C. UN FINANCEMENT INSATISFAISANT (ARTICLES 2 ET 3)
1. Relever le taux de l'impôt sur les sociétés : un financement proposé difficilement envisageable
L'article 2 de la présente proposition de loi vise à exclure du champ de « l'enveloppe normée » la hausse de la DGF résultant de la hausse de la dotation de base des communes dont le nombre d'habitants est inférieur à 20 000.
Il s'agit, selon l'intention des auteurs de la présente proposition de loi, de financer l'augmentation de la dotation de base en-dehors de la DGF et de « l'enveloppe normée », c'est-à-dire de ne pas appliquer les mécanismes de compensation « habituels ». L'objectif est donc d'éviter que les collectivités territoriales ne financent cette mesure .
Aussi, l'article 3 propose que cette dépense soit financée grâce à une augmentation de l'impôt sur les sociétés.
Cependant, cette proposition n'est pas cohérente avec le choix du Gouvernement de moderniser l'impôt sur les sociétés : selon le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, « la caractéristique de l'impôt sur les sociétés en France est d'avoir un taux élevé mais une assiette réduite. Une réflexion sera engagée pour que notre impôt sur les sociétés puisse, à rendement constant, avoir une assiette plus large, avec des taux qui devront être modulés. L'objectif est d'assurer une convergence européenne en matière d'impôt sur les sociétés ».
Par ailleurs, un financement par l'État ne paraît pas envisageable dans un contexte de réduction des dépenses publiques, et alors qu'il a été demandé aux collectivités de participer à cet effort.
2. Faire participer les collectivités elles-mêmes : un financement « traditionnel » peu opportun
Les règles applicables aux concours de l'État aux collectivités, dans le cadre de « l'enveloppe normée » et au sein même de la DGF, reposent sur divers mécanismes de compensation « automatiques » de la hausse de certaines dotations.
L'article L. 2334-7-1 du CGCT prévoit que toute hausse de la dotation de base est financée à due concurrence par les autres composantes de la dotation forfaitaire et ne peut donc pas conduire à une augmentation de cette dotation forfaitaire - ni, par conséquent, de la DGF.
En effet, « afin de financer l'accroissement de la dotation de base », le comité des finances locales fixe le montant des minorations appliquées au complément de garantie et à la compensation - l'ancienne composante « part salaires » (CPS) - des communes.
Aussi, les hausses de la dotation de base des communes - en raison de la croissance démographique - sont financées, chaque année, par les communes elles-mêmes.
En outre, afin de respecter la norme d'évolution appliquée aux concours financiers de l'État aux collectivités, la loi de finances fixe chaque année le périmètre des « variables d'ajustement » de « l'enveloppe normée ». Par conséquent, toute augmentation de la DGF est elle-même gagée afin de garantir le respect du montant maximal de « l'enveloppe normée » défini par la loi de programmation des finances publiques (LPFP).
Finalement, toute hausse de la dotation de base et toute hausse de la DGF sont aujourd'hui financées par les collectivités elles-mêmes, par le biais de mécanismes de compensation internes à la DGF ou dans le cadre de « l'enveloppe normée ».
Votre rapporteur considère qu'il est peu opportun d'envisager, à ce stade, un financement de la mesure proposée par les collectivités elles-mêmes.
En effet, l'ensemble des collectivités doit participer, en 2014, à l'effort de maîtrise des dépenses publiques, qui se traduit notamment par une réduction de 1,5 milliard d'euros des concours de l'État aux collectivités. Or, la répartition de cet effort a fait l'objet d'une concertation qui a abouti à un accord au sein du comité des finances locales, qui s'est concrétisé dans le « Pacte de confiance et de responsabilité » présenté par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault le 16 juillet 2013.
En outre, il conviendrait de préciser selon quelles modalités serait financée une telle mesure : un financement par le biais des mécanismes de compensation « habituels » pourrait avoir un effet massif pour certaines communes, pour lesquelles le complément de garantie peut représenter jusqu'à 70 % de la dotation forfaitaire.