Rapport général n° 140 (2016-2017) de MM. Vincent ÉBLÉ et André GATTOLIN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016
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LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS
SPÉCIAUX
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PREMIÈRE PARTIE - PRÉSENTATION DE LA
MISSION
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1. Une mission qui représente environ
85 % de l'ensemble des crédits alloués par l'État
à la politique de la culture
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2. Après la rebudgétisation de la
redevance d'archéologie préventive en 2016, une relative
stabilité du périmètre des crédits de la culture en
2017
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3. 2,9 milliards d'euros de crédits de
paiement prévus pour 2017, dont près de 30 % de subventions pour
charges de service public aux opérateurs et 34 % de dépenses
d'intervention
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4. 35 % des crédits sont
déconcentrés et gérés par les directions
régionales des affaires culturelles (Drac)
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5. Des crédits budgétaires
complétés par des dépenses fiscales ainsi que, de
façon plus marginale, par une taxe affectée
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6. Une mission qui représente environ 0,5 %
de l'emploi public total, une politique de rattrapage indemnitaire
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7. Un dispositif de performance articulé
autour de quatre principaux objectifs
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1. Une mission qui représente environ
85 % de l'ensemble des crédits alloués par l'État
à la politique de la culture
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SECONDE PARTIE - ANALYSE DE LA
BUDGÉTISATION 2017
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I. LES POINTS POSITIFS
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1. En 2017, une augmentation des crédits
justifiée par le lancement de dispositifs ambitieux, qui témoigne
d'un réel engagement du Gouvernement
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2. Une ambition forte en matière d'action
éducative auprès des jeunes publics : une nouvelle hausse
des crédits et un relèvement de la cible de performance
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3. Un accompagnement par l'État des
opérateurs culturels fragilisés à la suite des attentats
à saluer
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a) 6,4 millions d'euros liés à la
sécurisation post-attentat des établissements culturels
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b) Face à des besoins qui restent
importants, le renforcement en 2016 des moyens alloués au fonds
d'urgence
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c) Le lancement d'un plan en faveur du tourisme au
sein duquel le secteur culturel doit avoir toute sa place
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a) 6,4 millions d'euros liés à la
sécurisation post-attentat des établissements culturels
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4. La restauration et l'entretien des monuments
historiques : un maintien des moyens nécessaire au regard des
contraintes budgétaires des collectivités territoriales
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5. La mise en place d'un dispositif d'intervention
d'urgence sur le patrimoine en péril : un enjeu budgétaire
limité, un symbole néanmoins important
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1. En 2017, une augmentation des crédits
justifiée par le lancement de dispositifs ambitieux, qui témoigne
d'un réel engagement du Gouvernement
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II. LES POINTS DE VIGILANCE
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1. Une information insuffisante concernant la part
de la réduction d'impôt au titre des dons contribuant à
soutenir le secteur culturel
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2. La poursuite d'un programme immobilier
important qui exige un suivi attentif pour garantir la soutenabilité de
la mission
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3. La création du Fonpeps : un
dispositif justifié dans son principe mais dont les modalités
d'intervention restent à définir
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4. Une hausse des dépenses d'intervention
qui répond à de réels besoins, mais qui doit
désormais être maîtrisée
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5. Une inclusion insuffisante des
opérateurs dans une démarche de performance
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1. Une information insuffisante concernant la part
de la réduction d'impôt au titre des dons contribuant à
soutenir le secteur culturel
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I. LES POINTS POSITIFS
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LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE
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EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ
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EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
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ANNEXE : ÉTAT D'AVANCEMENT DU CONTRAT
D'OBJECTIFS ET DE PERFORMANCE (COP) POUR CHAQUE OPÉRATEUR DE LA MISSION
« CULTURE »
N° 140
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017
Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2016 |
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2017 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
Par M. Albéric de MONTGOLFIER,
Rapporteur général,
Sénateur.
TOME III
LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
( Seconde partie de la loi de finances )
ANNEXE N° 7
CULTURE
Rapporteurs spéciaux : MM. Vincent ÉBLÉ et André GATTOLIN
(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Éblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel . |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 4061, 4125 à 4132 et T.A. 833
Sénat : 139 et 141 à 146 (2016-2017)
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
I. Les points positifs 1. La progression des crédits prévue en 2017, à hauteur de de 5,8 % en crédits de paiement et de 8,3 % en autorisations d'engagement, est justifiée par le lancement de dispositifs ambitieux et témoigne d'un réel engagement du Gouvernement . Elle fait suite à plusieurs années marquées par un resserrement des moyens de la mission et permet au budget de la culture de représenter à nouveau 1 % du budget de l'État, ce qui n'était plus le cas depuis 2012. 2. La priorité accordée à la jeunesse se traduit par une ambition forte en matière d'action éducative artistique et culturelle auprès des jeunes publics . Ainsi, une nouvelle hausse des crédits permet de doubler les moyens de l'éducation artistique et culturelle depuis le début du quinquennat, passés de 30,8 millions d'euros en 2012 à 64 millions d'euros en 2017. En outre, le renforcement des moyens s'accompagne d'un relèvement de la cible de performance et d'une maîtrise du coût moyen par enfant des actions menées . 3. L'accompagnement par l'État des opérateurs culturels fragilisés à la suite des attentats doit être salué . En effet, le budget culturel public subit le contrecoup des attentats de deux façons distinctes. D'une part, l'État finance la sécurisation des opérateurs culturels publics (+ 6 millions d'euros à ce titre en 2017) . D'autre part, l'État participe au financement du fonds d'urgence pour le soutien au spectacle vivant, qui vise à indemniser une partie des surcoûts supportés par les établissements de spectacle privés (dotation totale de 17,4 millions d'euros en 2017) . 4. Le maintien des crédits alloués à l'entretien et à la restauration des monuments historiques à un niveau similaire à celui prévu en loi de finances initiale pour 2016, à rebours du budget triennal qui prévoyait leur baisse, paraît nécessaire au regard des contraintes pesant sur le budget des collectivités territoriales . 5. La mise en place d'un dispositif d'intervention d'urgence sur le patrimoine en péril , bien que l'enjeu budgétaire soit limité (1 million d'euros), constitue un symbole important . Il s'agit de créer un fonds de soutien qui aura vocation à financer des missions sur le terrain, en particulier en matière de formation et de soutien aux locaux pour la protection et la reconstruction des biens patrimoniaux . C'est la première fois que la mission « Culture » dispose de crédits dédiés à des interventions d'urgence pour préserver le patrimoine en péril. II. Les points de vigilance 1. La réduction d'impôt au titre des dons n'est pas rattachée à la mission « Culture » bien qu'elle contribue à soutenir le secteur culturel. L'absence de données précises relatives à la part de ce dispositif bénéficiant à des actions culturelles est problématique et il serait souhaitable que cette carence d'information soit palliée en 2017. 2. De très nombreuses opérations immobilières sont lancées, annoncées ou se poursuivent en 2017, pour un montant total budgétisé de l'ordre de 150 millions d'euros en crédits de paiement. Au total, le coût des travaux annoncés dépasse 1,5 milliard d'euros , dont au moins 500 millions d'euros pèseraient sur l'État . Le programme immobilier de la mission doit faire l'objet d'un suivi particulièrement attentif et les hypothèses initiales d'estimation des coûts doivent être très prudentes afin de garantir la soutenabilité budgétaire de la mission pour les années à venir. |
3. Le fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle (ou Fonpeps) , créé par le présent projet de loi de finances est doté de 90 millions d'euros en AE et de 55 millions d'euros en CP. Ce dispositif paraît, dans son principe, justifié , au regard des difficultés rencontrées par le secteur et de la nécessité de soutenir l'emploi . Cependant, la répartition des crédits entre les différentes aides qui devraient être créées n'est pas encore connue, ni leurs modalités exactes d'attribution . De même, l'administration du fonds reste, à ce stade, à définir. Il s'agira donc de veiller à ce que les règles de fonctionnement du fonds finalement retenues soient à la fois efficientes et en accord avec les objectifs initialement poursuivis. 4. Les crédits d'intervention de la mission représentent, en crédits de paiement, 34 % du total des dépenses et près de 45 % des crédits hors titre 2 . Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit une hausse des dépenses d'intervention de 12,3 % par rapport à 2017. Depuis 2013, l'augmentation totale serait de plus de 17 % - hors travaux de la Philharmonie de Paris et rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive. La multiplicité des dispositifs financés et la forte hausse des crédits consacrés aux dépenses d'intervention appellent à un examen de la complémentarité ou au contraire de la redondance de certains dispositifs et peut-être à un recentrage sur les plus efficients d'entre eux. 5. Seuls 33 % des opérateurs font l'objet d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) , soit un net recul par rapport à 2013 qui voyait 55 % des subventions pour charges de service public couvertes par un tel contrat. Il est donc urgent que les contrats en cours de préparation soient conclus . |
À la date du 10 octobre 2016, date limite fixée par l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances, les rapporteurs spéciaux avaient reçu 94 % des réponses du ministère de la culture et de la communication à leur questionnaire budgétaire. |
PREMIÈRE PARTIE - PRÉSENTATION DE LA MISSION
La mission « Culture », qui devrait être dotée de 2,9 milliards d'euros en 2017 , regroupe les crédits consacrés aux politiques publiques culturelles hors recherche (crédits portés par la mission « Recherche et enseignement supérieur ») et hors politique du livre et des industries culturelles (moyens présentés dans la mission « Médias, livre et industries culturelles »).
La mission « Culture » comporte trois programmes : le programme 131 « Création », le programme 175 « Patrimoines » et le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui porte les crédits destinés au ministère et les politiques transversales (enseignement supérieur culturel et démocratisation culturelle).
Répartition prévisionnelle des crédits de la mission « Culture » par programme en 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Ce dernier représente 42,2 % des crédits de la mission avec 1,2 milliard d'euros prévus en 2017. Le programme 175 « Patrimoines » porte 903,6 millions d'euros, soit un peu plus de 30 % du total des crédits de la mission tandis que le programme 131 « Création » correspond à 777,3 millions d'euros, soit 26,7 % du total.
La mission, qui représente environ 85 % de l'ensemble des crédits du budget général alloués à la culture , ne devrait pas connaître de changement de maquette significatif en 2017.
Les crédits budgétaires sont complétés par des dépenses fiscales ainsi que, bien que de façon beaucoup plus marginale, des ressources fiscales affectées , pour un montant total d'environ 330 millions d'euros.
Les objectifs fixés dans le cadre de la mesure de la performance sont presque tous atteints , démontrant la pertinence et l'efficacité de l'action du ministère.
1. Une mission qui représente environ 85 % de l'ensemble des crédits alloués par l'État à la politique de la culture
La mission « Culture » ne représente pas l'ensemble des moyens budgétaires alloués par l'État au secteur culturel .
Doivent lui être ajoutés les crédits du programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique » , rattaché à la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » ainsi que les crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » , faisant partie de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
De façon plus générale, la mission « Médias, livre et industries culturelles » porte des crédits destinés à financer des actions proches ou complémentaires de la politique publique culturelle proprement dite, comme en témoigne le fait que le ministère responsable pour ces deux missions est celui de la culture et de la communication.
2. Après la rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive en 2016, une relative stabilité du périmètre des crédits de la culture en 2017
a) La rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive en 2016
La rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive a été décidée en loi de finances initiale pour 2016 , entraînant en 2016, pour la première année, l'inscription au budget général de l'État des crédits destinés à financer les dépenses que la redevance finançait jusque-là, pour un montant de 118 millions d'euros .
La budgétisation de la redevance d'archéologie préventive , qui finançait jusqu'alors les acteurs des diagnostics (Institut national de recherches archéologiques préventives, ou Inrap, et services agréés des collectivités territoriales) ainsi que le Fonds national pour l'archéologie préventive (FNAP), constitue une évolution positive . En effet, son rendement irrégulier et la complexité de son affectation ont fragilisé pendant des années le financement de la politique d'archéologie préventive.
Ce mouvement de périmètre intervenu au 1 er janvier 2016 est sans incidence sur la comparaison de la budgétisation pour 2017 avec celle autorisée par la loi de finances initiale pour 2016 mais doit, en revanche, être neutralisé pour analyser l'évolution des crédits par rapport aux plafonds fixés en loi de programmation des finances publiques.
b) La création d'une action au sein du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » en raison de la constitution du « Fonpeps »
La création du fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle (ou « Fonpeps ») justifie celle de l'action 08 sur le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Ce fond sera doté, en 2017, de 90 millions d'euros en AE et de 55 millions d'euros en CP.
