Rapport n° 280 (2013-2014) de M. Jean-Claude CARLE , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 15 janvier 2014
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SYNTHÈSE DES TRAVAUX DE LA COMMISSION
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AVANT-PROPOS
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. UNE RÉORGANISATION INSATISFAISANTE DES
RYTHMES SCOLAIRES AU SERVICE D'OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES VAGUES
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II. PRIVILÉGIER LE PRAGMATISME POUR SORTIR
DE L'ORNIÈRE
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I. UNE RÉORGANISATION INSATISFAISANTE DES
RYTHMES SCOLAIRES AU SERVICE D'OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES VAGUES
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EXAMEN DES ARTICLES
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EXAMEN EN COMMISSION
N° 280
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 janvier 2014 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur la proposition de loi de MM. Jean-Claude GAUDIN, Jean-Claude CARLE et plusieurs de leurs collègues , visant à affirmer la liberté de choix des maires quant à l' organisation des rythmes scolaires dans l' enseignement du premier degré ,
Par M. Jean-Claude CARLE,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : Mme Marie-Christine Blandin , présidente ; MM. Jean-Étienne Antoinette, David Assouline, Mme Françoise Cartron, M. Ambroise Dupont, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jacques Legendre, Mmes Colette Mélot, Catherine Morin-Desailly, M. Jean-Pierre Plancade , vice-présidents ; Mme Maryvonne Blondin, M. Louis Duvernois, Mme Claudine Lepage, M. Pierre Martin, Mme Sophie Primas , secrétaires ; MM. Serge Andreoni, Maurice Antiste, Dominique Bailly, Pierre Bordier, Mme Corinne Bouchoux, MM. Jean Boyer, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Claude Domeizel, Mme Marie-Annick Duchêne, MM. Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Vincent Eblé, Mmes Jacqueline Farreyrol, Françoise Férat, MM. Gaston Flosse, Bernard Fournier, André Gattolin, Jean-Claude Gaudin, Mmes Dominique Gillot, Sylvie Goy-Chavent, M. Jean-François Humbert, Mmes Bariza Khiari, Françoise Laborde, M. Pierre Laurent, Mme Françoise Laurent-Perrigot, MM. Jean-Pierre Leleux, Michel Le Scouarnec, Jean-Jacques Lozach, Philippe Madrelle, Jacques-Bernard Magner, Didier Marie, Mme Danielle Michel, MM. Philippe Nachbar, Daniel Percheron, Marcel Rainaud, Michel Savin, Abdourahamane Soilihi, Alex Türk, Hilarion Vendegou, Maurice Vincent . |
Voir le(s) numéro(s) :
Sénat : |
116 et 281 (2013-2014) |
SYNTHÈSE DES TRAVAUX DE LA COMMISSIONRéunie le 15 janvier 2014, sous la présidence de Mme Marie-Christine Blandin (Ecolo-Nord), la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a examiné, sur le rapport de M. Jean-Claude Carle (UMP - Haute-Savoie), la proposition de loi n° 116 (2013-2014) visant à affirmer la liberté de choix des maires quant à l'organisation des rythmes scolaires dans l'enseignement du premier degré. Votre commission n'a pas adopté de texte sur cette proposition de loi. En conséquence, et en application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi. |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Alors que viennent d'être rendues publics les résultats du dernier Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), piloté par l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), il est de notre responsabilité commune de travailler à la modernisation de notre système éducatif au-delà des clivages idéologiques.
Le principe d'une refonte des rythmes scolaires fait l'unanimité, tant les élèves français pâtissent de la conjonction d'une année scolaire très courte et d'une journée scolaire très lourde. Force est pourtant de constater que la réforme engagée par le ministre de l'éducation nationale achoppe malgré ce diagnostic largement partagé par toutes les parties.
La raison de cet enlisement est simple et rejoint des constats anciens. L'éducation nationale fonctionne selon un régime vertical et hiérarchique, qui privilégie la rigidité de la circulaire à la souplesse du contrat. Elle a développé une culture de la défiance à l'égard des initiatives locales qui freine toutes les innovations.
Pour sortir de l'ornière, la présente proposition de loi consacre les maires comme des partenaires éducatifs autonomes et responsables en leur donnant la liberté de choix dans l'organisation du temps scolaire dans le premier degré.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. UNE RÉORGANISATION INSATISFAISANTE DES RYTHMES SCOLAIRES AU SERVICE D'OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES VAGUES
A. DES ÉLÉMENTS DE DIAGNOSTIC PARTAGÉS QUE DEVRAIT REPRENDRE TOUTE RÉFORME
1. La reconnaissance du rôle essentiel des collectivités territoriales
Le ministère de l'Éducation nationale souffre d'être une administration construite pour assurer un service uniforme dans le respect d'une réglementation très extensive et détaillée. Le culte de la circulaire y perdure alors que les systèmes éducatifs les plus performants ont su construire une autre organisation fondée sur le contrat et l'initiative locale.
Cette logique de réglementation, répondant à la tradition centralisatrice de notre pays, tend à transformer l'évaluation en contrôle et à privilégier ainsi le respect formel des textes sur une régulation des pratiques en fonction des besoins et des progressions des élèves.
L'école en tant qu'institution se présente comme un système pyramidal, très hiérarchisé et sans acteurs véritablement autonomes. Le manque criant de concertation avec les collectivités territoriales et l'inutilité de structures comme les conseils départementaux de l'éducation nationale (CDEN) et les conseils académiques de l'éducation nationale (CAEN) sont régulièrement pointés du doigt tant par les experts sociologues de l'éducation que par les élus locaux.
Plutôt que d'impulser des grands projets ministériels imposés par des voies hiérarchiques, il convient de s'appuyer sur les nombreuses initiatives nées aux échelons locaux, dans les établissements et dans les collectivités, pour les évaluer et en tirer des conséquences utiles pour l'ensemble du système éducatif.
Concertation, respect des initiatives locales et évaluation sont les trois piliers qui devraient supporter toute rénovation cohérente et efficace du système éducatif. Un très large accord peut être trouvé sur ce point. C'est un élément de diagnostic partagé, dont la portée est à la fois générale et particulièrement importante pour la mise en place d'une réforme des rythmes scolaires qui ne peut réussir sans l'investissement des communes. C'était déjà, en 2010, le sens des conclusions de votre rapporteur au nom de la mission commune d'information du Sénat sur l'organisation territoriale du système scolaire, présidée par notre ancien collègue Serge Lagauche.
2. La rupture souhaitable avec le paradoxe français en repensant le calendrier scolaire
Votre rapporteur estime qu'un consensus peut être également trouvé pour déplorer le paradoxe français des rythmes scolaires. Les élèves français ont le nombre de jours d'école le plus faible des pays de l'OCDE : 144 jours contre 187 en moyenne. Ils souffrent à la fois d'une année scolaire très courte et d'une journée scolaire très lourde par rapport aux autres enfants des pays développés. Sur 36 semaines de cours, se concentre un volume horaire annuel d'enseignement très important, qui s'élève à 864 heures par an contre 774 heures à 821 heures, en moyenne, selon l'âge des écoliers, au sein des pays de l'organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE).
Pourtant, et c'est là que se noue le paradoxe, l'accumulation de la charge d'enseignement ne parvient pas à garantir de bons résultats scolaires aux élèves français. Les évaluations du programme international de recherche en lecture scolaire ( PIRLS) et du programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) démontrent que la surcharge de l'année scolaire des écoliers français est sous-optimale. Des pays aussi différents que le Japon ou la Finlande conjuguent de meilleures performances avec des calendriers plus étalés et moins denses.
C'est le signe qu'une extrême concentration du temps d'enseignement est inadaptée et préjudiciable aux apprentissages. Ce constat est unanimement partagé, des scientifiques spécialistes des rythmes de l'enfant aux enseignants, en passant par les parents d'élèves.
