MISSION « ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT
ET
MOBILITÉ DURABLES »,
CAS « AIDE À
L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES », « TRANSITION
ÉNERGÉTIQUE » ET « FACÉ »
m. jean-françois husson, rapporteur spécial
SOMMAIRE
Pages
I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2019 335
1. Une augmentation des crédits de la mission par rapport à 2018 335
2. Une mission peu concernée par des mesures de régulation budgétaire en 2019 337
3. Un plafond d'emplois bien respecté 338
II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL 340
1. D'importants mouvements de crédits à destination du programme 174, pour faire face à la sous-budgétisation de la prime à la conversion 340
2. Un coût des dépenses fiscales qui représente le tiers des crédits de paiement de la mission en 2019 et s'élève à 4,7 milliards d'euros 341
3. Un poids important des dépenses extrabudgétaires pour le financement des politiques publiques portées par la mission 344
III. LES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE : LE PROGRAMME 345 « SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE » ET LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « TRANSITION ÉNERGÉTIQUE » 345
1. Un programme 345 « Service public de l'énergie » marqué en 2019 par la distribution d'un chèque énergie à 5,7 millions de ménages 346
2. Les crédits consommés du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » ont poursuivi leur progression en 2019 349
IV. DES AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES DONT LE MONTANT A PLUS QUE DOUBLÉ EN 2019 352
1. Le montant des aides à l'acquisition de véhicules propres a dépassé le milliard d'euros en 2019 354
2. Des recettes du malus en net retrait de - 19,2 % par rapport à 2018 356
3. Les bonus ont pour la première fois en 2019 excédé les prévisions, avec plus de 50 000 aides à l'acquisition de véhicules électriques distribuées 358
4. 376 831 primes à la conversion ont été distribuées en 2019, pour un coût budgétaire en hausse de 125,6 % par rapport à 2018 360
V. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « FINANCEMENT DES AIDES AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE (FACÉ) » 363
1. Le compte d'affectation spéciale FACÉ permet le financement d'aides à l'électrification rurale 363
2. Une nette augmentation de la consommation des crédits de paiement en 2019 en raison d'une sensibilisation des AODE à la nécessité de demander des acomptes au fil de l'avancement des travaux 364
3. La sur-exécution des crédits du programme 193 témoigne d'une amélioration constante de la gestion du FACÉ 366
4. Le problème de la sous-exécution systématique des crédits du programme 794 n'a pas été résolu en 2019, même s'il s'est légèrement atténué grâce à la baisse des crédits prévus en loi de finances initiale 368
I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2019
1. Une augmentation des crédits de la mission par rapport à 2018
En loi de finances initiale pour 2019, la mission « Écologie, développement et mobilité durables » bénéficiait de 14,4 milliards d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et de 14,3 milliards d'euros de crédits de paiement (CP), soit respectivement 1,3 milliard d'euros d'autorisations d'engagement et 765 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires par rapport à 2018.
Exécution des crédits de la mission
« Écologie, développement et mobilité
durables » par programme en 2019, y compris fonds de concours
et
attributions de produits
(en millions d'euros et en %)
Programme |
Crédits exécutés 2018 |
Crédits votés LFI 2019 |
Crédits exécutés 2019 |
Exécution 2019 / exéc. 2018 (en %) |
Exécution 2019 / LFI 2019 (en %) |
|
203 «Infrastructures et services de transport » |
AE |
4 950,1 |
5 418,0 |
5 415,2 |
+ 9,4 % |
- 0,1 % |
CP |
5 399,1 |
5 265,5 |
5 221,8 |
- 3,3 % |
- 0,8 % |
|
205 «Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » |
AE |
160,4 |
170,5 |
167,4 |
+ 4,4 % |
- 1,8 % |
CP |
162,8 |
164,8 |
157,3 |
- 3,4 % |
- 4,5 % |
|
113 «Paysages, eau et biodiversité» |
AE |
150,1 |
175,6 |
167,0 |
+ 11,2 % |
- 4,9 % |
CP |
150,8 |
171,8 |
159,4 |
+ 5,7 % |
- 7,2 % |
|
159 «Information géographique et cartographique» |
AE |
512,2 |
