D. UNE CONTRIBUTION DE 6,25 MILLIARDS D'EUROS POUR FINANCER LES DEUX TIERS DES PRESTATIONS DE RETRAITE PRÉVUES EN 2017

1. Une subvention de l'État qui couvre en moyenne 68 % des charges des régimes spéciaux

Malgré le léger recul de la participation de l'État en 2015 et en 2016, ses dotations continuent de représenter une part prépondérante des ressources des régimes spéciaux de la présente mission.

Au total, les subventions d'équilibre de l'État permettront de couvrir en moyenne 68 % des prestations de retraite versées par les principaux régimes spéciaux de la mission en 2017. La masse totale des prestations versées y atteint environ 9,2 milliards d'euros (0,4 point de PIB).

Cette contribution est élevée mais elle est inférieure à la contribution de l'État à l'équilibre du régime de pensions dans la fonction publique d'État qui atteint 75 %. Cet écart ne manque pas de logique dans la mesure où les régimes spéciaux disposent de trois sources de financement : les cotisations des salariés et des employeurs et la subvention d'équilibre de l'État, quand, dans le régime de la fonction publique l'État apporte le seul financement complémentaire aux cotisations des salariés.

Le poids de la subvention de l'État diffère d'un régime à l'autre : il couvre quasiment la totalité des pensions versées par le régime de la SEITA - qui ne compte plus que 11 cotisants - et environ 60 % de celles versées par les caisses de retraite de la SNCF et de la RATP.

Le régime de retraite des marins connaissant quant à lui une lente érosion du nombre de ses cotisants, le poids de la subvention de l'État se situe entre 80 % et 85 % depuis 2012.

Pour mémoire, l'État a l' obligation juridique d'équilibrer financièrement les régimes de retraite de la SNCF, de la RATP et de la SEITA. En revanche, les subventions d'équilibre aux régimes des mines et des marins sont versées au titre de la solidarité nationale et n'ont pas de caractère obligatoire.

Taux de couverture des prestations de retraite des principaux régimes spéciaux
par la subvention d'équilibre de l'État

(en millions d'euros)

Source : réponse de la direction du budget au questionnaire de votre rapporteur spécial

2. Une justification par l'état des équilibres démographiques des régimes spéciaux mais qui est loin d'épuiser les raisons des soutiens nécessaires à leur financement
a) Un rapport démographique dégradé

Le taux élevé de la contribution de l'État aux dépenses des régimes spéciaux peut se justifier par la dégradation de la situation démographique de ces régimes.

Cependant, le jeu de la compensation démographique montre que les avantages réservés par les régimes spéciaux à leurs affiliés sont la cause principale des soutiens que l'État finance à travers la mission.

Les régimes spéciaux financés par la présente mission connaissent une situation démographique dégradée , qui se manifeste par un ratio entre cotisants et retraités plus faible que dans le régime général d'assurance vieillesse et dans celui de la fonction publique d'État.

Parmi les régimes encore ouverts, le régime des marins comptait en 2015 seulement 0,27 cotisant pour un retraité (ratio stable en 2017), le régime de la SNCF 0,67 8 ( * ) cotisant pour un pensionné et le régime de la RATP 0,88 tandis que le ratio démographique est de 1,30 dans le régime général.

Le nombre des cotisants tend à se stabiliser à la RATP mais il baisse régulièrement à la SNCF, de 1,4 % en 2014, 2% en 2015 et, en prévision, de 1,2 % en 2017 9 ( * ) , soit une réduction nettement plus forte que celle des bénéficiaires de droit direct (- 0,6 %).

Évolution du rapport démographique * dans les principaux régimes de retraite

* Rapport cotisants / bénéficiaires vieillesse. Pour la SNCF, le ratio est pondéré des pensions de réversion.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du projet annuel de performances pour 2017, du rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2016, du recueil statistique de la Caisse nationale d'assurance vieillesse 2013 et du rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2017)

Observation n° 4 : les subventions versées par l'État représentent 68 % des ressources des régimes spéciaux financés par la présente mission, une part qui demeure stable depuis 2015. Même si le ratio démographique des régimes spéciaux est plus faible que dans les autres régimes, la situation tend à se stabiliser dans les régimes de la RATP et des marins tandis que les effectifs de cotisants diminuent de façon plus importante dans le régime de la SNCF.

