EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ
ARTICLE 55
Gouvernance du
quatrième programme d'investissements d'avenir
Le présent article énonce une doctrine d'investissement pour les PIA et étend au quatrième programme d'investissements d'avenir les règles de gouvernance déjà applicables pour les programmes précédents, tout en procédant à plusieurs aménagements. La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification. |
I. LE DROIT EXISTANT
Dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2010 24 ( * ) , 35 milliards d'euros avaient été inscrits dans le budget de l'année, pour constituer les crédits consacrés au grand « emprunt national » décidé pour relancer l'investissement. Ce dispositif est directement issu des travaux menés par MM. Alain Juppé et Michel Rocard , co-présidents de la commission chargée de mener une réflexion sur les investissements porteurs d'avenir, et qui ont remis leur rapport 25 ( * ) le 19 novembre 2009.
Il a été complété d'un deuxième programme , dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2014, pour un montant de 12 milliards d'euros 26 ( * ) .
En loi de finances initiale pour 2017 27 ( * ) , un troisième programme a été créé, présentant la particularité de constituer une mission budgétaire spécifique au sein du projet de loi de finances. Initialement doté de 10 milliards d'euros en autorisations d'engagement, ce dernier programme bénéficie chaque année d'une ouverture progressive en crédits de paiement.
La création du PIA a été guidée par la volonté de préserver l'investissement de long terme , qui risquait d'être sacrifié sous le coup de la crise économique. Il a été construit afin de lui donner une existence extrabudgétaire, à l'abri de tout arbitrage négatif en cours d'année.
Outre ces règles budgétaires dérogatoires du droit commun , le PIA repose également sur des modalités de gouvernance spécifiques, notamment fixées à l'article 8 de la loi précitée du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010. Les dispositions concernent à la fois les conditions de gestion et d'utilisation des fonds et les modalités d'information et de contrôle du Parlement.
A. UNE GESTION DES FONDS CONFIÉE À DES OPÉRATEURS SPÉCIALISÉS
1. Le recours à des conventions entre l'État et les opérateurs
La gestion des fonds est confiée par l'État à des opérateurs , dont le nombre est limité à quatre depuis le PIA 3 : l'Agence nationale de la recherche (ANR), la Caisse des dépôts et consignations (CDC), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et Bpifrance.
Les conditions de gestion et d'utilisation des fonds du PIA font l'objet, pour chaque action engagée et préalablement à tout versement, d'une convention conclue entre l'État et l'opérateur désigné, qui comprend nécessairement :
- les objectifs à atteindre et les indicateurs retenus pour mesurer les résultats obtenus ;
- les modalités d'instruction des dossiers et les « dispositions prises pour assurer la transparence du processus de sélection » ;
- les modalités d'utilisation des fonds et les conditions de contrôle et, le cas échéant, de décision en dernier ressort par l'État ;
- les modalités de suivi et d'évaluation de la rentabilité des projets d'investissement présentés, avec les conditions d'organisation, le cas échéant, d'un intéressement pour l'État ;
- l'organisation comptable, les modalités de suivi comptable et d'information préalable de l'État ;
- les conditions de placement des fonds en vue de la production d'intérêts.
Ces conventions ne peuvent être conclues pour une durée supérieure à quinze ans .
Les fonds ne peuvent être déposés qu' auprès d'un comptable du Trésor .
2. La gestion spécifique par l'ANR des dotations non consommables
Dans le cadre des dotations non consomptibles, l'Agence nationale de la recherche doit conclure une convention avec l'organisme bénéficiaire de la dotation , précisant les conditions de gestion et d'utilisation des fonds conservés pour produire intérêts. Cette convention est soumise à l'approbation de l'État.
À l'issue de la période probatoire, si les conditions définies au moment de la sélection sont remplies, la dotation non consommable a vocation à être dévolue définitivement au projet financé .
En revanche, ces conventions précisent que les dotations non consommables n'ayant pu être versées aux bénéficiaires finaux à l'issue des périodes probatoires - notamment parce que l'initiative d'excellence n'est pas confirmée - peuvent donner lieu à un nouvel appel à projets ou, à défaut, « sont reversées au budget de l'État 28 ( * ) ».
