EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le vendredi 20 mars 2020 sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2020.

M. Vincent Éblé , président . - Je vous remercie vivement de votre présence. Nous sommes réunis ce matin non seulement dans des circonstances exceptionnelles, mais aussi dans une configuration particulière, puisque nous avons volontairement restreint, pour des raisons sanitaires, la présence en commission. Je remercie nos collègues qui ont accepté de ne pas prendre part à la réunion, et qui pourront intervenir en séance publique. La salle a été préparée pour respecter les distances entre nous et a fait l'objet d'une désinfection préalable.

Comme vous le savez, le Gouvernement a déposé un projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2020 afin de tirer les conséquences du nouveau contexte économique, d'apporter un soutien budgétaire notamment par des mesures en faveur de l'activité partielle, et d'accorder une garantie bancaire de l'État à hauteur de 300 milliards d'euros, pour les emprunts contractés pour leurs besoins de trésorerie par les entreprises.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Alors que la France est confrontée à une crise sanitaire sans précédent, mes premières pensées vont naturellement aux victimes de cette épidémie, ainsi qu'à l'ensemble des soignants qui s'efforcent jour et nuit d'en limiter l'ampleur. Je tiens également à vous remercier pour votre présence et à saluer nos collègues qui n'ont pas pu être là, du fait des mesures de distanciation sociale que nous sommes contraints de mettre en oeuvre au Sénat comme partout ailleurs dans le pays.

Nous sommes réunis ce matin pour examiner en urgence un projet de loi de finances rectificative déposé il y a deux jours seulement et dont il y a fort à parier qu'il sera le premier d'une longue série. Il ne s'agit pas d'un plan de relance, mais plutôt d'un plan de sauvetage.

Le Gouvernement a dû revoir considérablement son scénario macroéconomique. Il tablait initialement sur une croissance de 1,3 % en 2020. Cette hypothèse était déjà compromise par le recul surprise du PIB de 0,1 % enregistré au dernier semestre de l'année 2019. Avec la crise sanitaire, elle est désormais caduque. La propagation du coronavirus à l'échelle mondiale, qui a conduit à la mise en oeuvre de mesures de confinement de plus en plus strictes en France et à travers le monde, constitue un choc d'une ampleur inédite depuis 2009. Nous avions dû à l'époque adopter successivement plusieurs lois de finances rectificatives.

L'économie française est confrontée à la fois à un choc d'offre, lié principalement aux absences au travail et à la perturbation des chaînes de production, et à un choc de demande, dû au report des décisions de consommation et d'investissement des agents économiques ainsi qu'à la contraction de la demande de nos partenaires commerciaux.

À ce stade, il est toutefois très difficile d'apprécier l'effet cumulé de ces différents chocs sur la croissance. J'observe d'ailleurs que l'Insee et la Banque de France ont temporairement renoncé à leur exercice de prévision habituel.

Pour sa part, le Gouvernement anticipe désormais un recul du PIB de 1 % en 2020. Il s'agirait du deuxième plus fort recul du PIB de l'après-guerre, juste derrière l'année 2009. Dans son exposé général, le Gouvernement suggère que cette nouvelle hypothèse présenterait un caractère central au regard des estimations disponibles. Toutefois, les évaluations de l'OCDE et de la Banque centrale européenne (BCE) auxquelles se réfère le Gouvernement apparaissent déjà datées. En effet, plusieurs développements intervenus depuis lors indiquent que le recul du PIB pourrait être plus fort qu'anticipé, notamment si la durée du confinement s'avère plus longue que prévu.

Tout d'abord, les premières données chinoises sur le ralentissement observé au cours des deux premiers mois de l'année suggèrent un effet économique des mesures de confinement nettement plus fort qu'escompté. Certains analystes anticipent désormais un recul de l'activité de 10 % en Chine sur le premier trimestre.

En outre, le scénario de croissance du Gouvernement repose sur deux hypothèses fortes qui sont tout sauf acquises, à savoir un confinement limité à un mois et un retour rapide à la normale de la demande française comme étrangère. Le Haut Conseil des finances publiques a d'ailleurs souligné la fragilité de ces hypothèses dans son avis.

Au regard des évolutions des derniers jours, la prévision du Gouvernement me paraît en réalité plutôt optimiste et se situer dans la fourchette haute des estimations. Si l'hypothèse retenue est très proche de celle qui a été présentée le 13 mars dernier par la Commission européenne et de celle qui a été retenue par Goldman Sachs le 16 mars, d'autres banques et instituts sont désormais beaucoup plus pessimistes. La banque américaine Morgan Stanley anticipe par exemple un recul de l'activité de 4,8 % en France en 2020. Un recul du PIB nettement plus fort qu'anticipé ne peut donc pas être exclu.

J'en viens maintenant aux effets de la crise sanitaire sur la trajectoire de redressement des comptes publics et à l'analyse de la stratégie budgétaire du Gouvernement.

