B. DE SÉRIEUX DOUTES SUR LA CONSTITUTIONNALITÉ DE L'ENSEMBLE DE LA PROPOSITION DE LOI

Toutes les dispositions de la proposition de loi soulèvent des doutes quant à leur constitutionnalité, à l'exception de l'extension aux locaux loués par une association cultuelle de la législation applicable aux locaux lui appartenant ou mis à sa disposition concernant la célébration public du culte ( article 2 ).

Ces interrogations sur la constitutionnalité de la proposition de loi, au regard de la liberté d'association comme de la liberté d'exercice des cultes, se sont exprimées lors de la plupart des auditions de votre rapporteur, notamment celles du ministère de l'intérieur, du ministère de la justice et de plusieurs universitaires.

1. L'obligation pour les associations ayant une activité cultuelle de se soumettre au régime de la loi du 9 décembre 1905

En premier lieu, la proposition de loi tend à imposer à toute association assurant l'exercice public d'un culte ou la gestion d'un lieu de culte, d'une part, de se conformer aux prescriptions de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État et, d'autre part, d'avoir pour objet exclusif l'exercice public d'un culte ou la gestion d'un lieu de culte ( article 1 er ). Il s'agit d'unifier dans le cadre d'un régime unique toutes les associations ayant une activité cultuelle, de façon à en faciliter le contrôle et à permettre une séparation claire entre les activités cultuelles et les autres activités exercées par un culte.

La violation de cette nouvelle obligation serait punie d'une amende de cinquième classe prévue à l'article 131-13 du code pénal, dont le montant est de 1 500 euros ou 3 000 euros en cas de récidive ( article 5 ), et pourrait entraîner la dissolution de l'association par décision du tribunal de grande instance, soit à la requête de tout intéressé, soit à la diligence du ministère public ( article 6 ).

Une telle obligation ne semble pas directement justifiée par un motif d'intérêt général, relevant en particulier de l'ordre public, de façon strictement proportionnée, de sorte que cette ingérence dans le libre exercice des cultes et la liberté d'association ne trouve pas de justification constitutionnelle.

Même si la question n'a jamais été formellement tranchée, contraindre un groupement qui exerce un culte à se constituer selon une forme juridique donnée soulève une question de constitutionnalité à la fois au regard du principe de libre exercice des cultes et de celui de liberté d'association.

Dans l'esprit du législateur de 1905, l'association cultuelle devait être la seule forme d'organisation des cultes. La proposition de loi reviendrait ainsi à l'état du droit issu de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État. Les difficultés qui en ont résulté avec l'Église catholique ont néanmoins rapidement conduit le législateur à assouplir le cadre fixé en 1905.

En l'état du droit, la loi du 2 janvier 1907 concernant l'exercice public des cultes prévoit l'exercice public d'un culte selon trois modalités distinctes, librement choisies : association régie par la loi du 1 er juillet 1901 relative au contrat d'association, réunions tenues sur initiatives individuelles en vertu de la loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion ou bien association régie par la loi du 1 er juillet 1901 se conformant aux prescriptions statutaires établies par la loi du 9 décembre 1905 (activité exclusivement cultuelle, obligations statutaires et comptables). Il est admis, en outre, qu'une association relevant de la loi du 1 er juillet 1901 puisse avoir des activités mixtes et pas exclusivement cultuelles : on parle alors d'associations à objet mixte.

Le régime de la loi du 9 décembre 1905 est plus contraignant, mais il permet de bénéficier d'avantages financiers et fiscaux. Pour autant, pour quel motif d'intérêt général, résultant de l'ordre public, imposer aux cultes de s'organiser sous la seule forme prévue par la loi du 9 décembre 1905 ?

La proposition de loi comporte également un gage financier ( article 12 ) justement destiné à compenser la perte de recettes qui résulterait, si elle était appliquée, de l'accroissement du nombre d'associations appelées à bénéficier des exonérations fiscales prévues par la loi du 9 décembre 1905.

2. L'obligation pour les ministres du culte de recevoir une formation qualifiante assurée par une instance cultuelle reconnue par l'État, sous peine de sanctions pénales

Ensuite, la proposition de loi tend à imposer aux associations cultuelles - qui seraient la forme unique sous laquelle pourrait se constituer un culte - l'obligation de ne faire appel, pour l'exercice public du culte, qu'à des ministres du culte « justifiant d'une qualification acquise au cours d'une formation spécifique leur assurant une connaissance suffisante des principes civils et civiques ainsi que des rites de cette confession » ( article 4 ). Comportant un volet profane et un volet religieux, cette formation devrait être « dispensée et sanctionnée par une instance suffisamment représentative de ce culte sur le territoire national », les critères de cette représentativité devant être déterminés par un décret en Conseil d'État, en tenant compte du nombre d'associations cultuelles se réclamant de chaque culte ( article 4 ). La proposition de loi veut aussi définir le titre de ministre du culte, qui serait « conféré à toutes les personnes qui occupent, en vertu d'un contrat ou à quelque titre que ce soit et en quelque lieu que ce soit, une fonction primordiale dans la direction, le déroulement, l'animation et l'enseignement d'un culte » ( article 4 ).

