LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 14 novembre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial, sur la mission « Pouvoirs publics ».

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - C'est un rapport particulier, du fait de la nécessaire autonomie financière des pouvoirs publics.

En un mot, les crédits de cette mission sont stables, mais cette stabilité ne peut pas durer.

Le périmètre de la mission englobe les deux assemblées, le Conseil constitutionnel, la présidence de la République et la Cour de justice de la République, qui n'a pas eu d'activité notable cette année. Je concentrerai mon exposé sur les trois premiers budgets, les plus importants, qui doivent être abordés comme des budgets d'établissements publics, avec des dotations de l'État, des recettes propres et des prélèvements sur les réserves. Or l'Assemblée nationale comme le Sénat font largement appel à ces réserves, et le tonneau des Danaïdes n'existant pas dans le domaine budgétaire et financier, celles-ci finiront par s'épuiser.

La Présidence, les deux assemblées et le Conseil constitutionnel se sont fixé un triple objectif de modernisation, d'optimisation et d'efficacité qui implique une révision ambitieuse des méthodes de travail.

Nous constatons une stabilité de la dotation de la présidence de la République accompagnée d'une légère augmentation des dépenses de personnel de l'Élysée, liée à une sous-estimation des crédits en 2018, et un budget de déplacement en forte croissance.

Autre fait saillant, l'Assemblée nationale puise beaucoup dans les réserves. Son budget s'élève à 568 millions d'euros, dont 517 millions d'euros de crédits budgétaires, sachant que les recettes propres sont très faibles. Pour le Sénat, le total est de 354 millions d'euros, jardin et musée inclus, dont 323 millions d'euros de crédits budgétaires.

Certes, les budgets des deux assemblées sont à peu près constants depuis 2012, soit une baisse réelle, mais le moment de vérité arrivera lorsque l'ensemble des réserves auront été consommées. C'est naturellement un sujet politique, une question d'exemplarité ; mais des mesures comme l'augmentation de 10 % de l'enveloppe des collaborateurs par les assemblées parlementaires doivent être financées. La situation me semble tenable jusqu'en 2020. Quoi qu'il en soit, il faudra se poser la question du budget après 2022, si le nombre et les moyens des parlementaires sont modifiés à cette échéance.

Ces observations faites, je propose l'adoption des crédits de la mission.

M. Arnaud Bazin . - Une réserve est toujours constituée en vue d'une utilisation déterminée. Quel est la raison d'être des réserves des assemblées ? Les ponctionner met-il en péril l'action ainsi envisagée ?

M. Marc Laménie . - L'augmentation des déplacements présidentiels a un impact sur les autres missions, notamment la mission « Sécurités ». Ainsi lors du passage du Président dans les Ardennes dans le cadre de l'itinérance mémorielle, une compagnie de CRS était mobilisée. A-t-on une idée de cet impact ?

Le budget du Sénat s'est stabilisé à 323 millions d'euros, et nos guides ne manquent pas de le signaler aux visiteurs. Il est important d'analyser la répartition de ces crédits.

Mme Christine Lavarde . - Où en est le projet de rapprochement entre la Chaîne Parlementaire et Public Sénat ?

Mme Sylvie Vermeillet . - Certes, le budget de l'Élysée se stabilise, mais après une augmentation de 3 % l'an dernier...

Concernant l'Assemblée nationale, la presse s'est fait écho de dépassements budgétaires en cours d'année. Or les charges de personnel passent de 175 millions d'euros pour le réalisé 2017 à... 171 millions d'euros pour le budget 2019. De même, les charges de secrétariat parlementaire ont baissé de 194 millions d'euros pour le réalisé 2017 à 170 millions pour le budget 2019 ! Cette comptabilité est-elle vraiment sincère ?

Mme Nathalie Goulet . - La réserve a son utilité. Elle permet notamment d'absorber les indemnités des très nombreux collaborateurs parlementaires licenciés après le renouvellement de l'Assemblée nationale en 2017.

Comment sont gérés les fonds de pension ? Il importe de vérifier que notre institution ne fait pas de placements dans des paradis fiscaux.

M. Philippe Dominati . - La Cour de justice de la République coûte 900 000 euros par an. Quelle a été son activité ces dernières années ?