Pour résoudre le paradoxe français, il faut impérativement agir simultanément sur tous les segments temporels pertinents : la journée, la semaine et l'année.
La question du rythme annuel est cruciale. Il convient de rouvrir le dossier de la durée des vacances scolaires et de leur zonage en tenant compte de l'impact des mesures nouvelles sur les industries touristiques, notamment dans les zones littorales et de montagne. C'est nécessaire pour trouver la bonne articulation entre trois ordres de temporalité distincts : le temps biologique des enfants et des enseignants, le temps économique et social, le temps climatique.
3. Des critiques recevables sur la semaine de quatre jours
Un consensus s'est formé, depuis 2008, sur la nécessité de revoir l'organisation du temps scolaire à l'école primaire, qui n'offrait pas un cadre optimal à l'épanouissement cognitif des enfants.
L'Académie nationale de médecine a souligné dans son rapport sur l'aménagement du temps scolaire et la santé de l'enfant, adopté le 19 janvier 2010, le risque de désynchronisation des enfants dû à la généralisation de la semaine de quatre jours. Précisément, elle s'est inquiétée d'une possible altération du fonctionnement de leur horloge biologique dès lors qu'elle n'est plus en phase avec les facteurs de l'environnement. Cette désynchronisation entraîne fatigue et difficultés de concentration qui nuisent aux apprentissages. L'Académie a nettement critiqué à cet égard le rôle néfaste de la semaine de quatre jours sur la vigilance et les performances des enfants. Les études de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) vont dans le même sens.
L'inspection générale de l'éducation nationale (IGEN) a régulièrement alerté sa tutelle sur les inconvénients pédagogiques de la semaine de quatre jours en raison du resserrement du temps scolaire. Elle évoque une baisse d'attention des enfants, la mise à l'écart de matières périphériques comme l'éducation artistique pour finir les programmes et la disparition du temps de concertation entre enseignants.
Il convient de noter qu'en 2008, le ministre de l'éducation Xavier Darcos n'avait pas imposé la semaine de quatre jours. Son objectif était avant tout de développer l'aide personnalisée et ensuite de libérer le samedi pour les familles. Les conseils d'école conservaient la faculté de répartir l'enseignement sur huit ou neuf demi-journées.
B. UNE RÉFORME EN COURS PARTIELLE ET PÉDAGOGIQUEMENT INEFFICACE
1. Une approche étroite et lacunaire
La réforme du ministre de l'éducation nationale Vincent Peillon constitue une occasion manquée, alors que sous le précédent gouvernement des travaux de grande qualité avaient préparé le terrain. Toutes les réflexions des parties prenantes (parents, enseignants, élus locaux, médecins et psychologues) sur la question des rythmes scolaires ont été synthétisées dans au moins deux rapports récents :
- celui de nos collègues députés Xavier Breton et Yves Durand de décembre 2010 ;
- celui de la conférence nationale sur les rythmes scolaires mise en place par le ministre de l'éducation Luc Chatel, qui date de juillet 2011.
Les deux rapports se rejoignent pour préconiser simultanément :
- l'étalement de la semaine scolaire sur au moins 9 demi-journées ;
- la réduction de la durée de la journée scolaire accompagnée d'une transformation pédagogique ;
- le rééquilibrage de l'année scolaire en redéfinissant les plages de vacances ;
- une action coordonnée sur le premier et sur le second degré en veillant à atténuer les effets de la rupture entre l'école élémentaire et le collège ;
- le renouvellement de la gouvernance territoriale de l'école en renforçant le partenariat entre l'État et les collectivités locales.
L'attention aux conséquences financières de toute rénovation des rythmes et la nécessité d'un dialogue approfondi avec tous les acteurs locaux pour s'adapter aux spécificités de chaque terrain paraissaient aller d'elles-mêmes pour les rapporteurs.
Force est de constater que la réforme des rythmes scolaires mise en place depuis la rentrée 2013 par le Gouvernement ne reprend que très partiellement ces recommandations.
Manque clairement toute réflexion sur l'organisation de l'année scolaire qui est pourtant le complément indispensable d'une redéfinition de la semaine scolaire. Manque également toute perspective de rénovation des rythmes au collège et de lissage de la transition CM2-6 e . La concertation avec les maires a fait défaut et aucune rénovation de la gouvernance territoriale n'est à l'ordre du jour, point sur lequel votre rapporteur reviendra plus avant.
Mais au-delà de son caractère lacunaire, la réforme des rythmes scolaires risque surtout de se révéler inefficace pour améliorer les performances des écoliers, parce qu'il s'agit d'une réforme administrative sans accompagnement pédagogique.
2. Le défaut de réflexion sur les effets pédagogiques
La nécessité de repenser l'organisation des enseignements à l'intérieur de la journée et de la semaine n'a pas été prise en compte. Sans réflexion pédagogique et didactique sur le contenu des enseignements, sur les méthodes d'apprentissage et sur le positionnement des différentes séquences et activités en fonction des rythmes propres aux enfants, la réforme ne peut espérer avoir d'impact positif sur les performances des élèves.
La réforme des rythmes scolaires s'est surtout concentrée non sur le temps scolaire mais sur les activités périscolaires. C'est en soi un contresens qui détourne les efforts de la Nation du coeur des difficultés que rencontre l'école primaire : les carences dans l'enseignement des matières fondamentales, qu'un rapport de 2013 de l'inspection générale de l'éducation nationale, sous la plume du doyen Claus, a encore récemment pointées.
L'accompagnement par les corps d'inspections territorialisés des professeurs des écoles n'est manifestement pas à la hauteur de la transformation des emplois du temps générée par le passage à la semaine de 4,5 jours. Cela vient de l'alourdissement général des tâches administratives dévolues aux cadres de l'éducation nationale qui sont contraints de privilégier le contrôle d'application des textes à la rénovation pédagogique et à l'accompagnement des enseignants. Mais si les professeurs ne font que transposer leurs anciens cours dans la nouvelle organisation, sans qu'ils soient aidés à les adapter, à les optimiser, à les personnaliser en fonction des élèves, il n'existe aucun espoir d'amélioration de notre système éducatif aussi bien en termes de résultats bruts qu'en matière de réduction des inégalités.
Une autre carence pédagogique de la réforme est l'absence de distinction entre l'école maternelle et l'école primaire. Or, les plus jeunes enfants connaissent un développement cognitif et affectif très rapide entre 3 et 6 ans. Les mêmes rythmes scolaires ne peuvent leur être appliqués uniformément, quel que soit leur âge. Des temps de repos et de jeux doivent être aménagés pour éviter toute surcharge et toute fatigue inutiles.
L'application indifférenciée de la réforme selon les cycles est une erreur autant qu'un paradoxe, alors même que le ministre a prétendu dans les débats sur la refondation de l'école conforter le caractère spécifique de l'école maternelle. Les rectifications préconisées par le comité de suivi de la réforme des rythmes scolaires et inscrites dans une récente circulaire sont certes bienvenues mais tardives. Elles témoignent surtout de l'impréparation et du manque d'ambition pédagogique d'une réforme administrative symptomatique de la culture hiérarchique et centralisatrice du ministère de l'éducation nationale.
II. PRIVILÉGIER LE PRAGMATISME POUR SORTIR DE L'ORNIÈRE
A. UNE RÉFORME IMPOSÉE SANS NÉGOCIATION ET SANS FINANCEMENT PÉRENNE
1. Des maires confrontés à des injonctions ministérielles illisibles
a) Un problème général de méthode
S'accorder sur la nécessité d'une réorganisation globale et concertée du temps scolaire n'entraîne aucune obligation de signer un blanc-seing à n'importe quelle réforme, aussi bien intentionnée soit-elle.
Retenir quelques grands axes structurants est relativement facile, mais déterminer des modalités d'application, préciser les marges de manoeuvre et les responsabilités des uns et autres, estimer les coûts et négocier leur partage, définir une méthode de mise en oeuvre, des objectifs précis et des critères d'évaluation sont des tâches la fois beaucoup plus difficiles et beaucoup plus importantes.