En outre, pour assurer l'effectivité des nouvelles obligations qu'elle établit, la proposition de loi tend à interdire la célébration d'un culte à toute personne ne remplissant pas cette obligation de formation spécifique ( article 3 ), sous peine d'encourir la peine de trois mois à deux ans d'emprisonnement déjà prévue par l'article 35 de la loi du 9 décembre 1905 à l'encontre des ministres du culte dont le discours ou un écrit contiennent « une provocation directe à résister à l'exécution des lois ou aux actes légaux de l'autorité publique » ou tendent « à soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres » ( article 7 ).

En outre, les ministres du culte déjà en fonction lors de l'entrée en vigueur de la loi devraient justifier de la nouvelle qualification requise pour célébrer un culte dans les trois années suivant la publication du décret en Conseil d'État précité ( article 8 ).

Ces dispositions sont déclinées dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ( articles 9 et 11 ), sans être applicables aux cultes statutaires ( article 11 )

L'ensemble de ces dispositions ont ainsi pour objet de réglementer le contenu de la formation des ministres du culte, l'accès à la fonction de ministre du culte, mais également la célébration du culte elle-même, qui ne pourrait avoir lieu en l'absence de ministre formé. L'exercice même du culte serait alors régi par la loi, ce qui constituerait une immixtion très significative dans l'organisation et la célébration des cultes, dans la libre administration de chaque culte, quand bien même celui-ci garderait la responsabilité d'organiser sa propre formation. Il s'agirait d'une atteinte particulièrement forte au principe constitutionnel de liberté de culte, alors que, selon le Conseil constitutionnel, la République doit garantir ce principe.

Pas plus que l'obligation précédente concernant l'organisation sous forme d'association de la loi du 9 décembre 1905, ces obligations ne semblent directement justifiées par un motif d'intérêt général, relevant en particulier de l'ordre public, de sorte que cette ingérence dans le libre exercice des cultes ne trouve pas de justification constitutionnelle.

Si l'État a la faculté d'exercer ses pouvoirs de police administrative dans l'objectif de prévenir les troubles à l'ordre public, ces derniers devraient être suffisamment graves pour justifier une telle immixtion dans l'exercice des cultes et, même dans cette hypothèse, les obligations imposées en matière de formation des ministres du culte et de célébration des cultes devraient être proportionnées. Votre rapporteur observe que ces conditions sont loin d'être réunies : l'obligation de formation ne correspond pas juridiquement et par elle-même à une exigence d'ordre public.

S'interrogeant sur la définition de ministre du culte et la « difficulté due au fait que l'islam ne dispose pas, à proprement parler, d'un clergé au sens catholique du terme, c'est-à-dire de ministres du culte s'inscrivant dans une hiérarchie », dans son rapport public de 2004 dont les considérations générales étaient consacrées à la laïcité 12 ( * ) , le Conseil d'État, reprenant à son compte des réflexions antérieures du Haut conseil à l'intégration 13 ( * ) , indiquait que « les pouvoirs publics peuvent seulement créer les conditions permettant aux candidats à la fonction d'imam de trouver, en France, la formation nécessaire... Si l'État peut encourager la création d'institutions universitaires permettant d'enrichir la connaissance de la culture musulmane, il ne peut se substituer aux activités cultuelles pour la formation des cadres religieux ». Le Conseil d'État a aussi rappelé qu'il s'était attaché depuis 1905, dans sa jurisprudence, à « la mise en oeuvre du principe de libre exercice des cultes, sous réserve des restrictions exigées par l'ordre public, ainsi qu'au respect des règles d'organisation de ces cultes ».

L'État ne peut avoir à connaître de la formation des ministres du culte que dans deux hypothèses : d'une part, lorsqu'un ministre du culte intervient dans le cadre d'un service public, par exemple comme aumônier, au nom du bon fonctionnement du service et, d'autre part, lorsqu'un ministre du culte étranger sollicite l'entrée ou le séjour sur le territoire français.

À cet égard, le décret n° 2017-756 du 3 mai 2017 relatif aux aumôniers militaires, hospitaliers et pénitentiaires et à leur formation civile et civique est venu imposer l'obtention préalable d'un diplôme sanctionnant une formation civile et civique agréée, comprenant un enseignement sur les grandes valeurs de la République 14 ( * ) . Entré en vigueur le 1 er octobre 2017, ce texte fait aujourd'hui l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'État, toujours en cours d'instruction.