513,2 |
507,3 |
- 0,9 % |
- 1,1 % |
CP |
507,4 |
513,2 |
507,9 |
+ 0,1 % |
- 1,0 % |
|
181 «Prévention des risques» |
AE |
794,6 |
847,5 |
800,0 |
+ 0,7 % |
- 5,6 % |
CP |
792,9 |
841,4 |
811,5 |
+ 2,4 % |
- 3,5 % |
|
174 «Énergie, climat et après-mines» |
AE |
442,8 |
996,2 |
1 174,5 |
+ 165,2 % |
+ 17,9 % |
CP |
502,6 |
996,2 |
1 227,1 |
+ 144,2 % |
+ 23,2 % |
|
345 « Service public de l'énergie » |
AE |
3 096,1 |
3 297,5 |
3 815,0 |
+ 23,2 % |
+ 15,7 % |
CP |
2 976,7 |
3 319,4 |
3 248,6 |
+ 9,1 % |
- 2,1 % |
|
217 «Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables» |
AE |
2 979,6 |
2 973,5 |
2 952,6 |
- 0,9 % |
- 0,7 % |
CP |
3 025,2 |
3 011,0 |
2 991,2 |
- 1,1 % |
- 0,7 % |
|
Total |
AE |
13 086,0 |
14 392,0 |
14 999,0 |
+ 14,6 % |
+ 4,2 % |
CP |
13 517,4 |
14 283,2 |
14 324,9 |
+ 6,0 % |
+ 0,3 % |
AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Cette hausse traduisait en partie l'augmentation des moyens alloués aux politiques portées par la mission en 2019, notamment :
- la dynamique importante des dépenses portées par le programme 345 « Service public de l'énergie » , qu'il s'agisse des dispositifs liés à la péréquation tarifaire en faveur des zones non interconnectées, du soutien à la cogénération, de la budgétisation de dépenses liées à la fermeture de la centrale de Fessenheim ou de la montée en puissance du chèque énergie (5,7 millions de bénéficiaires en 2019 contre 3,6 millions en 2018 119 ( * ) ) ;
- l'augmentation des moyens alloués au programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » , en raison du financement du « plan biodiversité » ;
- l'intégration du dispositif de la prime à la conversion au programme 174 « Énergie, climat et après-mines », dispositif jusqu'alors financé par le compte d'affectation spéciale « Aide à l'acquisition de véhicules propres ».
Les dépenses de la mission en 2019 s'élèvent, en exécution, à 15 milliards d'euros en AE et à 14,3 milliards d'euros en CP, ce qui représente des augmentations respectives de 14,6 % et de 6 % par rapport à l'exécution 2018 . Le taux de consommation des crédits s'élève donc à 104 % des AE et 100,3 % des CP votés.
Le programmes 174 « Énergie, climat et après-mines » présente une consommation d'AE et de CP supérieure aux crédits votés, en raison principalement d'une sous-budgétisation du dispositif de la prime à la conversion (cf. infra ).
Certains programmes enregistrent quant à eux une sous-exécution des crédits votés. S'agissant du programme 113, près de 160 millions d'euros ont été consommés en 2019, soit près de 6 % de plus qu'en 2018 - mais 7 % de moins que les prévisions inscrites en loi de finances initiales. 9 millions d'euros de CP ont en effet été annulés en loi de finances rectificative.
La loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 fixe à 10,55 milliards d'euros le plafond des crédits de la mission pour 2019 (hors CAS Pensions). Les changements opérés en 2019 sur le périmètre de la mission ne permettent pas d'analyser le respect de l'annuité 2019 telle que prévue par la loi de programmation. Ce montant est nécessairement sur-exécuté, dès lors qu'il correspond à l'exécution 2018, hors CAS Pensions. Toutefois, les perspectives de dépenses pour les années à venir appellent à une grande vigilance car certains programmes, en particulier le programme 345, connaissent une dynamique haussière. S'agissant par exemple du programme 345, toutes les actions sont concernées par cette tendance à la hausse : les mesures en faveur des zones non interconnectées, le chèque énergie, le soutien à la cogénération.
2. Une mission peu concernée par des mesures de régulation budgétaire en 2019
Dans le sillage de l'exécution 2018, le taux de mise en réserve initiale des crédits de la mission est relativement faible : il a été maintenu à 3 % hors titre 2 et à 0,5 % pour le titre 2 - à l'exception du programme 174, dont les crédits ont fait l'objet d'une mise en réserve plus importante, de 5 %, ne concernant ni les crédits de prime à la conversion ni les crédits alloués au Grand Plan d'Investissement (GPI). Dès lors, les crédits votés présentent un taux de consommation plus important, renforcé par les moindres annulations de crédits en cours de gestion.
