B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. La sous-exécution des crédits de la mission s'explique par sa démarche essentiellement programmatique en 2018

D'ici 2022, les programmes 348 et 349 seront dotés de respectivement un milliard d'euros et 700 millions d'euros. Les financements de la mission n'ont pas vocation à être poursuivis au-delà de 2022 . Cette démarche pluriannuelle explique que les crédits attribués à la mission aient été limités en 2018, année essentiellement programmatique et consacrée au lancement d'appels à projet .

Sur le programme 348, il s'agissait de compléter la connaissance technique du parc immobilier, notamment par le biais d'audits énergétiques et bâtimentaires et par la réalisation d'études de projets. Les premiers projets ont été approuvés par la conférence nationale de l'immobilier public (CNIP) en novembre 2018. Le programme 349 devait, lui, accompagner les deux premiers lauréats de l'appel à projet. Toutefois, la structure de gouvernance du FTAP, le « comité de pilotage du fonds », a mis plus longtemps que prévu à se mettre en place, ce qui explique la forte sous-consommation des AE constatée sur ce programme. Cette sous-consommation a été accentuée par le retard également pris dans la contractualisation avec les porteurs de projets. Sur 32 lauréats, seuls huit d'entre eux avaient signé un contrat de transformation en 2018 et seuls trois ont fait l'objet d'une consommation de crédits. Vos rapporteurs spéciaux relèvent que les deux premiers appels à projet se sont traduits par un fort déséquilibre au détriment des administrations déconcentrées , situation qui a conduit à assouplir les règles de sélection pour la troisième campagne.

2. La montée en charge des crédits devra se concrétiser pour que la mission puisse remplir ses objectifs

Du fait du caractère non-pérenne de ses financements, la mission « Action et transformation publiques » devra connaitre une forte montée en charge si elle veut que les projets financés répondent aux objectifs fixés à chacun des programmes . Dès 2019, la mission devrait connaitre une forte augmentation de ses crédits, avec 1 002 millions d'euros en AE (+ 355 %) et 312 millions d'euros en CP (quinze fois plus qu'en 2018).

Alors que la mission doit encore monter en charge, vos rapporteurs spéciaux feront preuve d' une vigilance particulière sur la programmation des AE et des CP ces prochaines années , et ce pour deux raisons. En effet, l'étiquetage de certains crédits budgétaires au titre du GPI peut parfois être opportuniste, ce qui incite à regarder la programmation avec prudence. Ensuite, le GPI est soumis au principe de réallocation des crédits, ce qui veut dire que des crédits pourraient être réalloués à d'autres actions. Or, au vu des besoins exprimés, notamment pour la rénovation des cités administratives, sanctuariser les sommes initialement prévues pour ces deux programmes paraît essentiel à vos rapporteurs spéciaux .

La directrice de l'immobilier de l'État, responsable du programme 348, avait affirmé lors de son audition devant la commission le 21 mai 2019 que des crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » pourraient être au besoin mobilisés pour financer les projets de rénovation qui ne rentreraient pas dans le cadre du programme 348 (ex. absence de gains énergétiques) 169 ( * ) . La Cour des comptes estime en effet qu'il pourrait manquer jusqu'à 300 millions d'euros pour couvrir les projets de rénovation des cités administratives et que les sites multi-occupants, pourtant éligibles au programme, en seront de fait exclus. Vos rapporteurs spéciaux y sont plutôt réticents : le CAS souffre d'ores et déjà d'une diminution de ses recettes, qui le limite dans son objectif de valoriser le patrimoine de l'État. En outre, si le Gouvernement a choisi de créer un nouveau programme, au sein d'une nouvelle mission, pour la rénovation des cités administratives et des sites multi-occupants, il doit en tirer les conséquences dans sa programmation.

Enfin, dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire, la Cour des comptes indique que plusieurs incertitudes entourent cette montée en charge. Les calendriers sont notamment très contraints, tant pour la passation des marchés publics pour la rénovation des cités administratives que pour le lancement des projets lauréats financés par le FTAP. A cela s'ajoute, pour le programme 348, une difficulté supplémentaire puisqu'il est conseillé aux pouvoirs adjudicateurs régionaux de recourir à un contrat qu'elles connaissent parfois mal, les marchés globaux de performance. Récent, ce type de marché ne fait pas encore l'objet d'une doctrine et d'un guide de bonnes pratiques bien établis.

3. Les indicateurs de performance ne sont pas adaptés au caractère temporaire et aux objectifs de la mission

Le GPI impose des procédures de sélection et d'évaluation, en amont et en aval des projets. Cela s'inscrit dans une démarche de « pilotage par la performance ». Si vos rapporteurs spéciaux soutiennent une telle approche, force est de constater que les indicateurs de performance mis à disposition dans les documents budgétaires sont inadaptés aux caractéristiques de la mission. En ce sens ils ne répondent pas aux critères de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Il est par exemple impossible d'apprécier à court ou à moyen terme la performance énergétique des cités administratives rénovées . De même, si l'un des indicateurs du programme 348 apprécie la consommation des AE, il ne donne dans les faits aucune indication sur l'avancement des projets, alors même que le respect d'un calendrier très contraint est l'un des enjeux essentiels de la mission . Les mêmes difficultés sont relevées par vos rapporteurs spéciaux sur le programme 349 : la sélectivité des projets et le délai d'instruction des projets ne donnent que peu d'information sur la contribution du programme aux objectifs de la mission et, plus largement, du GPI.

En outre, la Cour des comptes souligne une divergence entre les indicateurs inscrits dans les documents budgétaires et les instruments de pilotage et de suivi utilisés par les administrations responsables de ces programmes. Bien que ces derniers soient sans doute plus cohérents avec les objectifs de la mission et plus fournis, ce ne sont pas ceux utilisés dans les projets et rapports annuels de performance.


* 169 Audition de Mme Isabelle Saurat, Directrice de l'immobilier de l'État, devant la commission des finances du Sénat, 21 mai 2019. Lien vers le compte-rendu : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20190520/fin.html#toc5

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