B. UN SUIVI OPÉRÉ PAR LE COMITÉ DE SURVEILLANCE DES INVESTISSEMENTS D'AVENIR ET LE SECRÉTARIAT GÉNÉRAL POUR L'INVESTISSEMENT
L'article 8 précité de la première loi de finances rectificative pour 2010 a également prévu la création d'un Comité de surveillance des investissements d'avenir. Ce dernier comprend quatre députés, quatre sénateurs et huit personnalités qualifiées, issues de la société civile, nommées par arrêté du Premier ministre pour une durée de deux ans renouvelable.
Le comité de surveillance est notamment chargé d'évaluer le programme d'investissements et de « dresser un bilan annuel de son exécution », qui est remis au Premier ministre et aux deux assemblées parlementaires.
Il s'appuie sur les informations transmises par le Secrétariat général pour l'investissement , organe spécifiquement institué pour mettre en oeuvre ces investissements d'avenir. Ainsi, en vertu du décret n° 2010-80 du 22 janvier 2010, le Secrétariat général pour l'investissement « veille sous l'autorité du Premier ministre, à la cohérence de la politique d'investissement de l'État ».
Ainsi, selon l'article 1 er du décret précité, le secrétaire :
- prépare les décisions du Gouvernement relatives aux contrats passés entre l'État et les organismes chargés de la gestion des fonds consacrés aux investissements d'avenir ;
- coordonne la préparation des cahiers des charges accompagnant les appels à projets et vérifie leur cohérence avec l'action du Gouvernement en matière d'investissements d'avenir et de réforme des politiques publiques ;
- coordonne l'instruction des projets d'investissement et formule des avis et propositions ;
- veille à l'évaluation, a priori et a posteriori , des investissements, et notamment de leur rentabilité ;
- dresse un bilan annuel de l'exécution du programme.
C. UN CONTRÔLE DE L'UTILISATION DES CRÉDITS DÉVOLU AU PARLEMENT
1. La présentation annuelle de trois annexes budgétaires
Le Parlement contrôle l'exécution des programmes d'investissements d'avenir à partir des documents annexés annuellement au projet de loi de finances .
Le Gouvernement doit en premier lieu indiquer, au sein du rapport économique, social et financier (RESF), les conséquences sur les finances publiques des investissements financés par les crédits ouverts.
Il doit également transmettre à la représentation nationale une annexe budgétaire relative à la mise en oeuvre des investissements d'avenir . Correspondant à un « jaune budgétaire », cette dernière présente pour chaque mission :
- les investissements prévus et en cours de réalisation, en justifiant le choix des projets et en présentant l'état d'avancement des investissements ;
- les montants dépensés , les moyens financiers prévus pour les années à venir, les modalités de financement mises en oeuvre et, le cas échéant, les modifications apportées à la répartition initiale des fonds ;
- les cofinancements publics et privés attendus et obtenus ;
- les objectifs poursuivis et les résultats attendus et obtenus, avec la justification des indicateurs utilisés à cet effet ;
- les retours sur investissements attendus et obtenus, y compris également les méthodes d'évaluation utilisés ;
- le rôle des opérateurs , les résultats du contrôle par l'État de la qualité de leur gestion ainsi que le contenu et la mise en oeuvre des conventions.
L'article 134 de la loi de finances initiale pour 2017 29 ( * ) a ajouté à cette liste la présentation des abondements réellement opérés pour chaque programme, comparés aux prévisions initialement établies dans la convention entre l'État et l'opérateur, ainsi que « le financement effectif de la contribution au développement durable » pour chaque mission concernée.
Enfin , en vertu de l'article 179 de la loi de finances pour 2020 30 ( * ) , les crédits budgétaires labellisés « Grand plan d'investissement » - parmi lesquels figurent notamment les investissements d'avenir - font également l'objet d'une annexe générale au projet de loi de finances.