Cette crise sanitaire intervient dans un contexte budgétaire malheureusement contraint. Dans le cadre de nos travaux, nous avons régulièrement souligné que le choix des majorités successives de reporter l'ajustement structurel des comptes publics risquait de rendre l'économie française vulnérable face aux chocs. Nous y sommes ! Pour ne donner qu'un chiffre, la France est, avec l'Italie, le seul grand pays de la zone euro dont la part de la dette dans la richesse nationale a augmenté entre 2014 et 2019. L'écart avec l'Allemagne atteint désormais 40 points de PIB. Vous connaissez tout cela par coeur.

Faut-il pour autant que l'État renonce à soutenir les entreprises et les salariés ? Évidemment que non.

L'absence de mesures de soutien risquerait tout d'abord de dégrader durablement les perspectives de croissance de l'économie française.

En outre, la France dispose de deux atouts pour mener à bien ces mesures de soutien. Tout d'abord, elle continue de bénéficier d'un haut degré de confiance sur les marchés financiers. L'écart de coût de financement avec l'Allemagne se situe à un niveau très faible - 40 points de base - par rapport à la plupart des pays voisins et au point haut atteint lors de la crise des dettes souveraines - 190 points de base fin 2011. Enfin, la France peut compter sur le plein soutien de la BCE, qui a d'ailleurs annoncé avant-hier un nouveau programme d'achat d'obligations à hauteur de 750 milliards d'euros, en réponse au durcissement des conditions de financement qui commençait à se matérialiser.

Dans ce contexte, je partage la stratégie budgétaire de soutien proposée par le Gouvernement, qui comporte deux volets. Tout d'abord, laisser jouer les « stabilisateurs automatiques », en ne cherchant pas à augmenter les impôts ou à diminuer les dépenses pour atteindre les objectifs budgétaires initialement fixés pour 2020. La faiblesse de la croissance va en effet se traduire naturellement par une perte de recettes et une augmentation des dépenses sociales. Ainsi, la dégradation de la conjoncture pèse sur le déficit public à hauteur de 1,4 point de PIB.

En complément, des mesures de soutien budgétaire à vocation « défensive » ont été légitimement annoncées par le Gouvernement afin de permettre aux entreprises et aux travailleurs de surmonter le choc temporaire lié aux mesures de confinement.

Le Gouvernement communique sur un montant de 45 milliards d'euros de mesures de soutien immédiates et met par ailleurs en avant les 300 milliards d'euros de prêts garantis par l'État - une loi de finances rectificative était donc nécessaire, un décret d'avance budgétaire n'aurait pas suffi.

L'impact de ce « paquet » de mesures sur les indicateurs maastrichtiens est nettement plus faible à ce stade, car l'essentiel des mesures de soutien consiste en un simple étalement de charges fiscales et sociales, tandis que les garanties constituent un engagement « hors bilan » de l'État.

Le coût budgétaire au titre de l'exercice 2020 pris en compte par le Gouvernement se limite ainsi à 11,5 milliards d'euros : 8,5 milliards d'euros pour le dispositif exceptionnel de chômage partiel - État et Unédic - ; 2 milliards d'euros pour les dépenses additionnelles de santé et 1 milliard d'euros pour le fonds de solidarité en faveur des très petites entreprises (TPE).

Au total, la prévision de déficit public s'en trouve d'ores et déjà fortement dégradée, passant de 2,2 % du PIB initialement prévu à 3,9 % du PIB à l'issue de l'exercice 2020. Le dépassement du seuil de 3 % du PIB ne conduira toutefois pas à l'ouverture d'une procédure pour déficit excessif, dès lors que la Commission européenne a indiqué être prête à activer la « clause de sauvegarde » prévue par les traités.

Il peut être noté que le Gouvernement n'a pas souhaité communiquer sur l'évolution de sa prévision d'endettement. Interrogé sur ce point, il a seulement indiqué que « la dette publique dépassera les 100 points de PIB cette année ». Je l'estime pour ma part à 102,5 % du PIB, en tenant compte de la dégradation de la croissance et des mesures de soutien.

Il y a néanmoins fort à parier que le scénario gouvernemental sera, de nouveau, substantiellement modifié dans les prochaines semaines, tant celui-ci apparaît soumis à des aléas d'une ampleur inédite.

La prévision de croissance constitue naturellement la principale source d'interrogation. À titre d'illustration, un recul de 5 % du PIB en 2020, tel qu'envisagé par les instituts de conjoncture les plus pessimistes, pèserait à hauteur de 2,4 points de PIB supplémentaires sur le déficit public de 2020, ce qui porterait ce dernier à 6,3 % du PIB, soit un niveau comparable à celui qui a été atteint pendant la crise de 2009.

À prévision de croissance inchangée, l'élasticité des recettes à la conjoncture constitue également un aléa notable. En effet, le Gouvernement table sur une élasticité des prélèvements obligatoires à l'activité économique unitaire, alors que l'élasticité est généralement faible lorsque l'économie ralentit.