La réforme promue par le ministre de l'éducation nationale pèche sur de nombreux points :
- des objectifs à la fois grandioses et flous sans aucun dispositif d'évaluation et sans perspective concrète d'amélioration des résultats des élèves ;
- une méthode autoritaire fondée sur le règlement, la circulaire et des injonctions de l'administration aux élus ;
- des modalités pratiques de mise en oeuvre confuses et changeantes ;
- un manque d'information et de soutien aussi bien pour les maires que pour les familles ;
- un financement inadéquat.
La mise en place de la réforme des rythmes scolaires est quasiment un cas d'école qui illustre parfaitement le mode de fonctionnement pyramidal et rigide du ministère de l'éducation nationale.
Les mesures sont imposées par le décret du 26 janvier 2013 de façon uniforme sur tout le territoire à toutes les communes possédant une école. Cependant, le texte est interprété de façon très diverse par les directeurs académiques des services de l'éducation nationale (DASEN) qui ne suivent pas toujours l'évolution des déclarations du Gouvernement. Le ministre de l'éducation nationale a lui-même oscillé entre des déclarations tranchantes et des concessions modestes, mais sur le terrain, il n'est pas rare de voir certains DASEN ou inspecteurs de circonscription retenir des interprétations très restrictives des textes ou imposer des obligations supplémentaires, par exemple en termes de transmission anticipée des projets éducatifs.
Les maires doivent faire face à des injonctions répétées dans un contexte très mouvant. Ils n'appréhendent que très difficilement les marges de manoeuvre dont ils disposent à propos des possibilités de dérogation, du recours au samedi matin, de l'écriture des projets éducatifs territoriaux, du recrutement des animateurs, du taux d'encadrement des activités périscolaires ou encore les contributions des caisses d'allocations familiales. Des réponses ambiguës, voire contradictoires, leur ont été adressées selon les temps et selon les interlocuteurs. Le défaut d'articulation entre les services sociaux et l'éducation nationale n'a pas contribué pas à clarifier la situation.
Ceci explique que peu de maires se soient engagés dès 2013. Pour l'année scolaire 2013-2014, 3 991 sur 23 000 communes environ disposant d'une école sont passées aux nouveaux rythmes. Cela représente 1,3 million d'élèves, soit 22,2 % de l'effectif total du secteur public. Seules 35 des 150 communes les plus importantes ont choisi d'appliquer la réforme dès 2013.
L'organisation des temps scolaires relève du caractère propre des établissements privés. Il leur est loisible de passer ou non aux nouveaux rythmes ; 6 % seulement l'ont fait cette année d'après le ministère de l'éducation nationale. Il convient de donner aux maires la même latitude pour gérer le temps scolaire dans les écoles publiques que celle dont disposent les écoles privées.
Les réticences de la plupart des maires à l'égard de la réforme ne viennent pas de leur prétendue indifférence au bien-être des élèves. Elles doivent bien plutôt s'interpréter comme une protestation contre le refus du ministère de l'éducation nationale de les traiter comme des partenaires éducatifs responsables et autonomes à part entière. Surtout, elles reflètent d'importantes difficultés matérielles et financières qui ne peuvent être balayées d'un revers de la main.
b) Un exemple de complexité et de confusion : l'allègement du taux d'encadrement des activités périscolaires
Pour contenir les coûts et limiter le recrutement d'animateurs, qui peut être très difficile à réaliser en milieu rural, les maires ont demandé un assouplissement des taux d'encadrement des activités périscolaires imposés par l'article R. 227-16 du code de l'action sociale et des familles. Ils ont obtenu de haute lutte une expérimentation pour trois ans d'allègement des contraintes du droit commun.
Le périmètre de cette expérimentation, inscrite dans le décret n° 2013-707 du 2 août 2013, suscite beaucoup d'interrogations chez les maires. Cet assouplissement concerne-t-il l'ensemble des activités périscolaires ou uniquement les trois heures libérées par la réforme des rythmes scolaires ? La signature d'un PEDT est-elle nécessaire pour en bénéficier ? Comment expliquer aux parents des variations des normes d'encadrement d'activités similaires qui ne diffèrent que par leur classification administrative (extrascolaire, périscolaire, périscolaire libéré par la réforme des rythmes dans le cadre d'un PEDT) ? Que se passera-t-il à l'issue des trois ans d'expérimentation ?
Les réponses apportées par les représentants de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) à la mission commune d'information du Sénat sur les rythmes scolaires, lors de leur audition du 10 décembre 2013, éclairent la construction baroque qui prévaut aujourd'hui.
Le décret du 2 août 2013 précité permet d'abaisser les taux d'encadrement pour les trois heures d'activités périscolaires dégagées par la réforme à un encadrant pour 14 enfants pour les moins de six ans et à un encadrant pour 18 enfants pour les plus de six ans. Selon le droit en vigueur, ces taux allégés ne valent pas pour le reste des activités périscolaires. Cet assouplissement a posé de réelles difficultés d'application, puisque les activités ont vu leur taux d'encadrement varier selon qu'elles se déroulent ou non dans ces trois heures supplémentaires.
Par ailleurs, le Premier ministre a saisi la Cnaf pour réfléchir à l'extension du décret du 2 août 2013 à l'ensemble des activités périscolaires réalisées dans le cadre des projets éducatifs de territoire (PEDT). D'après M. Daniel Lenoir, directeur général de la Cnaf, cette hypothèse impliquerait que les CAF cosignent ces PEDT, car elle tient à sa politique de qualité et de sécurité des activités périscolaires.
Les maires auraient besoin de plus de cohérence et de simplicité : ils ont trop souvent l'impression d'être ballotés entre l'éducation nationale et les CAF et doivent multiplier les discussions, alors qu'on gagnerait à mener une négociation globale.
2. Un financement insuffisant, incertain et transitoire
a) Le dispositif du fonds d'amorçage
D'après l'enquête réalisée à l'automne 2013 par l'Association des maires de France (AMF) à l'automne 2013, 77 % des communes passées aux nouveaux rythmes s'inquiètent du financement de la réforme. C'est une de ses faiblesses structurelles essentielles.
L'article 67 de la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République a institué un fonds d'amorçage en faveur des communes mettant en oeuvre la réforme des rythmes scolaires à la rentrée 2013. Les modalités d'organisation du fonds sont précisées par le décret n° 2013-705 du 2 août 2013 et par un arrêté du 2 août 2013 fixant le taux des aides du fonds d'amorçage pour la réforme des rythmes scolaires.
La part forfaitaire a été fixée à 50 euros par élève et la part majorée à 40 euros par élève pour l'année 2013-2014. Le bénéfice de la part majorée est identifié à partir des listes fournies par le ministère de l'intérieur. Il concerne les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine, de solidarité rurale ou situées dans les départements d'outre-mer.
Confrontés dans la gestion de leurs communes à l'effet ciseau de la réduction des dotations et du transfert de nouvelles charges comme l'élargissement des activités périscolaires, les élus ont demandé la pérennisation des aides d'amorçage. Ils n'ont été que partiellement entendus puisque le Premier ministre a uniquement décidé de proroger le fonds d'amorçage pour l'année 2014-2015. Le niveau d'aide sera le même : 50 euros par élève au titre du forfait ou 90 euros pour les communes éligibles à la majoration. Cette prorogation a été introduite par amendement au projet de loi de finances pour 2014.
Au soutien au fonds d'amorçage s'ajoutent les aides des caisses d'allocations familiales (Caf) prévues spécifiquement pour contribuer au financement des trois heures périscolaires dégagées par la réforme. Cette aide complémentaire s'élève à 50 centimes par heure et par enfant présent, ce qui représente au maximum 54 euros par enfant présent, soit une dépense nouvelle de 850 millions d'euros pour la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf).
