EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er (art. L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales) - Modalités de composition de l'organe délibérant des communautés de communes et d'agglomération par accord des conseils municipaux
L'article 1 er a pour objet de réintroduire la faculté de composer l'organe délibérant des communautés de communes et d'agglomération par accord entre les communes concernées à la majorité qualifiée des deux tiers des conseils municipaux intéressés représentant la moitié de la population totale ou l'inverse, dans des limites cohérentes avec la jurisprudence constitutionnelle.
1. Le resserrement du dispositif opéré par le Sénat en première lecture
Par l'adoption d'amendements de votre rapporteur et de l'auteur de la proposition de loi, notre collègue Alain Richard, destinés à renforcer l'encadrement de l'accord local, l'article 1 er a été modifié par votre commission des lois sur trois points pour :
- exclure de l'attribution autorisée d'un siège supplémentaire par rapport à l'effectif qui résulterait de l'application de la proportionnelle démographique les communes ayant bénéficié de la garantie du siège de droit pour toute commune ;
- attribuer à ces communes un siège supplémentaire au cas où leur représentation serait inférieure de plus d'un cinquième par rapport à la proportionnelle démographique ;
- apprécier la sous-représentation d'une commune par sa part dans la population totale de l'intercommunalité.
En séance, outre des amendements rédactionnels de nos collègues Jacqueline Gourault et Charles Guené, le texte de l'article 1 er a été modifié, à l'initiative de notre collègue Alain Joyandet, pour mieux assurer sa lisibilité en définissant l'écart permis par le « tunnel » de 20 % autorisé par la jurisprudence constitutionnelle.
2. Un objectif prolongé par l'Assemblée nationale
Ce travail a été poursuivi et complété à l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des lois et de son rapporteur.
a) Les écarts de représentation autorisés
Au terme de ses travaux, les mécanismes de l'accord local autoriseraient un écart à la limite des 20 % dans deux cas précisément déterminés :
(1) en premier lieu, lorsque la répartition des sièges par application des principes fixés par l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales, notamment l'attribution d'un siège au moins à chaque commune et l'interdiction pour l'une d'entre elles de détenir plus de la moitié des sièges, conduirait à un écart de représentation d'un commune supérieur à 20 % de la moyenne.
Cette dérogation, cependant, ne serait possible que si l'accord au pire maintenait ou, au mieux, réduisait cet écart.
Le rapporteur Olivier Dussopt motive cet assouplissement par la jurisprudence du Conseil constitutionnel « qui justifie des tempéraments à la règle du « tunnel » de plus ou moins 20 % » par une amélioration de la « situation antérieure caractérisée par des écarts encore plus importants » 4 ( * ) .
Le Conseil a ainsi jugé à l'occasion d'une réforme de l'élection sénatoriale que si la nouvelle répartition des sièges de sénateurs élus dans les départements telle qu'elle résultait de la loi soumise à son examen 5 ( * ) maintenait « certaines disparités démographiques, les modifications qui résultent de la loi déférée n'en réduisent pas moins sensiblement les inégalités de représentation antérieures 6 ( * ) ».
Cette jurisprudence fut ensuite appliquée à la répartition des sièges de députés opérée par l'ordonnance n° 2009-935 du 29 juillet 2009 7 ( * ) ;
(2) en second lieu, lorsque par application de la représentation proportionnelle à la population, une commune obtiendrait un siège de conseiller communautaire, elle pourrait en obtenir un second en vertu de l'accord, « afin de favoriser une représentation plurielle et paritaire de chacune des communes au sein de l'organe délibérant » 8 ( * ) .
Ainsi que le précise le rapporteur de l'Assemblée nationale, ce tempérament lui a été suggéré par notre collègue Alain Richard 9 ( * ) . Il s'agit là de la mise en oeuvre de tempéraments à l'écart de représentation autorisés par le Conseil constitutionnel pour « assurer le fonctionnement normal d'une assemblée délibérante locale 10 ( * ) ». Cet objectif s'inscrit dans le cadre du principe constitutionnel de libre administration des collectivités.
b) Le renforcement des modalités d'adoption de l'accord local
À l'initiative de son rapporteur, l'Assemblée nationale a renforcé la condition de majorité exigée de l'adoption entre les communes concernées d'un accord pour la répartition des sièges au sein du conseil communautaire : les deux tiers des conseils municipaux représentant la moitié de la population totale ou l'inverse.
Dorénavant, cette majorité devrait comprendre le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse, lorsque celle-ci est supérieure au quart de la population totale.
