TITRE VI - DISPOSITIONS RELATIVES AUX REPRÉSENTANTS AU PARLEMENT EUROPÉEN
Article 13 - Transmission par l'administration fiscale au président de la HATVP d'une attestation concernant la situation fiscale d'un représentant français au Parlement européen - Extension aux représentants français au Parlement européen des incompatibilités relatives à l'exercice de fonctions de conseil
L'article 13 du projet de loi vise à rendre applicables aux représentants français au Parlement européen le dispositif de transmission par l'administration fiscale d'une attestation de situation fiscale concernant les députés et sénateurs (article 2 du projet de loi organique) et les nouvelles incompatibilités prévues pour mieux encadrer l'exercice par les parlementaires de fonctions de conseil (articles 3 à 8 du projet de loi organique) .
1. La délivrance d'une attestation de situation fiscale
Sur le modèle de l'article 2 du projet de loi organique, un représentant français au Parlement européen, dans le mois suivant son entrée en fonction, recevrait de l'administration fiscale une attestation relative au respect de ses obligations fiscales en matière de déclaration et de paiement des impositions dont il est redevable.
Comme pour les parlementaires nationaux, l'attestation porterait uniquement sur le respect des obligations de déclaration et de paiement et couvrirait l'ensemble des impositions, nationales comme locales, dont est redevable le représentant au Parlement européen. Cette procédure n'équivaut donc pas à une vérification de situation fiscale et ne permet pas d'exclure la découverte ultérieure d'un manquement du représentant au Parlement européen à ses obligations fiscales dans le cadre d'une procédure de contrôle fiscal de droit commun. C'est pourquoi cette attestation « ne constitue[rait] pas une prise de position formelle de l'administration fiscale sur la situation fiscale » du représentant au Parlement européen.
La procédure prévue est identique à celle applicable aux parlementaires nationaux sous deux réserves :
- le rôle du bureau de l'assemblée concernée serait assuré par le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ;
- la démission d'office serait prononcée par le Conseil d'État, juge de l'élection des représentants français au Parlement européen, en lieu et place du Conseil constitutionnel, compétent pour juger des seuls recours dirigés contre l'élection des députés et des sénateurs.
Sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-74 afin de préciser et simplifier cette procédure , dans la même mesure que celle applicable aux parlementaires nationaux.
Dans ce cadre, le président de la HATVP ne serait destinataire que des attestations de non-conformité délivrées par l'administration fiscale à l'égard d'un représentant au Parlement européen et à la condition que le juge n'ait pas été saisi, à cette date, d'une contestation relative aux obligations fiscales en cause. En effet, dans ce dernier cas, l'absence de paiement de tout ou partie des impositions dont le parlementaire serait redevable résulterait de l'existence d'un litige avec l'administration fiscale sur le bien-fondé de l'imposition ou du recouvrement. Cette précision a paru à votre commission de nature à préserver l'effectivité du droit au recours garanti à chaque élu comme contribuable.
De même, la transmission d'une attestation de non-conformité au président de la HATVP serait précédée d'une phase d'échanges avec le représentant au Parlement européen. Ce dernier serait invité par l'administration fiscale à lui présenter ses observations pour, éventuellement, éclairer les constatations de cette dernière, ce qui permettrait d'assurer le caractère contradictoire de la procédure. Le représentant au Parlement européen serait également invité à régulariser sa situation s'il admettait les manquements à ses obligations fiscales.
Le représentant au Parlement européen disposerait d'un délai d'un mois, au terme duquel l'administration fiscale, si elle confirmait l'attestation de non-conformité précédemment délivrée, la transmettrait au président de la HATVP.
Comme le bureau de chaque assemblée, le président de la HATVP disposerait bel et bien d'un pouvoir d'appréciation mais limité à la vérification de la réalité du manquement du représentant au Parlement européen aux obligations de déclaration et de paiement des impositions dont il est redevable. Si cette situation de non-conformité était avérée, alors le président de la HATVP serait tenu de saisir le Conseil d'État.