Trois questions au moins se posent sur les aides d'amorçage : le mode de calcul de leur montant, le bouclage de leur financement jusqu'en 2015, leur pérennisation à long terme.
b) Des aides calculées sans estimation préalable
Devant la mission commune d'information du Sénat sur les rythmes scolaires, le 3 décembre 2013, M. Guillaume Gaubert, directeur des affaires financières des ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur a apporté des éléments d'information précieux sur ce point.
Le calcul du montant des aides aux communes ne résulte pas d'une modélisation des coûts analytiques de la mise en place des activités périscolaires complémentaires. Le montant des aides a été calculé par répartition d'une enveloppe globale fixée à l'avance, en fonction de critères simples pour différencier les communes éligibles à une majoration. C'est pourquoi les aides sont forfaitaires et ne constituent pas une compensation, éventuellement plafonnée, des surcoûts supportées par les communes.
Il n'est dès lors pas surprenant de constater que les coûts de mise en oeuvre dans certaines communes dépassent largement le montant maximal des aides octroyées par le fonds d'amorçage et par les Caf. D'après l'enquête de l'AMF, le surcoût dû à l'organisation des trois heures périscolaires est supérieur à 200 euros par élève dans le quart des communes. Encore s'agit-il de communes volontaires pour passer à la semaine de 4 jours et demi dès 2013. Les communes qui construisent leur projet d'organisation pour 2014 sont confrontées à des estimations encore plus défavorables. En Alsace, certains chiffrages s'élèvent à 450 euros.
Les variations du simple au quadruple s'expliquent par celles du niveau de rémunération des intervenants et du taux d'encadrement. Il conviendrait à tout le moins, si la réforme était maintenue en l'état, de procéder à une évaluation et à un rebasage des aides. Il faudrait tenir compte des grands types d'organisation retenus, construire des modélisations et considérer ce qui était déjà consacré au périscolaire, afin de mesurer le coût net.
Aucune enquête auprès des maires n'a été conduite en amont. Aucune estimation prévisionnelle n'a été réalisée. Le coût des transports scolaires pour les départements n'a pas été pris en compte. Votre rapporteur y voit le signe d'une précipitation inutile et d'une impréparation préjudiciable.
c) Un financement du fonds encore inachevé
Le fonds d'amorçage décaissera environ 515 millions d'euros sur les années scolaires 2013-2014 et 2014-2015. Cela représente pour le budget de l'éducation nationale des décaissements de 28,2 millions d'euros en 2013, 199,6 millions d'euros en 2014, 286,3 millions d'euros en 2015.
Votre rapporteur se réjouit qu'en 2013 de simples redéploiements permettent de dégager les sommes nécessaires, alors qu'ils sont souvent estimés impossibles à réaliser par l'administration lorsqu'il s'agit de financer des initiatives parlementaires.
Pour le financement des aides en 2014, 102,7 millions d'euros ont été inscrits par amendement au projet de loi de finances pour 2014, dont 62 millions d'euros proviennent d'un financement exceptionnel de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), inscrit dans sa convention d'objectifs et de gestion. Resterait environ 35 millions d'euros qui seront dégagés en gestion, probablement dans des conditions similaires à celles de 2013.
Votre rapporteur souligne que cette contribution de la Cnaf se rajoute aux aides qu'elle verse directement aux communes pour soutenir l'accueil périscolaire. Il ne s'agit en rien d'un financement pérenne du fonds d'amorçage qui a vocation à être supporté par l'État. Lors de son audition, le 10 décembre 2013, devant la mission commune d'information du Sénat, M. Jean-Paul Deroussen, président du conseil d `administration de la Cnaf, a indiqué que son institution n'avait pas été associée à la préparation de la réforme des rythmes scolaires et que ce n'était qu'en cours de négociation de la convention d'objectifs et de gestion avec l'État, que la Caisse a appris l'inscription d'une obligation supplémentaire de financement de la réforme des rythmes scolaires. Le manque de dialogue entre l'éducation nationale et ses partenaires naturels des services sociaux se révèle très profond et met en péril l'action publique.
Enfin, le financement de 2015 reste ouvert et n'est pas fermement défini. Il faudra trouver 286 millions d'euros pour cette seule année, alors même que le budget de l'éducation nationale, qui absorbe déjà de nombreuses créations de postes d'enseignants, ne pourra y suffire. Votre rapporteur déplore la faiblesse du montage financier du fonds et la course aux expédients dans laquelle est engagée le Gouvernement. Malgré un sous-dimensionnement du fonds qui ne permet pas une compensation des charges supplémentaires pesant sur les communes, le financement de la réforme demeure incertain.
d) Une pérennisation en suspens
Il n'est prévu qu'une aide provisoire jusqu'en 2015 au plus tard. Or, les coûts de la réforme ne sont pas transitoires mais représentent au contraire des charges permanentes. Les communes devront donc trouver des ressources nouvelles après 2015 pour maintenir la qualité des activités périscolaires. Elles seront alors confrontées à un dilemme : soit demander une contribution financière aux parents, soit augmenter la fiscalité locale. C'est pourquoi l'Association des maires de France (AMF) souhaite à juste titre une pérennisation définitive des aides, si la réforme est maintenue en l'état.
Devant le mélange d'impréparation et d'autoritarisme, les difficultés matérielles d'organisation et l'absence d'un financement suffisant et crédible, votre rapporteur estime qu'il est temps de sortir de l'ornière en faisant confiance aux élus de terrain et en leur donnant la liberté d'organiser le temps scolaire.
B. UNE PROPOSITION DE LOI SOUPLE ET ADAPTÉE POUR RESTAURER LA CONFIANCE SANS DÉLAI
1. Donner le libre choix de l'organisation du temps scolaire aux maires
Les dysfonctionnements et les carences de la réforme sont désormais trop lourds pour se contenter d'ajustements marginaux. Pour apporter rapidement une réponse souple aux difficultés des communes, il faut remettre à plat la réforme dans son principe même pour passer de la contrainte au libre choix, de la circulaire à la convention, de l'injonction au dialogue, du cloisonnement au partenariat.
La proposition de loi soumise à l'examen du Sénat reconnaît et prend la mesure de l'investissement des maires dans l'école en leur faisant confiance pour l'organisation non seulement du temps périscolaire, compétence dont l'exercice dépend toujours des décisions unilatérales de l'éducation nationale, mais aussi du temps scolaire.
Dans certaines communes qui avaient les moyens de la mener à bien, la réforme semble rencontrer l'adhésion de tous. Sans les nier, il faut s'interroger sur les raisons de ces succès ponctuels. C'est bien souvent parce qu'historiquement, un partenariat s'était noué au préalable entre les différents acteurs au service d`un projet pédagogique partagé entre les acteurs de la communauté éducative. C'est ce que votre rapporteur tire de l'audition de Mme Françoise Moulin-Civil, rectrice de Lyon et présidente du comité de suivi de la réforme, devant la mission commune d'information du Sénat sur les rythmes scolaires, le 10 décembre 2013.
C'est donc en s'appuyant sur des démarches quasi-contractuelles entre acteurs volontaires et en prolongeant des initiatives locales enracinées dans leur environnement que l'on peut construire une nouvelle organisation du temps scolaire. Ceci plaide pour un changement radical de méthode en revenant à une démarche expérimentale sur la base du volontariat.
Il serait illusoire d'imaginer que la multiplication des normes nationales permettra de régler les problèmes qui se cristallisent localement dans des configurations très variées. Un règlement ne peut appréhender la complexité de chaque territoire sans générer d'autres difficultés supplémentaires d'interprétation, d'application et de coordination. L'uniformité bride l'innovation sans garantir l'égalité. Le libre choix des maires est la meilleure solution pour dépasser les blocages actuels et s'inscrire dans une évolution régulée des rythmes respectueuse des spécificités locales.
La proposition de loi renforce les pouvoirs du maire, jusque-là purement dérogatoires aux décisions d'organisation de la journée et de la semaine scolaire prises par le DASEN. À cette fin, elle complète l'article L. 521-3 du code de l'éducation pour donner aux maires la liberté d'organiser le temps scolaire des écoles maternelles et élémentaires publiques.