Il s'agit de tenir compte de la composition de l'intercommunalité et de la place qu'y occupe la commune la plus peuplée du périmètre.
Il convient de rappeler que la condition tenant à celle-ci dans la constitution de la majorité est déjà très présente dans le droit en vigueur, à commencer pour la création d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ( cf . article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales).
3. L'encadrement analogue de la répartition des sièges supplémentaires
Par l'adoption d'un amendement, en commission, de son rapporteur, l'Assemblée nationale a étendu les principes retenus pour encadrer l'accord local à la faculté, aujourd'hui offerte aux communes, hors la métropole d'Aix-Marseille-Provence, de créer et répartir un volant de sièges au plus égal à 10 % du nombre total de sièges résultant de l'application des règles légales. Pour les communautés de communes et d'agglomération, ce dispositif est ouvert aux communes qui n'auraient pas conclu d'accord local. Cette décision est prise à la majorité qualifiée des deux tiers/moitié.
Dans ce cadre, une commune membre d'une communauté urbaine ou d'une métropole, peut se voir attribuer un nombre de sièges supérieur à la moitié des sièges de l'organe délibérant.
Aux termes de l'article 1 er , la répartition des sièges supplémentaires serait soumise aux mêmes règles que celles retenues pour encadrer l'accord local en ce qui concerne les écarts de représentation à la moyenne et le renforcement de la condition de majorité.
Les modifications et compléments votés par les députés répondent à l'objectif assigné à la proposition de loi : offrir aux communes des assouplissements pour la répartition des sièges communautaires dans un cadre sécurisé.
Aussi, votre commission a-t-elle adopté l'article 1 er sans modification .
Article 1er bis (nouveau) (art. L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales) - Modalités de désignation des conseillers communautaires entre deux renouvellements des conseils municipaux en cas d'annulation de la composition d'un organe délibérant d'un EPCI à fiscalité propre
L'article 1 er bis résulte de l'adoption, par la commission des lois de l'Assemblée nationale, d'un amendement de son rapporteur.
Il vise à compléter l'article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales qui régit les modalités de composition d'un organe communautaire entre deux renouvellements généraux des conseils municipaux en cas de création d'un EPCI à fiscalité propre, de fusion d'établissements, d'extension du périmètre intercommunal, pour y intégrer expressément l'hypothèse de l'annulation par le juge administratif de la répartition des sièges au sein du conseil communautaire.
Les règles en vigueur sont les suivantes.
Modalités de composition d'un organe communautaire entre deux renouvellements généraux des conseils municipaux Dans les communes de moins de 1 000 habitants dont le conseil municipal est élu au scrutin majoritaire, les conseillers communautaires sont désignés dans l'ordre du tableau de la municipalité. En revanche, dans les communes de 1 000 habitants et plus dont le conseil municipal est élu au scrutin proportionnel de liste : |
- si le nombre de sièges attribués à la commune est supérieur ou égal au nombre de conseillers communautaires élus à l'occasion du précédent renouvellement général du conseil municipal, les conseillers communautaires précédemment élus font partie du nouvel organe délibérant ; le cas échéant, les sièges supplémentaires sont pourvus par élection à la proportionnelle par le conseil municipal parmi ses membres au scrutin de liste à un tour, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation, chaque liste étant composée alternativement d'un candidat de chaque sexe et présentant au moins deux noms de plus que le nombre de sièges à pourvoir ; |
- si le nombre de sièges attribués à la commune est inférieur au nombre de conseillers communautaires élus lors des dernières élections municipales, les membres du nouvel organe délibérant sont élus à la proportionnelle par le conseil municipal parmi les conseillers communautaires sortants au scrutin de liste à un tour, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. Si le nombre de candidats figurant sur une liste est inférieur au nombre de sièges qui lui reviennent, le ou les sièges non pourvus sont attribués à la ou aux plus fortes moyennes suivantes. |
En séance, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement destiné à assouplir la constitution des listes de conseillers municipaux pour pourvoir les sièges supplémentaires attribués à une commune par rapport au nombre qu'elle détenait lors du dernier renouvellement général des conseils municipaux.
Désormais, les communes auraient la possibilité de constituer des listes incomplètes. En effet, comme le souligne l'exposé sommaire de l'amendement, « dans certains cas, le rapport entre le nombre de sièges supplémentaires à pourvoir et le nombre de conseil(ler)s municipaux non titulaires d'un mandat communautaire, dans le respect de la parité des listes, ne permet pas, compte tenu des différentes sensibilités politiques au sein du conseil municipal issues des élections, de constituer des listes complètes » 11 ( * ) .
En conséquence, lorsque le nombre de candidats figurant sur une liste incomplète serait inférieur au nombre de sièges qui lui reviennent, le ou les sièges non pourvus seraient attribués à la liste qui aura obtenu la plus forte moyenne suivante comme l'article L. 5211-6-2 le prévoit déjà au cas où le nombre de sièges attribués à la commune est inférieur au nombre de conseillers communautaires élus lors des dernières élections municipales.
La novation proposée permettra une meilleure représentation du pluralisme du conseil municipal au sein de l'assemblée communautaire en permettant à tous de constituer une liste, quand bien même le nombre de candidats potentiels serait inférieur au nombre de sièges à pourvoir.
C'est pourquoi votre commission a adopté l'article 1 er bis ( nouveau ) sans modification .
Article 1er ter (nouveau) (art. L. 5216-4-1 du code général des collectivités territoriales) - Coordination
Introduit par un amendement du rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Olivier Dussopt, l'article 1 er ter procède aux coordinations résultant de la réécriture du I de l'article L. 5211-6-1 au sein de l'article L. 5216-4-1 du code général des collectivités territoriales qui régit les indemnités maximales pouvant être versées aux conseillers communautaires dans les communautés d'agglomération dont la population est égale ou supérieure à 100 000 habitants.
Votre commission a adopté l'article 1 er ter ( nouveau ) sans modification .
Article 2 - Droit d'option temporaire
L'article 2 vise à permettre aux intercommunalités touchées par la censure de l'accord local résultant de la décision du Conseil constitutionnel, d'y recourir dans sa version rénovée par le présent texte pendant une période de six mois à compter de sa promulgation.
Le Sénat en avait adopté le principe après avoir modifié la rédaction de l'article 2, sur la proposition de son rapporteur, afin de clarifier l'application de la déclaration d'inconstitutionnalité, laquelle n'est pas applicable aux organes communautaires dont la composition ne serait pas l'objet d'un contentieux ou dont aucun conseil municipal serait partiellement ou intégralement renouvelé.
Suivant son rapporteur, la commission des lois de l'Assemblée nationale a complété le dispositif ouvert par l'article 2. La rédaction alors adoptée a été clarifiée par l'adoption, en séance, d'un amendement du Gouvernement. Elle comporte deux séries de dispositions :
- en cas de renouvellement intégral ou partiel du conseil municipal d'une commune membre d'un communauté de communes ou d'agglomération dont l'organe délibérant a fait l'objet d'un accord local avant le 20 juin 2014, il serait procédé à une nouvelle détermination du nombre et de la répartition des sièges communautaires dans un délai de deux mois à compter de l'événement rendant nécessaire le renouvellement du conseil municipal. Il s'agit, ce faisant, de fixer la nouvelle répartition et le nombre de conseillers communautaires à élire avant le début des opérations électorales, lesquelles doivent être organisées dans les trois mois de l'annulation définitive en application de l'article L. 251 du code électoral ;
- les dispositions résultant de l'article 1 er bis permettant la constitution de listes incomplètes pour pourvoir les sièges supplémentaires attribués à une commune seraient applicables.
Par ailleurs, la référence aux chiffres des populations légales en vigueur a été supprimée : elle figure en effet à l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales.
Les précisions apportées par l'Assemblée nationale complètent utilement les dispositions offertes par l'article 2.
Aussi votre commission l'a-t-elle adopté sans modification .
Intitulé de la proposition de loi
L'intitulé de la proposition de loi initiale qui visait expressément les communautés de communes et d'agglomération a été modifié en conséquence de l'insertion, à l'article 1 er , des modifications au VI de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales qui vise toutes les catégories d'EPCI à fiscalité propre, y compris les communautés urbaines et les métropoles.
Votre commission a adopté l'intitulé de la proposition de loi sans modification .
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Votre commission a adopté la proposition de loi sans modification
* 4 Cf. rapport n° 2439 AN (XIV ème législature) précité.
* 5 Cf. loi n° 2003-697 du 30 juillet 2003 portant réforme de l'élection des sénateurs.
* 6 Cf. décision n° 2003-475 DC du 24 juillet 2003.
* 7 Cf. décision n° 2010-602 DC du 18 février 2010 sur la loi ratifiant l'ordonnance.
* 8 Cf. rapport n° 2439 AN (XIV ème législature) précité.
* 9 Cf. rapport n° 2439 AN (XIV ème législature) précité.
* 10 Cf. décision n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010.
* 11 Cf. amendement n° 5 rectifié.