Votre rapporteur spécial recommande qu'en complément du rapport démographique, qui mesure la situation à un instant donné, les documents budgétaires permettent de suivre dans le temps un indicateur mesurant le rapport entre le nombre d'années cotisées et le nombre d'années de services de la pension puisque l'un des objectifs des mesures prises pour équilibrer les régimes de retraite est de mieux proportionner le temps passé au travail et celui passé en retraite. Bien entendu, il conviendrait que l'information donnée sur ce point soit conçue en grandeurs observées mais aussi en grandeurs simulées.

b) Le poids des singularités des régimes spéciaux

En toute hypothèse, le besoin de financement de ces régimes ne s'explique pas uniquement par leur situation démographique .

Le fait que les régimes de retraite de la RATP et de la SNCF ait la qualité de contributeurs au mécanisme de « compensation généralisée vieillesse », alors même que d'un point de vue strictement démographique ils connaissent une situation moins bonne que la moyenne, indique que leur déséquilibre provient également pour une large part de leurs règles spécifiques .

La compensation généralisée vieillesse est en effet calculée de façon à apprécier la situation démographique comparée des régimes mais aussi leur capacité contributive appréciée en neutralisant l'impact de la diversité des règles de liquidation des pensions.

Si les réformes intervenues depuis 2003 ont tendu à faire converger les règles applicables à ces régimes avec celles du régime général et celui de la fonction publique (voir ci-dessous), des différences subsistent du fait des situations de départ, de l'exclusion des régimes fermés et du régime des marins du mouvement d'harmonisation entrepris et du calendrier d'application des réformes aux régimes spéciaux différée de quatre ans par rapport au rythme imprimé à la convergence entre les règles de la fonction publique et celles du régime général.

Les principales règles dérogatoires applicables aux régimes spéciaux de retraite

Les trois principaux régimes de retraite « ouverts » subventionnés par la mission, à savoir les régimes des retraites des personnels de la SNCF, de la RATP et des marins se caractérisent par des règles plus avantageuses que celles du régime général en matière d'âge de départ à la retraite et de liquidation.

Parmi les règles dérogatoires applicables au régime des marins , on peut citer :

- l'âge légal d'ouverture des droits à la retraite fixé à 55 ans (contre 62 ans pour le régime général) ;

- la liquidation de la pension de retraite sur la base des 3 dernières années (en fonction du salaire forfaitaire) ;

- l' absence de mécanisme de décote et de surcote .

Les régimes spéciaux de la SNCF et de la RATP se distinguent quant à eux du régime général par :

- un âge légal d'ouverture des droits de 52 ans progressivement porté à 57 ans pour le personnel roulant des deux entreprises. L'âge légal d'ouverture des droits est de 57 ans pour les autres catégories de personnels de la SNCF et de 60 ans progressivement porté à 62 ans pour ceux de la RATP ;

- un mécanisme de bonifications (validations gratuites de trimestres) pour les personnels recrutés avant la réforme de 2008 ;

- une liquidation de la pension sur la base des six derniers mois de salaires .

Par conséquent, l'âge effectif de départ à la retraite des assurés des régimes spéciaux est sensiblement inférieur à celui observé dans le régime général .

De plus, l'assiette de liquidation de la pension introduit un écart de rendement entre les cotisations versées dans les régimes spéciaux et celles du régime général.

Depuis 2013, le régime de la SNCF est devenu contributeur au titre de ce mécanisme : il devrait ainsi verser 9,6 millions d'euros de compensation en 2015 et près de 10 millions d'euros en 2016. Pour 2017, le montant de la compensation due par la caisse est en baisse (4 millions d'euros).

Le montant de compensation généralisée vieillesse versée par le régime de la RATP tend par ailleurs à s'accroître : elle devrait passer de 24,6 millions d'euros en 2013 à 30 millions d'euros en 2017.

Ces charges de compensation sont incluses dans les comptes des régimes et contribuent à la détermination de la subvention versée par la mission .

Pour 2017, les prévisions sur ce point permettent pour les deux régimes de transport terrestre une (modeste) économie de 4 millions d'euros.

Les principaux régimes bénéficiaires de la compensation généralisée vieillesse sont les régimes de retraite des salariés et des exploitants agricoles (Mutualité sociale agricole), le régime social des indépendants, le régime des mines et le régime des marins.


* 8 Ratio pondéré des pensions de réversion.

* 9 En 2016, la prévision faisait état d'une hausse inhabituelle de 1 % du nombre des cotisants.

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