Le coût des mesures de soutien annoncées pour faire face à la crise sanitaire constitue un troisième aléa majeur. En effet, le scénario budgétaire retenu pour l'exercice de 2020 suppose que les charges sociales et fiscales décalées soient intégralement remboursées et que les garanties octroyées ne soient pas appelées. Si tel n'était pas le cas, les indicateurs budgétaires maastrichtiens seraient grevés d'autant. Or, il est à craindre que de nombreuses entreprises fassent faillite et le mécanisme de soutien exclut les entreprises qui sont déjà placées sous le coup de la procédure de sauvegarde.

En outre, le calibrage des mesures de soutien « défensives » pourrait être revu à la hausse en fonction de la durée des mesures de confinement, en particulier s'agissant du dispositif rénové de chômage partiel.

Enfin, il ne peut être exclu que le Gouvernement décide dans les prochains mois de mettre en oeuvre des mesures de soutien « offensives », une fois l'épidémie du coronavirus endiguée. Après avoir « sauvé » le tissu économique, il conviendra probablement de mettre en oeuvre un plan de relance.

S'agissant à présent du budget de l'État et des articles du projet de loi de finances rectificative, je ne remettrai pas en cause les mesures proposées, qui ont pour objet de soutenir une économie qui risque de s'arrêter. Comme je viens de le rappeler, je ne peux toutefois que constater que l'absence de rétablissement des comptes de l'État depuis 2017 a conduit à priver le Gouvernement de toute marge de manoeuvre.

Les mesures présentées dégraderaient donc le solde budgétaire de l'État de 15,4 milliards d'euros, ce qui conduirait à amener le déficit budgétaire à un niveau de 108,5 milliards d'euros, contre 93,1 milliards d'euros prévus en loi de finances initiale. Le déficit budgétaire serait même de 109 milliards d'euros, l'Assemblée nationale ayant pris en compte, à la demande du Gouvernement, la baisse prévisible des recettes du contrôle et de l'exploitation aériens.

Cet impact porterait à la fois sur les recettes et sur les dépenses.

S'agissant des recettes, les prévisions sont particulièrement imprécises, car il est impossible à ce stade de savoir quelles seront les conséquences exactes de la crise sanitaire sur le rendement des impôts. Le texte prévoit donc une diminution de 10,7 milliards d'euros des recettes fiscales nettes, mais cela semble difficile à concevoir, car, en 2009, la perte de recettes fiscales avait été de 45 milliards d'euros.

Les deux impôts les plus affectés seraient l'impôt sur les sociétés (IS), à hauteur de 6,6 milliards d'euros, et la TVA, pour un montant de 2,2 milliards d'euros. Le rendement de l'impôt sur le revenu brut, avant prise en compte des remboursements et dégrèvements, serait quasiment identique à la prévision, ce qui peut surprendre compte tenu de l'effet potentiel de la crise sur les salaires versés. En outre, la part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) revenant à l'État n'évoluerait pas, malgré une évidente chute considérable de la consommation de carburant. D'après le Gouvernement, les autres affectataires subiraient cette baisse, or il s'agit des collectivités territoriales. Les mécanismes exacts devront être mieux expliqués et je ne manquerai pas d'interroger le gouvernement sur ce point.

S'agissant des dépenses, le texte que nous examinons comporte trois séries de mesures qui, toutes, tendent à soutenir l'activité des entreprises. Il s'agit donc non pas d'un plan de relance, mais plutôt d'un « plan de sauvetage » : c'est plus tard qu'il faudra aider les entreprises, en contribuant à relancer l'économie.

Deux mesures sont portées par une nouvelle mission budgétaire intitulée « Plan d'urgence face à la crise sanitaire ». Il faut, me semble-t-il, approuver la création d'une mission budgétaire spécifique, comme cela avait été le cas pour le plan de relance de l'économie en 2009. Les crédits seront ainsi sanctuarisés et traçables au travers des documents budgétaires.

Au sein de cette mission, le programme 356 « Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire » porte les crédits alloués par l'État au dispositif de soutien exceptionnel au chômage partiel. J'en rappellerai les principaux points : alors que le dispositif de droit commun s'arrête au niveau du SMIC, celui-ci soutiendra les salaires jusqu'à 4,5 fois le SMIC. Concrètement, l'entreprise verse une indemnité égale à 70 % du salaire brut, soit environ 84 % du salaire net, à ses salariés concernés. Les salariés au SMIC ou moins sont indemnisés à 100 %. L'entreprise sera entièrement remboursée par l'État, pour les salaires jusqu'à 4,5 fois le SMIC. Le coût budgétaire de ce dispositif, environ 8,5 milliards d'euros sur deux mois d'application, serait porté par l'État à hauteur de 5,5 milliards d'euros et par l'Unédic pour le complément, ce qui pourrait d'ailleurs porter atteinte au rétablissement des comptes de cet organisme.

Il convient sans doute d'approuver ce dispositif. Il a été massivement mis en place par l'Allemagne lors de la crise de 2008, ce qui a favorisé le maintien de l'emploi dans le pays. Soyons toutefois conscients que le coût final sera probablement supérieur si le dispositif est prolongé.