Bien que cette nouvelle action constitue une modification de la maquette budgétaire de la mission, elle ne correspond pas à une mesure de périmètre à proprement parler .
En effet, les dépenses nouvelles liées à l'institution du fonds ne correspondent pas à des recettes équivalentes pour le budget général de l'État et auraient pu être financées par redéploiement de crédits : aussi la hausse des moyens de la mission résultant de la création du fonds est une augmentation réelle du budget de la culture , découlant d'une décision du Gouvernement - à rebours de la rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive, qui constitue un simple changement de « tuyauterie budgétaire » sans incidence sur le niveau des crédits mis à disposition des opérateurs et des collectivités territoriales.
3. 2,9 milliards d'euros de crédits de paiement prévus pour 2017, dont près de 30 % de subventions pour charges de service public aux opérateurs et 34 % de dépenses d'intervention
La mission devrait se voir allouer 2,9 milliards d'euros en 2017 . La répartition des crédits par titre est présentée dans le graphique ci-après.
Répartition des crédits de la mission « Culture » par catégorie de dépense en 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Ainsi, les dépenses de personnel et de fonctionnement représentent moins d'un tiers du total, contre près de 30 % de crédits destinés à financer les subventions pour charges de service public : 49 opérateurs sont rattachés à la mission.
À titre de comparaison, sur la totalité du budget général de l'État 1 ( * ) , les dépenses de personnel et de fonctionnement représentent 40 % du total et les subventions pour charges de service public ne correspondent qu'à 7,3 % des dépenses.
Un tiers (34 %) des crédits portés par la mission correspondent à des dépenses d'intervention , c'est-à-dire des aides financières ou des bourses.
Doit également être signalé le poids des dépenses d'investissement : si leur part peut paraître modeste, dans la mesure où elle ne s'élève qu'à 5,7 % des crédits de la mission, elle constitue cependant un doublement par rapport à la moyenne du budget général (au sein duquel les dépenses d'investissement ne représentent que 2,8 % du total) et serait beaucoup plus importante si les dépenses d'intervention visant à financer des investissements étaient également prises en compte. L'importance des investissements s'explique en particulier par l'ampleur des travaux que nécessite l'entretien des nombreux bâtiments historiques dont le ministère de la culture et de la communication a la charge .
4. 35 % des crédits sont déconcentrés et gérés par les directions régionales des affaires culturelles (Drac)
L'administration centrale ne dispose que de 22 % des crédits de la mission : le reste des moyens alloués à la mission est soit attribué aux opérateurs par le biais d'une subvention pour charges de service public (SCSP), soit déconcentré en région et géré par les directions régionales des affaires culturelles (Drac) rattachées au ministère. En 2017, le taux de déconcentration des crédits devrait s'élever à 34 % en AE et 35 % en CP, soit une légère baisse par rapport aux montants observés au début de la décennie et qui s'explique davantage par la hausse des crédits transférés aux opérateurs que par une réduction en volume du montant des crédits déconcentrés.
Certaines des directions régionales des affaires culturelles ont connu un mouvement de réorganisation à la suite de l'adoption de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la république (NOTRe), promulguée le 7 août 2015.
Calendrier de la réorganisation des Drac Le 18 septembre 2014, le Premier ministre demandait aux inspections générales interministérielles et ministérielles un rapport commun sur l'administration territoriale de l'État. Ce rapport a été remis en avril 2015. [...] Le nouveau découpage régional a été connu de manière assez sûre au moment du vote du projet de loi par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, en novembre 2014. Le choix des capitales régionales et celui de l'implantation des directions régionales a été annoncé par le gouvernement le 31 juillet 2015, les sièges des Drac étant implantés dans les chefs-lieux de région, sauf dans les cas de Caen et Montpellier pour préserver les équilibres régionaux. Les décisions interministérielles sur le maintien de sites distants et la création de pôles métiers multi-sites ont été prises à la fin du premier semestre 2015, après un travail de concertation engageant la plupart des ministères. Les organigrammes détaillés des futures Drac ont été mis au point dans le courant du second semestre et n'ont pris leur forme définitive qu'après l'examen interministériel en novembre 2015, avant d'être validés après consultation des instances représentatives du personnel. Les directeurs régionaux des affaires culturelles ont été nommés le 1 er janvier 2016, comme dans les jours qui ont suivi la plupart des directeurs adjoints et les directeurs de pôle peu après (sauf dans le cas de l'Alsace, la nomination ayant été plus tardive). Les arrêtés d'organisation des Drac ont été signés par les préfets de région début 2016. Source : rapport n° 2016-18-30 de l'Inspection générale des affaires culturelles (Igac) relatif à la réorganisation des directions régionales des affaires culturelles |
Doit être signalé, en 2016, un ralentissement du rythme de décaissement des crédits lié à la réorganisation des services . Ainsi, les directions régionales ayant connu une fusion présentent un taux d'exécution des crédits, au 30 septembre 2016, inférieur de 10 points en AE et de 6 points en CP à celles qui n'ont pas fait l'objet d'une réorganisation. En matière de mise à disposition des crédits liés aux monuments historiques, l'écart atteint 12 points en AE et 9 points en CP, soit une différence de 12,5 %.
Taux de consommation des crédits au 30 septembre 2009 par les directions régionales des affaires culturelles (Drac)
(en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
D'après les informations recueillies en audition, le décalage constaté sur les neuf premiers mois de l'année devrait être partiellement compensé par une accélération des décaissements en fin de gestion pour les Drac fusionnées.
Il est à souhaiter que la réorganisation des administrations culturelles déconcentrées, en lien avec la réforme territoriale, soit pleinement achevée en 2017 et n'ait donc plus d'incidence sur le rythme de décaissement des crédits.
5. Des crédits budgétaires complétés par des dépenses fiscales ainsi que, de façon plus marginale, par une taxe affectée
Aux crédits budgétaires sont adjoints des dépenses fiscales rattachées à la mission , qui devraient s'élever à 588 millions d'euros en 2017, ainsi qu'une taxe affectée au Centre national des variétés pour 30 millions d'euros .
Doivent également être signalés, pour mémoire, les crédits versés par fonds de concours et attributions de produit 2 ( * ) qui devraient représenter en 2017 5,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et 10,6 millions d'euros en crédits de paiement.
a) 22 dépenses fiscales rattachées à la mission pour un montant total de près de 300 millions d'euros
Vingt-deux dépenses fiscales sont rattachées à la mission « Culture » à titre principal, pour un total prévisionnel de 294 millions d'euros en 2017 (187 millions d'euros sur le programme « Patrimoine » et 107 millions d'euros sur le programme « Création »).
Si la dépense fiscale la plus importante est le taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 2,10 % applicable aux droits d'entrée des 140 premières représentations de certains spectacles 3 ( * ) , créée en 1970 et qui devrait conduire à une moindre recette de 60 millions d'euros en 2017, la majeure partie du coût des dépenses fiscales rattachées à la mission porte sur l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés , qui devraient représenter 66 % du total en 2017.
b) Une taxe affectée au Centre national des variétés (CNV), opérateur de la mission, pour un montant de 30 millions d'euros
Une seule taxe est affectée à un opérateur rattaché à la mission « Culture » : il s'agit de la taxe sur les spectacles de variétés, dont bénéficie le Centre national des variétés, de la chanson et du jazz (CNV) pour un montant prévu à 30 millions d'euros en 2017 mais qui devrait être relevé, d'après les récentes déclarations de la ministre de la culture et de la communication devant la commission de la culture du Sénat 4 ( * ) .
Cette taxe est plafonnée , ce qui signifie qu'au-delà d'un montant défini en loi de finances initiale (par un article de première partie), le produit de l'impôt est reversé au budget général de l'État . Cependant, le montant recouvert de la taxe étant inférieur au plafond, aucun écrêtement n'est prévu en 2016 ni en 2017 .
Le plafonnement de la taxe paraît pertinent : en effet, il faut éviter que le produit dont bénéficie l'opérateur ne soit pas corrélé à ses besoins. En revanche, le plafond doit être fixé à un niveau adéquat au regard des besoins du secteur du spectacle .
6. Une mission qui représente environ 0,5 % de l'emploi public total, une politique de rattrapage indemnitaire
Le plafond d'emplois de la mission est fixé à 11 189 emplois équivalents temps plein , ou ETPT, en 2017. Cependant, ce chiffre ne concerne que l'administration du ministère , et non les emplois des opérateurs de la mission , qui sont soumis à un plafond total de 19 055 ETPT (ce chiffre intègre à la fois les emplois financés sur crédits de titre 2 et ceux sur titre 3). Il faut y ajouter une prévision de 606 emplois équivalents temps plein hors plafond .
Le plafond d'emplois constitue une limite supérieure rarement atteinte et dans le cas où il n'est pas saturé, son évolution peut être décorrelée de celle des effectifs : ainsi, il est possible que ceux-ci augmentent alors même que celui-là diminue.
C'est pourquoi les développements qui suivent s'attacheront davantage à retracer les effectifs réels et la masse salariale portée par la mission que les modifications relatives au plafond d'emplois.
a) 25 555 ETPT financés par la mission en 2015, dont plus de la moitié chez les opérateurs
Au total, 25 555 ETPT ont été portés par la mission « Culture » en 2015 , dont plus de la moitié sont présents chez les opérateurs. Les effectifs ont légèrement reculé en 2015 par rapport à 2014, de 683 ETPT (- 2,3 %).
Évolution des effectifs de la mission de 2013
à 2015
et de leur part dans l'emploi public total
(en ETPT et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
La part des emplois de la mission dans l'emploi public total a également fléchi, passant de 0,52 % en 2014 à 0,498 % en 2015. Cependant, cette diminution provient davantage de la hausse de l'emploi public total que de la baisse des effectifs de la mission « Culture » .
b) Une politique de rattrapage indemnitaire : 5,12 millions d'euros de mesures catégorielles prévues en 2017
La plupart des emplois de la mission sont financés par des crédits de titre 3 (dépenses de fonctionnement) dans la mesure où les subventions pour charges de service public versées aux opérateurs relèvent de cette catégorie. Il est donc difficile de procéder à une analyse globale, pour la mission, de l'évolution de la masse salariale et de ses composantes.
En ce qui concerne les services ministériels (administration centrale et déconcentrée), seul le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » porte des crédits de titre 2 , pour un montant de 696,7 millions d'euros en 2017, soit une hausse de près de 28 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2016 (+ 4 %).
Évolution des crédits de titre 2 de la mission « Culture » entre 2015 et 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Cette augmentation intègre les contributions de la mission au compte d'affectation spéciale « Pensions » pour un montant de 11,5 millions d'euros. Hors CAS « Pensions », la hausse de la masse salariale s'élève à 16,5 millions d'euros. Elle est principalement liée à l'impact des schémas d'emplois (+ 4,4 millions d'euros), au dégel du point d'indice de la fonction publique (+ 3,6 millions d'euros), au glissement vieillesse-technicité solde (+ 1,6 million d'euros) et surtout aux mesures catégorielles (+ 5,12 millions d'euros) .
En effet, d'après les éléments transmis en réponse au questionnaire budgétaire, sur le plan indemnitaire, « le ministère de la culture et de la communication se caractérise par un net décrochage par rapport aux autres ministères ».
La volonté d'opérer un rattrapage indemnitaire constitue donc un axe important de la politique des ressources humaines .
L'enveloppe dédiée aux mesures catégorielles sera, en 2017, essentiellement consacrée au financement de la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (ou PPCR) pour un montant de 2,82 millions d'euros. Le reliquat financera des mesures de revalorisation indemnitaire dans le cadre de la mise en place du nouveau régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP).
Le RIFSEEP : un nouveau régime indemnitaire
pour l'ensemble
Le RIFSEEP ou régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel, va devenir, d'ici fin 2016, le nouvel outil indemnitaire de référence en remplaçant la plupart des primes et indemnités existantes dans la fonction publique de l'État, critiqué pour sa complexité et sa fragmentation. Le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) a donc pour objet de rationaliser et simplifier le paysage indemnitaire . Les modalités de mise en oeuvre de ce nouveau régime indemnitaire sont définies dans la circulaire du 5 décembre 2014 . Il est composé de deux primes cumulatives : d'une part, une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) , versée mensuellement, d'autre part, un complément indemnitaire annuel (CIA) . Source : commission des finances du Sénat, d'après les informations mises en ligne par le Gouvernement sur le site fonction-publique.gouv.fr |
7. Un dispositif de performance articulé autour de quatre principaux objectifs
Quatre objectifs sont retenus au niveau de la mission : accroître l'accès du public au patrimoine national , améliorer l'insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement supérieur, favoriser un accès équitable à la culture notamment grâce au développement de l'éducation artistique et culturelle et enfin inciter à l'innovation et à la diversité de la création .
