LE LANCEMENT DE LA REVUE DE LA QUALITÉ DES ACTIFS BANCAIRES ET DES TESTS DE RÉSISTANCE

Pour lancer son activité de supervision directe des plus grands établissements de la zone euro et s'assurer, dans ce cadre, de la qualité et de la solidité des banques dont elle hérite, la Banque centrale européenne a lancé, en novembre 2013, une revue de la qualité des actifs bancaires ( asset quality review ou AQR ).

D'après la BCE, cet exercice « a trois objectifs principaux : la transparence , à travers une amélioration de la qualité des informations disponibles sur la situation des banques ; l' assainissement , grâce à l'identification et à la mise en oeuvre, le cas échéant, des mesures correctrices nécessaires ; et le renforcement de la confiance , en assurant toutes les parties prenantes que les banques sont fondamentalement solides et crédibles » 8 ( * ) .

Cette évaluation comprendra trois éléments :

- une évaluation prudentielle des risques auxquels sont exposés les établissements , y compris les risques de liquidité, d'effet de levier et de financement ;

- un examen de la qualité des actifs des banques , qui portera notamment sur l'adéquation de la valorisation des actifs et des garanties ainsi que des provisions ;

- un test de résistance visant à examiner la résilience du bilan des banques dans des scénarios de crise.

Soulignons que le champ des banques soumises à cette revue ne recouvre pas celui des banques soumises, ensuite, à la supervision directe de la BCE. Cette dernière a délibérément choisi un champ plus large , afin de procéder à un examen plus général du secteur bancaire européen.

En France, 13 établissements feront l'objet de l'examen de la BCE, y compris les trois acteurs publics que sont La Banque postale, Bpifrance et la Société de financement local (SFIL).

Liste des établissements français soumis à la revue de la qualité des actifs

Banque Centrale de Compensation (LCH Clearnet)

Banque PSA Finance

BNP Paribas

C.R.H. - Caisse de Refinancement de l'Habitat

Groupe BPCE

Groupe Crédit Agricole

Groupe Crédit Mutuel

HSBC France

La Banque Postale

BPI France (Banque Publique d'Investissement)

RCI Banque

Société de Financement Local

Société Générale

Source : Banque centrale européenne

À cet égard, la France se signale dans le paysage européen par la forte concentration de son secteur bancaire : ces 13 établissements représentent environ 95 % des actifs bancaires français et 30 % des actifs bancaires de la zone euro.

La revue sera réalisée par la BCE, avec l'appui des superviseurs nationaux et ses résultats devraient être publiés en novembre de cette année.

En parallèle, l'autorité bancaire européenne (ABE) procède également à des tests de résistance des banques de l'Union européenne : l'ensemble des établissements de l'Union européenne, y compris ceux hors de la zone euro et ne participant pas au MSU, en particulier les établissements britanniques, sont donc inclus dans cet exercice. Pour l'ensemble de l'Union, il concerne 124 établissements, qui représentent au moins 50 % de chaque secteur bancaire national. Les risques étudiés sont le risque de crédit, le risque de marché, le risque souverain, la titrisation et le coût de financement.

En pratique, les critères retenus par l'ABE pour cet exercice sont harmonisés avec ceux de la BCE dans le cadre de l'AQR , notamment en termes de ratios de fonds propres attendus. L'objectif de l'exercice de l'ABE est d'assurer une comparabilité des résultats de l'AQR de la BCE avec les performances des banques des autres États membres.

Au total, l'enjeu de cet exercice d'évaluation et de test de résistance est de réaliser une sorte d' « opération vérité » du secteur bancaire de la zone euro , afin d'assurer, dès le début de son entrée en vigueur, la crédibilité du nouveau superviseur unique. Ainsi, Danièle Nouy a indiqué, dans une interview au journal Financial Times du 7 février 2014 : « nous devons accepter le fait que certaines banques n'ont pas d'avenir. Nous devons en laisser quelques-unes disparaître de manière ordonnée, et pas forcément essayer de les fusionner avec d'autres institutions » 9 ( * ) .

Dès lors, il est nécessaire de prévoir un mécanisme de traitement des établissements dont il apparaîtrait qu'ils ne remplissent pas les critères de solidité fixés par la BCE .

La procédure elle-même restera purement nationale : ainsi, même si la « sonnette d'alarme » sera tirée par la BCE, la décision d'engager un redressement ou un démantèlement de l'établissement reviendra aux autorités nationales. S'agissant du financement des éventuelles recapitalisations nécessaires, le Conseil Ecofin le 15 novembre 2013 a défini une « feuille de route » qui prévoit :

- en premier lieu, un financement privé , y compris le bail-in , c'est-à-dire le renflouement interne par certains créanciers ;

- en deuxième lieu, un soutien public national , en veillant à la compatibilité avec les règles des aides d'Etat ;

- en troisième lieu et en dernier recours, lorsque l'Etat membre n'est pas en mesure de fournir seul le soutien financier nécessaire, une recapitalisation par le Mécanisme européen de stabilité (MES), qui consisterait en un prêt du MES à l'État membre, fléché vers l'institution financière en difficulté , après approbation par le conseil des gouverneurs du MES. Le MES peut être sollicité à cette fin dans la limite de 60 milliards d'euros.

L'instrument de recapitalisation directe de l'établissement par le MES n'est pas encore mis au point, malgré les déclarations répétées du Conseil européen, de l'Eurogroupe et du Conseil Ecofin en ce sens. Pourtant, il apparaît comme la seule solution crédible et globale pour mettre fin au cercle vicieux entre dette bancaire et dette souveraine et pour assurer, en dernier ressort, un financement crédible de la recapitalisation des établissements fragiles de la zone euro à l'issue de la revue de la qualité des actifs. En conséquence, votre rapporteur appelle de ses voeux un accord rapide sur l'instrument de recapitalisation directe, permettant sa mise en oeuvre dès l'automne 2014, en complément des financements privés des financements publics strictement nationaux .


* 8 Communiqué de presse de la BCE du 23 octobre 2013.

* 9 Article du Financial Times du 7 février 2014, « Let weak banks die, says eurozone super-regulator ».

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