Le programme 357 « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire » prévoit la création d'un fonds spécifique à destination des très petites entreprises dont l'activité est fortement touchée par la crise sanitaire. Les bénéficiaires seraient des entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 1 million d'euros, qui connaissent une situation critique en raison des conséquences économiques de la crise sanitaire, malgré les effets des autres dispositifs d'accompagnement, et qui ont perdu 70 % de leur chiffre d'affaires en mars par rapport à l'année précédente. L'aide sera de 1 500 euros - c'est peu pour sauver une entreprise ! - sur déclaration, ou supérieure à ce montant sur présentation d'un dossier. Le coût total serait de 1 milliard d'euros, dont un quart serait mis à la charge des régions, voire de certaines grandes entreprises.

Là encore, le dispositif est loin d'être cadré. Si le texte évoque quelques secteurs comme la restauration et l'hôtellerie, il faudra mettre l'accent sur les effets de la crise sur la situation économique des entreprises, plus que sur leur appartenance à tel ou tel secteur. Nombre d'artisans, de petites entreprises de construction ou encore d'agriculteurs sont et seront affectés par les mesures de confinement. En outre, le seuil de 1 million d'euros de chiffre d'affaires, qui est égal à la moitié du seuil d'appartenance à la catégorie des micro-entreprises, paraît bien bas et assez arbitraire. Le seuil de 70 % de pertes, nécessaire pour bénéficier des aides, est-il lui aussi adapté ou faudra-t-il l'abaisser ?

M. Jean-Marc Gabouty . - Cette référence est contestable. Très peu d'entreprises auront perdu 70 % de leur chiffre d'affaires en mars, car elles ont fonctionné normalement jusqu'au 15 mars.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Ces mesures ont été élaborées dans l'urgence et sans une concertation parfaite avec les fédérations professionnelles. D'une manière générale, je veux alerter sur la nécessité de définir des modalités d'attribution des aides particulièrement claires et rapides, car les demandes vont affluer.

Enfin, de manière à répondre aux problèmes de trésorerie auxquels de nombreuses entreprises font face, l'article 4 autorise l'État à garantir jusqu'à 300 milliards d'euros de prêts aux entreprises. Ce dispositif, dont la mise en oeuvre est confiée à Bpifrance Financement, doit permettre de maintenir ouvert le canal du crédit pour les entreprises, afin qu'elles soient en mesure de faire face à leurs charges pendant la période de forte contraction de l'activité qu'entraîne la crise sanitaire. Des conditions précises sont prévues pour définir les prêts éligibles, dans un double objectif de cibler le dispositif sur les conséquences de la crise sanitaire et de respecter le cadre spécifique relatif aux aides d'État que la Commission européenne s'apprête à publier. En particulier, cette garantie donnera lieu à une rémunération de l'État : c'est une exigence de la Commission européenne, le Gouvernement m'a indiqué qu'il devrait fixer cette commission au seuil plancher permis par le cadre européen.

Les petites et moyennes entreprises ainsi qu'une partie des entreprises de taille intermédiaire, à savoir celles qui réalisent un chiffre d'affaires annuel inférieur à 1,5 milliard d'euros, sont plus particulièrement ciblées : dès lors que le prêt respecte les critères prévus, l'octroi de la garantie sera automatique. Pour les autres, un arrêté du ministre chargé de l'économie est nécessaire.

Par ailleurs, le Gouvernement a introduit une garantie spécifique de l'assurance-crédit à l'Assemblée nationale au sein d'un nouvel article 5, dans la limite de 10 milliards d'euros. Ce dispositif vise à préserver les chaînes de sous-traitances qui structurent notre économie.

Les conséquences de ces garanties pour les finances publiques sont incertaines : elles dépendront des montants pour lesquels la garantie sera in fine appelée.

En adoptant le nouvel article 4 A à l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a également élargi les conditions d'octroi de la garantie de l'État accordée dans le cadre d'opérations de réassurance des entreprises habilitées à pratiquer en France des opérations d'assurance-crédit au titre des risques politiques et commerciaux à l'exportation. Il a également augmenté le montant total de l'encours maximum de cette garantie pour le passer de 1 milliard d'euros à 2 milliards d'euros.

S'agissant des autres articles du projet de loi de finances rectificative, l'article 1 A, inséré par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, prévoit d'exonérer d'octroi de mer et d'autres impositions indirectes propres à l'outre-mer des livraisons et importations de produits nécessaires au secours des populations, au rétablissement de la continuité des services publics et des infrastructures publiques dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.

Du côté des articles de récapitulation, l'article 1 er tire les conséquences des prévisions de ressources et de charges sur l'équilibre général. Les articles 2 et 3 procèdent aux ouvertures et annulations de crédits respectivement sur le budget général et sur les comptes spéciaux. L'Assemblée nationale a adopté deux amendements du Gouvernement qui prévoient une baisse de recettes de 500 millions d'euros du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », compensée par un prêt du Trésor comptabilisé dans le compte de concours financier « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

Si je regrette parfois le caractère lacunaire des informations qui nous sont apportées, je ne m'opposerai pas aux mesures proposées dans ce projet de loi de finances rectificative. Elles s'inspirent en effet de procédures déjà expérimentées et qui devraient contribuer à apporter un soutien aux entreprises.