M. Philippe Dallier . - Le budget 2019 est très satisfaisant en termes d'affichage, puisque les dotations des assemblées n'augmentent pas depuis six ans, mais le recours aux réserves pose la question de la soutenabilité de cette trajectoire à moyen terme. Personne ne comprendrait un ressaut brutal de ces dotations. Une baisse du nombre de parlementaires ne réglera pas le problème : outre les charges fixes, l'une des justifications de la mesure proposée est l'augmentation des moyens dont bénéficiera chaque parlementaire. Le passage des retraites de l'Assemblée nationale au régime général est présenté comme une grande avancée, mais il a lui aussi un impact sur l'équilibre du budget. Les difficultés arrivent ; à quelle échéance, et ne faut-il pas s'y préparer ?

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - La raison d'être des réserves du Sénat et de l'Assemblée nationale est, pour le moment, de financer les projets immobiliers. Au Sénat, les ressources propres et les crédits budgétaires financent le fonctionnement de l'institution, mais pas l'entretien courant. Or le Sénat, comme l'Assemblée nationale, voire l'Élysée, ressemblent beaucoup à un monument historique, et ce n'est pas pris en compte dans la dotation... C'est pourquoi l'entretien courant du bâtiment est financé par la réserve.

Ces réserves ont été constituées progressivement. François Hollande a, en quittant la Présidence, rendu 10 millions d'euros sur les 17 millions de la réserve au budget de l'État.

Marc Laménie, le G7 organisé à Biarritz en 2019 explique en partie l'augmentation du budget des déplacements. La Cour des comptes s'est demandé si le budget de l'Élysée recouvrait l'ensemble des dépenses de la Présidence. Un effort d'internalisation a été réalisé mais une véritable comptabilité analytique fait défaut. Concernant la sécurité du Président, la garde du pavillon de la Lanterne est assurée par la Garde républicaine et affectée dans le budget de celle-ci ; la CRS-1 relève de la Mission « Sécurités ». L'Élysée ne fonctionne pas encore à coût complet, mais s'en rapproche. Il faudrait davantage de comptabilité analytique, pour la Présidence comme pour l'Assemblée nationale ou le Sénat.

Christine Lavarde, le rapprochement entre LCP et Public Sénat ne semble plus dans l'air du temps.

Le budget de l'Assemblée nationale est-il sincère ? Oui, dans l'ensemble, les Questeurs de l'Assemblée nationale ont ajusté le budget 2019 à la réalité. Par ailleurs, les projets immobiliers de l'Assemblée, notamment la reconversion de l'hôtel de Clermont en bâtiment de bureaux, ont entraîné un recours accru aux réserves.

Les Questeurs m'ont indiqué que les réserves constituées au Sénat pour payer les pensions en financent 70 % du total ; 30 % doivent être prélevés sur les crédits annuels. Ce sont deux comptes séparés. Il ne me semble pas que ces fonds soient mal gérés.

Mme Nathalie Goulet . - Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - Le Sénat veille à éviter les placements dans les paradis fiscaux et procède aux diligences nécessaires.

La Cour de Justice de la République n'a pas eu d'activité en 2018 ; en 2012, elle a reçu 34 plaintes, 44 en 2013, 45 en 2014, 42 en 2015, 74 en 2016, 41 en 2017 et 11 au 31 mai 2018. Cinq affaires se sont conclues par un non-lieu et deux sont en cours.

Philippe Dallier a posé une question fondamentale : que fait-on demain ?

M. Philippe Dallier . - Et quand est-ce, demain ?

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - L'Assemblée nationale peut maintenir cette trajectoire jusqu'en 2022, le Sénat aussi. Il est également possible de laisser les bâtiments se dégrader, comme l'État le fait souvent... L'ajustement des crédits de fonctionnement et d'investissement courants est indispensable, pour l'Élysée comme pour l'Assemblée nationale et le Sénat. De plus, le Conseil constitutionnel fera un bilan, en 2020, de l'introduction de la question prioritaire de constitutionnalité, qu'il a absorbée à budget constant.

La baisse projetée de 30 % des effectifs parlementaires ne débouchera pas sur une économie de 30 % en fonctionnement, d'autant que le Président de la République a annoncé vouloir renforcer les moyens des assemblées, y compris en développant des capacités d'expertise propres. La fin du cumul des mandats et des cabinets locaux entraînera également un besoin de collaborateurs plus affûtés, et devrait se traduire par une augmentation du temps travaillé, du temps de présence des parlementaires et de l'activité de contrôle.

Il n'est pas raisonnable de laisser une telle situation à nos successeurs. Il faudra donc engager un travail d'explication auprès des Français et arrêter la démagogie.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

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Réunie à nouveau le jeudi 22 novembre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

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