II. LES PRINCIPAUX ENJEUX DU PROGRAMME

A. UNE AUGMENTATION DES DÉPENSES DE PERSONNEL RÉSULTANT DU PACTE DE SÉCURITÉ COMPORTANT À TERME UN RISQUE D'ÉVICTION DES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT

1. Une augmentation du schéma d'emploi en réaction aux nouvelles menaces...

Historiquement marqué par un phénomène de croissance pauvre en emploi (- 6,6 % d'ETPT entre 2006 et 2014, alors même que les dépenses ont augmenté de 22,7 % sur la période), l'année 2016 se distingue par une augmentation des dépenses de personnel assortie d'une augmentation du nombre d'ETPT.

Évolution comparée des ETPT et des dépenses de personnel

(en millions d'euros)

2006

2014

Évolution 2006-2014

Équivalent temps plein travaillé (ETPT)

2 563

2 395

- 6,6 %

Dépenses de personnel

134,416

164,907

22,7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ainsi, le plafond d'emplois de la sécurité civile en 2017 est fixé à 2 450 ETPT et le schéma d'emplois à réaliser au cours de l'année est de + 20 ETPT, les dépenses de personnel augmentant de 6,09 %.

Évolution des schémas d'emplois depuis 2015, par catégorie d'agents

Catégorie

2015

2016

2017

Personnels administratifs

2

3

3

Personnels techniques

7

14

17

Militaires

-17

-10

0

Ouvriers d'État

-6

-10

-4

Corps de contrôle et de direction

-4

-5

-2

Corps d'encadrement et d'application

-6

20

6

TOTAL

- 24

11

20

Source : réponse aux questionnaires budgétaires

Le plafond a été revu à la hausse en 2016 et 2017 afin de tenir compte, notamment, des recrutements autorisés au titre du Pacte de Sécurité, soit + 11 ETPT en 2016 et + 20 ETPT en 2017. Cette augmentation du schéma d'emploi permettra le recrutement de trente démineurs, dont quinze cette année, et de cinq géomaticiens, afin de renforcer les systèmes d'information et de communication mis en oeuvre dans la chaîne opérationnelle de la sécurité civile.

Ainsi, afin de prendre en compte ces recrutements, les plafonds d'emplois des personnels administratifs, des personnels techniques et des personnels relevant du corps d'encadrement et d'application, ont été rehaussés en 2017.

À l'inverse, le plafond d'emplois des ouvriers d'État est en diminution en raison notamment des restructurations de service et de fermeture d'ateliers de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (réorganisation des services du déminage et mutualisation des fonctions support des services centraux).

2. ...ne devant pas masquer le nécessaire renforcement des missions traditionnelles de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises

Si cette augmentation est en phase avec les prévisions opérationnelles et la recrudescence de nouveaux risques (les démineurs étant mobilisés, dans le cadre de la menace terroriste, pour la neutralisation de colis suspects, l'appui aux forces de l'ordre, ou encore des missions d'évaluation des risques), elle apparaît problématique à plusieurs égards. Elle entérine en réalité la montée en puissance des composantes « gestion de crise » et « lutte contre le terrorisme ».

En effet, l'augmentation du schéma d'emploi en 2016 et 2017 ne compense pas la diminution des effectifs opérée entre 2013 et 2015 (successivement - 21, - 20 et - 24). La hausse mise en oeuvre à partir de 2016 vise avant tout à répondre aux nouvelles menaces, alors même que les missions traditionnelles de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, comme l'animation des SDIS et des différents acteurs qui concourent à la sécurité civile, notamment les associations, ou encore en matière de formation des pompiers, restent d'actualité. Votre rapporteur spécial a, à cet égard, pu se faire l'écho des difficultés rencontrés par les sapeurs-pompiers volontaires pour bénéficier de la formation continue.

Votre rapporteur spécial restera vigilant quant à la mise en oeuvre du projet de réorganisation de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises annoncé par le ministre de l'intérieur lors du 123 e congrès national des sapeurs-pompiers de France à Tours, qui devrait permettre « d'ici la fin de l'année , [le recrutement de] quinze agents supplémentaires, essentiellement des sapeurs-pompiers, viendront renforcer les effectifs de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, en apportant à l'État leur connaissance du terrain et leur expertise technique » , afin de lui permettre « d'exercer dans de meilleures conditions son rôle de `tête de réseau' des services d'incendie et de secours » 2 ( * ) .

3. À terme, un risque d'éviction des dépenses d'investissement

Votre rapporteur spécial est par ailleurs préoccupé par le risque d'éviction des dépenses d'investissement que comporte, à terme, une augmentation trop importante des dépenses de personnel. En effet, ces créations de postes, associées au taux de rigidité élevé du programme, risquent de faire des dépenses d'investissement la seule marge de manoeuvre budgétaire.

Cette évolution n'est pas rassurante, dans un contexte où les besoins en investissement restent élevés, tant au niveau de l'État (renouvellement de la flotte aérienne, acquisition de moyens de lutte contre les attaques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques, modernisation des moyens de communication, etc.), qu'au niveau des SDIS.

Les besoins en investissement des SDIS portent sur les besoins courants (équipement, véhicules) ou peuvent être liées au déploiement de grands projets (ANTARES). À titre d'illustration, face au terrorisme, la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises a défini une doctrine d'action commune avec le RAID et le GIGN, pour prendre en charge les blessés, alors même que les terroristes ne sont pas neutralisés, qui rend nécessaire l'acquisition d'équipements antibalistiques (gilets et casques) par les SDIS.

Malgré cela, les dépenses d'investissement des SDIS connaissent une baisse de 4,6 % en 2015, et les aides de l'État visant à soutenir leur investissement sont éteintes depuis 2013. En effet, aucun crédit n'a été inscrit en loi de finances depuis 2013 pour abonder le fonds d'aide à l'investissement 3 ( * ) , qui constituait l'instrument de l'État pour soutenir les SDIS dans leurs efforts d'investissement en équipements et en matériels. La restauration durable d'un outil comparable, pourtant fort utile, apparaît particulièrement improbable car peu soutenable dans un contexte de hausse des dépenses de personnel, et ce malgré les discours du président de la République annonçant la création d'un nouveau fonds de soutien aux SDIS, doté de 20 millions d'euros, qui ne fait à ce stade l'objet d'aucune disposition en projet de loi de finances pour 2017 4 ( * ) .


* 2 Discours de Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, lors du 123 e congrès national des sapeurs-pompiers de France à Tours, le 22 septembre 2016.

* 3 Le fonds d'aide aux investissements a été instauré par l'article 129 de la loi n° 2002-1575 du 30 décembre 2002 de finances pour 2003.

* 4 Discours du Président de la République, le 24 septembre 2016, lors du 123 e congrès de la fédération nationale des sapeurs-pompiers.

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