SECONDE PARTIE :
UN ACCORD AÉRIEN AUX STIPULATIONS CONFORMES
AUX POLITIQUES EUROPÉENNE ET FRANÇAISE
L' Accord sur la création d'un espace européen commun entre la Géorgie , d'une part, et l'Union européenne et ses Etats membres, d'autre part, comprend vingt-neuf articles et quatre annexes . Les trois titres abordent successivement les dispositions économiques, la coopération réglementaire et les stipulations institutionnelles.
Ses termes sont conformes au cadre général de négociation établi pour la conclusion des accords de transport dans le cadre de la politique européenne de voisinage.
I. UN PREMIER CADRE FRANCO-GÉORGIEN DE CONCURRENCE ÉQUITABLE EN MATIÈRE DE TRANSPORTS AÉRIENS
Votre rapporteure tient à relever que le texte de l'accord géorgien présente une architecture et des principes traditionnels, en matière de services aériens .
A. LA LIBÉRALISATION DU MARCHÉ AÉRIEN
Conformément à l'objet de tels traités aériens, l'Accord prévoit l'ouverture complète du marché entre l'Union européenne et la Géorgie . Les transporteurs européens sont désormais libres de proposer des services, au départ de toute plateforme européenne, vers tout aéroport en Géorgie (droits dits de troisième et de quatrième libertés ) 26 ( * ) .
S'agissant des droits dits de cinquième liberté , ils relèvent des dispositions transitoires 27 ( * ) qui établissent un lien entre la reprise de l'acquis communautaire par la Géorgie et le degré d'ouverture du marché.
En effet, l'extension des opportunités commerciales à ces vols doit être autorisée par une décision du Comité mixte, en charge de contrôler la mise en oeuvre effective des termes de l'Accord . (Cf. seconde partie).
Ce comité doit, en l'espèce, valider l'achèvement de la reprise de l'acquis communautaire par la Géorgie. Cette autorisation permettra alors aux transporteurs géorgiens d'effectuer des vols via un point intermédiaire 28 ( * ) dans certains Etats tiers ou se poursuivant vers un État tiers, avec la possibilité d'exercer des droits de trafic entre cette escale intermédiaire et la Géorgie, ou au-delà entre la Géorgie et cet État tiers.
Au titre de la libéralisation du marché, l'Accord pose le principe de l'exploitation de ces services aériens sans contrainte, en termes de fréquences, de capacité ou de fixation des tarifs .
Le présent accord comporte toutefois quelques spécificités rédactionnelles, résultat des négociations.
Ainsi, les transporteurs européens bénéficient de droits additionnels par rapport à leurs homologues géorgiens, afin de rééquilibrer l'asymétrie de la taille des marchés. En plus du droit d'exploiter des services via ou en prolongation vers les pays de la zone Euromed, les pays de l'accord EACE et la Suisse 29 ( * ) , seuls les transporteurs européens pourront proposer des services au-delà de la Géorgie vers n'importe quelle destination.
Une autre caractéristique de l'Accord réside dans la possibilité d'une adhésion à l'accord EACE. En effet, le présent Accord constitue une étape dans la mise en oeuvre de la politique européenne de création d'espace aérien commun. Cette perspective d'adhésion revêt une importance tant économique que politique. Cette éventualité n'a toutefois pas encore été abordée lors des réunions informelles du comité mixte. La reprise effective de l'acquis communautaire semble être un préalable à une telle intégration dans l'EACE.