Il faut toutefois être conscient que ce plan est le premier et certainement pas le dernier. Les montants présentés ici ne seront suffisants que si la crise s'achève rapidement, ce qui paraît malheureusement peu probable : il est donc possible que nous devions nous retrouver, d'ici à quelques semaines, pour examiner un nouveau collectif budgétaire. Peut-être faudra-t-il aussi - mais à plus long terme - mettre en oeuvre un plan de relance pour ranimer la demande, lorsque l'offre pourra y répondre.

En tout état de cause le caractère extraordinaire des mesures qui nous sont présentées exige que nous soyons en mesure d'en suivre précisément et régulièrement la mise en oeuvre. Tout au long de l'application du plan de relance de l'économie adopté en 2009, le ministre de la relance a rendu des comptes chaque trimestre, au travers de rapports circonstanciés.

C'est pourquoi je souhaite qu'il en soit de même pour les mesures prévues par la nouvelle mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire » et la garantie des prêts prévue par l'article 4. Je vous proposerai donc un amendement prévoyant la mise en place de ce mécanisme de suivi. Le Gouvernement préfère la création d'un comité de suivi, mais le Parlement doit être informé directement et dès à présent.

Par ailleurs, j'ai entendu le Président de la République et le ministre de l'économie dire que les salariés doivent continuer de travailler dans les secteurs prioritaires - santé, alimentation, énergie, transport. Il faut aussi les y encourager ! C'est pourquoi je vous proposerai un amendement visant à exonérer de l'impôt sur le revenu et de cotisations sociales les rémunérations perçues au titre des heures supplémentaires effectuées par les salariés depuis le 16 mars 2020, début du confinement, et ce jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire. Il faut soutenir les salariés qui continuent à travailler en dépit du contexte. Le Gouvernement évoque une prime exceptionnelle, se référant probablement à la prime d'activité exceptionnelle défiscalisée de 1 000 euros instaurée lors de la crise des « gilets jaunes ». Mais cette prime est versée par les entreprises, non par l'État. Les grandes entreprises pourront la verser, pas les petites entreprises que nous voulons pourtant aider.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, je vous propose d'adopter ce PLFR, qui répond à une urgence, ainsi modifié par ces deux amendements. Si le Gouvernement prend des engagements en séance, nous les retirerons pour parvenir à un vote conforme. Il est possible aussi que le Gouvernement dépose un amendement visant à faciliter le versement d'une prime en faveur de ceux qui continuent à aller travailler.

Mme Nathalie Goulet . - Hier, lors de l'examen en séance des projets de loi ordinaire et organique d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19, on a évoqué plusieurs fois la nécessité de mettre en place un suivi des mesures prises par le Gouvernement dans ce cadre. On peut en effet faire des parallèles entre l'état d'urgence sanitaire et l'état d'urgence pour lutter contre le terrorisme. Le Parlement doit être informé dans les deux cas. Pourquoi ne pas nommer un rapporteur spécial sur la nouvelle mission budgétaire ? En tout état de cause, un suivi des mesures liées à l'urgence sanitaire est indispensable.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je suis d'accord. On peut tout à fait dresser un parallèle entre l'état d'urgence, l'état d'urgence sanitaire et ces mesures d'urgence économiques. On peut aussi se référer à ce qui s'est passé en 2009. À l'époque, le Parlement a été informé régulièrement. Je considère que la création d'un comité de suivi qui serait réuni à la discrétion du Gouvernement ne suffit pas. Je veux que nous disposions tous les mois de certaines données, comme les décaissements, les entreprises visées, etc. Même si nous ne nous réunissons pas physiquement, il est simple de nous adresser ces informations par courriel.

M. Vincent Éblé , président . - La question est moins de savoir quelle sera la modalité de ce suivi que d'être en mesure d'obtenir les informations que nous souhaitons. C'est pourquoi je soutiens l'amendement de notre rapporteur général qui contient un tableau de bord précis.

Mme Nathalie Goulet . - Nous voterons cet amendement avec enthousiasme.

M. Jean-Marc Gabouty . - Les effets de la crise sur les recettes de l'impôt sur les sociétés se feront essentiellement sentir à partir de 2021 ; quant à la baisse des recettes au titre de la TVA, elle me semble très sous-estimée.

La prime de 1 500 euros ne sera octroyée qu'aux entreprises ayant vu leur chiffre d'affaires baisser de 70 % en mars 2020 par rapport à mars 2019. Mais la trésorerie des entreprises n'a jamais été aussi élevée qu'aujourd'hui !

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Pas dans tous les secteurs ! Pensez à la restauration.

M. Jean-Marc Gabouty . - En effet. Mais dans les secteurs qui n'ont pas été touchés par le confinement, les entreprises ont encaissé les recettes de février et pourront reporter le paiement des charges du mois de mars. Or le problème ne concerne pas que le mois de mars. Même si la crise est relativement courte, il faut s'attendre à des difficultés au 15 avril, en mai et les mois suivants.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - C'est la période de référence qui ne vous paraît pas pertinente ?