247 millions d'euros en CP hors titre 2 ont été gelés en début d'année, auxquels s'est ajouté le gel d'une partie des reports de crédits, à hauteur de 14 millions d'euros. 20 % ont été libérés en cours de gestion. En AE, hors titre 2, 44 % des 271 millions d'euros gelés ont été libérés. Ainsi, comme en 2018, les crédits réservés n'ont pas fait l'objet d'une annulation intégrale au cours de la gestion 2019.
En outre, la mission n'a fait l'objet d'aucun décret d'avance ou d'annulation : les crédits ont été annulés via la loi de finances rectificative , et au surplus, ont principalement porté sur les crédits mis en réserve. 78,4 millions d'euros d'AE hors titre 2 ont été annulés en 2019 et 80,5 millions d'euros de CP hors titre 2, ce qui représente moins de 1 % des crédits disponibles.
Le rapporteur spécial partage le constat de la Cour des comptes : « ce niveau d'annulation est sans commune mesure par rapport aux années antérieures à 2018 ou même 2018 » 120 ( * ) . Le faible niveau d'annulation permet un meilleur accomplissement des missions du ministère et des opérateurs autant qu'il renforce la sincérité de la budgétisation initiale.
Néanmoins, le calibrage insuffisant des besoins relatifs à la prime à la conversion, budgétée sur le programme 174 en 2019, a entraîné un dépassement des crédits initialement prévus sur le programme et des mouvements réglementaires de crédits : le décret n° 2019-845 du 19 août 2019 a ainsi viré 20 millions d'euros de crédits du programme 345 vers le programme 174 ; ce dernier programme a par ailleurs bénéficié, outre des ouvertures en loi de finances rectificative, d'une ouverture de 70 millions d'euros de crédits par le décret n° 2019-1165 du 12 novembre 2019 afin de permettre à l'Agence de services et de paiement d'assurer le paiement des primes à la conversion (cf. infra ).
3. Un plafond d'emplois bien respecté
Les dépenses de personnel ( titre 2 ), qui représentent 19,5 % des CP exécutés de la mission, sont réparties entre le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement durable et de la mer » et le programme 181 « Prévention des risques », auquel sont rattachées les dépenses de personnel de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). La quasi-totalité des crédits et des emplois sont imputés sur le programme 217 (2,76 milliards d'euros sur 2,8 milliards d'euros) .
Le plafond d'autorisations d'emplois (PAE) a quasiment été respecté. La loi de finances initiale prévoyait un PAE de 39 373. Or, en exécution, il s'est élevé à 39 287 ETPT , soit une sous-exécution de 86 ETPT (moins de 1 % des emplois exécutés), contre une sous-exécution de 78 ETPT en 2018.
Exécution du plafond d'emplois de la mission entre 2017 et 2019
(en ETPT)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Le plafond d'emplois de la mission a donc connu une diminution de 1 800 ETPT ces trois dernières années. La Cour des comptes rappelle que la diminution du plafond d'emplois s'élève même à près de 47 % depuis 2008, année où le plafond d'emplois atteignait 73 986 ETPT.
Le schéma d'emplois est donc respecté : l'exécution atteint ainsi - 811 équivalents temps plein (ETP) contre une prévision de - 806. La sur-exécution n'est donc que de 5 ETP.
Le rapporteur spécial partage cependant une nouvelle fois les inquiétudes formulées par la Cour des comptes 121 ( * ) s'agissant de la déqualification de la structure des emplois du ministère .
Depuis 2014, la sur-exécution des schémas d'emplois est allée de pair avec un moindre recrutement d'agents de catégories A et B que prévu et davantage de recrutements d'agents de catégorie C. Si ce procédé permet une moindre consommation de crédits de personnel, il participe d'un processus de « dépyramidage » dont les effets en matière de perte de compétences sont particulièrement dommageables en termes de gestion des ressources humaines. Néanmoins, la Cour note que cette tendance est moins marquée en 2019, le schéma des emplois de catégorie A ayant, pour la première fois, été sous-exécuté : depuis 2014, 492 emplois de catégorie A ont été détruits au-delà des cibles pour « créer » 898 emplois de catégorie C.
* 119 Rapport annuel de performance annexé à la présente mission, p. 8.
* 120 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2019 de la mission : en CP, 434 millions d'euros en 2017, 361 en 2016, 464 en 2015, et 114,6 millions d'euros en 2018.
* 121 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2019 de la mission.