QUELQUES MESURES DÉJÀ CONNUES

Le livre vert de la Commission européenne identifie les chantiers prioritaires dans les mois à venir :

« - élaborer des propositions pour favoriser une titrisation de haute qualité afin de libérer suffisamment d'espace dans le bilan des banques pour qu'elles puissent octroyer de nouveaux prêts ;

« - réexaminer la directive ?prospectus? afin que les entreprises, en particulier les petites entreprises, puissent plus facilement lever des fonds et trouver des investisseurs à l'étranger ;

« - lancer les travaux visant à améliorer la disponibilité de l'information sur la solvabilité des PME, afin que les investisseurs puissent investir plus aisément dans celles-ci ;

« - coopérer avec le secteur pour mettre en place un régime paneuropéen de placement privé afin d'encourager l'investissement direct dans les petites entreprises ;

« - soutenir le recours aux nouveaux fonds européens d'investissement à long terme pour canaliser l'investissement vers les infrastructures et d'autres projets à long terme ».

À ce jour, seuls les deux premiers points ont fait l'objet d'un début de mise en oeuvre puisque la Commission européenne a lancé deux consultations concomitamment à la publication du livre vert.

Prochainement et peut-être dès septembre 2015, la Commission européenne publiera un plan d'action pour l'union des marchés de capitaux qui précisera la feuille de route qu'elle entend suivre au cours des prochains mois.

Il semble d'ores et déjà acté que deux propositions législatives, l'une sur la titrisation, l'autre sur la modification de la directive « Prospectus » seront rendues publiques d'ici la fin de l'année.

La titrisation est une technique financière qui permet de transformer des prêts accordés par des banques en des titres financiers qui peuvent être vendus et échangés sur les marchés financiers. Cette technique a notamment été utilisée pour vendre des parts de prêts subprime et a permis une diffusion au niveau mondial du risque associé à ces prêts. C'est pourquoi les nouvelles réglementations bancaires ont considérablement durci les conditions dans lesquelles les banques peuvent réaliser des opérations de titrisation. Le marché de la titrisation s'est donc significativement réduit depuis la crise 13 ( * ) .

Or la titrisation permet d'alléger les bilans bancaires (les prêts titrisés « sortent » du bilan de la banque). Ainsi, pour un niveau de fonds propres identique, une banque pourra libérer de nouvelles marges de manoeuvre financière pour financer l'économie.

La relance de la titrisation, dans des conditions de sécurité qui ne permettent pas la diffusion de risques non ou mal identifiés, serait donc de nature à aider les banques à prêter plus largement aux entreprises et aux ménages. Cet axe de réforme a reçu le soutien de la Banque centrale européenne et des régulateurs ( cf. encadré). Des travaux internationaux sont également en cours. À terme, les autorités publiques souhaitent définir les critères d'une titrisation dite « STS » (simple, transparente et standardisée) qui offrirait un haut niveau de protection aux investisseurs.

Extrait du compte-rendu de la réunion de la commission des finances
du 14 mai 2014

Audition conjointe sur le thème « Stabilité financière : a-t-on progressé depuis 2008 ? »

M. Gérard Rameix, président de l'Autorité des marchés financiers . - Nous avons adopté une régulation bancaire plus stricte : il nous faut donc ouvrir des portes. C'est pourquoi je ne partage pas l'inquiétude exprimée par l'un d'entre vous à propos de la titrisation. Je pense que la titrisation des subprimes a été un travail de fraudeurs ! L'outil, en lui-même, n'est pas en cause. Ce n'est pas parce qu'un conducteur sous l'emprise de l'alcool est entré dans un arbre qu'il ne faut plus utiliser la voiture ! [...]

Une titrisation honnêtement réalisée et professionnellement présentée a son utilité économique !

C'est un des problèmes les plus faciles à résoudre, parmi les questions que nous avons traitées aujourd'hui. Si un produit frelaté obtient une note triple A, c'est catastrophique, mais une banque sérieuse - il y en a - peut offrir un véhicule avec des créances sérieuses et les présenter sérieusement ! Le seul inconvénient réside dans le fait que c'est plus cher que le bon vieux crédit bancaire, l'intermédiation bancaire étant relativement bon marché en termes de marges par rapport à la titrisation, qui est plus compliquée. Cela mis à part, il n'y a pas de risques énormes en tant que tel.

Ce qui a été catastrophique dans le cas des subprimes , c'est le fait que des banques allemandes ou des sociétés de gestion françaises ont acheté du papier issu d'une titrisation au carré, voire au cube. À la fin, elles pensaient quasiment acheter une obligation. Or elles achetaient un papier que plus personne, au bout du compte, pas mêmes des banquiers très sophistiqués, ne pouvait évaluer ! Nous avons réalisé des titrisations à la française à la Commission des opérations de bourse (COB) lorsque j'ai débuté comme directeur général ; nous en avons fait à l'AMF : nous n'avons jamais eu le moindre problème !

Le livre vert estime que « si le niveau des titrisations de prêts aux PME pouvait regagner - en toute sécurité - ne serait-ce que la moitié du terrain perdu par rapport à 2007, cela pourrait représenter quelque 20 milliards d'euros de financement supplémentaire ».

La directive « Prospectus » encadre l'information délivrée aux investisseurs lors de l'émission de titres par des sociétés cotées. L'établissement du prospectus est coûteux car il nécessite un important travail comptable et juridique.

À cet égard, les règles actuelles sont souvent considérées comme dissuasives pour les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire. La consultation de la Commission européenne vise à donc à explorer des pistes afin d'alléger les contraintes du prospectus afin d'attirer ce type d'entreprises sur les marchés, que ce soit pour des émissions d'actions ou d'obligations.

Il est cependant normal qu'un niveau minimal de contraintes soit conservé, ce qui signifie que ce sont surtout les entreprises de taille intermédiaire ou bien les plus grandes des PME qui pourront supporter les coûts fixes liés à la publication d'un prospectus.

Votre rapporteur souhaite enfin que la Commission européenne prenne en compte les nouveaux modes de financement des entreprises, en particulier le financement participatif pour lequel une réglementation européenne uniforme sera la bienvenue.


* 13 En 2014, le marché de la titrisation a représenté 216 milliards d'euros, contre 594 milliards d'euros en 2007 (source : livre vert de la Commission européenne).

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