C. LES AVIS DU CONSEIL D'ETAT ET DU CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL ONT PERMIS D'ENRICHIR LE TEXTE LORS DE SON EXAMEN À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le travail parlementaire a pu bénéficier d'appuis extérieurs de qualité, les députés ayant modifié en profondeur le texte afin de se conformer aux avis sollicités du Conseil d'Etat, soucieux d'assurer la sécurité juridique du dispositif, et du Cese, visant à assurer la réussite du projet.
1. L'avis du Conseil d'Etat vise à assurer la sécurité juridique de l'expérimentation
En application de l'article 39 de la Constitution 20 ( * ) , le Conseil d'Etat a été saisi par le président de l'Assemblée nationale pour rendre un avis sur la proposition de loi initiale.
Rendu le 12 novembre dernier, cet avis indique que seule la loi peut prévoir les modalités de la participation des collectivités territoriales candidates, fixer le cadre de l'expérimentation et définir le motif du licenciement des salariés en cas de fin prématurée du projet.
Votre rapporteure souscrit à cette analyse et ajoute que le recours à la loi permettra d' impulser une dynamique sur l'ensemble des territoires, indispensable pour susciter des candidatures, et renforcer la légitimité de l'action des associations .
La haute juridiction administrative a également considéré que :
- la délimitation du public bénéficiaire de l'expérimentation était suffisamment précise, mais que l'obligation pour les salariés de l'entreprise conventionnée de poursuivre la recherche d'un emploi était source de difficultés ;
- la définition des entreprises pouvant être conventionnées devait faire référence à la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 qui définit les critères d'appartenance à l'économie sociale et solidaire ;
- la nature juridique, les conditions de gestion et la gouvernance du fonds national chargé d'habiliter les collectivités territoriales volontaires et de financer les entreprises conventionnées devaient être clarifiées, tandis qu'une procédure de contrôle des fonds issus du budget de l'Etat, à travers la création d'un commissaire du Gouvernement notamment, devait être instaurée ;
- la loi devait distinguer les conventions de fonctionnement du fonds et des comités locaux de pilotage et celles opérationnelles conclues avec les collectivités territoriales ;
- le recours à un décret était recommandé pour aborder certains sujets comme la méthodologie de l'évaluation de l'expérimentation ;
- le bilan de l'expérimentation devait être remis dix-huit mois avant son terme, et non deux ans.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat a estimé que la disposition selon laquelle l'entreprise conventionnée, lorsqu'elle réalise un résultat net positif au terme d'un exercice financier, devait reverser ce résultat au fonds était contraire au principe constitutionnel de liberté d'entreprendre et à l'égalité devant les charges publiques.
Enfin, s'agissant des aides financières prévues par le texte, le Conseil d'Etat a considéré qu'elles ne devaient pas être regardées comme des aides d'Etat, notamment parce qu'elles ne sont pas de nature à affecter les échanges entre Etats membres au sein de l'Union européenne.
2. L'avis du Conseil économique, social et environnemental présente les conditions de réussite du projet
Lors de son audition par votre rapporteure, Patrick Lenancker, rapporteur de l'avis du Cese sur la proposition de loi, a indiqué avoir eu un regard « bienveillant mais exigeant » sur cette initiative.
Bienveillant , car le texte repose sur une expérimentation qui implique la mobilisation de tous les acteurs d'un territoire pour lutter contre le chômage de longue durée.
Exigeant , car le Cese a donné à l'unanimité (174 votes pour et une abstention sur 175 votants) un avis favorable au texte sous réserve que les seize conditions de faisabilité présentées dans l'avis soient respectées.
Ces recommandations, qui s'inscrivent dans la continuité de l'étude réalisée par l'Ansa, concernent l'ensemble de la proposition de loi, qu'il s'agisse de la définition des bénéficiaires, des actions d'accompagnement et de formation à leur égard, de la diversité des territoires retenus, des obligations imposées aux entreprises conventionnées ou encore du pilotage de l'expérimentation.
Le rapport met surtout l'accent sur la nécessité de sanctuariser les crédits de l'Etat pendant toute la durée de l'expérimentation, et de prévoir une évaluation confiée à un organisme qui n'aura pas exercé de responsabilité de gouvernance du dispositif pendant cette période, car le fonds national ne doit pas être juge et partie en la matière.
Notre collègue député Laurent Grandguillaume, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des affaires sociales, a indiqué que plus de 80 % des préconisations du Cese avaient été reprises par voie d'amendement à l'Assemblée nationale.
Les propositions du Cese Les publics et leur statut
- être inscrites sur les listes de demandeurs d'emploi depuis plus d'un an ; - avoir épuisé leurs droits à une indemnisation au régime d'assurance chômage ou ne pas avoir suffisamment cotisé pour bénéficier d'un tel droit. Les comités locaux conserveront une marge d'appréciation pour examiner des situations proches de la limite.
Répondre aux besoins d'accompagnement et de formation des personnes
Etre vigilant sur les activités développées par les entreprises conventionnées
Choisir des territoires d'expérimentation
Assurer un pilotage de qualité pour l'expérimentation
- de valider les comités locaux en fonction du contenu et du plan de financement de l'expérimentation de chaque territoire ; - de gérer les fonds d'Etat consacrés à l'expérimentation.
Préciser les modalités de financement de l'expérimentation
Les régions réserveront des crédits fléchés à l'accompagnement et à la formation des personnes recrutées. Articuler le dispositif avec l'insertion par l'activité économique
Conditionner l'élargissement du dispositif à une évaluation rigoureuse
Source : Cese |
* 20 Le dernier alinéa de cet article dispose que « dans les conditions prévues par la loi, le président d'une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d'Etat, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par l'un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s'y oppose ».