Sont présentés dans cette annexe :
- un récapitulatif des crédits consacrés au plan, par mission, programme et action au cours des trois précédents exercices, ainsi que la prévision d'exécution pour l'exercice en cours et la prévision d'exécution pour les trois années à venir ;
- un bilan détaillé des mesures financées au titre de ce plan pour l'ensemble des administrations publiques ;
- une présentation exhaustive et par année des modifications apportées à la répartition initiale des crédits ;
- une présentation, pour les trois exercices précédents, l'exercice en cours et l'exercice à venir, des conséquences sur les finances publiques des investissements financés par les crédits relevant du plan , en particulier leurs conséquences sur le montant des dépenses publiques, des recettes publiques, du déficit public et de la dette publique, en précisant les administrations publiques concernées ;
- les résultats attendus et obtenus , mesurés au moyen d'indicateurs précis dont le choix est justifié ;
- une présentation des dispositifs de sélection des projets et programmes financés dans le cadre de ce plan ainsi que des méthodes d'évaluation retenues pour mesurer les résultats obtenus.
2. La transmission périodique d'informations supplémentaires aux commissions des finances
Les commissions des finances, ainsi que les autres commissions compétences des deux assemblées sont également destinataires des projets de conventions , en amont de leur signature entre l'État et les opérateurs, ainsi que leurs éventuels avenants ( B du II de l'article 8 précité ).
En vertu de l'article 134 de la loi de finances initiale pour 2017 31 ( * ) , ces conventions doivent notamment préciser le « rythme prévisionnel d'abondement des fonds des programmes de la mission "Investissements d'avenir" [...] » afin d'améliorer l'information dont dispose le Parlement.
Les commissions sont également informées des projets de redéploiements de crédits qui modifient la répartition initiale des fonds entre les différentes actions des programmes, avant d'être approuvés par le Premier ministre ( III de l'article 8 précité ).
À la réception de ces documents, les commissions ont la possibilité d'adresser au Premier ministre « toutes observations qui leur paraissent utiles ».
En parallèle, le Secrétariat général pour l'investissement transmet trimestriellement à ces commissions un bilan des financements des PIA , en présentant à la fois les engagements et les décaissements, par nature de financement, par opérateur et par action, ainsi que le taux de cofinancement.
Enfin, les commissions concernées sont informées chaque trimestre de la situation et les mouvements des comptes au trésor sur lesquels sont déposés les fonds des organismes gestionnaires ( III de l'article 8 précité ).
D. LA SUBSTITUTION DU PLAN DE RELANCE AU LABEL « GRAND PLAN D'INVESTISSEMENT »
Annoncé par le Premier ministre le 25 septembre 2017, le Grand plan d'investissement prévoyait de mobiliser 57 milliards d'euros, entre 2018 et 2022, sur 4 axes de transformation prioritaires pour le Gouvernement :
- transition écologique ;
- compétences ;
- compétitivités et innovation ;
- transition numérique de l'État.
En pratique, le GPI reposait sur la mobilisation de crédits budgétaires ministériels et de crédits issus du troisième programme d'investissements d'avenir, ainsi que sur le fléchage de crédits de l'Assurance maladie et sur des instruments financiers de prêts ou de fonds propres de la Caisse des dépôts et consignations, de Bpifrance et de la Banque européenne d'investissement.
Doté de 100 milliards d'euros en réponse à la crise sanitaire , le plan France Relance s'inscrit dans la continuité des principes du GPI, avec une gouvernance interministérielle ad hoc , adossé à un suivi régulier des résultats.
Les trois axes du plan de relance - verdissement, indépendance et compétitivité, cohésion territoriale et sociale - reprennent très largement les thématiques du GPI . Ces initiatives poursuivent par ailleurs le même objectif d'accompagnement des réformes structurelles et de transformation de l'économie.