Des limites au pouvoir du maire sont posées afin de garantir le respect des programmes scolaires et du calendrier scolaire annuel fixé par le ministre de l'éducation nationale. Ces garde-fous sont nécessaires pour maintenir un cadre pédagogique commun à toutes les écoles.
L'article premier du texte prévoit également une consultation préalable des conseils d'écoles, des professeurs des écoles, des représentants des parents d'élèves, du DASEN et des IEN concernés. Il s'agit ainsi d'impulser un changement de méthode en privilégiant les coopérations horizontales entre toutes les parties prenantes et l'adaptation la plus fine aux circonstances locales.
Enfin, la proposition de loi pose le principe d'une compensation intégrale par l'État des charges imposées aux communes et aux EPCI par toute modification des rythmes scolaires par voie réglementaire. C'est une manière d'imposer à l'administration une évaluation préalable de l'impact financier des mesures qu'elle prend, tout en protégeant les budgets des collectivités locales soumis à la réduction des dotations.
2. La nécessité d'agir rapidement
Il pourrait être objecté aux auteurs de la proposition de loi que leur initiative intervient trop tôt et qu'il vaut mieux attendre les conclusions et les recommandations de la mission commune d'information du Sénat chargée de dresser un premier bilan de la réforme des rythmes scolaires. Votre rapporteur pense au contraire que la proposition de loi est déposée juste à temps pour trouver une issue au blocage de la réforme, alors que la fronde légitime des élus enfle et que les syndicats d'enseignants multiplient les appels à la grève.
En effet, même si elle n'a pas achevé ses travaux, la mission commune d'information a commencé à travailler dès le mois de novembre. Les auditions se sont succédé à un rythme rapide : l'AMF, la direction générale de l'enseignement scolaire, la direction des affaires financières, les inspections générales, le pédopsychiatre Marcel Rufo, la présidente du comité de suivi de la réforme, la Cnaf, l'Union nationale des associations familiales, les représentants des parents d'élèves et plusieurs syndicats d'enseignants ont d'ores-et-déjà été auditionnés.
Il convient de saluer la présidente Mme Catherine Troendle et la rapporteure Mme Françoise Cartron pour leur travail sérieux et mené dans la plus grande transparence. Grâce à leur efficacité et à leur diligence, nous disposons d'ores et déjà d'une excellente vision des difficultés qui se posent à la fois dans l'organisation matérielle et le financement de la réforme. Ces premiers éléments justifient le dépôt et l'examen rapide d'une proposition de loi qui apporte une solution mesurée et adaptée.
Il n'est pas possible de tarder davantage en raison des contraintes cumulées des calendriers du Parlement, de l'école et des collectivités. Compte tenu des délais de la procédure parlementaire et des élections municipales à venir, si nous voulons faire oeuvre utile pour la rentrée 2014, nous devons débattre maintenant.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er (Art. L. 521-3 du code de l'éducation) - Liberté des maires dans l'organisation du temps scolaire des écoles primaires publiques
I. Le droit en vigueur
L'organisation du temps scolaire est essentiellement régie par des dispositions réglementaires. Seul le cadre général est fixé par la loi. Il vaut à la fois pour les écoles primaires et pour l'enseignement secondaire :
- l'année scolaire comporte 36 semaines et fait alterner cinq périodes de travail et quatre périodes de vacances. Le ministre de l'éducation nationale fixe par arrêté le calendrier scolaire pour trois ans. La possibilité d'une adaptation aux situations locales est ouverte dans des conditions fixées par décret (article L. 521-1 du code de l'éducation) ;
- les « besoins d'expression physique, d'éducation et de pratique corporelle et sportive des élèves » sont pris en compte dans la définition des rythmes scolaires, ce qui s'entend pour l'organisation aussi bien de la journée que de la semaine (article L. 521-2 du code de l'éducation) ;
- le maire a la faculté de modifier les horaires de la journée scolaire, tant l'entrée que la sortie des classes en raison des circonstances locales, après avis de l'autorité scolaire responsable (article L. 521-3 du code de l'éducation).
La réforme des rythmes scolaires à l'école primaire engagée à partir de la rentrée de septembre 2013 ne modifie pas ce cadre général et s'inscrit dans ses limites. Elle s'appuie sur le décret n°2013-77 du 24 janvier 2013 qui prévoit essentiellement :
- le passage à une semaine de 9 demi-journées incluant le mercredi matin, la durée totale de la semaine scolaire demeurant fixée à 24 heures d'enseignement ;
- une durée d'enseignement de 5 heures 30 au maximum par jour et une demi-journée d'enseignement n'excédant pas 3 heures 30 ;
- une pause méridienne d'1 heure 30 au minimum.
Il est de la compétence du directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN) d'arrêter l'organisation précise de la semaine scolaire dans le respect des dispositions législatives et réglementaires précédentes. Il prend sa décision après avis du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) intéressé et après examen des projets d'organisation qui lui ont éventuellement transmis par le conseil d'école ou la commune.
Le DASEN peut accorder une dérogation pour placer la demi-journée d'enseignement le samedi matin au lieu du mercredi matin ou pour étendre la journée scolaire au-delà du plafond journalier d'heures d'enseignement. Les demandes de dérogations doivent être justifiées dans le cadre du projet éducatif territorial (PEDT) et doivent s'accompagner de garanties pédagogiques suffisantes.
Le décret de janvier 2013 prévoit enfin la mise en place par groupes restreints d'élèves d'activités pédagogiques complémentaires (APC) pour le soutien aux élèves en difficulté, pour l'aide au travail personnel ou pour une activité prévue par le projet d'école. L'organisation des APC est arrêtée par l'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) de la circonscription sur proposition du conseil des maîtres.
II. Le dispositif de cet article
L'article 1 er de la proposition de loi contient l'essentiel du dispositif du texte. Il ne modifie pas les articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de l'éducation et laisse ainsi inchangées l'organisation générale de l'année scolaire et la compétence du ministre de l'éducation nationale à cet égard.
En revanche, il renforce les pouvoirs du maire,
jusque-là purement dérogatoires aux décisions
d'organisation de la journée et de la semaine scolaire prises par le
DASEN. Les décisions du maire afin de modifier les heures
d'entrée et de sortie ne peuvent actuellement avoir qu'un
caractère ponctuel, sans modification durable de l'équilibre des
rythmes scolaires
(CE, 10 mars 1995,
commune de Vesoul
). Elles
constituent pour ainsi dire une extension de ses pouvoirs de police en vue
d'assurer l'ordre public dans les établissements scolaires.
À cette fin, il complète l'article L. 521-3 du même code pour donner aux maires le libre choix de l'organisation du temps scolaire des écoles maternelles et élémentaires publiques. Des limites au pouvoir du maire sont posées afin de garantir le respect des programmes scolaires et des principes généraux posés aux articles L. 521-1 et L. 521-2. Il prévoit également une consultation préalable des conseils d'écoles, des professeurs des écoles, des représentants des parents d'élèves, du DASEN et des IEN concernés.
Enfin, l'article 1 er de la proposition de loi pose le principe d'une compensation intégrale par l'État des charges imposées aux communes et aux EPCI par toute modification des rythmes scolaires par voie réglementaire.
Votre rapporteur est favorable à l'adoption de cet article.
III. La position de votre commission
Votre commission considère prématurée l'initiative des auteurs de la proposition de loi. En effet, une mission commune d'information du Sénat s'est constituée le 6 novembre 2013 pour dresser un premier bilan de la réforme des rythmes scolaires. Sa création répondait à une demande du groupe UMP auquel appartiennent également les auteurs de la proposition de loi. Il apparaît à la fois opportun et logique de surseoir à toute modification du cadre législatif dans l'attente des conclusions de la mission qui devraient être rendues publiques au printemps. Il est encore beaucoup trop tôt pour préjuger des recommandations qu'elle formulera après une série d'auditions et de déplacements sur le terrain destinée à garantir leur objectivité et leur pertinence.