M. Jean-Marc Gabouty . - Le critère d'une baisse de 70 % du chiffre d'affaires par rapport au mois de mars de l'année dernière sera valable pour certains secteurs, comme la restauration, mais, pour l'ensemble des entreprises de production, les difficultés se poseront par la suite, car le redécollage ne sera pas immédiat. Les reports de charges sont accordés par les commissions des chefs de service financiers (CCSF) dans chaque département. Étaler le paiement des charges pendant six mois ne serait guère utile. Il faut prévoir un amortissement des charges sur le moyen terme, sinon on ne fait que reporter de quelques mois la difficulté pour les entreprises. En plus, les charges reportées par les CCSF ne sont que les charges patronales, soit la moitié environ des charges des entreprises. De plus, les CCSF, qui sont habituées à traiter quelques dizaines de dossiers en temps normal, vont avoir à en traiter plusieurs centaines et risquent d'être saturées.

La garantie des prêts des entreprises à hauteur de 300 milliards d'euros est une excellente mesure, mais il convient que le dispositif soit placé sous le contrôle d'un opérateur public, l'État ou Bpifrance, afin que les banques n'en profitent pas pour regarantir tous les prêts qu'elles ont déjà émis. Il faut éviter que le mécanisme ne soit détourné. Aussi, j'insiste sur la nécessité d'amortissements dans la longue durée, au minimum 24 ou 36 mois, des reports de charges et des pertes, à l'image des prêts participatifs simplifiés de trésorerie dans les années 1980.

D'un côté, on demande aux entreprises de continuer leur activité, ce qui est indispensable pour assurer le fonctionnement de l'économie et l'approvisionnement en produits de nécessité, et, de l'autre, on demande aux gens de rester chez eux. Finalement, les salariés ne savent plus que faire, hésitant à aller travailler ou à rester chez eux par civisme.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Quant aux entreprises, elles ne veulent pas prendre de risques, face au risque de poursuite pénale.

M. Jean-Marc Gabouty . - Cette situation crée des distorsions de concurrence entre les commerces physiques et les plateformes numériques. On ferme les librairies ou les magasins de chaussures, mais on n'interdit pas à Amazon de vendre sur internet ! Les petits commerces vont souffrir.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je comprends vos remarques. Il est évident que le dispositif est perfectible et qu'il devra être peaufiné. Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir. Peut-on vraiment sauver une entreprise avec une aide de 1 500 euros ? Il faut reconnaître que, pour l'instant, on navigue à vue, dans l'urgence, et que nous aurons certainement à revoir ces mécanismes.

M. Pascal Savoldelli . - Merci au rapporteur général pour sa présentation sérieuse et apaisée : le Sénat doit veiller à l'image qu'il renvoie à nos concitoyens - tout comme les élus locaux - et travailler avec autonomie.

Incontestablement, il y a un choc d'offre, comme vous l'avez bien montré. Il y a aussi un choc de demande, et certains de nos amendements l'évoqueront. Un tel cataclysme ne peut que provoquer une profonde mutation de la demande sociale. La question de la dette privée se posera aussi brutalement. Nous devons apprendre à mieux veiller à la solvabilité des entreprises et des particuliers.

L'idée d'un outil d'information régulier sur les aspects financiers ne peut, à mon avis, que faire l'unanimité. Nous pourrions avoir le même outil sur les aspects sanitaires... C'est le rôle du Parlement que d'exercer son contrôle sur un plan comme sur l'autre. Ce serait une erreur de les séparer. Sur les 2 milliards d'euros de dépenses additionnelles de santé, il nous faut des explications très claires : c'est un sujet à se brûler les mains ! Il est étonnant qu'un ministre annonce qu'il est exceptionnel que les heures supplémentaires seront payées... À l'hôpital, on ne comprend pas. Sans aucune polémique, je souhaite savoir ce que comprennent ces 2 milliards d'euros.

M. Vincent Éblé , président . - Ils ne figurent pas dans le projet de loi de finances rectificative - mais j'entends votre question, sur le plan politique.

M. Philippe Dallier . - Nous allons bien sûr voter cet ensemble de mesures. Conforme ? Nul ne le sait. Le Gouvernement sous-estime dans ses prévisions l'impact de cette crise - du reste, nous aurons tous tout sous-estimé, du début à la fin. Pourquoi le fait-il ? Pour ne pas affoler les marchés financiers ? Les taux sont en train de monter fortement, surtout en Italie, où la dette dépasse 130 % du PIB. Nous finirons par être rattrapés par le poids de l'endettement public. On nous dit que, depuis 1812, la France n'a jamais fait défaut. C'est vrai. Mais à force de charger la barque...