Ces objectifs correspondent chacun à un indicateur qui lui-même se décline en sous-indicateurs . Les cibles ont été fixées lors de l'élaboration du budget triennal pour les années 2015 à 2017 c'est-à-dire il y a deux ans, en 2014.
D'après les prévisions, les objectifs devraient presque tous être atteints en 2017 à l'exception de la part des artistes bénéficiant pour la première fois de commandes, d'acquisitions et d'aides à la création par l'État (objectif « Inciter à l'innovation et à la diversité de la création ») qui devait dépasser 48 % et qui a été revu à la baisse à 46 %.
SECONDE PARTIE - ANALYSE DE LA BUDGÉTISATION 2017
Le budget 2017 prévoit une hausse significative des crédits alloués à la mission avec une augmentation de plus de 8 % en autorisations d'engagement et de près de 6 % en crédits de paiement.
Comparaison des crédits de la mission « Culture » exécutés en 2015, alloués en 2016 et prévus pour 2017 en crédits de paiement
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Ce renforcement des moyens de la culture devrait permettre de faire face aux enjeux à venir : outre la montée en puissance des dispositifs d'éducation artistique et culturelle, les attentats survenus en 2015 nécessitent de sécuriser les sites culturels et ont entraîné des baisses de fréquentation importantes pour certains opérateurs. En outre, le maintien prévu des crédits destinés à la restauration et à l'entretien des monuments historiques paraît particulièrement bienvenu au regard des difficultés des collectivités territoriales à assurer un financement aussi important qu'au début des années 2000.
Quelques points de vigilance doivent être signalés : outre un défaut d'information relatif à la réduction d'impôt au titre des dons, la poursuite d'un programme immobilier très important et la hausse des crédits d'intervention pourraient fragiliser, à terme, la soutenabilité de la mission. Au surplus, les modalités d'intervention du fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle (ou Fonpeps) doivent être précisées et les opérateurs davantage inclus dans une démarche de performance à travers la signature de contrats d'objectifs et de performance (ou COP).
I. LES POINTS POSITIFS
1. En 2017, une augmentation des crédits justifiée par le lancement de dispositifs ambitieux, qui témoigne d'un réel engagement du Gouvernement
Les crédits alloués à la mission en 2017 connaissent une augmentation significative de 5,8 % en crédits de paiement, soit près de 160 millions d'euros . La progression des crédits est encore plus importante en autorisations d'engagement et s'établit à 8,3 %, soit + 231 millions d'euros.
Hors contributions au compte d'affectation spéciale « Pensions », la hausse est de 6,3 % en crédits de paiement.
Évolution des crédits de la mission de 2015 à 2017 par programme
(en millions d'euros, CP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Cette augmentation, qui dépasse ce qui était prévu dans le triennal, permet aux politiques publiques culturelles de représenter à nouveau 1 % du total des dépenses de l'État .
a) Une augmentation bienvenue qui dépasse ce qui était prévu dans le triennal
L'augmentation des crédits de la mission en 2017, qui fait suite à la hausse prévue en loi de finances initiale pour 2016, est bienvenue après plusieurs années marquées par un resserrement des moyens de la mission .
En effet, de 2010 à 2014 , les crédits du budget de la culture n'ont cessé de baisser et ont connu, sur la période, une réduction de 14,4 % (comme le montre le graphique ci-dessous). La tendance à la diminution du budget de la culture, qui faisait suite à une hausse de 7,6 % des crédits de 2007 à 2010, semble avoir été renversée à partir de 2015 : après une première augmentation modérée des crédits, les années 2016 et 2017 portent des hausses plus franches.
Évolution des crédits de la mission « Culture » de 2007 à 2017
(périmètre courant, en CP, en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Comparaison des crédits prévus par le
projet de loi de finances pour 2017
et du plafond 2017 du budget
triennal
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
La hausse des crédits en 2017, qui prolonge celle de 2016, permet donc de compenser la forte diminution intervenue précédemment et de retrouver une budgétisation initiale du même ordre que l'exécution de la mission constatée en 2009.
La budgétisation prévue en 2017 dépasse les prévisions du budget triennal défini par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 5 ( * ) . En effet, à périmètre constant, c'est-à-dire après neutralisation de l'impact budgétaire lié à la rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive, les crédits prévus pour 2017 sont supérieurs de 284,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 205,4 millions d'euros en crédits de paiement aux plafonds du budget triennal pour 2017, soit une hausse de 10,8 % en crédits de paiement et de 7,9 % en autorisations d'engagement.
Le renforcement des moyens alloués à la mission traduit l'engagement du Gouvernement en faveur de la culture , dans le cadre d'un redressement global des comptes publics. Ces crédits supplémentaires devraient ainsi permettre de renforcer les politiques prioritaires que porte le ministère , en particulier en matière d' égalité d'accès à la culture et de création dans les territoires , mais aussi d'action en faveur de la jeunesse , de mise à niveau des équipements , de pérennisation de l'emploi et bien sûr de sécurisation des publics .
b) 1 % des crédits de l'État accordés à la culture en 2017 : le signal d'un réengagement fort
La hausse des crédits permet au budget de la culture de représenter à nouveau 1 % du budget de l'État , ce qui n'était plus le cas depuis 2012 . Il faut noter que ce taux est calculé sur le périmètre culturel « élargi » , c'est-à-dire prenant en compte le programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique », rattaché à la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » ainsi que les crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles », faisant partie de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Sont en revanche exclus de son assiette les contributions au compte d'affectation spéciale « Pensions » portées par la mission « Culture » (qui devraient s'élever à 212,2 millions d'euros en 2017), de même que les dépenses fiscales rattachées à la mission ainsi que les taxes affectées bénéficiant à ses opérateurs.
La hausse du total des crédits de la culture est largement portée par la mission « Culture » elle-même qui ne représentait que 78 % du total en 2014 contre 85 % en 2017. Il faut noter que les mouvements de périmètre, en dehors de ceux liés à la création de nouveaux programmes (comme le programme 186, créé en 2011), ne sont pas neutralisés.
Le dépassement de ce seuil doit être souligné en ce qu'il constitue un signal du réengagement de l'État en faveur de la culture , après plusieurs exercices qui avaient vu une réduction certes modérée, mais notable, des moyens alloués à ce secteur.
Part des crédits alloués à la culture dans le budget de l'État de 2007 à 2017
(en %, à périmètre courant)
Note de lecture : MIRES = mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
2. Une ambition forte en matière d'action éducative auprès des jeunes publics : une nouvelle hausse des crédits et un relèvement de la cible de performance
a) Une forte hausse des crédits consacrés à l'éducation artistique et culturelle : une priorité gouvernementale accordée à la jeunesse
En 2017, les crédits d'intervention en fonctionnement destinés à financer l'éducation artistique et culturelle 6 ( * ) s'élèvent à 64 millions d'euros , soit une augmentation de 17 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016.
La hausse des crédits dédiés à l'éducation artistique prévue par le projet de loi de finances pour 2017 prolonge celle de 2016 : en loi de finances initiale pour 2016, l'éducation artistique et culturelle avait déjà été dotée de 54,6 millions d'euros, soit une progression de 29 % (+ 12,2 millions d'euros) par rapport à la loi de finances pour 2015.
L'éducation artistique et culturelle, que la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République 7 ( * ) reconnaît comme une composante de la formation générale de tous les élèves , constitue en effet l'un des axes structurants de la mission : les crédits alloués aux actions d'éducation culturelle ont plus que doublé depuis le début du quinquennat .
Ainsi, les crédits d'intervention en fonctionnement à ce titre sont passés de 31 millions d'euros en 2012 à 64 millions d'euros dans la budgétisation initiale prévisionnelle pour 2017, soit une hausse de 108 %.
Évolution des crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle de 2012 à 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
La hausse des crédits permet en particulier de consolider les moyens alloués aux conservatoires , après des coupes budgétaires qui avaient fragilisé l'action de ces établissements dans les territoires. Ainsi, près de 8 millions d'euros sont destinés en 2017 à pérenniser les actions des conservatoires classés en faveur de la jeunesse et la diversité .
L'accroissement des moyens rend également possible le lancement d'un programme d'un montant de 2 millions d'euros visant à renforcer la présence artistique, notamment des jeunes artistes , dans les projets d'éducation artistique en milieu scolaire .
Ce programme passe par l'appel à projets « Création en cours » conduit en lien avec l'établissement public de coopération culturelle Clichy-Montfermeil et le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Cet appel vise à installer, chaque année, 100 artistes en résidence dans les écoles et collèges éloignés de l'offre culturelle (par exemple quartiers de la politique de la ville, zones rurales et périurbaines, outremer...), afin de permettre un échange soutenu entre les artistes et les enfants et adolescents dits du « cycle 3 », c'est-à-dire en classe de CM1, CM2 et 6 ème . D'après le ministère de la culture et de la communication, « l'échange avec l'artiste et la découverte de son travail seront complétés par des connaissances sur l'histoire des arts et des ateliers de pratiques artistique ». La préparation de la première édition débutera à l'automne 2016 pour un démarrage effectif des résidences à partir de janvier 2017 .
b) Une prévision élevée concernant l'indicateur de performance relatif à l'action éducative culturelle qui témoigne de l'efficacité de la dépense
Doit être signalée la prévision ambitieuse concernant la part des enfants et des jeunes en âge scolaire ayant bénéficié d'une action éducative d'une structure subventionnée par le ministère de la culture et de la communication : celle-ci devrait s'élever à 49 %, contre une cible fixée lors du triennal à 43 % et un taux de 35 % constaté en 2014.
Cet objectif témoigne tout à la fois de l'importance attachée par le Gouvernement à l'éducation artistique et culturelle et de l'efficacité des crédits supplémentaires accordés à cette politique.
En effet, cet indicateur permet de constater que la hausse des crédits se traduit bien par un accroissement net du nombre d'enfants passés par l'un des dispositifs mis en oeuvre .
Il ne s'agit pas de chercher à « faire du chiffre » et de réduire sans discernement le coût des dispositifs prévus, dans la mesure où la quantité d'enfants accueillis doit être conciliée avec la qualité des animations mises en place, mais de reconnaître que la politique volontariste mise en oeuvre par le Gouvernement tend à porter ses fruits sans pour autant entraîner un relâchement des efforts de maîtrise des dépenses .
Ainsi, le coût par enfant a diminué depuis 2011 , où il s'élevait à 13,4 euros, pour atteindre un peu plus de 10 euros en 2015 soit une baisse de près de 23 %. Cette maîtrise des coûts doit être maintenue en 2016 et 2017 afin de sécuriser les dispositifs d'éducation artistique et culturelle au niveau élevé auxquels les a portés le Gouvernement depuis le début du quinquennat.
Évolution de 2010 à 2015 du nombre
d'enfants ayant bénéficié d'actions d'éducation
culturelle et artistique, du montant des opérations d'EAC
et du
montant moyen par enfant
(en millions d'euros, en millions d'enfants et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
3. Un accompagnement par l'État des opérateurs culturels fragilisés à la suite des attentats à saluer
Le budget culturel public subit le contrecoup des attentats de deux façons distinctes. D'une part, l'État finance la sécurisation des opérateurs culturels publics . D'autre part, l'État participe au financement du fonds d'urgence pour le soutien au spectacle vivant qui vise à indemniser une partie des surcoûts supportés par les établissements de spectacle privés .
a) 6,4 millions d'euros liés à la sécurisation post-attentat des établissements culturels
Sur le programme 131 « Création » , une enveloppe de 2,31 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement a été répartie entre les différents opérateurs pour leur permettre de financer la mise en oeuvre des mesures de sécurité renforcée prises à la suite des attentats de novembre 2015 , c'est-à-dire essentiellement de faire face à une hausse des dépenses de gardiennage.
Concernant le programme 175 « Patrimoines » , la sécurisation des établissements culturels a fait l'objet d'une dotation de 4,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement au profit des musées nationaux.
