C. LA MISE EN oeUVRE DES INÉLIGIBILITÉS

1. L'office du juge

En matière d'inéligibilité, l'office du juge de l'élection serait clarifié (articles 2 de la PPL et 1 er de la PPLO) .

Quel que soit le manquement constaté, le juge pourrait déclarer le candidat inéligible « en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales ».

S'inspirant d'une observation du Conseil constitutionnel, cette rédaction vise à rappeler qu'une « simple erreur matérielle, sans volonté de fraude, ne doit pas entraîner qu'un candidat soit déclaré inéligible » 11 ( * ) .

Dans la même logique, les articles 7 de la PPL et 2 bis de la PPLO tendent à clarifier l'inéligibilité prononcée contre les parlementaires n'ayant pas respecté leurs obligations fiscales 12 ( * ) .

2. Le « point de départ » de l'inéligibilité

Le « point de départ » de l'inéligibilité constitue aujourd'hui une source d'inéquité entre les candidats.

L'inéligibilité s'appliquant à compter de la décision définitive du juge de l'élection, l'effet de la sanction varie d'un candidat à l'autre 13 ( * ) .

« Point de départ » de l'inéligibilité : l'état du droit

Source : commission des lois de l'Assemblée nationale

En première lecture, le Sénat a autorisé le juge de l'élection à moduler la durée des inéligibilités , l'objectif étant que des candidats ayant commis des irrégularités comparables soient déclarés inéligibles pour les mêmes scrutins (articles 2 et 3 de la PPL, articles 1 er et 2 de la PPLO) .

L'Assemblée nationale n'a pas retenu cette proposition. Pour son rapporteur, « une telle disposition reviendrait à inciter le juge à traiter différemment des situations comparables [...]. Or, la durée de la peine prononcée est un élément qui peut aussi compter dans une élection et dans l'appréciation de la gravité des faits reprochés à un candidat » 14 ( * ) .

Le droit en vigueur serait donc maintenu, faute de consensus . Particulièrement complexe, la question du « point de départ » de l'inéligibilité nécessite de poursuivre la réflexion au-delà des présentes proposition de loi et proposition de loi organique .

3. L'inéligibilité de certains membres du corps préfectoral

En raison de leurs fonctions, certains membres du corps préfectoral sont soumis à un régime d'inéligibilité particulièrement strict.

Aussi, les préfets sont-ils inéligibles pour une durée de trois ans dans les territoires où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions. Le « délai de carence » des sous-préfets, secrétaires généraux de préfecture et directeurs de cabinet de préfet est fixé à un an.

Ce régime d'inéligibilité serait renforcé sur deux aspects.

Pour les élections municipales, le « délai de carence » serait étendu aux anciens membres du corps préfectoral 15 ( * ) , par cohérence avec le droit applicable aux autres scrutins ( article 3 bis A de la PPL , introduit à l'initiative de votre rapporteur).

Comme l'a souligné M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur, « aucune raison n'explique qu'un préfet soit empêché d'être candidat pendant trois ans s'il est en activité, alors que ce n'est pas le cas s'il part à la retraite un mois avant » 16 ( * ) .

Sur proposition de son rapporteur, l'Assemblée nationale a également allongé d'un à deux ans le « délai de carence » des sous-préfets, secrétaires généraux de préfecture et directeurs de cabinet de préfet . Afin de « mieux tenir compte de leur rôle dans les territoires » 17 ( * ) , cette disposition s'appliquerait aux élections locales mais également aux élections parlementaires (articles 3 bis A de la PPL et 2 ter de la PPLO) .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi et la proposition de loi organique sans modification.


* 11 Source : exposé des motifs de la proposition de loi de notre collègue Alain Richard.

* 12 Sans remettre en cause les mandats acquis antérieurement à la décision du juge, cette inéligibilité empêcherait les parlementaires de se présenter à d'autres scrutins.

* 13 Voir le commentaire de l'article 2 de la PPL pour un exemple concret.

* 14 Objet de l'amendement adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale.

* 15 Alors, qu'aujourd'hui, ce « délai de carence » n'est pas opposable aux candidats admis à faire valoir leurs droits à la retraite.

* 16 Compte rendu intégral de la séance du Sénat du 2 mai 2019.

* 17 Source : objet de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale.

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