérieur à la réforme de la taxe d'habitation, ce qui est donc moins favorable. Nous avions posé, l'année dernière, unanimement, la question de la juste compensation, mais n'avions pas été entendus. Le montant des retours aux collectivités territoriales est d'environ 23 milliards. Toutefois, compte tenu du fait que l'État assumait le coût de certaines exonérations, la charge nette pour lui s'élèverait plutôt à 18 milliards d'euros.

Sur la question des dépenses fiscales, la mission « Remboursements et dégrèvements » traite seulement des restitutions d'impôts et non des réductions d'impôt. C'est bien dommage, car elles ne font l'objet de quasiment aucune évaluation. Il serait sans doute pertinent que notre commission s'occupe davantage de ce sujet. Au niveau de la mission dont je rapporte les crédits, les restitutions pour l'impôt sur les sociétés représentent tout de même un montant d'un peu plus de 12 milliards d'euros.

Par ailleurs, je crois que l'on ne peut pas évaluer le CIR uniquement au regard de l'effort global de recherche et développement mais que l'on doit bien voir que la dépense n'est pas toujours efficace.

Je sais que nous sommes divisés sur la réforme des impôts productifs. Une réforme du calcul de la valeur locative cadastrale des locaux industriels est en cours. La notion me semble claire, mais il reste à savoir comment elle sera conduite ensuite sur le plan administratif. En tenant compte de cette réforme et de celle de la CVAE, l'effet sera plus diffus : on peut estimer, à ce stade, qu'elle bénéficiera à l'industrie pour 40 %.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » sans modification, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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