IV. LE PROGRAMME 218 : CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES
A. UN PROGRAMME TRANSVERSAL AU PÉRIMÈTRE ÉLARGI
Dans le cadre de la simplification de la maquette budgétaire, le programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » est fusionné avec l'ancien programme 221 « Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État », ces deux programmes ayant en commun une forte dimension transversale et le cas échéant interministérielle .
Placé sous la responsabilité du secrétaire général des ministères économiques et financiers, le programme 218 est dorénavant regroupé en quatre actions :
- l'action 1 « État-major et politiques transversales » regroupe notamment les crédits des cabinets ministériels, de certains services du secrétariat général, de la direction des affaires juridiques (DAJ) ou encore du service à compétence nationale TRACFIN ;
- l'action 2 « expertise, audit, évaluation et contrôle » regroupe notamment les crédits de l'inspection générale des finances (IGF), du contrôle général économique et financier (CGEFI), et de structures de régulation et de contrôle tels que l'autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), l'observatoire des jeux (OdJ) et le conseil de normalisation des comptes publics (CNoCP) ;
- l'action 3 « prestations d'appui et de support » regroupe notamment les crédits du secrétariat général liés aux fonctions support et logistiques, l'institut de formation continue des ministères (IGPDE) ou encore le service commun des laboratoires (SCL), qui intervient principalement pour la DGDDI et la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) ;
- l'action 4 « pilotage des finances publiques et projets interministériels » regroupe les crédits de la direction du budget (DB), de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), du service des achats de l'État (SAE), de l'agence pour l'information financière de l'État (AIFE) et de l'opérateur national de paye (ONP).
B. L'IMPACT MAJEUR DE L'ARRÊT DE L'OPÉRATEUR NATIONAL DE PAYE
Les crédits demandés pour le programme 218 au titre de l'année 2015 s'élèvent à environ 1,1 milliard d'euros en AE et en CP soit, à périmètre constant, une baisse de 0,3 % en AE (3 millions d'euros) et surtout une baisse de 3,7 % (40 millions d'euros) en CP .
Répartition par titre des crédits du
programme 218
« Conduite et pilotage des politiques
économiques et financières »
(en euros)
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
|||||
LFI 2014 |
PLF 2015 |
var. |
LFI 2014 |
PLF 2015 |
var. |
|
Titre 2 :
|
525 976 004 |
511 148 707 |
-2,82% |
525 976 004 |
511 148 707 |
-2,82% |
Autres dépenses : |
580 136 912 |
591 749 873 |
2,00% |
581 069 916 |
555 409 158 |
-4,42% |
Titre 3 :
|
475 780 842 |
515 909 873 |
8,43% |
482 042 795 |
478 799 158 |
-0,67% |
Titre 5 :
|
97 536 070 |
59 980 000 |
-38,50% |
97 207 121 |
60 750 000 |
-37,50% |
Titre 6 :
|
6 510 000 |
15 250 000 |
134,25% |
1 510 000 |
15 250 000 |
909,93% |
Titre 7 :
|
310 000 |
610 000 |
96,77% |
310 000 |
610 000 |
96,77% |
Total P. 218 |
1 106 112 916 |
1 102 898 580 |
-0,29% |
1 107 045 920 |
1 066 557 865 |
-3,66% |
Répartition par action des crédits du
programme 218
« Conduite et pilotage des politiques
économiques et financières »
(en euros)
Autorisations d'engagement |
|||
LFI 2014 |
PLF 2015 |
||
1 - État-major et politiques transversales |
380 731 149 |
404 396 088 |
6,22% |
2 - Expertise, audit, évaluation et contrôle |
75 028 338 |
77 654 023 |
3,50% |
5 - Prestations d'appui et de support |
432 884 312 |
446 488 285 |
3,14% |
7 - Pilotage des finances publiques et projets interministériels |
217 469 117 |
174 360 184 |
-19,82% |
Total pour le programme 218 |
1 106 112 916 |
1 102 898 580 |
-0,29% |
Crédits de paiement |
|||
LFI 2014 |
PLF 2015 |
||
1 - État-major, médiation et politiques transversales |
380 089 585 |
404 396 088 |
6,39% |
2 - Expertise, audit, évaluation et contrôle |
75 766 712 |
74 754 023 |
-1,34% |
5 - Prestations d'appui et de support |
434 689 132 |
408 337 570 |
-6,06% |
7 - Pilotage des finances publiques et projets interministériels |
216 500 491 |
179 070 184 |
-17,29% |
Total pour le programme 218 |
1 107 045 920 |
1 066 557 865 |
-3,66% |
Source : projet annuel de performances, PLF 2015. Hors fonds de concours et attribution de produits.