Outre ces raisons d'opportunité, votre commission considère que le dispositif de la proposition de loi soulève des réserves de fond. Laisser aux maires le libre choix de l'organisation du temps scolaire paraît excessif dans la mesure où l'État seul dispose de la compétence sur les enseignements et la pédagogie.
Plus qu'un pouvoir exorbitant, la proposition de loi aurait surtout pour effet de leur confier une responsabilité écrasante : si les maires disposaient du libre choix de l'organisation du temps scolaire, il leur appartiendrait de la définir. Autrement dit, dans la formulation retenue par ses auteurs, la proposition de loi tend à conférer aux maires une compétence obligatoire sur le temps scolaire alors même qu'ils ne disposent que d'une compétence facultative en matière d'activités périscolaires. Il est loin d'être certain que cela soit une revendication des maires.
Votre commission approuve la prolongation des aides d'amorçage inscrite par le Gouvernement dans la loi de finances initiale pour 2014 et souhaite que l'éducation nationale apporte tout son soutien aux communes dans la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. Les préoccupations des maires ruraux doivent se voir accorder toute l'attention nécessaire afin de dégager des solutions opérationnelles adaptées à leurs spécificités.
Cependant, le principe de compensation par l'État des charges induites par une modification des rythmes scolaires n'est pas exempt d'ambiguïtés. Il maintient une équivoque entre ce qui ressort de compétences obligatoires ou facultatives. Stricto sensu , l'organisation d'activités périscolaires n'est pas obligatoire. Si un soutien financier de l'État est légitime pour garantir la qualité des activités et limiter les inégalités territoriales, une compensation intégrale paraît excessive dans la mesure où le détail de l'organisation et, par conséquent, le coût induit dépendent des politiques locales et des décisions de la commune en fonction de ses ressources et de son environnement. Les disparités dans le chiffrage des effets de la réforme en cours d'application traduisent à la fois la diversité des circonstances locales particulières et le rôle des décisions prises par les collectivités en toute responsabilité.
L'intention manifestée dans la proposition de loi est généreuse mais risque soit d'inciter à la prolifération inutile d'activités périscolaires coûteuses, soit à un contrôle très strict de l'administration qui restreindra l'autonomie des communes. Votre commission estime qu'il vaut mieux, sur ce point également, attendre l'état des lieux dressé par la mission commune d'information constituée par le Sénat.
Votre commission n'a pas adopté de texte pour l'article 1 er de la proposition de loi.
Article 2 - Modalités d'application
Cet article renvoie les modalités d'application du texte à un décret en Conseil d'État.
Par cohérence, votre commission n'a pas adopté de texte pour l'article 2 de la proposition de loi.
Article 3 - Gage
Cet article vise à compenser les éventuelles conséquences financières du texte pour les collectivités territoriales par une majoration de la dotation globale de fonctionnement. Les pertes de recettes subséquentes pour l'Etat seraient compensées par un relèvement des droits d'accises.
Par cohérence, votre commission n'a pas adopté de texte pour l'article 3 de la proposition de loi.
*
* *
Votre commission n'a pas adopté de texte sur la proposition de loi n° 116 (2013-2014) visant à affirmer la liberté de choix des maires quant à l'organisation des rythmes scolaires dans l'enseignement du premier degré.
En conséquence, et en application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
MERCREDI 15 JANVIER 2014
_____
M. Jean-Claude Carle, rapporteur . - Madame la présidente, mes chers collègues, la proposition de loi déposée par M. Jean-Claude Gaudin et les membres du groupe UMP qui est soumise à notre examen offre une solution souple et pragmatique pour sortir de l'ornière la réforme des rythmes scolaires.
Nous pouvons nous accorder sur la nécessité d'une réorganisation globale et concertée du temps scolaire. Cela ne nous oblige en rien à accepter n'importe quelle réforme, aussi bien intentionnée soit-elle. En l'espèce, la réforme promue par le ministre de l'éducation nationale pèche sur de nombreux points :
- l'absence de dispositif d'évaluation et de perspective concrète d'amélioration des résultats des élèves ;
- une méthode autoritaire fondée sur le règlement, la circulaire et des injonctions de l'administration aux élus ;
- des modalités pratiques de mise en oeuvre confuses et changeantes ;
- un manque d'information et de soutien aussi bien pour les maires que pour les familles ;
- un financement inadéquat.
C'est un cas d'école qui illustre parfaitement le mode de fonctionnement pyramidal et rigide du ministère de l'éducation nationale.
Le décret du 26 janvier 2013 impose un cadre unique qui s'applique de façon uniforme sur tout le territoire. Cependant, le texte est interprété de façon très diverse par les directeurs académiques des services de l'Éducation nationale (DASEN) qui ne suivent pas toujours l'évolution des déclarations du Gouvernement. Sur le terrain, il n'est pas rare de voir certains DASEN ou inspecteurs de circonscription retenir des interprétations très restrictives des textes ou imposer des obligations supplémentaires, par exemple en termes de transmission anticipée des projets éducatifs.
Les maires n'appréhendent que très difficilement leurs marges de manoeuvre en ce qui concerne les possibilités de dérogation, le recours au samedi matin ou l'écriture des projets éducatifs territoriaux. Certains DASEN poussent à l'adoption d'un modèle d'organisation unique dans tout leur département.
De plus, les possibilités de recrutement d'animateurs, l'évolution du taux d'encadrement des activités périscolaires ou encore les contributions des caisses d'allocations familiales demeurent incertaines. Des réponses ambiguës voire contradictoires leur ont été adressées au fil du temps et selon les interlocuteurs. Le défaut d'articulation entre les services sociaux et l'éducation nationale n'a pas contribué à clarifier la situation.
C'est pourquoi peu de maires se sont engagés dès 2013. Pour l'année scolaire 2013-2014, 3 991 communes sur 23 000 environ disposant d'une école sont passées aux nouveaux rythmes. Cela représente 1,3 million d'élèves, soit 22,2 % de l'effectif total du secteur public. Seules 35 des 150 communes les plus importantes ont choisi d'appliquer la réforme dès 2013.
L'organisation des temps scolaires relève du caractère propre des établissements privés. 6 % seulement sont passés aux nouveaux rythmes cette année.
Les réticences de la plupart des maires à l'égard de la réforme ne viennent pas de leur prétendue indifférence au bien-être des élèves. Elles sonnent plutôt comme une protestation contre le refus du ministère de les traiter comme des partenaires éducatifs responsables et autonomes. Surtout, elles reflètent d'importantes difficultés matérielles et financières qui attendent une réponse.
D'après l'enquête réalisée à l'automne 2013 par l'Association des maires de France (AMF), 77 % des communes passées aux nouveaux rythmes s'inquiètent du financement de la réforme. C'est une des faiblesses structurelles essentielles de la réforme. Son financement est à la fois insuffisant, incertain et éphémère.
La loi de refondation de l'école de la République a institué un fonds d'amorçage en faveur des communes mettant en oeuvre la réforme des rythmes scolaires à la rentrée 2013.
Trois questions au moins se posent sur les aides d'amorçage : le mode de calcul de leur montant, le bouclage de leur financement jusqu'en 2015, leur pérennisation à long terme.
Le montant des aides n'a fait l'objet d'aucune estimation préalable du coût prévisionnel des activités périscolaires complémentaires. Il n'a fait l'objet d'aucune enquête d'intention auprès des maires. Il ne tient pas compte du coût du transport scolaire. Le montant des aides a été calculé par répartition d'une enveloppe globale fixée à l'avance et ne reposant sur aucune justification. C'est pourquoi les aides sont forfaitaires et ne constituent pas une compensation des surcoûts supportés par les communes.
