D. L'ABSENCE DE MAÎTRISE DES DÉPENSES DE PERSONNEL ENTRAINE UN DÉPASSEMENT IMPORTANT DE LA PROGRAMMATION TRIENNALE
Pour rappel, la mission « Sécurités » rassemble 5 % des crédits du budget général de l'État exprimés en norme pilotable 14 ( * ) .
Place de la mission « Sécurités » dans l'ensemble du budget général présenté au PLF 2020
(en CP, en « norme pilotable »)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires.
Les programmes « Gendarmerie nationale » et « Police nationale » concentrent en 2020 plus de 95 % des crédits de la mission « Sécurités ». L'évolution de la mission par rapport au triennal constitue donc un bon indicateur de la position des deux forces 15 ( * ) .
Sur la trajectoire triennale fixée par la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 , les crédits hors CAS « Pensions » de la mission « Sécurités » devaient augmenter de 2,10 %, contre une augmentation en moyenne de 3 % pour les missions du budget général 16 ( * ) . En prenant en compte les prévisions d'inflation, cette programmation prévoyait une évolution négative des crédits, qui devaient diminuer de 0,4 %.
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, votre rapporteur spécial avait estimé que cette trajectoire n'était pas crédible 17 ( * ) , alors que la sécurité nationale était toujours présentée comme une priorité et que le contexte sécuritaire demeurait particulièrement tendu. Cette trajectoire apparaissait en outre contradictoire avec l'annonce par le président de la République de la création de 10 000 emplois au sein des forces de sécurité intérieure sur le quinquennat (cf. supra ).
Conformément à la prévision de votre rapporteur spécial, le présent projet de loi de finances dépasse à nouveau largement le triennal, d'environ 500 millions d'euros, soit près de 4 % des CP exprimés en norme pilotable .
Comparaison de l'évolution des crédits de
la mission « Sécurités »
avec les plafonds
fixés par la loi de programmation des finances publiques
pour les
années 2018 à 2022
(en milliards d'euros)
Crédits prévus par la LPFP en 2020 |
Crédits prévus par la LPFP en 2020 (retraités du différentiel d'inflation) |
Crédits PLF 2020 (pilotable, courant) |
Crédits PLF 2020 (format 2018 prenant en compte notamment les mesures de transfert, calculs Sénat) |
Comparaison 2020 - LPFP (en montant) |
Comparaison 2020 - LPFP (en %) |
13,66 |
13,73 |
13,75 |
14,26 |
+ 0,5 |
3,86% |
Les prévisions de la LPFP par mission sont retraitées de la différence entre l'inflation prévue et l'inflation constatée en 2018 et estimée en 2019. Les crédits des missions en 2020 sont considérés sur le périmètre de la norme de dépenses pilotables, et retraités des mesures de transfert et de périmètre survenues sur les missions entre 2018 et le projet de loi de finances pour 2020.
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
La mission « Sécurités » fait ainsi partie des six missions présentant le plus important dépassement par rapport à la LPFP, en proportion de leurs crédits.
Écart entre les crédits 2020 et les crédits prévus en LPFP
(en %)
Source : Rapport provisoire de M. Albéric de Montgolfier sur le présent projet de loi de finances - Tome I
En montant, la mission « Sécurités » connaît ainsi le troisième plus gros dépassement de la programmation triennale du budget général de l'État, derrière les missions « Solidarité, insertion et égalité des chances » et « Écologie, développement et mobilité durables ».
Écart entre les crédits 2020 et les crédits prévus en LPFP
(en milliards d'euros)
Source : Rapport provisoire de M. Albéric de Montgolfier sur le présent projet de loi de finances - Tome I
Ce dépassement traduit l'absence de maitrise des dépenses de personnel par les responsables des deux programmes .
Ainsi, pour le programme « Police nationale », la prévision d'exécution 2019 des dépenses de personnel, prise en compte par le présent projet de loi de finances , est supérieure de 155 millions d'euros 18 ( * ) à celle de la LPFP. Cela s'explique notamment par les mesures du protocole du 19 décembre 2018 (+ 83,9 millions d'euros) et les dépenses de compte épargne-temps (+ 17,5 millions d'euros), notamment du fait des mesures issues du rendez-vous salarial du 18 juin 2018.
En outre, les mesures catégorielles prévues pour 2020 sont supérieures de 145,9 millions d'euros en PLF 2020 par rapport à la LPFP , qui s'explique notamment par la poursuite du protocole du 19 décembre 2018 (60,7 millions d'euros), ainsi que par l'indemnisation du flux des heures supplémentaires 19 ( * ) (26,5 millions d'euros) et le décalage d'un an des revalorisations prévues par le protocole PPCR (50,5 millions d'euros).
Enfin, le schéma d'emplois 2020 prévu en PLF 2020 a un coût supérieur de 11,5 millions d'euros à celui prévu en LPFP.
* 14 Hors CAS « Pensions ».
* 15 La mission étant également constituée des programmes « Sécurité et éducation routières » et « Sécurité civile ».
* 16 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
* 17 Rapport général n° 108 (2017-2018) de M. Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2017.
* 18 Les dépenses de personnel sont présentées hors CAS « Pensions » dans ce paragraphe, afin de pouvoir être rapprochées des plafonds de la LPFP.
* 19 Voir infra.