Saisi par le président de la HATVP, le Conseil d'État aurait, comme le Gouvernement le propose, la faculté de mettre fin au mandat du représentant au Parlement européen. Afin d'éviter tout risque d'incompétence négative, cet amendement encadre le pouvoir d'appréciation du Conseil d'État en réservant cette possibilité au cas où il constaterait un manquement d'une particulière gravité.
Votre commission a également opté pour qualifier cette cessation du mandat de déchéance plutôt que de démission d'office, les effets restant identiques.
2. Les incompatibilités parlementaires
L'article 7 de l'Acte du 20 septembre 1976 175 ( * ) permet l'extension des incompatibilités applicables aux députés et aux sénateurs aux représentants français au Parlement européen .
Sur ce fondement, l'article 6 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 176 ( * ) prévoit ainsi que « les articles L.O. 139, L.O. 140, L.O. 142 à L.O. 150 et L.O. 152 du code électoral sont applicables aux représentants (français) au Parlement européen ».
Ces derniers disposent de trente jours pour mettre fin à une éventuelle situation d'incompatibilité. Dans le cas contraire, tout électeur peut saisir le Conseil d'État ; le représentant au Parlement européen est réputé renoncer à son mandat lorsque le juge administratif constate une incompatibilité.
L'article 13 du projet de loi ordinaire tend, par conséquent, à appliquer aux représentants français au Parlement européen les nouvelles incompatibilités prévues par le projet de loi organique 177 ( * ) .
Le I de l'article 13 prévoit la mention, dans la déclaration d'intérêts et d'activités de ces représentants, des participations directes ou indirectes leur conférant le contrôle d'une société, d'une entreprise ou d'un organisme dont l'activité consiste « principalement » dans la fourniture de conseils.
Le 2° de son II prévoit que les représentants français au Parlement européen disposent de trois mois pour céder les participations leur conférant le contrôle d'une structure dont l'activité consiste « principalement » dans la fourniture de prestations de conseils ou pour en confier la gestion à un tiers.
Comme pour les députés et les sénateurs, ce délai serait plus long que la période de trente jours accordée aux parlementaires pour régulariser d'éventuelles incompatibilités professionnelles. Il s'agit, en l'espèce, de prendre en compte l'ampleur des démarches administratives à réaliser 178 ( * ) .
Adoptant la même logique qu'à l'article 7 du projet de loi organique, votre commission a pris soin de distinguer l'interdiction d'acquérir, au cours du mandat, le contrôle d'une structure dont l'activité consiste principalement dans la fourniture de conseils, d'une part, et l'interdiction, sous certaines conditions, de continuer d'exercer le contrôle d'une telle structure, d'autre part.
Dans le premier cas, l'interdiction serait d'application immédiate à compter de l'entrée en vigueur de la loi. Dans le second cas, le parlementaire disposerait de trois mois pour régulariser sa situation (amendement COM-73 du rapporteur) .
Le 3° du II de l'article 13 « relève le compteur » de la loi n° 77-729 précitée du 7 juillet 1977 pour garantir l'application outre-mer de l'ensemble de ces dispositions.
Votre commission a adopté l'article 13 ainsi modifié .
Article 14 - Modalités d'entrée en vigueur de la modification des déclarations d'intérêts et d'activités et des incompatibilités parlementaires
L'article 14 du projet de loi tend à préciser les modalités d'entrée en vigueur de la modification des déclarations d'intérêts et d'activités et des incompatibilités parlementaires prévue, pour les représentants français au Parlement européen, par l'article 13.
Il vise, tout d'abord, à ce que ces représentants modifient leur déclaration d'intérêts et d'activités dans un délai de trois mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi afin d'y inclure les informations relatives aux participations leur conférant le contrôle d'une société, d'une entreprise ou d'un organisme dont l'activité consiste « principalement » dans la fourniture de conseils (I) .
