C. LA SUPPRESSION DE L'INFRACTION DE RECOURS À LA PROSTITUTION
Après une longue discussion, votre commission spéciale a décidé de supprimer l'article 16 qui créait une contravention de 5 ème classe à l'encontre des clients des personnes prostituées.
En effet, les témoignages et les points de vue recueillis lors des travaux préparatoires ont convaincu la majorité de ses membres que l'instauration d'une telle infraction aurait probablement des conséquences dommageables pour les conditions de vie des personnes prostituées en accroissant la clandestinité de leur activité, sans pour autant apporter de contribution significative à la lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains.
En outre, ils ont considéré que la mise en oeuvre d'une telle infraction soulèverait de grandes difficultés pratiques pour les forces de l'ordre, alors même que leurs effectifs actuels ne leur permettent pas de lutter de manière satisfaisante contre les réseaux criminels.
Sans méconnaître ces difficultés, votre rapporteure reste toutefois convaincue, comme plusieurs membres de la commission spéciale, que la création de cette incrimination constitue une mesure incontournable qui permettrait, à tout le moins, de peser sur la demande, de poser clairement le caractère violent du recours à la prostitution et ainsi de responsabiliser le client.
Par coordination avec la suppression de l'article 16, votre commission spéciale a également supprimé l'article 17 qui avait pour objet la création d'une peine complémentaire consistant en un stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels.
D. DES MODIFICATIONS DESTINÉES À AMÉLIORER CERTAINS DISPOSITIFS JURIDIQUES
Votre commission spéciale a supprimé l'article 1 er ter A qui créait une procédure spécifique de domiciliation pour les personnes prostituées. Celle-ci était en effet inutile dans la mesure où rien ne s'oppose à ce que les personnes prostituées se domicilient dans le cadre des règles de droit commun fixées par le code de l'action sociale et des familles.
À l'article 1 er ter , la commission spéciale a adopté un amendement présenté conjointement par sa rapporteure et par son président supprimant l'extension, aux personnes prostituées victimes de l'infraction de recours à la prostitution définie par l'article 16, des dispositions permettant de témoigner anonymement. Cette extension est en effet apparue disproportionnée, cette dernière possibilité, dérogatoire de la procédure pénale ordinaire, ne devant s'appliquer qu'à des infractions lourdement punies. En tout état de cause, la suppression de l'infraction de recours à la prostitution par la commission spéciale rendait ces dispositions sans objet. En outre, certaines des dispositions prévues par l'article 1 er ter peuvent déjà, en vertu du droit en vigueur, bénéficier aux personnes prostituées victimes de la traite ou du proxénétisme : il en est ainsi de la possibilité de domiciliation auprès du commissariat ou de la brigade de gendarmerie et de la possibilité de témoigner de manière anonyme. L'amendement précité a donc également pour effet de supprimer ces dispositions.
Votre commission spéciale, à l'initiative de sa rapporteure et de son président, a supprimé l'article 9 bis qui ajoutait les personnes prostituées à la liste des personnes vulnérables, entraînant une aggravation des sanctions en cas de violences, d'agressions sexuelles ou de viols. En effet, elle a considéré que ces faits ne pouvaient pas être considérés par principe plus graves s'ils concernent une personne qui se prostitue.
À l'article 11 , elle a supprimé, à l'initiative de sa rapporteure et de son président, la possibilité pour les associations reconnues d'utilité publique de se porter partie civile sans l'accord des personnes prostituées. Elle a estimé qu'une telle possibilité pouvait, dans certaines hypothèses, s'avérer dangereuse pour celles-ci compte tenu de la violence des réseaux criminels.
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Au cours de sa réunion du mardi 8 juillet 2014, la commission spéciale a adopté l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction issue de ses travaux. |