Cet engagement de l'État aux côtés des établissements culturels paraît nécessaire afin de permettre aux opérateurs de poursuivre leurs missions dans des conditions de sécurité satisfaisantes pour le public, sans fragiliser outre mesure leur équilibre financier.
b) Face à des besoins qui restent importants, le renforcement en 2016 des moyens alloués au fonds d'urgence
Initialement doté de 4,3 millions d'euros en 2015 , le fonds d'urgence créé par la loi de finances rectificative pour 2015 a fait l'objet de plusieurs abondements en cours d'année 2016 pour atteindre un montant de 13,4 millions d'euros à la fin de l'année.
Le fonds d'urgence pour le spectacle vivant Le fonds d'urgence, créé par l'article 119 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, peut intervenir pour la quasi-totalité des structures de spectacle vivant du secteur privé : il s'agit de théâtres, mais aussi de salles de concert, de cabarets, de cirques... C'est le Centre national de la chanson, des variétés et jazz (ou CNV) qui gère le fonds. Cet élargissement temporaire des missions du Centre national des variétés est compensé par l'application de frais de gestion de 3,82 % prévus par le règlement intérieur du fonds. Ce taux est appliqué aux sommes allouées pour le fonds d'urgence. Le Centre national des variétés tient une comptabilité séparée des flux financiers attachés à cette procédure , en produits et en dépenses, dont il rend compte au conseil d'administration de l'établissement ainsi qu'à l'ensemble des contributeurs du fonds d'urgence. L'article 119 de la loi de finances rectificative pour 2015 a prévu l'existence de ce dispositif jusqu'à la fin de l'année 2018 . Source : communication des rapporteurs spéciaux de la mission « Culture » sur le fonds d'urgence pour le spectacle vivant, présentée à la commission des finances du Sénat le 1 er juin 2016 |
Les dotations constituées au titre de ce fonds d'urgence doivent être diminuées du montant des frais de gestion prélevés par le Centre national des variétés, soit 3,82 %. Le montant disponible est, de ce fait, ramené à 12,9 millions d'euros pour les aides non remboursables.
Enfin, le fonds s'est doté d'un volant complémentaire de 1 million d'euros apporté par le Centre national des variétés et du jazz pour procéder à des aides remboursables et soutenir la trésorerie des entreprises en difficulté, en général dans l'attente d'un remboursement d'assurance.
Alors que la constitution du fonds avait fait l'objet d'une coopération de l'ensemble des acteurs du secteur, y compris des représentants de structures privées, force est de constater que les apports en 2016 ont très majoritairement été faits sur fonds d'État : le ministère de la culture et de la communication a ainsi engagé 7 millions d'euros supplémentaires, soit près de 80 % du total des crédits supplémentaires.
D'après les réponses du Gouvernement au questionnaire budgétaire, au 1 er septembre 2016, le comité du fonds d'urgence s'est réuni à huit reprises depuis sa création. Il a instruit au total 442 demandes d'aides et soutenu 366 dossiers pour un montant total de 8,319 millions d'euros .
Il est bien sûr difficile d'anticiper les perspectives budgétaires du fonds pour l'année à venir : comme le souligne le Gouvernement, elles dépendent tout à la fois des conditions de sécurité dans l'espace public et de la capacité des partenaires publics comme privés à venir abonder le financement du fonds.
Celui-ci a toutefois fait l'objet d'une « rallonge » de 4 millions d'euros dans le cadre du plan de relance du tourisme décidé par le comité interministériel du tourisme du 7 novembre 2016.
c) Le lancement d'un plan en faveur du tourisme au sein duquel le secteur culturel doit avoir toute sa place
La perte d'attractivité de la France en tant que destination touristique a conduit le comité interministériel du tourisme à décider, lors de sa réunion du 7 novembre 2016, le lancement d'un plan de relance du tourisme pour un montant de 42,7 millions d'euros , qui vise à atteindre quatre objectifs : garantir la sécurité des touristes sur tout le territoire français, soutenir les professionnels qui connaissent une baisse d'activité, renforcer l'image de la France auprès des touristes français et des clientèles internationales et enfin poursuivre les efforts en faveur des départs en vacances pour tous.
Ce plan permet en particulier un nouvel abondement du fonds d'urgence en faveur du spectacle vivant pour 4 millions d'euros , le portant à 17,4 millions d'euros.
L'intégration du secteur culturel à l'élaboration d'une stratégie de relance de la « destination France » paraît tout à fait nécessaire : les acteurs culturels font pleinement partie de l'attrait exercé par la France auprès des touristes étrangers et doivent être associés aux actions décidées dans le cadre du plan.
En outre, la réduction des flux de touristes internationaux en France et particulièrement à Paris n'a pas été sans conséquence pour les opérateurs de la mission « Culture » : aux coûts de sécurisation des sites, s'ajoutent des pertes de recettes parfois considérables. Les établissements les plus touchés semblent être, dans l'ensemble, ceux du programme 175 « Patrimoines » dans la mesure où la fréquentation des grands musées parisiens reposait davantage sur le tourisme international que celle d'équipements culturels de proximité.
Il est donc à souhaiter que la mise en oeuvre du plan associe non seulement le secteur privé culturel, mais aussi les opérateurs publics de la culture .
4. La restauration et l'entretien des monuments historiques : un maintien des moyens nécessaire au regard des contraintes budgétaires des collectivités territoriales
L'écart constaté sur l'action 01 « Patrimoine monumental » du programme 175 « Patrimoines » par rapport au budget triennal défini par la loi de programmation des finances publiques, de 21,7 millions d'euros en AE et 11,2 millions d'euros en CP, résulte du renforcement des crédits dédiés à la restauration et à l'entretien des monuments historiques « dans la double optique d'un accès élargi de tous les publics à la culture et de transmission du patrimoine aux générations futures ».
Cette hausse par rapport au triennal permet de maintenir les crédits alloués à l'entretien et à la restauration des monuments historiques à un niveau similaire à celui prévu en loi de finances initiale pour 2016.
Évolution des crédits alloués aux monuments historiques de 2007 à 2017
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Cet engagement de l'État paraît d'autant plus nécessaire que les collectivités territoriales ont tendance à se désengager, au moins en partie, des opérations de restauration des monuments historiques . Ainsi, le ministère de la culture et de la communication indique, en réponse au questionnaire budgétaire, que si « jusqu'en 2010, les financements croisés entre l'État et les départements étaient courants [...], les charges des départements s'alourdissant sensiblement, une évolution notable s'est produite dans les politiques patrimoniales locales depuis 2010 . La plupart des collectivités ont choisi de se concentrer sur leurs domaines de compétences obligatoires . Ce mouvement s'est accentué depuis 2015 » .
Or les 43 804 immeubles et 262 000 objets mobiliers classés ou inscrits au titre des monuments historiques , répartis sur l'ensemble du territoire, contribuent à l'attractivité touristique de la France et participent de son ancrage dans l'histoire. Leur entretien et, le cas échéant, leur restauration doit demeurer une priorité de la politique publique culturelle .
5. La mise en place d'un dispositif d'intervention d'urgence sur le patrimoine en péril : un enjeu budgétaire limité, un symbole néanmoins important
L'évolution positive sur l'action 06 « Action culturelle internationale » du programme 224 correspond à la mise en place d'un dispositif d'intervention d'urgence sur le patrimoine en péril dans le prolongement des annonces du Président de la République à l'Unesco le 17 novembre 2015.
Il s'agit de créer un fonds de soutien , doté de 1 million d'euros en 2017 , qui aura vocation à financer des missions sur le terrain, en particulier en matière de formation et de soutien aux locaux pour la protection et la reconstruction des biens patrimoniaux.
Si l'enjeu budgétaire est limité, le symbole n'en demeure pas moins important . En effet, c'est la première fois que la mission « Culture » dispose de crédits dédiés à des interventions d'urgence pour préserver le patrimoine en péril.
En outre, le 1 er novembre 2016, le Président de la République a annoncé que le patrimoine en péril pourrait être conservé dans le Centre de conservation et de réserves du Louvre , qui devrait être construit à proximité du Louvre-Lens.
Un sommet se tenant à Abu Dhabi en décembre 2016 sur le sujet de la protection du patrimoine devrait permettre de préciser les modalités d'intervention du fonds de soutien et les contributions attendues de la part d'éventuels partenaires de l'État .
II. LES POINTS DE VIGILANCE
1. Une information insuffisante concernant la part de la réduction d'impôt au titre des dons contribuant à soutenir le secteur culturel
Doit être notée l'existence d'une dépense fiscale non rattachée à la mission « Culture » et qui contribue pourtant à soutenir le secteur culturel : il s'agit de la réduction d'impôt au titre des dons . L'absence de données précises relatives à la part de ce dispositif bénéficiant à des actions culturelles est problématique et il serait souhaitable que cette carence d'information soit palliée en 2017.
a) Une dépense fiscale au titre des dons en forte croissance depuis sa création
En effet, la dépense fiscale relative au mécénat, qu'elle porte sur les dépenses des entreprises 8 ( * ) ou des particuliers 9 ( * ) , introduite en France par la loi du 1 er août 2003 dite loi « Aillagon » 10 ( * ) n'est pas rattachée à la mission « Culture » mais à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » 11 ( * ) .
Concernant les entreprises, les versements faits dans le cadre du mécénat ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 60 % de leur montant . Cette réduction est toutefois plafonnée : les versements sont pris en compte dans la limite de 0,5 % du chiffre d'affaires hors taxes de l'entreprise donatrice . Lorsque les versements dépassent le plafond de 0,5 %, l'excédent peut être déduit sur les cinq exercices suivants et ouvre droit à la même réduction d'impôt.
Concernant les particuliers , la réduction d'impôt est égale à 66 % des sommes versées, retenues dans la limite annuelle de 20 % du revenu imposable . Le taux de réduction a été porté à 75 % (dans la limite forfaitaire de 488 euros) pour les versements effectués par des particuliers au profit d'organismes sans but lucratif procédant à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent à titre principal, à la fourniture gratuite de soins.
La masse budgétaire représentée par cette dépense fiscale est loin d'être négligeable : elle devrait s'élever, en 2017, à plus de 2 milliards d'euros , dont 1,4 milliard d'euros pour les dons des particuliers et environ 700 millions d'euros pour le mécénat des entreprises. En 2004, lors de la première année de mise en oeuvre du dispositif, elle atteignait seulement 680 millions d'euros. Le coût de cette dépense fiscale a donc été multiplié par trois depuis sa création .
b) Une progression particulièrement dynamique concernant les entreprises
Il faut cependant distinguer la dépense fiscale en direction des entreprises de celle visant les particuliers. En effet, si la dépense fiscale en direction des entreprises représente environ un tiers du total, sa progression est beaucoup plus dynamique que celle de la dépense fiscale relative aux dons des particuliers.
Ainsi, le coût de la dépense fiscale liée au mécénat des entreprises a été multiplié par 7,7 depuis 2004 (contre un facteur multiplicateur d'environ 2,4 pour la dépense fiscale en direction des particuliers).
Un palier est observé entre 2010 et 2011 avec une hausse de 72 % entre ces deux années (cf. graphiques ci-dessous).
Évolution de la dépense fiscale liée au mécénat des entreprises
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Évolution de la dépense fiscale liée au mécénat des particuliers
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Une entreprise peut mener des actions de mécénat directes (par exemple financement d'un opérateur culturel ou don « en nature ») mais aussi indirectes , à travers l'apport de fonds ou de moyens humains à une structure intermédiaire.
En effet, plusieurs types de structures privées bénéficient de la dépense fiscale liée au mécénat : les principales formes juridiques sont les associations « loi 1901 », les associations reconnues d'utilité publique, les fondations reconnues d'utilité publique, les fondations d'entreprise et les fonds de dotation .
Lorsqu'une société effectue des versements auprès de sa fondation d'entreprise, elle a droit à la même réduction d'impôt que lorsqu'elle engage une action directe de mécénat .
Ces fondations ne font l'objet d'aucun contrôle particulier de l'État (en dehors d'un contrôle classique et non systématique de régularité fiscale).
c) Une absence de données sur la part de la dépense fiscale bénéficiant au secteur culturel
Le montant de dépense fiscale présenté au sein des documents budgétaires est agrégé et ne permet pas de distinguer la part relative au mécénat culturel .
Ainsi, le ministère de la culture et de la communication n'est pas en mesure de préciser le montant global des dons affectés à la culture déclarés à l'administration fiscale, ni leur répartition entre les différents domaines concernés .
Le montant de la dépense fiscale engagée au profit de fondations privées non reconnues d'utilité publique n'est pas non plus publié par le Gouvernement .