Dès lors, il n'est pas surprenant de constater dans de nombreuses communes des coûts de mise en oeuvre dépassant largement le montant maximal des aides octroyées par le fonds d'amorçage et par les caisses d'allocations familiales (CAF). D'après l'AMF, le surcoût dû à l'organisation des trois heures périscolaires est supérieur à 200 euros par élève pour 25 % des communes. Encore s'agit-il de communes volontaires pour passer à la semaine de 4 jours et demi dès 2013. Les communes qui construisent leur projet d'organisation pour 2014 sont confrontées à des estimations encore plus défavorables.
Malgré un sous-dimensionnement du fonds qui ne permet pas une compensation adéquate pour les communes, le financement de la réforme demeure incertain. Pour 2014, 102,7 millions d'euros ont été inscrits dans la loi de finances, dont 62 millions d'euros proviennent de la caisse nationale des allocations familiales (CNAF). Cette contribution exceptionnelle de la CNAF, qui n'avait été aucunement prévue à l'origine, s'ajoute aux aides qu'elle verse directement aux communes pour soutenir l'accueil périscolaire. Il ne s'agit en rien d'un financement pérenne du fonds d'amorçage qui a vocation à être supporté par l'État.
Pour 2015, le financement est entièrement ouvert. Il faudra trouver 286 millions d'euros pour cette seule année, alors même que le budget de l'éducation nationale qui absorbe déjà de nombreuses créations de postes d'enseignants ne pourra y suffire.
Si la réforme est maintenue en l'état, ce problème de financement deviendra d'autant plus pressant que les aides seront définitivement pérennisées au-delà 2015. C'est ce que demande légitimement l'AMF, puisque les coûts de la réforme ne sont pas transitoires mais représentent au contraire des charges permanentes.
Sans pérennisation des aides, les communes devront donc trouver des ressources nouvelles après 2015 pour maintenir la qualité des activités périscolaires. Elles seront alors confrontées à un dilemme : soit demander une contribution financière aux parents, soit augmenter la fiscalité locale.
Devant ce mélange d'impréparation et d'autoritarisme et considérant les difficultés matérielles d'organisation et l'absence d'un financement suffisant et crédible, il est temps de sortir de l'ornière en faisant confiance aux élus de terrain et en leur donnant la liberté d'organiser le temps scolaire.
Pour apporter rapidement une réponse souple aux difficultés des communes, il faut remettre à plat la réforme dans son principe. Il est temps de passer de la contrainte au libre choix, de la circulaire au contrat, de l'injonction au dialogue, du cloisonnement au partenariat.
La proposition de loi renforce les pouvoirs du maire, qui sont aujourd'hui purement dérogatoires aux décisions d'organisation de la journée et de la semaine scolaire prises par le DASEN. À cette fin, elle complète l'article L. 521-3 du code de l'éducation pour donner aux maires la liberté d'organiser le temps scolaire des écoles maternelles et élémentaires publiques.
Des limites au pouvoir du maire sont posées afin de garantir le respect des programmes scolaires et du calendrier scolaire annuel fixé par le ministre de l'éducation nationale. Ces garde-fous sont nécessaires pour maintenir un cadre pédagogique commun à toutes les écoles.
La proposition de loi prévoit également une consultation préalable des conseils d'écoles, des professeurs des écoles, des représentants des parents d'élèves, du DASEN et des inspecteurs de l'éducation nationale (IEN) concernés. Il s'agit ainsi d'impulser un changement de méthode : il faut privilégier les coopérations horizontales entre tous les acteurs et l'adaptation la plus fine aux circonstances locales.
Enfin, la proposition de loi pose le principe d'une compensation intégrale par l'État des charges imposées aux communes par toute modification des rythmes scolaires par voie réglementaire.
On pourrait objecter que cette initiative parlementaire intervient trop tôt et qu'il vaut mieux attendre les conclusions et les recommandations de la mission commune d'information du Sénat sur ce sujet. Je pense au contraire que la proposition de loi est déposée juste à temps pour trouver une issue au blocage de la réforme.
Même si elle n'a pas achevé ses travaux, la mission a commencé à travailler dès le mois de novembre. Les auditions se sont succédé à un rythme rapide : l'association des maires de France (AMF), la direction générale de l'enseignement scolaire, la direction des affaires financières, les inspections générales, le pédopsychiatre Marcel Rufo, la présidente du comité de suivi de la réforme, la CNAF, l'Union nationale des associations familiales, les représentants des parents d'élèves et plusieurs syndicats d'enseignants ont d'ores et déjà été auditionnés.
Je veux saluer ici la présidente Mme Catherine Troendle et la rapporteure Mme Françoise Cartron pour leur travail sérieux et mené dans la plus grande transparence. Grâce à leur efficacité et à leur diligence, nous disposons d'ores et déjà d'une excellente vision des difficultés qui se posent dans l'organisation matérielle et le financement de la réforme.
Il n'est pas possible de tarder davantage en raison des contraintes cumulées des calendriers du Parlement, de l'école et des collectivités. Compte tenu des délais de la procédure parlementaire et des élections municipales à venir, si nous voulons faire oeuvre utile pour la rentrée 2014, nous devons débattre maintenant.
C'est pourquoi je suis favorable à l'adoption de la présente proposition de loi.
M. Jacques-Bernard Magner . - Nous devons garder à l'esprit les objectifs pédagogiques du décret. Les derniers tests du programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) en témoignent : il était absolument nécessaire de mettre une demi-journée supplémentaire à la disposition des élèves.
Si nous sommes encore confrontés à certaines difficultés de mise en place, et l'on peut certes évoquer la question de l'action des DASEN, nous devons nous efforcer de surmonter ces difficultés. C'est d'ailleurs en ce sens que sont orientés les travaux de la mission commune d'information consacrée aux rythmes scolaires.
Je qualifierais le texte que nous examinons de « réactionnaire » au sens premier du terme, dans la mesure où il se propose de revenir à la situation antérieure qui était pourtant insatisfaisante. Par ailleurs, le moment choisi pour le proposer, à la veille des élections municipales, nous conduit à penser qu'il est plus inspiré par des considérations politiciennes que par l'intérêt des élèves.
Mme Françoise Cartron . - Je pense, moi aussi, que cette proposition de loi n'est pas dénuée d'arrière-pensées, trois mois seulement après la mise en oeuvre du dispositif et alors que notre mission d'information travaille à trouver des solutions pour remédier à certains problèmes ponctuels dans un contexte de satisfaction générale : aucune des personnes auditionnées ne nous a jamais parlé d'ornière.
Les termes d'impréparation et d'autoritarisme, qui ont été employés à tort à l'encontre de notre ministre, s'appliquent en revanche parfaitement à la façon dont M. Xavier Darcos a imposé la semaine de quatre jours.
Dans l'exposé des motifs, M. Carle a évoqué plusieurs points sur lesquels je souhaiterais revenir.
On ne peut pas dire qu'aucun dispositif d'évaluation n'existe alors que justement un comité de suivi de l'application des rythmes scolaires a été mis en place.
S'agissant de la fixation de la demi-journée supplémentaire, aucune disposition ne privilégie le mercredi par rapport au samedi. Ce choix majoritaire procède de la volonté des parents d'élèves, qui sont aussi les administrés des maires.
En dépit de difficultés transitoires d'organisation, la plupart des villes qui ont choisi d'appliquer les dispositions de la loi dès cette année persisteront dans ce choix pour la rentrée prochaine.
M. Carle a relevé certaines insuffisances, que nous reconnaissons, s'agissant de l'information et de l'accompagnement des enseignants, des parents d'élèves et des maires. Nous devrons y remédier.
Mme Sophie Primas . - C'est trop tard !
Mme Françoise Cartron . - Non, il n'est pas trop tard.
Si l'accompagnement financier des communes a le mérite d'exister, ce qui constitue une première, nous reconnaissons qu'il peut s'avérer insuffisant et nous devrons trouver les moyens de surmonter cette difficulté. Cela dit, il conviendra de considérer non seulement les coûts supplémentaires, mais aussi certaines diminutions de charges liées, par exemple, à la fermeture du centre de loisir le mercredi matin.