Les mesures à destination des TPE sont très sous-calibrées. Déjà, il y a eu la crise des « gilets jaunes », et beaucoup avaient des difficultés de trésorerie. Il va falloir voir durant les douze ou vingt-quatre prochains mois comment elles pourront traverser cette période difficile sans déposer le bilan. Le report de la réforme des aides personnelles au logement (APL), est-il comptabilisé dans ce texte ? Son impact en année pleine est d'environ 1 milliard d'euros.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le cabinet de M. Le Maire vient de m'indiquer que le Gouvernement ne déposerait pas d'amendement sur le projet de loi de finances rectificative, il devrait appliquer le dispositif de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat. Pour l'instant, toutefois, il ne sait pas me dire si une entreprise qui aurait versé une prime en janvier pourrait le faire de nouveau. Et, sur la défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires, il renvoie à des débats ultérieurs, afin que nous votions ce texte conforme.

Sur le comité de suivi, il y a une certaine confusion. Je présenterai mon amendement et le retirerai si le Gouvernement s'engage formellement en séance - qui sera présidée par M. le Président Larcher - à nous fournir mensuellement le tableau que nous souhaitons.

M. Vincent Éblé , président . - Nous pourrons de toute façon le réclamer en vertu de nos pouvoirs de contrôle.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le dispositif de comité de suivi n'est pas adapté, en particulier avec la période que nous traversons.

Le Gouvernement nous annonce un autre projet de loi de finances rectificative prochainement. Il faut un dispositif plus incitatif qu'une prime exceptionnelle que les entreprises ne peuvent pas verser !

M. Thierry Carcenac . - Compte tenu de l'urgence, nous devons voter ce texte, même si les hypothèses de l'article 1 er posent problème. L'article 2 introduit une nouvelle mission et deux programmes : pourquoi pas ? Mais nous avons déjà des rapporteurs spéciaux, sur l'économie, d'une part, et sur le travail et l'emploi, d'autre part, qui pourraient suivre ces deux programmes, il me semble. L'article 4 doit nécessairement être adopté. Sur le suivi et le contrôle, la proposition du rapporteur général est intéressante, mais quid de la dette ? Il est anormal d'apprendre le résultat des émissions de dette par l'Agence France Trésor par les journaux.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Ce matin, le taux de notre obligation à dix ans (OAT) était de 0,2 % sur le marché secondaire.

M. Thierry Carcenac . - Nous devons être mieux informés : cette année, nous allons tout de même emprunter 246 milliards d'euros ! Nous n'avons pas évoqué les collectivités locales. Pourtant, il y aura un ralentissement des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - C'est clair !

M. Thierry Carcenac . - Les départements les utilisaient pour investir...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Les dépenses liées au revenu de solidarité active (RSA) vont sans doute aussi augmenter.

M. Thierry Carcenac . - Et le pacte de Cahors...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je crois que, cette année, il passera aux oubliettes.

M. Thierry Carcenac . - Comme Pascal Savoldelli, je m'interroge sur les 2 milliards d'euros supplémentaires pour la santé. De quoi s'agit-il ? D'une réévaluation de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) ? Sur quel budget seront-ils pris ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous verrons si, à terme, un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFSS) est déposé. L'Ondam va effectivement évoluer.

M. Thierry Carcenac . - Chaque secteur aura des difficultés, et requerra un plan d'urgence. Il en est ainsi du secteur culturel et des librairies, qu'il faudrait autoriser à ouvrir.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Tant que nous n'aurons pas assez de gants ni de masques...

M. Thierry Carcenac . - On entre bien sans masque au supermarché.

M. Vincent Capo-Canellas . - Merci pour ce rapport éclairant. L'exigence est double : dépenser, pour soutenir l'économie et éviter que tout se bloque, et veiller à la solidité financière de l'État, dont la dette avoisine 100 % du PIB. Sur le long terme, il faudra tirer des leçons, en matière de souveraineté, de définition et de financement des secteurs régaliens, et de localisation de la production. À court terme, il faut empêcher que des secteurs vitaux ne se grippent : ainsi, de la chaîne logistique de l'agro-alimentaire, dont l'arrêt provoquerait la panique dans la population. Conserver les savoir-faire et la capacité productive par le chômage partiel, c'est du bon sens. Sur la solidité financière de l'État, l'évolution des taux nous renseigne et fixe notre capacité à vendre notre dette. Il faudrait disposer d'une cartographie précise des risques pour éviter toute bascule financière. Quels sont les seuils à ne pas dépasser pour que l'État conserve sa crédibilité financière ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'avenir le dira ! J'essaierai de vous faire suivre des informations pendant la période à venir.

M. Philippe Dominati . - L'inquiétude, pour tout plan de sauvetage, c'est de savoir si c'est l'État ou le contribuable qui en bénéficiera : souvent, l'État en profite pour réparer ses propres insuffisances. Quelle est la part de ces 45 milliards d'euros qui ira réellement aux entreprises ou aux personnes ? Il y aura de nombreuses faillites, notamment pour ceux qui vivent d'une activité saisonnière. Le président de la République a annoncé 5 milliards d'euros pour la recherche : très bien, mais sont-ils inscrits dans ce texte ? Il paraît d'ailleurs que ce sera, en fait, 500 millions d'euros par an sur dix ans. Tout cela reste bien flou.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'essentiel du décaissement budgétaire prévu consiste en un soutien aux entreprises, avec les dispositifs de chômage partiel et du fonds de solidarité aux TPE, accompagnés de reports de charges et de fiscalité. L'hôpital, cela relève du champ du PLFSS. La recherche, c'est une annonce, sans traduction budgétaire pour l'instant. Nous ne sommes que dans une première phase du « plan de sauvegarde » de notre économie.