Concernant les incompatibilités applicables aux représentants français au Parlement européen, l'article 14 suit une démarche similaire à celle de l'article 12 du projet de loi organique (applicable aux députés et aux sénateurs), en distinguant :
- les incompatibilités opposables dès l'entrée en vigueur de la loi (premier alinéa du III) ;
- celles pour lesquelles les représentants français au Parlement européen disposeraient de trois mois à compter cette entrée en vigueur pour régulariser leur situation (deuxième alinéa du III) ;
- celles applicables à compter du prochain renouvellement du Parlement européen prévu en mai 2019 (IV) .
Ces dispositions seraient applicables en Polynésie française, dans les Iles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie (V).
L'entrée en vigueur des incompatibilités (représentants français au Parlement européen)
Disposition |
Article
|
Entrée en vigueur |
Obligation de compléter sa déclaration d'intérêts et d'activités en mentionnant le contrôle d'une structure dont l'activité consiste « principalement » dans la fourniture de conseils |
Art. L.O. 135-1 |
Trois mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi |
Interdiction de diriger une structure dont l'activité consiste « principalement » à conseiller les sociétés, entreprises, établissements ou organismes « sensibles » mentionnés à l'article L.O. 146 du code électoral |
Art. L.O. 146, 8° |
À compter de l'entrée en vigueur de la loi avec, ensuite, un délai de mise en conformité de trois mois |
Interdiction d'exercer une fonction de conseil qui n'était pas la sienne avant le début du mandat |
Art. L.O. 146-1, 1° |
À compter de l'entrée en vigueur de la loi |
Interdiction de poursuivre une activité de conseil initiée moins d'un an avant l'entrée en fonction du parlementaire |
Art. L.O. 146-1, 2° |
À compter du prochain renouvellement du Parlement européen (mai 2019) |
Interdiction de fournir des prestations de conseil aux sociétés, entreprises, établissements ou organismes « sensibles » mentionnés à l'article L.O. 146 du code électoral |
Art. L.O. 146-1, 3° |
À compter de l'entrée en vigueur de la loi avec, ensuite, un délai de mise en conformité de trois mois |
Interdiction d'acquérir le contrôle d'une structure dont l'activité consiste « principalement » dans la fourniture de conseils |
Art. L.O. 146-2, premier alinéa |
À compter de l'entrée en vigueur de la loi |
Interdiction d'exercer le contrôle d'une structure dont l'activité consiste « principalement » dans la fourniture de conseils, si ce contrôle a été acquis moins d'un an avant l'entrée en fonction du parlementaire |
Art. L.O. 146-2, 1° |
À compter du prochain renouvellement du Parlement européen (mai 2019) |
Interdiction d'exercer le contrôle dans une structure dont l'activité consiste « principalement » à conseiller les sociétés, entreprises, établissements ou organismes « sensibles » mentionnés à l'article L.O. 146 du code électoral |
Art. L.O. 146-2, 2° |
À compter de l'entrée en vigueur de la loi avec, ensuite, un délai de mise en conformité de trois mois |
Interdiction aux parlementaires qui bénéficiaient de la dérogation « professions libérales » de débuter une fonction de conseil qui n'était pas la leur avant l'entrée en vigueur de la loi |
Ancien art. L.O. 146-1 du code électoral, alinéa 2 |
À compter de l'entrée en vigueur de la loi |
Source : commission des lois du Sénat
À l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté l'amendement COM-75 pour améliorer la rédaction de l'article 14 et corriger des erreurs matérielles.
Votre commission a adopté l'article 14 ainsi modifié .
* 175 Acte portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct.
* 176 Loi relative à l'élection des représentants au Parlement européen.
* 177 Cf. les commentaires des articles 3 à 8 du projet de loi organique pour plus de précisions.
* 178 Cf. le commentaire de l'article 7 du projet de loi organique pour plus de précisions.