En revanche, quelques données chiffrées sont produites par Admical 12 ( * ) , une association d'entreprises mécènes, sur la base d'une enquête déclarative portant sur un échantillon restreint - les résultats ne peuvent donc être interprétés qu'avec beaucoup de précaution.
D'après cette enquête 13 ( * ) , au total 3,5 milliards d'euros auraient été dépensés en matière de mécénat par les entreprises en 2015. Les entreprises financeraient en grande majorité des structures privées : celles-ci arriveraient très largement en tête du soutien des entreprises (69 %), alors que les structures publiques verraient leur part baisser pour atteindre 15 %.
L'étude tend aussi à montrer que le recours à la réduction fiscale est de plus en plus répandu : en 2015 , il aurait concerné 55 % des entreprises mécènes (pour tout ou partie des montants engagés au titre du mécénat) contre 43 % en 2013.
La culture représente le deuxième secteur le plus important (après les actions sociales) : choisie par 24 % des entreprises mécènes, son montant dans le total des dépenses augmenterait et passerait de 13 à 15 % du budget total .
Au sein du champ culturel, la musique et la préservation du patrimoine bâti et paysager seraient les deux secteurs les plus soutenus.
Une enquête annuelle menée avec les services du ministère chargé du budget et les instances représentatives du mécénat et des fondations (Admical, Centre français des fonds et fondations, Observatoire de la Fondation de France, etc .) permettrait de mieux cerner la répartition du mécénat déductible entre les différents secteurs de l'intérêt général (solidarité, culture, recherche, sport, environnement, etc.).
Il faudrait également identifier la répartition de la dépense fiscale entre les différentes structures : connaître le montant de dépense fiscale lié à un mécénat envers des organismes publics ou à l'inverse privés, avec le détail des statuts juridiques des structures bénéficiant du mécénat (fondation d'entreprise, fondation reconnue d'utilité publique, fonds de dotation...).
Ces données permettraient de mieux appréhender les effets du dispositif sur le secteur culturel et d'engager une réflexion sur l'efficacité de la dépense fiscale.
2. La poursuite d'un programme immobilier important qui exige un suivi attentif pour garantir la soutenabilité de la mission
De très nombreuses opérations immobilières sont lancées, annoncées ou se poursuivent en 2017 , pour un montant total budgétisé de l'ordre de 150 millions d'euros en crédits de paiement.
Doivent être cités les schémas directeurs de Versailles, du Louvre , la rénovation de deux théâtres nationaux (Chaillot et Opéra-Comique) mais aussi la restructuration du quadrilatère Richelieu, la réorganisation des archives nationales avec la fermeture du site de Fontainebleau et le transfert des archives qui y étaient conservées, ainsi qu'un projet de très grande ampleur (466 millions d'euros) concernant le Grand Palais . Le relogement du Centre national des arts plastiques devrait également être lancé en 2017.
Sont également prévus de nombreux travaux de réhabilitation et d'extension des écoles d'enseignement supérieur rattachées à la mission, ainsi que l'ouverture au public de l'Hôtel de la Marine , ou encore le schéma directeur du Centre Pompidou et celui du château de Fontainebleau .
Le nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) du ministère de la culture et de la communication, validé par le secrétaire d'État chargé du budget en mars 2016, prévoit la non-reconduction du bail du site de la rue Beaubourg et la cession de deux bâtiments. Si ce regroupement des sites de l'administration centrale du ministère devrait permettre, à terme, de réaliser des économies, il est probable qu'il crée dans un premier temps des coûts supplémentaires liés au déménagement des services.
Le Président de la République a également annoncé le 24 octobre 2016 la construction d'une Cité du théâtre sur le site des ateliers Berthier, pour un montant prévu à 150 millions d'euros.
Au total, le coût des travaux annoncés dépasse 1,5 milliard d'euros, dont au moins 500 millions d'euros pèseraient sur l'État .
Les réponses au questionnaire budgétaire ne permettent pas de conclure que le coût de l'ensemble des travaux est correctement anticipé et qu'une réflexion stratégique sur la priorisation des différents chantiers à l'échelle de la mission est lancée.
L e programme immobilier de la mission doit donc faire l'objet d'un suivi particulièrement attentif et les hypothèses initiales d'estimation des coûts doivent être très prudentes au regard du dépassement quasi-systématique des enveloppes prévisionnelles afin de garantir la soutenabilité budgétaire de la mission pour les années à venir.
En outre, la mobilisation annoncée des crédits du programme d'investissements d'avenir , à la fois pour l'opération du Grand Palais (pour 200 millions d'euros) et pour la relocalisation de l'école nationale supérieure artistique de Marseille au sein du futur bâtiment de l'Institut méditerranéen de la ville et des territoires ou IMVT (pour 0,1 million d'euros) pose la question du caractère réellement additionnel de ces crédits qui sont censés ne pas financer des opérations relevant du budget général de l'État.
3. La création du Fonpeps : un dispositif justifié dans son principe mais dont les modalités d'intervention restent à définir
La création du fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle (ou Fonpeps), suite à une annonce présidentielle, donne lieu à la création d'une action au sein du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », dotée de 90 millions d'euros en AE et de 55 millions d'euros en CP .
Ce dispositif paraît, dans son principe, justifié , au regard des difficultés rencontrées par le secteur et de la nécessité de soutenir l'emploi . À ce titre, doit également être signalée la création de l'aide à la recherche du premier emploi ou ARPE , qui s'inscrit dans la continuation des bourses versées aux élèves des établissements d'enseignement supérieur culturel et qui devrait faire l'objet d'une dotation de 2 millions d'euros en 2017.
D'après le ministère, le « Fonpeps » devrait financer plusieurs mesures parmi lesquelles une aide au premier salarié (APS), une prime à l'emploi pérenne de salariés du spectacle (PEPSS), une aide à la durée des contrats (ADC), une aide aux jeunes artistes diplômés (AJAD), une aide à la garde d'enfant d'artistes et techniciens intermittents (AGEDATI), un fonds assurantiel des groupements d'entreprises culturelles (FAGEC) mais aussi des dispositifs de soutien de l'emploi dans les secteurs fragiles.
Cependant, la répartition des crédits entre ces différents dispositifs n'est pas encore connue, ni leurs modalités exactes d'attribution . De même, l'administration du fonds reste, à ce stade, à définir. Le projet annuel de performances de la mission indique seulement que « ces mesures doivent encore faire l'objet de précisions qui interviendront en cours d'année, dans la limite des crédits disponibles ».
Il s'agira donc de veiller à ce que les règles de fonctionnement du fonds finalement retenues soient à la fois efficientes et en accord avec les objectifs initialement poursuivis. Si la création du fonds ne fait pas débat, les modalités d'attribution des aides doivent être définies avec d'autant plus de soin que la mission « Culture » voit ses dépenses d'intervention augmenter dans des proportions importantes ces dernières années.
4. Une hausse des dépenses d'intervention qui répond à de réels besoins, mais qui doit désormais être maîtrisée
Les crédits d'intervention de la mission représentent, en crédits de paiement, 34 % du total des dépenses mais près de 45 % des crédits totaux hors titre 2 (dépenses de personnel) , ce qui en fait comme le Gouvernement le souligne dans ses réponses au questionnaire budgétaire « un poste de dépenses particulièrement stratégique ».
En effet, la politique publique de la culture est menée en étroite collaboration tant avec les opérateurs rattachés à la mission qu'avec de nombreux autres acteurs subventionnés par les crédits de la mission : il peut s'agir de collectivités territoriales, d'associations, d'entreprises ou encore de ménages. Les crédits d'intervention financent à la fois des bourses pour les étudiants des écoles d'enseignement supérieur rattachées à la mission et de nombreuses aides à différentes structures sur l'ensemble du territoire .
Ce phénomène se vérifie particulièrement pour le programme 131 « Création » , en raison de l'importance accordée au financement des réseaux et labels de la création artistique : 213,8 millions d'euros en crédits de paiement sont inscrits à ce titre par le projet de loi de finances pour 2017.
Crédits d'intervention : fonctionnement et investissement Les crédits d'intervention sont majoritairement composés de crédits de fonctionnement (près de 80 %), particulièrement pour ce qui concerne les politiques en faveur de la création artistique portées par le programme 131, de l'éducation artistique et culturelle et de soutien à l'enseignement supérieur sur le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » ainsi que du soutien au patrimoine architectural sur le programme 175 « Patrimoines ». Les crédits d'investissement portent traditionnellement les opérations d'équipement, d'aménagement ou de mise aux normes des structures culturelles maillant le territoire, au premier rang desquelles les opérations inscrites en contrats de projet État-région (CPER). Source : réponse du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux |
Les crédits d'intervention ouverts en loi de finances initiale ont d'abord augmenté de 2008 à 2012, avant de connaître une relative stabilisation entre 2013 et 2015. Le ressaut constaté en loi de finances initiale pour 2016 est confirmé par le projet de loi de finances pour 2017, qui voit les dépenses d'intervention croître de 12,3 % par rapport à 2017. Depuis 2013, l'augmentation totale est de plus de 17 % - le calcul de cette hausse neutralise l'effet des travaux de la Philharmonie de Paris ainsi que la rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive.
Évolution des crédits d'intervention de la mission de 2013 à 2017
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Les aides accordées font, certes, écho à de réels besoins.
Cependant, la multiplicité des dispositifs financés et la forte hausse des crédits consacrés aux dépenses d'intervention appellent à un examen de la complémentarité ou au contraire de la redondance de certains dispositifs et peut-être à un recentrage sur les dispositifs les plus efficients .
5. Une inclusion insuffisante des opérateurs dans une démarche de performance
Seuls 33 % des opérateurs font l'objet d'un contrat d'objectifs et de performance (COP), soit un net recul par rapport à 2013 qui voyait 55 % des subventions pour charges de service public couvertes par un tel contrat.
Répartition des opérateurs selon qu'ils
sont ou non dotés
d'un contrat d'objectif et de performance
(COP)
(en nombre d'opérateur et en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Pourtant, ce document est un élément essentiel du pilotage des opérateurs par la performance . Il constitue également un support utile au contrôle du Parlement dans la mesure où il permet d'objectiver les objectifs fixés à l'opérateur par sa tutelle et les indicateurs qui doivent en mesurer l'atteinte.
Le ministère de la culture et de la communication argue, dans ses réponses au questionnaire budgétaire, du fait que « le nombre et la diversité des opérateurs rattachés à la mission ?Culture? rend extrêmement complexe le déploiement d'une couverture exhaustive des opérateurs par des COP ».
Il est cependant difficile de souscrire à une telle remarque dans la mesure où la complexité de suivi des opérateurs de la mission constitue précisément une incitation supplémentaire à la conclusion de contrats de performance.
Il est donc urgent que les contrats en cours de préparation soient conclus.
LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté sans modification les crédits de la mission « Culture ».
En seconde délibération, à l'initiative du Gouvernement, nos collègues députés ont minoré de 9,5 millions d'euros, en AE et en CP, les crédits de l'ensemble des programmes de la mission .
Cette minoration fait partie du « rabot » appliqué sur la quasi-totalité des missions du budget général afin de gager les hausses de crédits sur d'autres missions .
Elle est répartie de la façon suivante :
- 4 millions d'euros sur le programme « Patrimoines » ;
- 1,5 million d'euros sur le programme « Création » ;
- 4 millions d'euros sur le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».
EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ
ARTICLE 55 bis (nouveau) - Demande de rapport relatif à l'impact financier du projet de construction d'une « Cité du théâtre »
Commentaire : le présent article vise à obtenir un rapport du Gouvernement sur l'impact financier du projet de construction d'une « Cité du théâtre », tant en termes d'investissement que de fonctionnement futur. Celui-ci devra être remis au Parlement avant le 1 er octobre 2017.
Le présent article est issu d'un amendement de notre collègue député François de Mazières et plusieurs de ses collègues adopté avec un avis de sagesse de la commission des finances et un avis favorable du Gouvernement.
Il prévoit que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur l'impact financier du projet de « Cité du théâtre » avant le 1 er octobre 2017 .
Ce projet comporte deux volets.
Le premier grand volet concerne le site Berthier , au nord-ouest de Paris, dans le quartier des Batignolles. Le théâtre de l'Odéon verra ses équipements modernisés. Viendra également s'y installer la Comédie-Française . Enfin, le Conservatoire national supérieur d'art dramatique de Paris (CNSAD) déménagera également sur le site.
