II. IL CONVIENT D'ACHEVER LE PROCESSUS ENGAGÉ EN 1974 ET DE RECONNAÎTRE LA QUALITÉ DE COMBATTANT À CEUX QUI ONT SERVI EN ALGÉRIE APRÈS LE 2 JUILLET 1962

A. LA REVENDICATION DU MONDE COMBATTANT EST ANCIENNE ET LÉGITIME

1. L'extension de la carte du combattant constitue une demande récurrente du monde combattant
a) Une demande ancienne et systématiquement repoussée par les gouvernements successifs

L'attribution de la carte du combattant aux militaires ayant servi en Algérie après l'indépendance de ce pays constitue une demande récurrente du monde combattant, fréquemment relayée au Parlement.

On peut notamment citer la proposition de loi 17 ( * ) déposée par notre ancien collègue Marcel-Pierre Cléach 18 ( * ) , ou encore celle déposée à l'Assemblée nationale par M. Gérald Darmanin en septembre 2012 19 ( * ) . La proposition de loi de notre ancien collègue a toutefois été rejetée à la demande du Gouvernement 20 ( * ) , alors que celle de M. Darmanin n'a jamais été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Au cours de la campagne pour l'élection présidentielle de 2017, M. Emmanuel Macron s'était dit favorable à la mesure proposée par la présente proposition de loi. Toutefois, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, le Gouvernement, conformément à la ligne adoptée par tous les gouvernements précédents, s'est opposé aux amendements en ce sens. Adoptés par le Sénat, ces amendements n'ont finalement pas prospéré.

Par ailleurs, une proposition de loi similaire, déposée par notre collègue député Gilles Lurton a été discutée le 4 avril 2018 à l'Assemblée nationale. A la demande des députés du groupe La République en Marche, cette proposition de loi a été renvoyée en commission.

b) Le dispositif proposé

Le dispositif de la présente proposition de loi est simple. Il modifie l'article L. 311-2 du CPMIVG afin d'étendre aux militaires ayant servi en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1 er juillet 1964 le bénéfice des dispositions relatives à la reconnaissance de la qualité de combattant aux « militaires des forces armées françaises qui ont participé à des actions de feu et de combat (...) qui, en vertu des décisions des autorités françaises, ont participé au sein d'unités françaises ou alliées ou de forces internationales, soit à des conflits armés, soit à des opérations ou missions menées conformément aux obligations et engagements internationaux de la France », c'est-à-dire essentiellement aux vétérans des Opex (article 1). Les conséquences financières de cette mesure doivent être compensées par une augmentation à due concurrence des droits de consommation sur le tabac (article 2).

Concrètement, cette proposition de loi permettrait donc de combler un angle mort de la législation actuelle et d'attribuer la carte du combattant aux militaires ayant servi en Algérie après la fin de la guerre.

2. Cette mesure permettrait de résoudre une injustice et une inégalité
a) Une situation qui n'était pas paisible

La guerre d'Algérie a pris fin avec l'accès de ce pays à l'indépendance. Il ne saurait être question de remettre en cause cette date. Néanmoins, la présence des militaires français entre le 2 juillet 1962 et le 1 er juillet 1964 n'était pas paisible. S'il est difficile de connaître avec précision le nombre de victimes, le monde associatif considère que plus de 500 militaires ont perdu la vie au cours de cette période.

Ce chiffre, qui ne traduit que partiellement la réalité d'une situation, est à comparer avec celui des pertes déplorées dans les autres opérations extérieures. En effet, le ministère des armées recense 226 soldats décédés en opération entre le 1 er janvier 2000 et le 22 février 2018, dont 90 en Afghanistan entre 2001 et 2015.

b) Une présence assimilable à une opération extérieure

Permise par un traité international, la présence militaire française en Algérie après le 2 juillet 1962 s'apparente à une opération extérieure.

On peut d'ailleurs noter que l'arrêté du 12 janvier 1994 mentionne des opérations menées au Cameroun entre le 17 décembre 1956 et le 31 décembre 1958, d'une part, et entre le 1 er juin 1959 et le 28 mars 1963 d'autre part, soit avant et après l'indépendance de ce pays intervenue, pour la partie sous tutelle française, le 1 er janvier 1960.

En outre, au vu de la durée et de l'intensité de certaines des opérations mentionnées, on voit mal en quoi la participation à ces opérations justifierait davantage la reconnaissance de la qualité de combattant que la présence en Algérie sur la période 1962-1964.

La présente proposition de loi s'inscrit donc dans une logique d'équité entre les différentes générations du feu.

c) Une mesure d'équité entre frères d'armes

Si la création de la carte « à cheval » a permis d'attribuer la carte du combattant à certaines des personnes concernées par la présente proposition de loi, elle a également créé une curieuse situation dans laquelle un soldat arrivé en Algérie le 1 er juillet 1962 est reconnu comme combattant alors que son frère d'armes arrivé le 3 juillet ne le peut pas.

Il en résulte une inégalité de traitement entre anciens soldats placés dans des conditions objectivement similaires.


* 17 Proposition de loi n° 282 (2007-2008) pour l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de l'armée française ayant au moins quatre mois de présence en Algérie avant le 1 er juillet 1964.

* 18 Proposition de loi n° 669 (2011-2012) visant à élargir les conditions d'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de l'armée française totalisant au moins quatre mois de présence en Algérie avant le 1er juillet 1964 ou en opérations extérieures.

* 19 Proposition de loi n° 211 (2011-2012) visant à élargir les conditions d'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de l'armée française totalisant au moins quatre mois de présence en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 2 juillet 1964 ou en opérations extérieures.

* 20 Séance du 19 novembre 2013.

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