À supposer qu'il soit possible d'imposer une formation aux ministres du culte, dispensée par chaque culte lui-même, nonobstant les réserves d'ordre constitutionnel développées supra , la proposition de loi affecterait cette mission de formation à une « instance suffisamment représentative de ce culte sur le territoire national ». Pour chaque culte, les critères de représentativité seraient déterminés par un décret en Conseil d'État, qui tiendrait compte du nombre d'associations cultuelles se réclamant de chaque culte.

Une telle disposition soulève une seconde difficulté constitutionnelle au regard du principe de liberté de culte, puisqu'elle reviendrait in fine à ce que l'État détermine lui-même quelles sont les instances représentatives de chaque culte et, au-delà, quels sont les cultes qui peuvent bénéficier de ce dispositif de représentativité leur permettant de délivrer une formation permettant à leurs ministres du culte de célébrer légalement le culte.

En effet, outre l'ingérence qu'il représenterait dans le fonctionnement interne des cultes, ce mécanisme reviendrait, en particulier avec l'intervention d'un décret en Conseil d'État, à une forme de reconnaissance de certains cultes par l'État, alors que la République ne reconnaît aucun culte et garantit leur libre exercice, selon le Conseil constitutionnel, en vertu du principe de neutralité de l'État, découlant du principe de laïcité. L'État ne saurait porter une appréciation sur la représentativité des instances internes d'un culte.

En outre, cette disposition créerait une inégalité entre les citoyens en raison de leur religion, contraire à l'article 1 er de la Constitution, selon que leur culte disposerait ou non d'une « instance suffisamment représentative » reconnue par l'État et capable de former des ministres du culte sur le territoire français.

En effet, seraient privés de la célébration du culte, en violation du libre exercice du culte et du droit qui en résulte d'exercer son culte, les fidèles dont les cultes ne seraient pas en mesure de se conformer à ces exigences, par exemple en raison d'un manque de moyens matériels pour assurer la formation, ne disposeraient pas d'instance jugée suffisamment représentative ou même ne comporteraient pas de ministre du culte en tant que tel.

Plus largement, cette disposition pourrait porter atteinte au principe de l'égalité de traitement des différents cultes, par exemple si aucune instance n'était jugée suffisamment représentative d'un culte par l'État. Elle ouvrirait sans doute la voie à des contestations de la part de cultes très minoritaires, qui se trouveraient entravés dans le libre exercice du culte, voire à des demandes de reconnaissance par l'État de mouvements à caractère sectaire.

Enfin, pour l'ensemble de ces dispositions, votre rapporteur fait aussi état de ses interrogations au regard de la protection de la liberté de culte assurée par l'article 9 précité de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales.

3. L'instauration d'infractions pénales similaires à des infractions existantes, mais avec des peines différentes

Par ailleurs, la proposition de loi comporte des sanctions pénales ( article 7 ), qui soulèvent aussi des difficultés d'ordre constitutionnel, au regard du principe de légalité des délits et des peines. Ces dispositions sont également déclinées dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ( article 10 ), sans être applicables aux cultes statutaires ( article 11 ).

Comme cela a été indiqué supra , les ministres du culte qui exerceraient publiquement un culte sans pouvoir justifier de leur obligation de formation encourraient la peine de trois mois à deux ans d'emprisonnement prévue par l'article 35 de la loi du 9 décembre 1905 à l'encontre des ministres du culte dont le discours ou un écrit contiennent « une provocation directe à résister à l'exécution des lois ou aux actes légaux de l'autorité publique » ou tendent « à soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres » ( article 7 ).

En outre, seraient passibles de la même peine de trois mois à deux ans d'emprisonnement, au-delà des seuls ministres du culte, les personnes :

- qui, par leurs discours, soit provoquent à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ;

- ou qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l'étranger.

Or, ces incriminations sont quasiment identiques à des incriminations qui existent déjà, soit dans le code pénal, soit dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

D'une part, l'article 421-2-5 du code pénal punit des peines de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende « le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l'apologie de ces actes ». Ce délit de provocation ou d'apologie du terrorisme a été sorti de la loi du 29 juillet 1881 par la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, afin de lui appliquer le régime de droit commun de la procédure pénale, compte tenu de la gravité des actes en question, plutôt que le régime de la presse, plus favorable aux auteurs d'infraction au nom de la liberté d'expression. Dans la récente décision n° 2018-706 QPC du 18 mai 2018 15 ( * ) , le Conseil constitutionnel a validé le transfert de ce délit dans le code pénal, « au regard de la nature des comportements réprimés », qui consistent à « inciter à porter un jugement favorable sur une infraction expressément qualifiée par la loi d'"acte de terrorisme" ou sur son auteur ».