Le second volet du projet a trait à l'Opéra national de Paris. Le site Berthier était en effet un lieu historique de l'Opéra où se fabriquaient les décors et où se tenait une partie des répétitions. Les ateliers jusqu'alors hébergés sur le site Berthier vont être rapatriés au sein des espaces encore inutilisés de l'Opéra de Bastille et sera créée, également sur le site de Bastille, une nouvelle salle pour l'éducation artistique et culturelle.
Le coût en investissement est aujourd'hui estimé à environ 150 millions d'euros . Ce montant est cependant provisoire dans la mesure où ni la nature exacte des opérations, ni le maître d'oeuvre n'ont encore été choisis. Aucun chiffre n'a été communiqué concernant le coût en fonctionnement.
La date de remise du rapport était initialement fixée au 1 er juillet par les auteurs de l'amendement. La ministre de la culture Audrey Azoulay a demandé en séance à ce qu'elle soit reportée au 1 er octobre dans la mesure où « une procédure de dialogue compétitif avec les équipes d'architectes (...) se déroulera au cours de l'année 2017 et les premières esquisses résultant de ce dialogue seront examinées à la fin de l'été 2017 afin que soient affinés les coûts d'investissement et de fonctionnement du projet avant que ne soit arrêté le choix du maître d'oeuvre ».
La remise du rapport paraît utile et bienvenue dans le contexte d'un programme de travaux particulièrement important dans les années à venir .
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours d'une réunion tenue le mardi 15 novembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de MM. Vincent Eblé et André Gattolin, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Culture ».
M. Vincent Éblé , rapporteur spécial . - Avant d'entrer dans le détail des crédits de la culture pour 2017, je souhaite, comme certains d'entre nous ont déjà eu l'occasion de le faire, exprimer un regret qui a trait aux conditions dans lesquelles le projet de loi de finances pour 2017 pourrait être examiné par le Sénat. La majorité sénatoriale, semble-t-il, devrait décider de ne pas débattre de ce budget en séance publique.
M. Philippe Dallier . - Ne soyez pas impatients !
M. Vincent Éblé , rapporteur spécial . - Cela serait doublement dommageable : une telle décision dévaloriserait les travaux de la commission des finances et déprécierait le rôle de l'institution sénatoriale dont la voix ne sera pas entendue. Si la majorité considère que ce budget est indigne d'être présenté en séance publique, nous ne pouvons que l'inviter à en proposer un autre !
Ceci étant dit, j'en viens au projet de loi de finances pour 2017 de la mission « Culture » dont je suis le co-rapporteur spécial avec André Gattolin.
La mission « Culture », qui devrait être dotée de 2,9 milliards d'euros en 2017, regroupe 85 % des crédits consacrés aux politiques publiques culturelles de l'État. Les 15 % restants sont présentés dans la mission « Recherche et enseignement supérieur » et dans la mission « Médias, livre et industries culturelles ». La mission comporte trois programmes : le programme 131 « Création », le programme 175 « Patrimoines » et le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », lequel représente 42 % des crédits de la mission et comprend des crédits destinés au ministère et aux politiques transversales, en particulier l'enseignement supérieur culturel et la démocratisation culturelle. Le programme « Patrimoines » atteint 904 millions d'euros, un peu plus de 30 % du total des crédits de la mission ; le programme « Création » est doté de 777 millions d'euros, 27 % du total.
Le budget de la culture s'appuie sur un large réseau d'acteurs qui maille le territoire : l'administration centrale ne représente qu'un cinquième des crédits. Pour le reste, les dépenses sont des subventions aux opérateurs, pour 30 %, et des dépenses d'intervention, c'est-à-dire des aides financières, par exemple aux propriétaires de monuments historiques, des bourses aux étudiants de l'enseignement supérieur artistique... Ces crédits d'intervention représentent 34 % du total de la mission.
En outre, 35 % des crédits sont déconcentrés et gérés par les directions régionales des affaires culturelles (Drac). À la suite de l'adoption de la loi dite « NOTRe », en 2016, un ralentissement du rythme de décaissement des crédits par les Drac a été constaté. Il est lié à la réorganisation des services. Ainsi, les directions régionales ayant connu une fusion présentent au 30 septembre 2016 un taux d'exécution des crédits inférieur de dix points en autorisations d'engagement et de six points en crédits de paiement aux niveaux observés dans les autres régions. Sur les crédits liés aux monuments historiques, l'écart atteint douze points en autorisations d'engagement et neuf points en crédits de paiement. D'après les informations recueillies en audition, le décalage constaté sur les neuf premiers mois de l'année devrait être partiellement compensé par une accélération des décaissements en fin de gestion pour les Drac fusionnées. Il faudra le vérifier. La réorganisation des administrations culturelles déconcentrées devrait être achevée en 2017 et ne plus avoir d'incidence sur le rythme de décaissement des crédits.
J'en viens maintenant aux observations que le budget pour 2017 de la culture nous inspire, à mon co-rapporteur André Gattolin et à moi. Je commencerai par les points positifs.
La progression des crédits prévue en 2017 est justifiée par le lancement de dispositifs ambitieux. Elle témoigne d'un réel engagement du Gouvernement, après plusieurs années de resserrement des moyens. Le budget de la culture représente à nouveau 1 % du budget de l'État, ce qui n'était pas le cas depuis 2012 : de 2010 à 2014, les crédits n'ont cessé de baisser et ont connu sur la période une réduction que nous avons chiffrée à 14,4 %. La hausse des crédits en 2017, qui prolonge celle de 2016, compense donc la forte diminution intervenue précédemment, avec une budgétisation initiale équivalente à l'exécution constatée en 2009.
Les crédits alloués à l'entretien et à la restauration des monuments historiques sont maintenus à un niveau similaire à celui prévu en loi de finances pour 2016, à rebours du budget triennal qui prévoyait leur baisse. Ce maintien paraît nécessaire au regard des contraintes budgétaires des collectivités territoriales.
La mise en place d'un dispositif d'intervention d'urgence sur le patrimoine en péril, bien que l'enjeu budgétaire soit limité (1 million d'euros), constitue un symbole important. Il s'agit de créer un fonds de soutien qui aura vocation à financer des missions sur le terrain, en particulier en matière de formation et de soutien pour la protection et la reconstruction des biens patrimoniaux. C'est la première fois que la mission « Culture » dispose de crédits dédiés à des interventions d'urgence pour préserver le patrimoine en péril.
M. André Gattolin , rapporteur spécial . - À cela s'ajoutent deux autres points positifs. La priorité accordée à la jeunesse se traduit par une ambition forte en matière d'action éducative artistique et culturelle auprès des jeunes publics. Ainsi, grâce à une nouvelle hausse des crédits, les moyens sont doublés par rapport au début du quinquennat : ils passent de 30,8 millions d'euros en 2012 à 64 millions d'euros en 2017. Cela s'accompagne d'un relèvement de la cible de performance et d'une maîtrise du coût moyen par enfant des actions menées. Celui-ci a diminué de 23 % entre 2011 et 2015, de 13,40 euros à un peu plus de 10 euros. La maîtrise des coûts doit être saluée et maintenue afin de sécuriser les dispositifs d'éducation artistique et culturelle au niveau élevé auquel les a portés le Gouvernement.
Les moyens alloués aux conservatoires, après les coupes budgétaires en 2015 qui avaient fragilisé l'action de ces établissements, augmentent. Le rattrapage commencé l'an dernier se poursuit. D'après la ministre elle-même, le niveau initial n'est pas tout à fait retrouvé, mais ces crédits retrouvent une trajectoire positive. Ainsi, près de 8 millions d'euros sont destinés en 2017 à pérenniser les actions des conservatoires classés en faveur de la jeunesse et la diversité.
L'accroissement des moyens rend également possible le lancement d'un programme de 2 millions d'euros visant à renforcer la présence artistique, notamment des jeunes artistes, dans les projets d'éducation artistique en milieu scolaire. L'appel à projets « Création en cours » est conduit en lien avec l'établissement public de coopération culturelle Médicis-Clichy-Montfermeil et le ministère de l'éducation nationale. Il s'agit d'installer, chaque année, 100 artistes en résidence dans les écoles et collèges éloignés de l'offre culturelle - par exemple, quartiers de la politique de la ville, zones rurales et périurbaines, outre-mer, etc. - afin de favoriser des échanges soutenus entre les artistes et les enfants et adolescents du cycle 3, c'est-à-dire en classe de CM1, CM2 et 6 e .
L'accompagnement par l'État des opérateurs culturels fragilisés à la suite des attentats doit être salué. En effet, le budget culturel public subit le contrecoup des attentats de deux façons. D'une part, l'État finance la sécurisation des opérateurs culturels publics : une augmentation de 6 millions d'euros est prévue à ce titre en 2017. D'autre part, l'État participe au financement du fonds d'urgence pour le soutien au spectacle vivant, Vincent Eblé et moi vous avions présenté une communication sur le sujet au printemps dernier, qui vise à indemniser une partie des surcoûts supportés par les établissements de spectacle privés et qui sera doté de 17,4 millions d'euros en 2017. La réduction des flux de touristes étrangers, particulièrement à Paris, n'a pas été sans conséquence pour les opérateurs de la mission « Culture » qui ont subi des pertes de recettes parfois considérables. L'État doit continuer de s'engager à leurs côtés, pour les aider à passer cette période difficile.
Mais ce budget pour 2017 présente aussi quelques points qui appellent une grande vigilance. Première observation : la réduction d'impôt au titre des dons n'est pas rattachée à la mission « Culture » bien qu'elle contribue à soutenir le secteur culturel. Or, l'absence de données précises relatives à la part de ce dispositif bénéficiant à des actions culturelles est problématique : le montant de dépense fiscale présenté au sein des documents budgétaires est agrégé et le ministère n'est pas en mesure de préciser le montant global des dons affectés à la culture déclarés à l'administration fiscale, ni leur répartition. Le montant de la dépense fiscale engagée au profit de fondations privées non reconnues d'utilité publique n'est pas non plus publié par le Gouvernement. Une enquête annuelle menée avec les services du ministère chargé du budget et les instances représentatives du mécénat et des fondations serait utile pour mieux cerner la répartition du mécénat déductible entre les différents secteurs de l'intérêt général. Il faudrait également identifier la répartition de la dépense fiscale entre les différentes structures : connaître le montant de dépense fiscale lié à un mécénat envers des organismes publics ou à l'inverse privés, avec le détail des statuts juridiques des structures bénéficiant du mécénat. Ainsi nous pourrions mieux appréhender les effets sur le secteur culturel et l'efficacité de la dépense fiscale.
Ma deuxième observation concerne le fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps), créé par le présent projet de loi de finances et doté de 90 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 55 millions d'euros en crédits de paiement. Il paraît dans son principe justifié, au regard des difficultés rencontrées par le secteur et de la nécessité de soutenir l'emploi. Cependant, la répartition des crédits entre les différentes aides à créer n'est pas encore connue, ni les modalités exactes d'attribution ; l'administration du fonds reste à définir. Il s'agira donc en 2017 de veiller à ce que les règles soient à la fois efficientes et en accord avec les objectifs initiaux.
Troisième point qui me paraît problématique : la très forte hausse des crédits d'intervention. Ceux-ci représentent, en crédits de paiement, 34 % du total des dépenses et près de 45 % des crédits hors titre 2 (c'est-à-dire hors masse salariale). Le projet de loi de finances prévoit une hausse des dépenses d'intervention de 12,3 %. Depuis 2013, l'augmentation totale serait de plus de 17 %, hors travaux de la Philharmonie de Paris et rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive (RAP).
Certes, les aides accordées sont une réponse à de réels besoins. Mais la multiplicité des dispositifs financés et la forte hausse des dépenses d'intervention appellent un examen attentif. Peut-être faudrait-il recentrer la dépense sur les dispositifs les plus efficients.
M. Vincent Éblé , rapporteur spécial . - Deux autres points doivent faire l'objet d'un suivi vigilant. De très nombreuses opérations immobilières sont lancées, annoncées ou se poursuivent en 2017. Le montant inscrit en 2017 s'élève à 150 millions d'euros en crédits de paiement mais le coût des travaux annoncés dépasse 1,5 milliard d'euros. Sur ce total, au moins 500 millions d'euros pèseraient sur l'État. Je pense en particulier à la rénovation du Grand Palais, qui devrait coûter 466 millions d'euros, au regroupement des administrations ministérielles sur trois sites et au déménagement de certaines archives à la suite de la fermeture du site de Fontainebleau. Comme nous l'avions déjà souligné l'an dernier, le programme immobilier de la mission doit faire l'objet d'un suivi particulièrement attentif. Les estimations initiales de coût doivent être très prudentes afin de garantir la soutenabilité budgétaire de la mission pour les années à venir car, chacun le sait, les enveloppes initiales sont souvent dépassées...
