B. FACE À CE DÉFI, UN BUDGET « USUEL »

1. La mise en oeuvre du plan de lutte anti-terroriste et du plan « migrants »

Tout d'abord, les forces de police et de gendarmerie bénéficieront de la majorité des moyens supplémentaires annoncés par le Premier ministre le 21 janvier 2015 dans le cadre du plan de lutte anti-terroriste (PLAT).

Le ministère de l'intérieur doit bénéficier entre 2015 et 2017 de 1 400 créations d'emplois additionnelles , dont 1 100 au sein des services de renseignement, ainsi que de 233 millions d'euros supplémentaires pour les dépenses d'investissement et de fonctionnement , pour un montant total de 340 millions d'euros entre 2015 et 2017.

Pour les seuls programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », 945 créations d'emplois et 126 millions d'euros de crédits de fonctionnement et d'investissement sont prévus pour 2015 et 2016.

État de mise en oeuvre du PLAT au sein des deux programmes

(en ETP et millions d'euros)

2015

2016

Total

Créations d'emplois

500

445

945

Dépenses de personnel

25,8

36,1

61,9

Crédits de fonctionnement et investissement

84,5

47,6

132,1

Note : les montants indiqués en 2015 correspondent aux crédits ouverts par le décret n° 2015-402 du 9 avril 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La mise en oeuvre du PLAT explique l'essentiel de l'écart entre les crédits initialement demandés et la trajectoire pluriannuelle définie dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques (LPFP).

Écart entre la LPFP et les crédits de paiement demandés dans le PLF 2016

(en millions d'euros)

LPFP

PLF 2016

Écart

Police nationale

Dépenses de personnel HCAS

5 847,5

5 878,2

30,7

Autres dépenses

965,2

981,7

16,5

Gendarmerie nationale

Dépenses de personnel HCAS

3 710,7

3 726,4

15,7

Autres dépenses

1 220,5

1 225,7

5,2

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses du ministère de l'intérieur au questionnaire)

Une partie de l'écart constatée sur les dépenses de personnel peut toutefois être expliquée par des mesures catégorielles non prévues par la LPFP. Il s'agit principalement de la revalorisation de l'indemnité journalière d'absence temporaire des forces mobiles (8,5 millions d'euros) et du rattrapage du nouvel espace statutaire concernant les catégories B de la fonction publique (7,3 millions d'euros).

Au total, une hausse de 0,8 % des crédits de paiement était ainsi prévue en 2016 pour les deux programmes.

Évolution des autorisations d'engagement et des crédits de paiement
des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale »

(en millions d'euros)

Action

LFI 2015

PLF 2016

Variation

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Police nationale

01 - Ordre public et protection de la souveraineté

1 145

1 145

1 152

1 152

0,6 %

0,6 %

02 - Sécurité et paix publiques

3 092

3 092

2 999

2 999

- 3 %

- 3 %

03 - Sécurité routière

501

501

461

461

- 8,1 %

- 8,1 %

04 - Police des étrangers et sûreté des transports internationaux

650

650

727

727

11,9 %

11,9 %

05 - Missions de police judiciaire et concours à la justice

2 463

2 463

2 514

2 514

2,1 %

2,1 %

06 - Commandement, ressources humaines et logistique

1 805

1 839

1 916

1 919

6,2 %

4,3 %

Sous-total

9 656

9 690

9 770

9 772

1,2 %

0,9 %

Gendarmerie nationale

01 - Ordre et sécurité publics

3 192

3 192

3 145

3 145

- 1,4 %

- 1,4 %

02 - Sécurité routière

767

767

745

745

- 3 %

- 3 %

03 - Missions de police judiciaire et concours à la justice

1 779

1 779

1 896

1 896

6,6 %

6,6 %

04 - Commandement, ressources humaines et logistique

2 180

2 163

2 350

2 202

7,8 %

1,8 %

05 - Exercice des missions militaires

157

157

133

133

- 15 %

- 15 %

Sous-total

8 074

8 058

8 270

8 122

2,4 %

0,8 %

Total

17 730

17 748

18 040

17 894

1,7 %

0,8 %

Source : commission des finances (d'après les documents budgétaires)

Compte tenu de l'évolution de la situation migratoire en Europe, la mise en oeuvre d'un plan « migrants » a également été annoncée par le Premier ministre le 16 septembre 2015.

Pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », ce plan doit se traduire par la création de 900 emplois supplémentaires en 2016, dont 190 pour la préfecture de police de Paris, 300 pour les CRS, 40 pour la direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) et 370 pour les gendarmes mobiles.

Afin de financer ces créations d'emplois, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du rapporteur spécial, l'amendement n° 228 du Gouvernement, qui prévoit un abondement supplémentaire de 42,5 millions d'euros pour les deux programmes :

- le programme 176 « Police nationale » bénéficie de 22,6 millions d'euros en AE et en CP, dont 16 millions d'euros en titre 2 ;

- le programme 152 « Gendarmerie nationale » bénéficie de 19,9 millions d'euros en AE et en CP, dont 12,7 millions d'euros en titre 2.

2. Une hausse des crédits de 0,9 % loin d'être exceptionnelle

Au cours d'une seconde délibération, l'Assemblée nationale a toutefois adopté, avec l'avis favorable de la rapporteure générale, l'amendement n° 18 du Gouvernement, qui prévoit une baisse de 20 millions d'euros des crédits des deux programmes afin de contribuer au respect de la norme de dépenses en valeur de l'État :

- la baisse s'élève à 12,67 millions d'euros en AE et CP pour le programme 176 « Police nationale » (dont 4,67 millions d'euros en titre 2) ;

- la baisse s'élève à 6,85 millions d'euros en AE et CP pour le programme 152 « Gendarmerie nationale » (baisse de 7 millions d'euros hors titre 2 et hausse de 150 000 euros des dépenses de personnel au titre du protocole relatif à l'avenir de la fonction publique).

Au total, la hausse des crédits demandés pour 2016 s'élève à 0,9 % pour les deux programmes , contre 0,8 % avant adoption des deux amendements.

Évolution des crédits de paiement des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

2015 (LFI)

2016 (initial)

2016 (après amendement plan "migrants")

2016 (après la seconde délibération)

Dépenses de personnel

15 567

15 682

15 710

15 705

Dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention

2 181

2 212

2 226

2 211

Dépenses de personnel / Total des dépenses

87,7 %

87,6 %

87,6 %

87,7 %

Total des dépenses

17 748

17 894

17 936

17 916

Variation par rapport à la LFI 2015

0,8 %

1,1 %

0,9 %

Note de lecture : les données de la colonne « 2016 » prennent en compte l'amendement n° II-228 adopté par l'Assemblée nationale

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette hausse modérée ne constitue pas un effort particulièrement notable, en dépit du caractère doublement exceptionnel de la situation .

À titre de comparaison, la hausse des crédits de paiement en exécution était de 3,5 % en 2009, de 2,6 % en 2011 et de 2 % en 2013 , alors même que ces exercices n'ont pas été marqués par un renforcement particulier du niveau de la menace.

Par ailleurs, cette hausse modérée des crédits demandés masque une véritable « paupérisation » des forces de police et de gendarmerie.

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