N° 549
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 mai 2014 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi de Mmes Muguette DINI, Chantal JOUANNO et plusieurs de leurs collègues, modifiant le délai de prescription de l' action publique des agressions sexuelles ,
Par M. Philippe KALTENBACH,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Sueur , président ; MM. Jean-Pierre Michel, Patrice Gélard, Mme Catherine Tasca, M. Bernard Saugey, Mme Esther Benbassa, MM. François Pillet, Yves Détraigne, Mme Éliane Assassi, M. Nicolas Alfonsi, Mlle Sophie Joissains , vice-présidents ; Mme Nicole Bonnefoy, MM. Christian Cointat, Christophe-André Frassa, Mme Virginie Klès , secrétaires ; MM. Alain Anziani, Philippe Bas, Christophe Béchu, François-Noël Buffet, Vincent Capo-Canellas, Luc Carvounas, Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Cécile Cukierman, MM. Michel Delebarre, Félix Desplan, Christian Favier, René Garrec, Mme Jacqueline Gourault, MM. François Grosdidier, Jean-Jacques Hyest, Philippe Kaltenbach, Mme Isabelle Lajoux, MM. Jean-René Lecerf, Jean-Yves Leconte, Antoine Lefèvre, Roger Madec, Jean Louis Masson, Jacques Mézard, Thani Mohamed Soilihi, Hugues Portelli, André Reichardt, Alain Richard, Simon Sutour, Mme Catherine Troendlé, MM. René Vandierendonck, Jean-Pierre Vial, François Zocchetto . |
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Sénat : |
368 et 550 (2013-2014) |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOISRéunie le mercredi 21 mai 2014 sous la présidence de M. Jean-Pierre Sueur , président, la commission a examiné le rapport de M. Philippe Kaltenbach sur la proposition de loi n° 368 (2013-2014) de Mmes Muguette Dini et Chantal Jouanno modifiant le délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles . M. Philippe Kaltenbach, rapporteur, a souligné que si la France s'était dotée d'un dispositif répressif sévère à l'encontre des auteurs de violences sexuelles, seule une part infime de ces violences était portée à la connaissance des autorités ; le nombre de condamnations pour de tels faits n'excède pas 7 000 à 8 000 par an alors que, d'après les études de victimation réalisées par l'INSEE et l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, près de 200 000 personnes seraient, chaque année, victimes de violences sexuelles. A cet égard, les délais de prescription de ces faits, pourtant dérogatoires lorsque la victime est un mineur, peuvent apparaître inadaptés lorsque le traumatisme subi se traduit par une amnésie dissociative , plaçant la victime dans l'impossibilité de dénoncer les faits subis pendant une période parfois très longue. Toutefois, en proposant de faire partir le délai de prescription des viols et agressions sexuelles au jour où la victime est en mesure de révéler les faits, la proposition de loi présente plusieurs difficultés sérieuses. Sa conformité aux principes constitutionnels de légalité des délits et des peines et d'égalité des justiciables devant la loi est incertaine . L'application aux violences sexuelles de la jurisprudence de la Cour de cassation relative aux infractions occultes ou dissimulées, applicable principalement à certains délits financiers, ne paraît, en l'espèce, pas adaptée. Par ailleurs, votre commission des lois a réaffirmé son souhait d'une réforme globale des délais de prescription en matière pénale , dans la suite des propositions formulées en 2007 par nos collègues Jean-Jacques Hyest, Hugues Portelli et Richard Yung 1 ( * ) , prenant mieux en compte la situation des victimes tout en réservant l'imprescriptibilité aux seuls crimes contre l'humanité, en raison de leur particulière gravité. Le débat en séance publique permettra d'approfondir la réflexion sur les conditions dans lesquelles les délais de prescription applicables aux violences sexuelles commises sur des mineurs, d'ores et déjà dérogatoires au droit commun, pourraient être de nouveau augmentés. Au-delà, votre commission appelle de ses voeux une meilleure prise en charge des victimes de violences sexuelles. La commission n'a pas adopté de texte sur la proposition de loi n° 368 (2013-2014) modifiant le délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles. En conséquence, et en application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat. |
* 1 « Pour un droit de la prescription moderne et cohérent », rapport d'information n°338 (2006-2007) de M. Jean-Jacques Hyest, président, et de MM. Hugues Portelli et Richard Yung, rapporteurs, fait au nom de la commission des lois du Sénat, juin 2007, pages 12 et suivantes. Ce rapport peut être consulté à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/r06-338/r06-338.html