Ma deuxième remarque porte sur le fait que seuls 33 % des opérateurs font l'objet d'un contrat d'objectifs et de performance (COP). C'est un net recul par rapport à 2013 : 55 % des subventions pour charges de service public étaient alors couvertes par un tel contrat. Il est urgent que les contrats en cours de préparation soient conclus.
M. André Gattolin , rapporteur spécial . - Nous avions fait part l'an dernier de notre satisfaction concernant le budget alloué à la culture, qui traduisait son caractère prioritaire pour le Gouvernement. Le budget pour 2017 confirme la priorité accordée à la culture. Les quelques points de vigilance que nous avons signalés ne nous paraissent pas suffisants pour justifier un rejet. La hausse des crédits est justifiée par des dispositifs ambitieux, tournés vers la jeunesse et l'emploi. Ce budget est à la fois sincère et soutenable. Nous proposons donc l'adoption des crédits de la mission.
M Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - La loi de finances pour 2016 a rebudgétisé la redevance d'archéologie préventive (RAP). Cela a créé une difficulté pour les services d'archéologie des collectivités territoriales, qui ne perçoivent plus son produit. Des subventions de remplacement sont indispensables. Qu'en est-il en 2017 ?
Les crédits alloués au patrimoine sont maintenus, il faut s'en réjouir. Mais, comme nos rapporteurs spéciaux l'ont souligné, au total il y a moins d'argent pour le patrimoine, puisque les collectivités territoriales font face à des contraintes budgétaires qui les forcent à se retirer du financement du patrimoine. Or à côté des financements de l'État, les financements complémentaires des collectivités locales sont considérables : est-il possible d'avoir quelques précisions sur ce point ?
Comme rapporteur spécial de la mission « Investissement d'avenir », j'avais évoqué la possible débudgétisation du financement de la restauration du Grand Palais : est-ce confirmé ? Si le PIA finance le Grand Palais, pourquoi pas les Invalides ? Le Louvre ? Versailles ? Où se situera la ligne de partage ? Quelle est la doctrine, s'il y en a une, qui permet d'affirmer que le chantier du Grand Palais relève du PIA et non des crédits du ministère de la culture ? C'est la voie ouverte à toutes les débudgétisations
M. David Assouline , rapporteur pour avis de la commission de la culture (programme 131 « Création ») . - Le budget de la culture augmente cette année de manière assez exceptionnelle au regard du contexte budgétaire global : 5 % de hausse. Les deux premières années du quinquennat, j'ai été mécontent de constater qu'il diminuait à la suite de décisions comptables un peu aveugles, et très content quand il a ensuite été stabilisé, puis augmenté. Cette année, la hausse est réelle, je m'en réjouis. Car la culture est la première visée par les terroristes. Or elle fait vivre les citoyens ensemble, les fait communier le temps d'un spectacle ou d'un concert, quelles que soient les difficultés des temps.
Un effort très significatif est accompli sur les crédits de la création. Il sera donc possible de pérenniser ce qui semblait fragilisé, je pense notamment aux compagnies, aux festivals structurants ou innovants, aux résidences d'artistes, aux ateliers de fabrication et aux arts du cirque, de la marionnette, etc. Au-delà des aides, il s'agit d'un véritable investissement de l'État, très bien reçu dans ces secteurs. En outre, la création du Centre national des arts visuels, la photographie, qui a toujours été traitée comme le parent pauvre de la création, est un acte fort qu'il faut souligner.
Les performances de l'industrie du cinéma en France sont remarquables. En effet, 300 films ont été tournés l'an dernier et le danger principal, une fuite des tournages à l'étranger, a été endigué grâce à une mesure que j'avais proposée et que le Sénat a reprise : le crédit d'impôt, pourfendu par certains mais efficace. Même les tournages en cours ont été rapatriés. Des dizaines de milliers d'emplois sont en jeu, ainsi que le rayonnement de la France via son cinéma. L'effort se poursuit, afin que le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) soutienne la distribution et l'exportation et encourage les salles d'art et d'essai, souvent menacées de fermeture dans les petites villes ou en campagne. Le plan de numérisation totale que nous avons soutenu l'an dernier a fonctionné ; toutes les salles sont numérisées. En Espagne ou en Italie, où cela n'a pas été fait, on constate une chute brutale de la fréquentation. La France est le deuxième exportateur, après les États-Unis...
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Et l'Inde ?
M. David Assouline , rapporteur pour avis . - Je ne parle pas de marché intérieur mais d'exportation. Bien sûr, les Indiens sont plus nombreux que nous et leur marché domestique est le deuxième plus grand au monde.
M. Dominique de Legge . - Vous avez mentionné que les crédits de paiement dans certaines directions régionales ne sont pas, pour l'heure, dépensés à hauteur de leur inscription en loi de finances. Vous l'avez expliqué notamment par la réorganisation des régions. Pourtant la Bretagne n'a pas été réorganisée, or depuis fin août, il n'y a pas eu une seule délégation de crédits ! Est-ce en raison d'un gel de crédits ?
M. Dominique de Legge . - Il est bien fâcheux de ne pas payer des entreprises dont les savoir-faire doivent être protégés et qui offrent des emplois non délocalisables. Il n'est pas normal que les engagements pris ne soient pas honorés. Plus aucun paiement n'est parvenu aux gestionnaires de monuments historiques depuis fin août.
M. Philippe Dallier . - Je voudrais revenir sur le programme immobilier de la mission. Le cumul des projets en cours représente, avez-vous dit, 1,5 milliard d'euros de dépenses. Pas moins de 466 millions d'euros seront consacrés au Grand Palais, financés en partie par le PIA, mais l'État ne financera pas la totalité de l'opération. Vous indiquez que l'État portera au moins 500 millions d'euros du total des dépenses liées au programme immobilier. D'où vient le reste ?
M. Vincent Capo-Canellas . - Le seuil de 1 % est franchi à nouveau, tant mieux. Mais tous les gouvernements ont la tentation de jouer sur des effets de périmètre pour se rapprocher de 1 %. Cette année, quels sont les effets de périmètre ?
M. Antoine Lefèvre . - Le niveau des crédits en matière de restauration et d'entretien des monuments historiques est maintenu, je m'en réjouis. Ce patrimoine fait aussi notre force et notre attractivité touristique. Les opérateurs et les propriétaires privés seront soutenus, tant mieux.
Dans les Hauts-de-France, ont été maintenues une Drac Picardie, dont le siège est à Amiens, et une Drac Nord-Pas-de-Calais qui se situe à Lille. S'agit-il d'une période transitoire ? Ou ce maintien est-il destiné à être pérenne ?
Mme Marie-France Beaufils . - L'aide à la création est un sujet très important. Une partie de la hausse des crédits orientée vers le spectacle vivant est liée aux besoins nouveaux qui ont émergé après les attentats. Les montants sont-ils suffisants, alors que le secteur de la création a déjà été très affecté par une baisse des crédits les années précédentes ? J'ai connaissance de certains cas dans lesquels on attend toujours des réponses de la Drac sur l'accompagnement qui pourrait être apporté ; quant aux collectivités, elles ne sont plus en mesure de compenser un éventuel désengagement de l'État.
Malgré les nombreuses négociations sur le régime des intermittents du spectacle, la situation de ces derniers est toujours fragile. Que pouvez-vous nous en dire pour 2016 ?
M. Michel Bouvard . - Le regroupement des anciennes régions entraîne celui des Drac. On découvre alors que le retard des décaissements par rapport à la programmation des travaux est très variable selon les territoires. Un décalage de un ou deux ans n'est pas très grave, mais il atteint parfois cinq ans ! Ne doit-on pas craindre que les fusions soient l'occasion de purger les plus gros retards, au détriment des services les plus sérieux ?
La loi dite « Raffarin » prévoyait la possibilité d'une décentralisation temporaire de la gestion des crédits du patrimoine historique, au niveau des régions ou, à défaut, des départements. Quel bilan peut-on en tirer aujourd'hui ? Les périmètres des régions sont à présent modifiés, les compétences culturelles du département assurées. Ne serait-il pas opportun de reprendre ce mouvement de décentralisation ?
M. Vincent Delahaye . - Sur le programme immobilier, je suis surpris que les rapporteurs spéciaux ne puissent pas nous fournir d'éléments financiers plus précis. Sur 1,5 milliard d'euros de programmation - avant dépassements, systématiques - on ignore d'où proviendront les deux-tiers des financements. Le regroupement des services ministériels se traduira par la cession de deux bâtiments et d'une résiliation de bail : des économies ne sont-elles pas à en attendre ?
Annoncer des projets ambitieux six mois avant la fin d'un mandat qui risque de se terminer assez mal ne me semble pas très correct sur le plan démocratique.
Enfin, je ne comprends pas cette hausse de 6 %. J'ai lu tous les documents budgétaires du Gouvernement depuis 2012, et la culture n'y apparaît jamais comme l'une des priorités. Et voilà que, d'un coup, le budget de la mission monte en flèche... C'est l'une des missions qui connait l'augmentation la plus importante. Un bon budget n'est pas forcément un budget qui augmente. La hausse est, selon moi, inconsidérée.
M. Éric Doligé . - J'étais hier en Haute-Vienne, représentant la délégation du Sénat aux collectivités territoriales qui se penche sur l'évolution des missions de l'État au service des collectivités. La directrice-adjointe de la Drac nous a expliqué le fonctionnement des services de la culture dans la Nouvelle-Aquitaine : on a scindé en trois les responsabilités pour maintenir les directions de Poitiers, Bordeaux et Limoges. Ainsi mon interlocutrice, s'occupant de culture populaire, reçoit à présent les dossiers des douze départements. Comment faire face, alors que les moyens ne sont pas à la hauteur ? Les rapporteurs spéciaux pourraient peut-être s'intéresser à la réorganisation des Drac.
M. Michel Bouvard . - Tout à fait !
M. Maurice Vincent . - Ce budget est très positif et nous le voterons. Cependant, nous déplorons le refus de la majorité sénatoriale de débattre en séance plénière et, en conséquence, nous nous abstiendrons de débattre ici, puisque cela ne débouchera sur rien. Nous ne laisserons pas instrumentaliser le débat de commission. Puisqu'aucune suite concrète n'est à en attendre, nous ne présenterons pas non plus d'amendements.
M. Michel Canevet . - Ce rapport me laisse perplexe : le niveau de 1 % en dépenses n'est calculé que sur un périmètre réduit, qui inclut par exemple les dépenses en faveur du cinéma : si celles-ci étaient réintégrées, l'on s'apercevrait que l'effort total de l'État en faveur du secteur culturel est bien supérieur à 1 % !
Et comment augmenter de 5,8 % les crédits de la culture quand on cherche à réduire les dépenses dans tous les domaines d'intervention de l'État ? Cela n'est pas réaliste. Les dépenses de personnel augmentent de 4 % alors que la fusion de certaines régions est censée permettre de réaliser des économies sur les administrations déconcentrées !
M. Vincent Éblé , rapporteur spécial . - Plusieurs questions ont été posées concernant la redevance d'archéologie préventive, rebudgétisée en loi de finances pour 2016.
D'abord, s'agissant des mesures de périmètre évoquées par Vincent Capo-Canellas, il y a bien un petit effet périmètre, lié justement à la rebudgétisation, mais il ne s'élève qu'à 118 millions d'euros ce qui n'est pas très important au regard du montant global du budget de la culture. Ce montant n'a donc pas grande incidence sur le seuil de 1 %.
Ensuite, quant aux conséquences de la rebudgétisation sur le financement de l'archéologie préventive, il faut d'abord souligner que c'est une opération importante pour les opérateurs de l'archéologie préventive. Ils étaient jusque là - et nous l'avions constaté ici-même - dans une grande difficulté pour percevoir les recettes issues de la redevance. Désormais, la rebudgétisation offre une certaine fiabilité aux opérateurs quant aux moyens sur lesquels ils peuvent compter pour accomplir leurs missions.