M. Emmanuel Capus . - Nous sommes tous d'accord pour privilégier l'unité nationale contre cette crise. Nos services fiscaux pourront-ils être assez réactifs, compte tenu du télétravail ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - C'est une vraie question.

M. Emmanuel Capus . - Dans le bâtiment, on refuse le chômage partiel à beaucoup d'entreprises qui avaient compris qu'elles devaient interrompre leurs chantiers.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - On entend parler d'un renforcement du confinement...

M. Emmanuel Capus . - Sur le chômage partiel, nous sommes passés à 100 %, si j'ai bien compris.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Uniquement au niveau du SMIC. Le plafond a été porté à 4,5 fois le SMIC, mais, au-delà du SMIC, l'indemnisation n'est pas de 100 % mais de 84 %. Près de 6 milliards d'euros seront pris en charge par l'État ; le reste le sera par l'Unédic.

M. Vincent Éblé , président . - Concernant la réactivité de l'administration, un amendement voté hier habilite le Gouvernement à déroger par ordonnance aux dispositions relatives à la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics afin de permettre le recours accru à des pièces dématérialisées. Il apporte de la souplesse avec des allégements de procédures annoncés par le Gouvernement comme proportionnés.

Mme Sophie Taillé-Polian . - Plus que d'un plan de relance, il s'agit d'un plan de sauvegarde. Des annonces ont été faites en faveur des plus démunis, mais je n'en vois pas la transcription.

M. Julien Bargeton . - Le président de la République a dit « coûte que coûte ». Ce texte est une première salve, et nul ne sait à combien se montera le déficit. À long terme, il y aura d'autres éléments de réflexion, et rien ne sera comme avant. Je me réjouis de ce que la commission vise un vote conforme, et envisage de nous informer par voie numérique. Il y aura d'autres mesures, et d'autres projets de loi de finances rectificative, mais nous devons réfléchir à notre mode de travail : cette réunion aurait pu se tenir par visioconférence.

M. Vincent Éblé, président. - Il faudrait pour cela probablement adapter notre Règlement.

EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire

L'article liminaire est adopté sans modification.

Article additionnel avant le titre unique (nouveau)

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je présenterai un amendement demandant un rapport mensuel, puis semestriel, sur les deux dispositifs, et un amendement sur la défiscalisation des heures supplémentaires. Si le Gouvernement ne dépose pas d'amendement, je retirerai mes amendements en échange d'un engagement formel du Gouvernement, qui sera confirmé par un échange de lettres, afin que nous puissions aboutir à un vote conforme.

L'amendement n° 8 vise à exonérer de l'impôt sur le revenu et de cotisations sociales les rémunérations perçues au titre des heures supplémentaires effectuées par les salariés depuis le 16 mars 2020, début du confinement, et ce jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire.

M. Jean-Marc Gabouty . - Nous nous abstiendrons.

Mme Sophie Taillé-Polian . - Nous nous abstiendrons également.

M. Pascal Savoldelli . - Nous nous abstiendrons, en attendant d'y voir plus clair.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Cet amendement n'est pas la panacée, j'en conviens. Mais il faut inciter à poursuivre l'activité. M. Le Maire a dit que nous avions le système de chômage partiel le plus généreux d'Europe ; dès lors pourquoi aller travailler... Pourtant, il faut que l'activité continue. Il faut récompenser ceux qui travaillent si l'on veut éviter que l'économie s'arrête totalement.

M. Vincent Capo-Canellas . - Les collectivités territoriales et les entreprises, avec leurs plans de sauvegarde, savent travailler en mode dégradé. Ce qui manque à l'État, c'est un gigantesque plan national de sauvegarde. Du coup, on tâtonne.

M. Emmanuel Capus . - Cela nous renvoie au débat que nous avons eu, à l'initiative du groupe CRCE, sur ce qu'est une entreprise particulièrement indispensable à la poursuite de l'activité économique et sociale du pays. Si nous avions une liste des secteurs concernés, cela permettrait de procéder à des réquisitions.

L'amendement n° 8 est adopté.

Articles 1er A, 1er, 2, 3, 4 A, 4

Les articles 1er A, 1er, 2, 3, 4 A et 4 sont adoptés sans modification.

Article additionnel après l'article 4 (nouveau)

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 9 prévoit l'information du Parlement sur les mesures d'urgence, notamment pour lui permettre d'évaluer l'effet des mesures sur les comptes publics.

L'amendement n° 9 est adopté.

Article 5

L'article 5 est adopté sans modification.

Après avoir adopté deux amendements, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter le projet de loi de finances rectificative pour 2020 tel que modifié par ses amendements.

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