II. UNE INTERDICTION CIBLÉE, COMPLÈTE ET ADAPTÉE AU SERVICE PUBLIC DE L'AUDIOVISUEL
Votre rapporteure rappelle que l'interdiction voulue par le Sénat est à la fois ciblée, complète et adaptée au service public de l'audiovisuel :
1) L'interdiction est ciblée parce qu'elle concerne les enfants de moins de douze ans . Les adolescents qui disposent d'un esprit critique et d'une capacité de jugement plus importante ne sont pas visés. La proposition de loi se concentre sur le public le plus fragile - les enfants - qui ne sont pas capables de faire la différence entre le personnage dans le dessin animé et le même personnage qui apparaît quelques secondes plus tard pour vanter les mérites d'une boisson sucrée ou d'une barre chocolatée industrielle. On peut rappeler à cet égard que l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA) a adopté en 2008 une position dans laquelle elle recommandait à ses membres de ne pas recourir aux messages publicitaires destinés aux enfants de moins de douze ans . Il existe donc un certain consensus sur ce sujet ;
2) L'interdiction est complète parce qu'elle vise à la fois le linéaire, le délinéaire et le numérique. Le service public deviendra ainsi un espace de confiance pour les parents , ce qui devrait constituer un avantage comparatif et concurrentiel important. Cette proposition de loi n'est donc pas dirigée contre le service public, elle vise bien au contraire à renforcer son identité et sa spécificité ;
3) Cette interdiction est, enfin, adaptée puisqu'elle ne concerne pas les chaînes privées qui sont, pour leur part, soumises à une autorégulation sous le contrôle du CSA renforcée par l'article 1 er .
Après mûre réflexion votre rapporteure estime aujourd'hui que la situation des chaînes privées ne peut être comparée à celle des chaînes publiques qui disposent d'une importante subvention publique : une telle interdiction aurait en effet pour conséquence de faire disparaître les programmes jeunesse des chaînes privées puisque c'est la publicité qui les finance. L'alternative qui consisterait à attribuer aux chaînes privées une part du produit de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) pour compenser la perte de recettes publicitaires n'apparaît pas envisageable.
Concernant la philosophie de cette proposition de loi, votre rapporteure considère nécessaire de préciser que le texte ne vise pas à diaboliser la publicité ni certains produits en particulier. La consommation occasionnelle de barres chocolatées ou de boissons gazeuses ne constituent pas, en effet, une menace pour la santé lorsque les parents sont attentifs à ce que cela ne devienne pas une habitude .
Par contre, votre rapporteure souhaite apporter une réponse à la situation où certaines familles considèrent, pour diverses raisons, la télévision comme une sorte de « babysitter » . Les enfants sont alors trop souvent laissés seuls devant le poste de télévision pendant des heures sans surveillance et deviennent des objets de convoitise pour les grands industriels qui peuvent leur inculquer des réflexes alimentaires nocifs ou les formater pour acheter des produits le plus souvent de piètre qualité fabriqués en Asie. Mme Chantal Jannet, membre de l'UNAF, avait très justement indiqué à votre rapporteure lors de son audition l'année dernière que « la publicité a pour but, dès 3 ans, de structurer l'enfant afin d'en faire un futur client des annonceurs » .
Votre rapporteure souhaite également rappeler que la publicité à la télévision concerne d'abord les grandes entreprises multinationales et non les PME et les artisans qui sont souvent confrontés à une concurrence déloyale de la part des grands groupes.
Dans ces conditions, l'objectif de la proposition de loi est bien de proposer aux familles un espace sanctuarisé - un espace de confiance - où les familles sauront que les enfants seront protégés face aux stratégies de certains industriels qui - comme les fabricants de tabac - ne font aucun sentiment et ne reculent devant rien pour vendre leurs produits.