Le rebudgétisation a aussi, c'est vrai, un effet sur les collectivités territoriales puisque la redevance finançait à la fois l'Institut national de recherches archéologiques préventives (l'Inrap), le fonds national d'archéologie préventive (Fnap) mais également les services d'archéologie préventive des collectivités territoriales qui avaient fait le choix de créer un service propre - ce qui n'est pas le cas, bien évidemment, de toutes les collectivités locales. 10 millions d'euros sont budgétés sur la mission « Culture » en 2017 pour subventionner ces services, soit un montant équivalent à la fraction du produit de la redevance dont bénéficiaient les services territoriaux. Il n'y a donc, me semble-t-il, pas de crainte à avoir sur ce point, sauf situation très particulière qui appellerait alors une analyse approfondie.
Concernant l'ensemble des crédits mobilisés en faveur du patrimoine, il y a en effet une question, comme plusieurs d'entre vous l'ont évoqué, relative à la clé de répartition entre la dépense d'État et les dépenses des collectivités territoriales. Cela dit, la dépense de l'État vise d'abord à financer l'entretien et la restauration des monuments historiques dont il est le propriétaire. Le budget de l'État comprend aussi des aides pour les propriétaires privés, et les collectivités apportent des aides complémentaires d'un montant très variable. Elles disposent à ce titre d'une pleine autonomie de décision et de gestion. Certaines d'entre elles privilégiaient par exemple les édifices inscrits pour rattraper le différentiel de subventionnement par l'État qui privilégie souvent les monuments classés.
La tension sur les budgets locaux a certes des conséquences sur les montants alloués par les départements, les régions, voire les communes, à l'entretien du patrimoine monumental mais on pourrait faire la même remarque pour tous les secteurs : transports, routes, accompagnement social, logement... Nos interlocuteurs nous ont indiqué que l'inflexion à la baisse des contributions des collectivités territoriales concernant le patrimoine monumental était sensible à partir de 2010 et s'est accentuée à partir de 2015.
Il faut donc continuer de suivre ces questions avec vigilance, ce que nous nous efforçons de faire. Mais il faut aussi noter qu'un effort particulier de l'État peut inciter les partenaires à se désengager, comme on l'a parfois constaté. Prudence, donc.
M. André Gattolin , rapporteur spécial . - Concernant l'ampleur du programme immobilier de la mission, que vous avez été nombreux à évoquer, je voudrais d'abord remettre les montants en perspective. Les 466 millions d'euros du Grand Palais équivalent au coût du bâtiment de la Fondation LVMH dans le bois de Boulogne - payé aux deux tiers par un dégrèvement d'impôt. Je partage tout à fait le souci de rigueur budgétaire qui anime Vincent Delahaye, mais au moins, dans le cas du Grand Palais, les inscriptions budgétaires sont-elles claires.
Il s'agit en outre d'un projet stratégique pour l'attrait de Paris. Le Grand Palais fonctionne à 84 % sur ses recettes commerciales, il ne coûte donc pas cher à l'État. Mais aujourd'hui, certaines salles ne peuvent être ouvertes au public, pour des raisons de sécurité. Les travaux viseront aussi à rénover le Palais de la Découverte et il est envisagé de créer une agora entre le Petit et le Grand Palais. Les bornes ont été posées en 2013, le financement a été déterminé en 2016 et les travaux commenceront en 2020.
Depuis un an, les recettes de la billetterie ont chuté tandis que les charges liées à la sécurité augmentaient fortement.
Sur le total du financement, je rappelle que l'État apportera 136 millions d'euros au titre du programme 175, comme il le fait chaque année ; le PIA fournira 200 millions d'euros si le projet est retenu par le jury sur la base d'un projet qui devra faire la preuve d'une réelle rentabilité économique ; l'établissement pourra s'endetter à hauteur de 145 millions d'euros et le complément proviendra des fonds propres de l'opérateur.
M. Michel Bouvard . - L'opérateur fait partie de ceux qui sont autorisés à s'endetter ?
M. André Gattolin , rapporteur spécial . - Oui. C'est par ailleurs l'un des établissements culturels les plus performants en termes de ressources propres. Son inscription dans le PIA 3 est une exception, je le reconnais.
M. Vincent Éblé , rapporteur spécial . - Encore un mot à propos de la redevance d'archéologie préventive : il n'y avait avant la réforme de 2016 pas de corrélation entre sa perception et la réalité des opérations d'archéologie, puisqu'elle était due par les aménageurs quelles que soient les prescriptions archéologiques. En loi de finances initiale pour 2016, 10 millions de crédits ont été inscrits dans l'action 9 du programme 175, soit 9,2 millions à répartir entre les collectivités locales dotées de services d'archéologie, selon des critères qui seront définis par un décret.
M. Michel Bouvard . - Sauvons le soldat Inrap...
M. André Gattolin , rapporteur spécial . - Pour répondre à Michel Canevet, la hausse des dépenses de personnel s'explique par la faiblesse des primes distribuées jusqu'alors au ministère de la culture. La ministre Audrey Azoulay a fait part, lors de son audition devant la commission de la culture, des problèmes de recrutement de professionnels qualifiés. Le ministère mène donc une politique de réajustement des statuts et de rattrapage indemnitaire.
M. Vincent Éblé , rapporteur spécial . - Pour conclure, un rapport de l'inspection générale des affaires culturelles traite de la réorganisation des Drac et évoque la perspective de la stabilisation de l'organisation des Drac sur le territoire. Je vous invite à vous y reporter.
À l'issue de ce débat la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Culture ».
*
* *
Réunie à nouveau le jeudi 24 novembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a décidé de proposer au Sénat d'opposer la question préalable au projet de loi de finances pour 2017.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Secrétariat général du ministère de la culture et de la communication (programme 224)
- M. Arnaud ROFFIGNON, secrétaire général adjoint ;
- M. Benoît PROUVOST, chef du département de la programmation et des moyens - Secrétariat général.
Direction générale de la création artistique (programme 131)
- Mme Régine HATCHONDO, directrice générale de la création artistique ;
- M. Pierre OUDART, directeur adjoint délégué aux arts plastiques ;
- M. Pascal PERRAULT, sous-directeur des affaires financières et générales ;
- M. Stéphane MARTINET, adjoint au sous-directeur.
Direction générale des patrimoines (programme 175)
- M. Vincent BERJOT, directeur général des patrimoines ;
- M. Kevin RIFFAULT, sous-directeur des affaires financières et générales.
Établissement public de Versailles
- Mme Catherine PÉGARD, présidente ;
- M. Thierry GAUSSERON, administrateur général.
Opéra national de Paris
- M. Stéphane LISSNER, directeur.
ANNEXE : ÉTAT D'AVANCEMENT DU CONTRAT D'OBJECTIFS ET DE PERFORMANCE (COP) POUR CHAQUE OPÉRATEUR DE LA MISSION « CULTURE »
Direction de tutelle / Programme Nom de l'organisme |
Statut juridique |
Etat d'avancement du COP |
Programme 131 - Création |
||
CNV - Centre national de la chanson, des variétés et du jazz |
EPIC |
en préparation |
CND - Centre national de la danse |
EPIC |
en cours d'exécution |
CNAP - Centre national des arts plastiques |
EPA |
en cours d'exécution |
Cité de la musique - Philharmonie de Paris |
EPIC |
absence de COP |
Comédie-Française |
EPIC |
en préparation |
Ensemble Intercontemporain |
Association |
en préparation |
Etablissement public Cité de la céramique - Sèvres et Limoges |
EPA |
en préparation |
EPPGHV - Etablissement public du parc et de la grande halle de la Villette |
EPIC |
en préparation |
Opéra Comique |
EPIC |
en préparation |
ONP - Opéra national de Paris |
EPIC |
en cours d'exécution |
Orchestre de Paris |
Association |
absence de COP |
Théâtre national de Chaillot |
EPIC |
en cours d'exécution |
Théâtre national de la Colline |
EPIC |
en préparation |
Théâtre national de l'Odéon |
EPIC |
en préparation |
Théâtre national de Strasbourg |
EPIC |
en cours d'exécution |
Programme 224 - Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
||
AFR - Académie de France à Rome |
EPA |
en préparation |
CNAC - Centre national des arts du cirque |
Association |
en préparation |
CNSAD - Conservatoire national supérieur d'art dramatique |
EPA |
en préparation |
CNSMDL - Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon |
EPA |
en préparation |
CNSMDP - Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris |
EPA |
en cours d'exécution |
7 Ecoles d'art en région |
EPA |
5 COP en exécution / 2 COP en préparation |
ENSCI - Ecole nationale supérieure de création industrielle |
EPIC |
en cours d'exécution |
ENSAD - Ecole nationale supérieure des arts décoratifs |
EPA |
en préparation |
ENSBA - Ecole nationale supérieure des beaux arts |
EPA |
en préparation |
Ecole du Louvre |
EPA |
en cours d'exécution |
20 ENSA - Ecoles Nationales Supérieures d'Architecture |
EPA |
9 COP en préparation |
EPPPD - Etablissement public de la porte Dorée * |
EPA |
absence de COP |
INP - Institut national du Patrimoine |
EPA |
en cours d'exécution |
OPPIC - Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la Culture |
EPA |
en cours d'exécution |
ENSMIS - Ecole nationale supérieure des métiers de l'image et du son *** |
EPIC |
en cours d'exécution |
Programme 175 - Patrimoines |
||
CMN - Centre des monuments nationaux |
EPA |
en cours d'exécution |
CNAC-GP - Centre national d'art et de culture Georges Pompidou |
EPA |
en préparation |
CAPA - Cité de l'architecture et du patrimoine |
EPIC |
en cours d'exécution |
Etablissement public du château de Fontainebleau |
EPA |
en préparation |
Etablissement public du domaine national de Chambord |
EPIC |
en préparation |
Etablissement public du musée du quai Branly * |
EPA |
en cours d'exécution |
EPV - Etablissement public du Château, du musée et du domaine national de Versailles |
EPA |
en cours d'exécution |
Inrap - Institut national de recherches archéologiques préventives |
EPA |
en cours d'exécution |
Les Arts Décoratifs |
Association |
absence de COP |
MuCEM - Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée |
EPA |
en préparation |
Etablissement public du musée d'Orsay et du musée de l'Orangerie |
EPA |
en cours d'exécution |
Musée du Louvre |
EPA |
en cours d'exécution |
Musée des arts asiatiques Guimet |
EPA |
absence de COP |
Musée Henner |
EPA |
absence de COP |
Musée Moreau |
EPA |
absence de COP |
Musée national Picasso - Paris |
EPA |
en cours d'exécution |
RMN-GP - Etablissement public de la Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Élysées |
EPIC |
en préparation |
TOTAL |
24 / 72 COP en cours d'exécution |
|
30 / 72 COP en préparation |
||
18 / 72 opérateurs non dotés d'un COP |
* cotutelle MENESR
** tutelle subsidiaire de la DGP pour l'INHA (tutelle principale au MENESR)
*** cotutelle avec le CNC
Source : réponse du ministère de la culture et de la communication au questionnaire des rapporteurs spéciaux
* 1 Hors charge de la dette et dotations aux pouvoirs publics.
* 2 Aux termes de l'article 17 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1 er août 2001, les fonds de concours constitués par des fonds à caractère non fiscal versés pour concourir à des dépenses d'intérêt public et par les produits de legs et donations attribués à l'État. Dans ce dispositif, la partie versante est une personne morale ou physique distincte de l'État. Les attributions de produits sont destinées à recueillir les recettes tirées de la rémunération de prestations régulièrement fournies par un service de l'État.
* 3 Dépense fiscale n° 730301, rattachée au programme 131 « Création ».
* 4 Audition d'Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication, sur le projet de loi de finances pour 2017 par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat le 9 novembre 2016.
* 5 Article 13 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.
* 6 Portés par l'action 02 « Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle » du programme 224 qui voit, en 2017, ses autorisations d'engagement relevées de près de 8 % et ses crédits de paiement de 5,5 % par rapport à 2016.
* 7 Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.
* 8 Réduction d'impôt au titre des dons faits par les entreprises à des oeuvres ou organismes d'intérêt général, numéro 210309, prévue par l'article 238 bis du code général des impôts.
* 9 Réduction d'impôt au titre des dons, numéro 110201, prévue par l'article 200 du code général des impôts.
* 10 Article 6 de la loi n° 2003-709 du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations.
* 11 Programme 163 « Jeunesse et vie associative ».
* 12 Association reconnue d'utilité publique dont les adhérents sont des mécènes et dont la mission est de « Donner aux entreprises et aux entrepreneurs l'envie et les moyens d'affirmer et de concrétiser leur rôle sociétal grâce au mécénat ».
* 13 Publiée en mai 2016 et disponible sur le site de l'association.