Par conséquent, le plan France Relance se substitue désormais au label GPI ; cette évolution n'emporte pas de conséquence directe sur les actions initiées dans le cadre du GPI ou les instances créées pour la mise en oeuvre de programmes spécifiques (Fonds de transformation de l'action ou Programme d'investissement d'avenir), qui sont maintenues et font l'objet d'une présentation budgétaire classique.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A. LA DÉFINITION DES MODALITÉS DE GOUVERNANCE DU PIA 4
1. La création d'un PIA 4, obéissant aux mêmes règles de gestion et de budgétisation que le PIA 3
Le b du 1 du I et le b du 2 du I étendent au PIA 4 les règles de fonctionnement et de budgétisation applicables au PIA 3 - à savoir principalement un fonctionnement par appels à projets gérés par des opérateurs spécialisés et un suivi spécifique de la dépense au sein des conventions conclues avec ces opérateurs.
Doté de 20 milliards d'euros sur cinq ans, le PIA se composera de deux programmes distincts, correspondant à deux volets d'action :
- un volet « dirigé » , porté par le programme 424, visant à financer des investissements exceptionnels sur l'ensemble du continuum innovation, pour un montant total de 12,5 milliards d'euros ;
- un volet « structurel » , mis en oeuvre par le programme 425 et ayant pour objectif de garantir un financement pérenne et prévisible aux écosystèmes d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation mis en place par les précédents PIA, pour un montant total de 7,5 milliards d'euros sur cinq ans.
En pratique, de nouvelles conventions entre l'État et les opérateurs devront entrer en vigueur en 2021 pour régir les modalités de mise en oeuvre de ces nouveaux programmes.
2. Des aménagements relatifs à la gouvernance et du fonctionnement des PIA
a) Un renouvellement du rôle du Comité de surveillance
Le 4 du I étend les missions du Comité de surveillance des investissements d'avenir.
Actuellement chargé d'évaluer le programme d'investissements et de dresser un bilan annuel de son exécution, ce comité devra désormais également conseiller le Gouvernement sur les priorités d'investissement du programme .
L'étude d'impact précise, en sus, qu'un décret du Premier ministre sera pris pour modifier la composition du comité de surveillance.
b) Un renforcement des obligations d'informations à destination du Parlement
Le c du 2 du I prévoit un renforcement des obligations d'information à destination du Parlement, avec la transmission annuelle aux commissions des finances ainsi qu'aux autres commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat d'une liste récapitulative des conventions et avenants signés entre l'État et les organismes gestionnaires et publiés au Journal officiel .
c) Une prolongation exceptionnelle de la durée des conventions
Le a du 2 du I autorise, à titre exceptionnelle, la prolongation pour cinq ans de la durée des conventions entre l'État et les organismes gestionnaires des fonds des trois premiers programmes d'investissements d'avenir.
Ces conventions pourront être prorogées à deux conditions :
- la prolongation ne doit pas permettre d'engager de nouvelles dépenses, hors frais de gestion et d'expertise ;
- la prolongation a uniquement pour finalité d'assurer la fin progressive de l'action considérée et les retours financiers vers l'État.
Cette disposition a également vocation à s'appliquer aux actions qui ont octroyé des prêts par le passé, ou à celles qui sont associées à des fonds d'investissements financés par les fonds propres du PIA.
Le 3 du I du présent article précise, en parallèle, que les fonds conservés par l'Agence nationale de la recherche sont « fongibles et rassemblées sur un même compte », les intérêts de ces fonds étant affectés au « financement structurel de l'enseignement supérieur, de la recherche et de sa valorisation ».
Par conséquent, les dotations non consommables issues des PIA 1 et 2 demeureront mobilisables pendant 5 années supplémentaires ; les intérêts générés par ces dotations pourront en parallèle être redéployés au profit d'autres structures du PIA ayant vocation à financer l'enseignement supérieur, la recherche et la valorisation.
B. LA FORMALISATION D'UNE DOCTRINE D'INVESTISSEMENT POUR LES PROGRAMMES D'INVESTISSEMENTS D'AVENIR
Le c du 1 du I énonce une nouvelle doctrine d'investissement pour le programme d'investissements d'avenir, formalisée en cinq points.
1. Des investissements réservés aux financements innovants
Le premier point de la doctrine se réfère à la nature des projets financés. Ces derniers doivent être innovants et destinés à poursuivre un des trois objectifs suivants :
- augmenter le potentiel de croissance de l'économie ;
- accélérer la transition écologique ;
- augmenter la résilience de l'organisation socio-économique du pays.
2. Une sélection transparente des projets financés
La doctrine s'attache également à préciser le mode de sélection des projets soutenus par les crédits des PIA. Ces derniers doivent être retenus au terme de procédures « ouvertes et objectives, favorisant la concurrence ».
Cette exigence se traduit par la publication des critères de sélection et l'évaluation systématique des projets , dans leur potentiel comme dans leurs risques, par « des experts indépendants ou des jurys comprenant le cas échéant des personnalités étrangères ».
Parmi les critères appréciés figurent notamment la capacité d'entraînement des projets , qui doivent contribuer à structurer la coopération entre acteurs tout au long du continuum enseignement-recherche-innovation.
Enfin, les processus de sélection et de suivi des projets font l'objet d'un examen périodique destiné à accroître leur efficacité.
3. La recherche d'un retour sur investissement
Les programmes d'investissements d'avenir se distinguent des autres types d'investissement public en ce que les projets sélectionnés doivent présenter un retour sur investissement , « financier ou non ».
Concrètement, selon le « jaune budgétaire » relatif aux PIA annexé au projet de loi de finances, cette exigence implique :
- de privilégier la constitution d'actifs financiers (matériels ou incorporels) ;
- d'exiger un engagement à long terme des porteurs de projets , lorsque la constitution d'actifs tangibles n'est pas envisageable, de manière à garantir la pérennité des projets ;
- de réserver les subventions et avances remboursables à la phase la plus amont de l'innovation , de manière à obtenir un retour financier en cas de succès ;
Il est également précisé dans les documents budgétaires que le retour sur investissement peut prendre la forme d'une externalité positive bénéficiant à l'ensemble de la société .
4. L'obligation de cofinancer les projets
Les projets doivent être cofinancés . L'origine de ces cofinancements peut être privée, publique ou européenne.
5. La publicité des décisions d'investissement
Le choix des investissements doit être fait en toute transparence et ainsi, les décisions d'investissement ainsi que les éléments ayant contribué à leur sélection sont rendues publiques , « dans le respect des dispositions relatives au secret des affaires ».
C. LA SUPPRESSION DE L'ANNEXE GÉNÉRALE RELATIVE AU GPI
Le II du présent article abroge le 27 de l'article 179 de la loi de finances pour 2020, au terme duquel le projet de loi de finances comporte une annexe générale relative au Grand plan d'investissement (GPI).
En effet, le label GPI étant remplacé par le plan de relance, la présentation de cette annexe devient sans objet . C'est désormais par le biais des documents budgétaires annexés à la mission « Plan de relance » que se fera le suivi des crédits labellisés « France Relance ».
III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a adopté deux amendements avec un avis favorable du Gouvernement.
Le premier, à l'initiative de Marie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale des crédits de la mission « Investissements d'avenir », procède à une coordination.
Le second, présenté par Barbara Bessot Ballot a été rectifié sur proposition du Gouvernement. Initialement destiné à intégrer la prise en compte de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance parmi les critères de sélection des investissements d'avenir, définis dans la doctrine, cet amendement substitut à l'expression « non-financier » le terme « extrafinancier ».
Ainsi, il est donc énoncé au sein de la doctrine des investissements d'avenir que « les décisions d'investissement sont prises en considération d'un retour sur investissement, financier ou extrafinancier ».
IV. LA POSITION DE LA COMMISSION
A. UN RENOUVELLEMENT OPPORTUN DE LA GOUVERNANCE DES PIA
Les modifications apportées à la gouvernance des investissements d'avenir reprennent, en grande partie, les recommandations du Comité de surveillance.
À ce titre, elles visent à pallier certaines carences relevées par la commission des finances du Sénat, à commencer par le faible degré d'inter-ministérialité observée jusqu'alors . Lors du lancement du troisième programme d'investissements d'avenir, la commission soulignait en effet qu'il convenait de veiller davantage à ce que l'ensemble des crédits alloués participent d'une stratégie globale réfléchie et concertée .
À cet égard, la création d'un Conseil interministériel de l'innovation est révélatrice d'une prise de conscience bienvenue et mérite d'être saluée. Pour le rapporteur spécial, seule une gouvernance de très haut niveau sera en effet en mesure de garantir un alignement entre les priorités stratégiques des différents ministères.
Le renforcement du rôle du Comité de surveillance, désormais chargé de conseiller le Gouvernement sur les priorités du programme , constitue également une initiative opportune. Il appartiendra donc au Comité de veiller à la cohérence de la stratégie d'ensemble , et notamment d'identifier les champs d'investissement prioritaires.
Le rapporteur spécial note cependant que les termes retenus laissent une grande marge d'appréciation à l'administration ; il sera donc loisible au Gouvernement d'associer plus ou moins étroitement le Comité de surveillance aux décisions stratégiques en matière d'investissements d'avenir . Il conviendra donc de suivre avec attention les modalités pratiques de mise en oeuvre de ces nouvelles prérogatives.
S'agissant du contrôle exercé par le Parlement, le rapporteur spécial a déjà eu l'occasion de s'exprimer sur la complexité inhérente au suivi des PIA . En effet, le suivi des montants inscrits dans le PIA 3 se révélait déjà particulièrement complexe, en raison de la double comptabilité induite par l'architecture retenue, mais également de la dispersion des crédits , ainsi que de l'ampleur et de la fréquence des redéploiements opérés en cours de gestion.
De ce point de vue, force est de constater que la nouvelle maquette de la mission « Investissements d'avenir », avec la contemporanéité de deux PIA et des débudgétisations supplémentaires aggrave encore la situation .
Or, comme l'a rappelé le Comité de surveillance, compte tenu du caractère dérogatoire du cadre budgétaire applicable, la pérennisation des investissements d'avenir ne pourra être équilibrée vis-à-vis du Parlement que « si les principes d'additionnalité et les exigences en termes de reporting et d'évaluation des actions sont respectées » 32 ( * ) .
Si les efforts visant à étayer les informations dont dispose la représentation sont bien évidemment appréciables, la multiplication des annexes et obligations déclaratives ne saurait à elle-seule pallier le déficit de lisibilité dont souffre la mission « Investissements d'avenir » .
Pour le rapporteur spécial, il importe en parallèle de simplifier l'architecture d'ensemble , afin de faciliter le suivi et le contrôle de ces crédits dérogeant très largement aux règles budgétaires.
B. UN EFFORT NÉCESSAIRE DE FORMALISATION DE LA DOCTRINE DES PIA
La définition d'une doctrine d'investissement pour les investissements d'avenir répond également à une recommandation du Comité de surveillance. Cet effort est bienvenu ; la formalisation d'une doctrine confère un caractère pérenne aux PIA, tout en constituant un garde-fou utile . Elle a surtout le mérite de définir les conditions à respecter pour que ces crédits soient employés de la manière la plus efficace et efficiente possible.
Le rapporteur spécial note cependant que les principes énoncés demeurent nettement plus ouverts que ce que préconisait le Comité. À titre d'exemple, si ce dernier notait que les investissements d'avenir doivent financer « des actions à caractère transformant et/ou innovant et non des politiques publiques pérennes et récurrentes (...) », le présent article se contente d'affirmer que les projets financés doivent être innovants.
Le rapporteur spécial s'interroge donc sur la portée des grands principes énoncés dans la doctrine, peu susceptibles de constituer un verrou effectif .
Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.
* 24 Loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.
* 25 Rapport au Président de la République, « Investir pour l'avenir, Priorités stratégiques d'investissement et emprunt national ».
* 26 Pour une présentation des deux précédents programmes d'investissements d'avenir, voir ci-dessus la présentation de la mission.
* 27 Article 134 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 28 Convention du 23 septembre 2010 entre l'Etat et l'ANR relative au programme d'investissements d'avenir (action « initiatives d'excellence »)
* 29 Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 30 L'article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 rassemble les fondements juridiques de l'ensemble des annexes générales appelées « jaunes budgétaires ». Il abroge, par conséquent, les fondements législatifs initiaux de ces articles.
* 31 Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 32 Ibid.