Le programme est essentiellement marqué par une forte baisse de 38,5 % (en AE) et 37,5 % (en CP) des crédits d'investissement, soit près de 37 millions d'euros. Cette baisse se retrouve dans la diminution de 19,8 % en AE (43 millions d'euros) et 17,3 % en CP (37 millions d'euros) des crédits de l'action 7 « pilotage des finances publiques et projets interministériels ».
Cette baisse brutale tient à la « réorientation » du projet de l'opérateur national de paye (ONP) , annoncée le 10 mars 2014 par le Gouvernement à la suite de la remise du rapport de Jacques Marzin, directeur interministériel des systèmes d'information et de communication (DISIC). Ce projet lancé en 2007 avait pour but de mettre en place un pilotage unifié et centralisé de la paye des 2,5 millions d'agents de l'État (projet SI-Paye), et de proposer un système d'information des ressources humaines (projet SIRH) aux ministères ne souhaitant pas moderniser le leur en vue du raccordement. Comme l'expliquait Jacques Marzin lors de son audition par votre commission des finances le 21 mai 2014 17 ( * ) , le projet s'est cependant heurté à plusieurs obstacles conduisant à l'abandon de son volet SI-Paye 18 ( * ) : « premièrement, la durée du projet : celui-ci devait se terminer en 2016, mais il mais il est apparu qu'il n'aurait pas pu être achevé avant 2023. Or cet horizon 2023 est soumis à des aléas (...). Deuxièmement, le coût : nous avons pour la première fois consolidé l'ensemble des projets - le calculateur et les SIRH. Nous avons pu constater que même en poussant jusqu'à l'horizon 2034, nous arrivions à une rentabilité extrêmement négative, qui s'établit à un milliard d'euros au minimum ».
Si vos rapporteurs spéciaux ne remettent pas en cause la décision d'abandonner le volet SI-Paye de l'ONP compte tenu des difficultés rencontrées, ils s'interrogent toutefois sur le caractère tardif de cette décision - d'autant que les investissements avaient cessé depuis plusieurs mois . Dans leur rapport sur la loi de règlement des comptes de l'année 2013, nos collègues Albéric de Montgolfier et Philippe Dallier, anciens rapporteurs spéciaux, avaient déjà signalé que le taux de consommation des crédits d'investissement était de seulement 62,7 % en 2013 , c'est-à-dire 126 millions d'euros de moins que les 334 millions d'euros prévus en loi de finances initiale.
Surtout, vos rapporteurs spéciaux soulignent que les « économies » réalisées à partir de 2015 sur les crédits d'investissement du programme 218 sont en fait la conséquence d'une perte nette de près de 286 millions d'euros pour l'État, sur la seule période comprise entre 2009 et 2013 , selon les chiffres fournis par Jacques Marzin. Si l'on intègre l'adaptation des huit SIRH ministériels en vue de leur raccordement à l'ONP, le coût total est plus proche du milliard d'euros. Enfin, Le rapport de Jacques Marzin chiffre les économies liées à l'arrêt du projet à 200 millions d'euros pour les quatre années à venir .
Plus généralement, vos rapporteurs spéciaux s'interrogent les choix stratégiques relatifs aux grands chantiers informatiques de l'État : la « réorientation » de l'ONP suit de peu l'arrêt, annoncé le 3 décembre 2013, du logiciel de paye des militaires, Louvois , qualifié de « désastre » par le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian. Quant à Chorus , le système d'information budgétaire, financière et comptable de l'État 19 ( * ) , vos rapporteurs spéciaux ont déjà eu l'occasion, lors de leurs précédents travaux à l'Assemblée nationale 20 ( * ) , d'alerter sur les très importants dérapages financiers du projet. Si le déploiement de Chorus est aujourd'hui terminé, la question du retour sur investissement reste entièrement posée . Il appartient à la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication (DISIC), réorganisée par le décret du 1 er août 2014 et maintenue auprès du Premier ministre, d'améliorer considérablement le pilotage des chantiers informatiques de l'État.
* 17 Audition conjointe de Olivier Bourges, directeur général adjoint à la direction générale des finances publiques (DGFiP), Marie-Anne Lévêque, directrice générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), Jacques Marzin, directeur de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication (DISIC) et de Valérie Metrich-Hecquet, secrétaire générale du ministère de l'agriculture, sur le projet de l'opérateur national de paye, le 21 mai 2014.
* 18 L'élaboration d'un SIRH unifié à destination des ministères volontaires est en revanche maintenue.
* 19 Chorus succède lui-même au progiciel Accord, lancé en 1996 et abandonné en 2009.
* 20 Cf. Assemblée nationale, rapport n° 3644 de la mission d'information relative à la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (MILOLF), fait par Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Thierry Carcenac et Charles de Courson, 12 juillet 2011.