Figure n° 5 : Résumé des libertés de l'air
1) Les libertés reconnues Les libertés de l'air constituent des droits ou privilèges accordés par un État à un ou plusieurs autres États, dans le contexte de services aériens internationaux réguliers. Il s'agit du droit de: - de survoler le territoire de cet Etat sans y atterrir ( Première liberté de l'air, droit de survol). - d'atterrir sur le territoire de cet Etat pour des raisons non commerciales (Deuxième liberté de l'air 30 ( * ) , droit d'escale technique). - de débarquer des passagers, du courrier et des marchandises embarqués sur le territoire de l'Etat dont l'aéronef possède la nationalité ( Troisième liberté). - d'embarquer des passagers , du courrier et des marchandises à destination du territoire de l'Etat dont l'aéronef possède la nationalité ( Quatrième liberté). - d'embarquer des passagers, du courrier et des marchandises à destination du territoire de tout autre Etat contractant et de débarquer des passagers, du courrier et des marchandises en provenance du territoire de tout autre Etat contractant ( Cinquième liberté) 31 ( * ) . 2) Les libertés non reconnues Les libertés non reconnues ont pour objet : - de transporter du trafic entre deux Etats, en passant par l'État dont le transporteur a la nationalité ( Sixième liberté). Cette liberté permet l'installation de hubs 32 ( * ) . - d'effectuer un trafic commercial, pour un transporteur d'un Etat opérant entièrement hors de son territoire (sans escale, ni survol), entre le territoire d'un autre Etat et un pays tiers ( Septième liberté) Ainsi, une compagnie française peut négocier avec une autre compagnie française localisée à Singapour la possibilité d'opérer à partir de Singapour. - de transporter du trafic de cabotage entre deux points situés à l'intérieur du territoire de l'État qui accorde le droit ou privilège au moyen d'un service qui commence ou se termine dans le territoire de l'État dont le transporteur étranger a la nationalité, ou à l'extérieur du territoire de l'État qui accorde le droit ou privilège ( Huitième liberté ou « cabotage consécutif »). - d'offrir un service effectué entièrement à l'intérieur du territoire de cet État ( Neuvième liberté ou « cabotage autonome »). |
Source : Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI)
L'accès au marché des transporteurs aériens est organisé par les articles 3 et 5 de l'Accord. Ceux-ci définissent les conditions d'autorisation 33 ( * ) , de refus et de révocation et de suspension des autorisations d'exploitation des transporteurs aériens .
Cette ouverture de marché s'accompagne d'une libéralisation de l'investissement, prévue à l'article 6 de l'Accord. Elle permet la détention et le contrôle effectif des transporteurs aériens de chaque Partie par des intérêts de l'autre Partie. Cependant, cette opération d'investissement transfrontalier doit être autorisée par le comité mixte afin de renforcer le contrôle de l'origine et de la finalité des investissements.
La portée de la décision préalable du Comité mixte, ainsi prévue avant tout investissement « transfrontalier » est réelle car elle doit être prise par consensus, comme toute autre décision du Comité. En conséquence, chaque Partie dispose d'un droit de véto lui permettant de s'opposer à une opération donnée .
Les dispositions fiscales prévoient, respectivement aux articles 10 et 11, des exemptions en matière de droits de douane et taxes ainsi que les modalités des redevances imposées pour l'usage des aéroports, des infrastructures et des services aéronautiques.
* 26 L'article 2 de l'Accord définit les droits des transporteurs aériens de la manière suivante : « a) Le droit de survoler son territoire sans y atterrir ; b) Le droit d'effectuer sur son territoire des escales non commerciales, c'est-à-dire dans un but autre que l'embarquement ou le débarquement de passagers, de bagages, de fret et/ou de courrier par voie aérienne ; c) Lors de l'exploitation d'un service agréé sur une route spécifiée, le droit d'effectuer des escales sur son territoire afin d'embarquer ou de débarquer des passagers, du fret et/ou du courrier en trafic international, de façon séparée ou combinée. » Le contenu des activités commerciales est décrit à l'article 9 de l'Accord. Celles-ci concernent l'assistance en escale, les ventes, la location et le franchisage de marque.
* 27 Cf. Annexe II.
* 28 Les points intermédiaires prévus à l'accord sont : les pays de la zone Euromed (Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Syrie, Territoires palestiniens, Tunisie et Turquie), les pays de l'accord EACE, le Liechtenstein et la Suisse.
* 29 Cette possibilité est octroyée aux transporteurs géorgiens et européens.
* 30 Adoptées en 1952, les deux premières libertés n'ont pas été ratifiées par la Russie.
* 31 Cette liberté permet de rentabiliser certaines routes, en permettant aux avions de ne pas repartir à vide.
* 32 Selon Larousse, le hub est une « plate-forme aéroportuaire de correspondance permettant aux compagnies aériennes de concentrer leurs avions en un point unique . »
* 33 Ces conditions portent sur la localisation du principal établissement dans le pays (Géorgie ou Etat membre), le maintien d'un contrôle réglementaire effectif à l'égard du transporteur ainsi que la détention financière du transporteur par le pays ou un de ses ressortissants. Aux fins d'une meilleure coopération, l'article 4 pose le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions relatives à la propriété et au contrôle effectif des transporteurs aériens prises par les autorités compétentes des Parties contractantes. Des possibilités de vérification sont néanmoins garanties.