Ce délit de provocation est extrêmement proche des « agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme » que veut sanctionner la proposition de loi, au point que votre rapporteur, à l'instar des personnes entendues sur ce point lors de ses auditions, estime que ces deux délits doivent être considérés comme identiques. Pour autant, les peines encourues ne sont pas les mêmes : cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende dans le code pénal, contre deux ans d'emprisonnement dans la proposition de loi.

D'autre part, l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse punit d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende « ceux qui (...) auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». Les moyens par lesquels est constaté ce délit de provocation à la haine raciale sont précisés à l'article 23 de la même loi : il s'agit en particulier d'une provocation par des discours publics ou des écrits.

Ce délit est rédigé en des termes identiques à ceux de la proposition de loi, à la différence près que cette dernière ne vise que le moyen des discours. De plus, l'infraction instituée par la proposition de loi est rédigée d'une manière redondante, car la provocation à la haine et la propagation des idées de haine doivent à l'évidence être considérées comme des faits identiques. Là encore, votre rapporteur constate que les peines encourues ne sont pas les mêmes : un an d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende dans la loi du 29 juillet 1881, contre deux ans d'emprisonnement dans la proposition de loi.

Ainsi, dans les deux cas, les mêmes faits pourraient être poursuivis sur le fondement d'incriminations similaires, mais seraient passibles de sanctions pénales différentes.

Résultant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, selon lequel « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée », le principe constitutionnel de légalité des délits et des peines implique, notamment, que la loi doit définir les incriminations pénales en des termes suffisamment clairs et précis pour éviter tout risque d'arbitraire. Dans sa décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981 16 ( * ) , le Conseil constitutionnel a affirmé, pour la première fois, « la nécessité pour le législateur de définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire ». Depuis 1980, le principe de légalité des délits et des peines est contrôlé de façon constante par le Conseil. Dans sa décision n° 98-399 DC du 5 mai 1998, il a précisé « qu'il résulte de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de la légalité des délits et des peines (...), la nécessité pour le législateur de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale, de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis pour permettre la détermination des auteurs d'infractions et d'exclure l'arbitraire dans le prononcé des peines ».

Votre rapporteur juge que la situation qui résulterait de la proposition de loi serait particulièrement arbitraire dans le prononcé des peines, puisque les mêmes faits pourraient être poursuivis au titre d'incriminations identiques, mais avec des peines encourues variables. La proposition de loi semble dès lors méconnaître le principe de légalité des délits et des peines.

Par ailleurs, votre rapporteur s'interroge aussi au regard du principe constitutionnel de nécessité des peines, qui résulte également de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et dont découle, notamment, le principe de proportionnalité des peines. Ainsi, selon la décision n° 86-215 DC du 3 septembre 1986 17 ( * ) , « en l'absence de disproportion manifeste entre l'infraction et la peine encourue, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer sa propre appréciation à celle du législateur en ce qui concerne la nécessité des peines attachées aux infractions définies par celui-ci ». Depuis 1986, les principes de nécessité et de proportionnalité des peines sont contrôlés de façon constante par le Conseil.

À supposer que l'interdiction de célébrer publiquement un culte pour un ministre du culte non régulièrement formé ne porte pas atteinte au principe de libre exercice du culte, la peine de deux ans d'emprisonnement encourue par ce ministre du culte peut apparaître disproportionnée au regard de la gravité de l'infraction commise pour l'ordre public.


* 12 Rapport public du Conseil d'État, 2004, Considérations générales, réflexions sur la laïcité.

* 13 Haut conseil à l'intégration, l'Islam dans la République, novembre 2000.

* 14 Les caractéristiques de ce diplôme ont été précisées par un arrêté du 5 mai 2017. Aujourd'hui, dix-huit diplômes universitaires dits « laïcité », encouragés par le ministère de l'intérieur, y compris d'un point de vue financier depuis 2015, correspondent à ces caractéristiques. Les premiers de ces diplômes ont été créés en 2008 à l'Institut catholique de Paris et en 2011 à l'université de Strasbourg. Ils sont spécialement destinés aux cadres de tous les cultes et aux fonctionnaires concernés par les questions cultuelles. En 2016 a été élaborée une charte commune à tous ces enseignements, dans un but d'harmonisation.

* 15 Conseil constitutionnel, décision n° 2018-706 QPC du 18 mai 2018, M. Jean-Marc R. [Délit d'apologie d'actes de terrorisme].

* 16 Conseil constitutionnel, décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981, loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes.

* 17 Conseil constitutionnel, décision n° 86-215 DC du 3 septembre 1986, loi relative à la lutte contre la criminalité et la délinquance.

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