Pour conclure, nous ne pouvons nous déclarer favorables à ce texte, proposé à un moment très mal choisi. Nous préférons nous consacrer au travail constructif et apaisant mené dans le cadre de la mission commune d'information.
Mme Dominique Gillot . - J'observe avec satisfaction qu'en dépit des arguties qu'il nous propose M. Carle ne semble pas contester le bien-fondé de la loi de refondation de l'école.
Il était nécessaire de répartir les 24 heures hebdomadaires de scolarité sur quatre jours et demi. Même si ce n'est pas forcément l'intérêt des enfants, il se trouve que la majorité les parents d'élèves ont souhaité qu'il n'y ait pas école le samedi.
Sous la houlette de la rectrice de Lyon, Mme Françoise Moulin-Civil, le comité de suivi de la réforme des rythmes scolaires nous informe précisément sur son application dans les territoires. Dans les 4 000 communes engagées pour l'instant, chacun sait faire preuve d'initiative et de créativité, les élus pouvant choisir d'organiser et de financer ou non les activités péri-scolaires.
On ne peut être favorable à cette proposition de loi conçue dans un esprit opportuniste et de polémique.
Mme Françoise Laborde . - Je suis assez d'accord avec ce qui vient d'être dit, et qui sera sans doute répété en séance publique.
Il y a quelques années, la cinquième matinée a été supprimée de façon quelque peu abrupte, la volonté des parents ayant semble-t-il primé sur l'intérêt objectif des élèves.
Le groupe RDSE ne sera sans doute pas favorable à cette proposition de loi.
Mme Colette Mélot . - J'adhère, pour ma part, aux arguments développés par notre rapporteur. Si la question du temps scolaire se devait d'être traitée, la réforme s'est effectuée sans concertation, sans évaluation et sans prendre en compte les difficultés des petites communes rurales.
Cette proposition de loi est l'occasion d'apporter des améliorations au dispositif dans l'intérêt des enfants.
M. Jacques Legendre . - Je pense que nous aurions pu faire l'économie de ce débat, car nous pouvons nous accorder sur la nécessité de prolonger le temps scolaire hebdomadaire tout en reconnaissant qu'il existe des difficultés de mise en oeuvre, en particulier pour les communes dont les moyens sont disparates.
En regardant les réponses apportées par les communes de mon département au questionnaire que je leur avais adressé dans le cadre de la mission commune d'information, j'ai observé que si la semaine de 4 jours et demi était acceptée, nombre de maires faisaient part de leur désarroi à propos de l'organisation et du financement du temps périscolaire.
Par ailleurs, les manifestations parisiennes des enseignants et des parents d'élèves ont été spontanées et ont témoigné de la réalité des difficultés.
Alors que les questions liées à la pédagogie et au financement des enseignements relèvent normalement de l'État et que les communes sont en charge des activités parascolaires, la réforme actuelle nous fait entrer dans une zone grise qui crée légitimement un certain malaise.
Nous devons considérer cette proposition de loi comme une protestation contre le caractère hâtif des mesures prises.
Cela dit, j'ai espoir que les travaux de la mission commune d'information mettront à jour des solutions adéquates.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - Je n'ai jamais caché mes interrogations concernant cette réforme. Certes, la question des rythmes scolaires doit être traitée, mais en prenant en compte les disparités de moyens entres les communes et en gardant toujours à l'esprit que la rénovation de la pédagogie doit être au centre des préoccupations.
M. Jacques Legendre . - Tout à fait.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - S'il y a des difficultés, nous devons nous garder de toute polémique et cette proposition de loi me paraît être une réponse inadaptée, alors qu'une mission commune d'information vient d'être créée.
Les résultats des derniers tests PISA doivent nous mettre en alerte et nous devons nous attacher à prendre toutes les mesures nécessaires dans l'intérêt des élèves. Je mets toutefois en garde ceux qui abusent de cette expression trop souvent employée de façon simplement incantatoire. Ce n'est pas l'intérêt des élèves qui a guidé la réduction de la durée de préparation du bac professionnel à trois ans.
M. Claude Domeizel . - Il est fortement regrettable que le ministre de l'époque, M. Xavier Darcos, ait instauré la semaine de quatre jours.
La grande majorité des communes sont favorables à la semaine de quatre jours et demi mais les maires doivent prendre en compte le fait que la plupart des parents d'élèves souhaitent préserver la journée du samedi et fixer au mercredi matin la demi-journée supplémentaire.
M. Jean-Pierre Leleux . - Il est dommage que le consensus qui s'est créé sur la question du temps scolaire se dégrade en raison de difficultés d'application.
Nous devons garder à l'esprit la question des programmes et des pédagogies, qui sont tout aussi essentielles à la réussite des élèves.
Il y a quelques années nos voisins allemands ont été confrontés à des résultats décevants au test PISA. Ils ont alors pris des mesures qui commencent à porter leurs fruits.
Comme la plupart des maires, je joue le jeu de la coopération avec l'éducation nationale, en développant les actions d'éducation artistique et culturelle, mais nous devons faire face à deux types de difficultés : d'une part, le manque de discernement de certains DASEN, d'autre part des plages d'activité trop courtes pour entreprendre des actions dont les enfants profitent véritablement.
Je regrette certains termes employés aujourd'hui pour qualifier cette proposition de loi. Loin d'être réactionnaire, elle est, au contraire, progressiste dans la mesure où elle en appelle à la liberté des communes et à la mobilisation des financements nécessaires.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur . - Je ferai juste quelques remarques.
À M. Claude Domeizel, je dirai que j'essaie d'être constant. J'ai dit et j'ai écrit que la semaine de 4 jours et demi était plus adaptée et je ne change pas d'avis. Mais je ne pense pas que cette proposition de loi vienne télescoper les travaux de la mission commune d'information, mise en place à la demande du groupe UMP. Ce n'est pas contradictoire. Ma proposition de loi ne touche qu'à l'organisation de la semaine et comme l'a dit Mme Brigitte Gonthier-Maurin, le champ de la mission englobe les rythmes dans leur intégralité, de la semaine à la définition de l'année scolaire dans son ensemble.
À Mme Dominique Gillot, je répondrai que je ne remets pas en cause la loi de refondation de l'école. Je relève juste qu'aujourd'hui les DASEN dirigent tout et que je préfèrerais que ce soit les maires. Les DASEN ne veulent pas bousculer leurs habitudes et je sais bien que, quel que soit le gouvernement, on leur demande de faire du résultat et du chiffre.
J'ai volontairement parlé d'ornière et non d'impasse, parce qu'il ne s'agit pas de s'arrêter ou de reculer mais d'affronter des difficultés dans la mise en place de ces nouveaux rythmes. Un quart des 22 % de maires qui ont tenté l'expérience dès 2013 ont répondu à l'enquête de l'AMF et 80 % d'entre eux se disent satisfaits, mais cela ne représente au total que moins de 5 % de l'ensemble des maires.
Je souhaite juste apporter de la souplesse dans une situation difficile.
Enfin, pour répondre à M. Jacques-Bernard Magner sur l'enquête PISA, c'est d'une réforme pédagogique dont nous avons besoin. La refonte des rythmes n'est qu'un des facteurs d'amélioration du système avec la lutte contre les inégalités sociales, la rénovation des pratiques et la formation des enseignants.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente . - Je vous propose de mettre aux voix les trois articles de la proposition de loi.
La commission n'a pas adopté les articles 1 er , 2 et 3 de la proposition de loi n° 116 (2013-2014) visant à affirmer la liberté de choix des maires quant à l'organisation des rythmes scolaires dans l'enseignement du premier degré.
La commission n'a pas adopté de texte sur la proposition de loi.
En conséquence, et en application de l'article 42, alinéa premier, de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi.