C. DES CHANTIERS D'AMPLEUR À ENGAGER D'URGENCE
Le rapport « Plus simple la vie : 113 propositions pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap », remis au Gouvernement en mai 2018, a bien montré les rigidités et la complexité auxquelles se heurtent les demandeurs d'aide à la compensation de leur handicap. Aussi le Gouvernement a-t-il opportunément lancé, dans le cadre de la Conférence nationale du handicap, plusieurs chantiers dont deux sont consacrés respectivement à l'articulation entre la PCH et l'AEEH, et à la simplification et à la modernisation de la PCH. L'inspection générale des affaires sociales (Igas) a rendu un rapport en juin 2019 sur le premier de ces aspects.
Les nombreuses auditions conduites par votre rapporteur l'auraient, en première analyse, conduit à compléter la proposition de loi sur deux points, avant que le dépôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 et la connaissance des travaux lancés par le Gouvernement ne le convainquent de s'en tenir au texte initial.
Il lui semble néanmoins que deux chantiers urgents doivent être engagés.
1. Faciliter l'accès aux aides techniques
Votre rapporteur proposait déjà dans son rapport d'information d'octobre 2018 6 ( * ) de réfléchir à un nouveau circuit de distribution des aides techniques coûteuses et d'ouvrir le financement de ces aides au matériel remis en circulation .
Une expérimentation de cinq ans aurait pu autoriser tout organisme privé non lucratif, destinataire d'un agrément délivré par l'ARS et disposant d'au moins un membre de son personnel formé, à distribuer des aides techniques déjà utilisées. Ces organismes auraient été soumis aux obligations que la réglementation européenne impose aux distributeurs de dispositifs médicaux, et un contrôle externe attestant de la conformité du matériel aurait été exercé avant leur distribution. La remise en circulation de toute aide technique neuve ayant fait l'objet d'une inscription à la liste des produits et prestations remboursées n'aurait pas fait obstacle à sa réinscription et donc à son remboursement par l'assurance maladie.
Le Gouvernement a toutefois pris des initiatives dans le cadre du projet de loi relatif à l'économie circulaire ainsi que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, dont l'article 28 pose les bases d'un accès facilité aux aides techniques reconditionnées.
Votre rapporteur invite cependant à maintenir une grande vigilance sur l'applicabilité et l'efficacité des dispositifs proposés.
2. Construire une prise en charge intégrée des transports
Le rapport d'information de votre rapporteur de 2018 soulevait également le problème de l'accès aux transports de nos concitoyens handicapés, situation fréquemment qualifiée de kafkaïenne. Information lacunaire, compétences éclatées, financeurs multiples et dépenses plafonnées... Le cas des enfants conduits à l'aube sur les routes du Nord-Est de la France pour gagner les seules écoles, belges, qui ont accepté de les scolariser a fait les gros titres de la presse. Celui des milliers de parents contraints de pallier, parfois au prix de leur emploi, l'insuffisance de la prise en charge des transports pour adultes dit aussi bien notre échec collectif en la matière.
Par surcroît, la logique de parcours de vie, la société inclusive que nous appelons tous de nos voeux accroîtra nécessairement la demande de mobilité entre domicile et établissements et services médico-sociaux, tous types confondus.
Votre rapporteur est en conséquence convaincu qu'il est urgent de repenser en profondeur l'organisation et le financement des transports des personnes handicapées :
• En procédant à des clarifications nécessaires : en faisant de la question des transports un volet obligatoire du plan personnalisé de compensation, en autorisant l'exercice de la compétence transport des personnes handicapées par un groupement de coopération sociale et médico-sociale, ou encore en obligeant les états prévisionnels des recettes et des dépenses des établissements à rendre explicite le montant des dépenses des établissements relatives aux transports, ou encore en améliorant la coordination des financements des établissements provenant des ARS et des autorités organisatrices de transport.
• En lançant une expérimentation visant à attribuer au président du conseil départemental la gestion financière et logistique de l'ensemble des transports de la personne handicapée, à l'exception des transports sanitaires. Cette compétence donnerait lieu à un transfert au conseil départemental de la dotation normalement attribuée par l'ARS aux établissements au titre des transports, ainsi qu'au bénéfice de la fraction de PCH normalement attribuée à la personne handicapée pour les surcoûts de transport.
De telles propositions doivent s'articuler aux travaux et chantiers lancés par le Gouvernement et faire l'objet d'un dialogue entre l'État et les départements.
Votre rapporteur a également eu l'occasion de faire des propositions plus globales dans son rapport d'octobre 2018 7 ( * ) , en plaidant non seulement pour la fusion de la PCH enfants et de l'AEEH, mais aussi pour faire de la PCH le financeur exclusif des aides techniques, à l'inclusion du transport et des aides à l'aménagement du logement.
La présente proposition de loi s'efforce, quant à elle, d'apporter des solutions à plus court terme.
* 6 Op. cit.
* 7 « Repenser le financement du handicap pour accompagner la société inclusive », fait au nom de la commission des affaires sociales.